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Dans le cas présent, le tableau fait référence à {{Citation|deux sources justificatrices pour la [[Belgique]] de 1830 : la religion catholique et le passé national}}{{Sfn|Kupper|George|5=2006|p=79}}. Saint Lambert exerce le rôle de {{Citation|défenseur du sacrement du mariage}}{{Sfn|Kupper|George|5=2006|p=79}}, et donc des valeurs morales chrétiennes, mais il représente également {{Citation|un clin d'œil [[Principauté de Liège|principautaire]]}}{{Sfn|Kupper|George|5=2006|p=79}}, et donc une référence à ce passé national. L'allusion au passé national se complète par l'utilisation de {{Citation|l'imaginaire [[Pépinides|pippinide]] et [[Carolingiens|carolingien]]}} qui est évoqué {{Citation|avec Pépin de "[[Herstal]]" dans son "palais" de "[[Jupille-sur-Meuse|Jupille]]", sans oublier le jeune [[Charles Martel]] représenté par Chauvin aux côtés de ses parents. Ce jeu subtil d'identification peut être complété par l'image négative d'[[Alpaïde]], cette [[Messaline]] déjà caricaturée sur la première page du [[bréviaire]] liégeois de 1622}}{{Sfn|Kupper|George|5=2006|p=79}}. |
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Le ''Journal des beaux-arts'' du {{Date|15 septembre 1861}} publie une élogieuse critique de l'œuvre, |
Le ''Journal des beaux-arts'' du {{Date|15 septembre 1861}} publie une élogieuse critique de l'œuvre, alors exposée au [[Salon d'Anvers]] : |
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{{Citation bloc|La composition en est irréprochable : comme ligne, comme logique, M. Chauvin s'est placé à une grande hauteur. On devine un penseur sérieux sous l'artiste ; un homme habitué à commenter les règles de l'art et à entrer dans le vif de ce qui détermine l'étude du vrai et du beau. Il y a comme un souffle du grand [[Pierre Corneille|Corneille]] sur cette scène qui forme un des points constitutifs les plus saillants de l'histoire de Liège ; on le sent dans cette grande tempête humaine soulevée par la parole de St. Lambert, et le spectateur en subit la secrète et magique influence. Chacun des personnages est parfaitement dans l'esprit de son rôle : la terreur, la colère, la foi, la crainte, toutes ces passions et tous ces sentiments occupent dans l'œuvre une place importante, et, il faut le dire, c'est, sous ce rapport, un des succès les plus larges auxquels nous ayons assisté. Nous ne nous rappelons pas avoir vu, sous le rapport de l'expression dramatique, une œuvre exécutée avec un accent plus vrai et plus profond que celle de M. Chauvin|référence=<ref name=":3" />.}} |
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Version du 11 août 2024 à 08:30
Directeur Académie royale des beaux-arts de Liège | |
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Enseignant Dessin d'après nature (d) Peinture Composition picturale Académie royale des beaux-arts de Liège | |
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Enseignant Dessin d’après l’antique (d) Expression (d) Académie royale des beaux-arts de Liège | |
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Naissance | |
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Décès | |
Sépulture | |
Nom de naissance |
Auguste Adolphe Chauvin |
Nationalité | |
Formation | |
Activités | |
Période d'activité |
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Père |
Pierre Jean Jacques Chauvin |
Mère |
Antoinette Piermont |
Fratrie | |
Conjoint |
Marie Wilhelmine Buschbeck |
Enfant |
Membre de | |
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Mouvements | |
Maîtres | |
Genres artistiques | |
Distinction |
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Auguste Chauvin, né le à Liège où il meurt le , est un peintre belge.
Né à Liège en 1810, le jeune Auguste s'installe avec sa famille dès 1816 à Aix-la-Chapelle. Il s'y forme pour devenir architecte, mais apprend également les bases du dessin et de la peinture chez Jean Baptiste Bastiné. Après avoir exercé comme maître-maçon durant quelques années, il renonce en 1831, décide de suivre sa vocation artistique et part étudier à l'Académie des beaux-arts de Düsseldorf auprès de Wilhelm von Schadow. De 1832 à 1841, il poursuit sa formation à Düsseldorf tout en officiant quelques mois par an comme peintre officiel de la cour de Neuwied.
En 1841, il revient à Liège, où un poste de professeur à l'Académie royale des beaux-arts lui est offert. C'est le début d'une longue carrière d'enseignant à l'Académie, qui se complète par celle de directeur de cette même institution à partir de 1856. Il obtient sa mise à la pension en 1880.
Bien qu'il soit aussi dessinateur, Auguste Chauvin est avant tout un peintre de scènes religieuses, de portraits, de compositions historiques et allégoriques, et de scènes de genre. Spécialement proche du romantisme dans ses compositions historiques, il reste fortement influencé par l'école de peinture de Düsseldorf, surtout dans ses scènes religieuses.
Tout au long de sa carrière, il « s'efforce de faire pénétrer et apprécier en Belgique l'art allemand et plus particulièrement les œuvres des maîtres de Düsseldorf ».
Biographie
Jeunesse, formation et début de carrière artistique (1810-1841)
Auguste Adolphe Chauvin, né le à Liège, est le fils aîné de Pierre Jean Jacques Chauvin, marchand chapelier, et d'Antoinette Piermont[1],[2]. Il a deux frères et trois sœurs, nés entre 1812 et 1817[2]. En 1816, la famille s'installe à Aix-la-Chapelle, et le jeune Auguste y fait ses études à l'école primaire, au collège et enfin à l'école industrielle[3],[4]. Peu après, il est attaché à ce dernier établissement en tant que professeur suppléant[3]. C'est aussi à cette époque qu'il se forme, en compagnie d'Alfred Rethel, aux principes du dessin et de la peinture auprès de Jean Baptiste Bastiné[3],[5],[6].
Il devient architecte et pendant quatre ou cinq ans exerce le métier de maurermeister, ou maître-maçon[3]. Ce métier ne lui plaît pas et il décide finalement en 1831 de se rendre à Düsseldorf[3],[4], pour y étudier à l'Académie des beaux-arts auprès de Wilhelm von Schadow[5],[6],[7],[8]. Selon un article de 1865 du journal La Meuse, « Schadow fit une mine assez douteuse quand il entendit les plans que lui exposait ce jeune homme de vingt-et-un ans ; et il lui objecta avec force les difficultés de son entreprise ; néanmoins, cédant devant cette volonté ferme et inébranlable, il lui permit de faire un essai »[3].
Chauvin continue sa formation à l'Académie de Düsseldorf, mais il doit, chaque année, quitter la ville durant quelques mois pour se rendre à Neuwied. De 1832 à 1841, il y travaille en tant que professeur de dessin du prince Maximilian zu Wied-Neuwied[3], puis comme peintre officiel de la cour[5],[6],[7],[8], où, « racontait-il plus tard à ses élèves, il peignait en gants blancs »[9].
L'artiste commence sa carrière artistique en 1836 avec la peinture Adieu entre Tobie et son père aveugle[3],[4]. En 1840, il expose deux toiles au Salon d'Anvers[10], dont le tableau La Châtelaine ; épisode de la chasse au faucon. « Cette œuvre eut un succès tel que bientôt d'autres artistes s'emparèrent de ce sujet et le reproduisirent avec différentes variantes »[3].
Durant les années qu'il passe à Düsseldorf, l'artiste tisse des liens d'amitié avec Alfred Rethel et Christian Köhler[3]. Il organise aussi un voyage en Belgique, où il sert de guide pour Schadow, Köhler et quatorze autres peintres de l'école de peinture de Düsseldorf[3]. « Ce fut là le premier voyage artistique important, qui créa des relations entre les artistes belges et allemands, encore que ceux-ci se sentissent plutôt attirés vers les œuvres des anciens artistes de Gand, d'Anvers et de Bruges »[3]. Enfin, il épouse Marie Wilhelmine Buschbeck (1819-1890)[11] qui est originaire de Coblence[3],[12], avec qui il a cinq fils[13] : Pierre Auguste (1843)[13], Charles Victor (1844-1913)[13],[14], Adolphe Charles (1847-1893)[13], Paul Gustave Léopold (1855-1856)[13] et Georges Hyacinthe (1859-1910)[13],[15].
Carrière à l'Académie des beaux-arts de Liège (1841-1880)
En 1841, il revient à Liège, où il nommé professeur de dessin à l'Académie des beaux-arts[4],[16]. Commence alors une longue carrière professorale qui s'étend de 1842 à 1880[5],[6],[7],[8]. En 1855, il est nommé directeur de l'Académie à la suite du décès de Barthélemy Vieillevoye et occupe ce poste, en plus de celui de professeur, de 1856 jusqu'à 1880[5],[6],[7],[16]. Dans l'exercice de ses fonctions de professeur et directeur, il apporte « un esprit élevé, un sens droit, un goût sûr et une grande bienveillance envers ses élèves et ses subordonnés »[17]. Lui sont également reconnus « le tact nécessaire pour diriger chacun dans sa vie » et la capacité d'« encourager le talent à propos et lui donner l'occasion de se produire »[17].
En plus de sa carrière à l'Académie, il est membre de la commission directrice de la société pour l'encouragement des beaux-arts de 1846 à 1857[18],[19],[20] et de la Commission provinciale des monuments[17],[19]. En 1856, il est également nommé directeur des collections de peinture de la ville de Liège, qui sont alors conservées dans la Halle aux Drapiers[21], fonction qu'il assume de même jusqu'en 1880[8].
Malgré ses multiples tâches professorales et administratives, l'artiste expose régulièrement durant cette période. Au Salon de Bruxelles de 1845, il expose son tableau La mort de Moïse[22]. En 1848, le peintre envoie 5 œuvres au Salon de Bruxelles[23], dont sa toile Une dernière entrevue des bourgmestres Beeckman et Laruelle qui lui permet d'obtenir une médaille en vermeil[24] et son tableau La Fuite en Égypte qui « eut tant de succès et fut reproduit par la gravure »[17]. La critique se montre pourtant réservée, trouvant à l'artiste « des qualités incontestables, comprimées par un excès de sagesse, de prudence »[25] et l'engageant « à être plus téméraire ; qu'il ne craigne pas de se montrer trop audacieux »[25]. Au Salon de Bruxelles de 1851, il expose cette fois le Portrait du Baron Louis de Schiervel, conservé au Sénat[26].
L'exposition suivante de l'artiste n'a lieu que dix ans plus tard, lorsqu'il expose Le banquet de Jupille au Salon d'Anvers de 1861[27]. L'absence d'expositions notables durant cette période est probablement liée à ses nominations à la direction de l'Académie en 1855 et des collections d'art communales en 1856[4],[8]. Le retour du peintre se passe sans accroc : l'œuvre est bien accueillie par la critique de l'époque[19],[28], et l'artiste est nommé Chevalier de l’ordre de Léopold à la fin du salon[29]. Le banquet de Jupille obtient d'ailleurs « un si légitime succès » au Salon d'Anvers que, l'année suivante, « le Sénat de Berlin adresse à l'artiste une lettre des plus flatteuses pour l'inviter à exposer dans la capitale de la Prusse » le tableau en question[30], qui y est aussi bien reçu par la critique[31].
Les années suivantes, Chauvin recommence à exposer plus régulièrement : à l'Exposition universelle de Londres en 1862[32] ; au Salon d'Anvers en 1864[33], 1870[34] et 1873[35] ; au Salon de Gand en 1871[36] et 1874[37] ; et enfin au Salon de Bruxelles de 1875[38]. La majorité des œuvres qu'il envoie à ces expositions sont des peintures religieuses, comme les Remords de Caïn, l'Arrivée de la Sainte Famille en Égypte, L'éducation de la Sainte Vierge, etc. Néanmoins, la production artistique de Chauvin s'est ralentie, ce dont se lamente le périodique Le Rasoir dans un article du : « Depuis quelque temps, cependant, l'artiste semble être absorbé par le directeur de l'Académie, les couleurs sèchent sur sa palette et son pinceau semble délaissé. Le feu sacré serait-il éteint et l'artiste penserait il à se reposer sur ses succès ? »[4].
En 1930, le critique d’art et conservateur de musée Jules Bosmant dépeint l'artiste comme un « homme érudit et fort écouté »[18] qui « jouissait à Liège d'un grand prestige »[18], ce qu'indique déjà un article du journal La Meuse en 1865 : « Son talent, son esprit, ses connaissances et son activité lui ont acquis l'estime de ses concitoyens et la confiance du gouvernement qui l'appelle souvent à faire partie de Commissions ou le charge de missions à l'étranger »[3]. En 1863, il est d'ailleurs envoyé à Munich « pour faire un rapport sur l'exposition des travaux graphiques des écoles bavaroises »[3]. Tout au long de sa carrière, il « s'efforce de faire pénétrer et apprécier en Belgique l'art allemand et plus particulièrement les œuvres des maîtres de Düsseldorf »[3],[18].
Dernières années (1880-1884)
Vu que « les progrès de l'âge lui firent sentir que l'heure de la retraite avait sonné », Auguste Chauvin obtient sa mise à la pension en 1880 « après de longs et loyaux services »[17]. Il est aussi nommé directeur honoraire[17],[19]. Même à la retraite, il envoie encore le tableau Moïse au Mont Sinaï au Salon de Gand de 1880[39].
Auguste Chauvin meurt à Liège le [19],[40], d'un mal survenu peu de temps auparavant, comme le rappelle Prosper Drion durant les funérailles de l'artiste : « Il y a un mois à peine qu'il s'alitait pour ne plus se relever, et hier, toujours vivant par l'esprit, il expirait sans souffrance »[17]. Les obsèques attirent « une foule considérable », dont de nombreuses « notabilités liégeoises » ainsi que « le corps professoral et les élèves de l'Académie au grand complet »[41]. Le peintre est inhumé au cimetière de Robermont[41].
Œuvre
Style et techniques artistiques
L'historien de l'art Paul Piron détecte chez Auguste Chauvin une « prédilection pour les portraits, les compositions historiques et allégoriques, les scènes de genre »[5] et le perçoit comme « proche du romantisme »[5]. Serge le Bailly de Tilleghem, docteur en archéologie et histoire de l'art[42], le résume avec ces mots : « Auguste Chauvin - ses toiles héroïques prolongent le romantisme nationaliste… dans le dernier quart du siècle ! »[43].
Cette proximité avec le romantisme, surtout dans ses compositions historiques, est également mise en avant par Jacques Goijen[6] ainsi que par Sibylle Valcke et Gaëtane Warzée[7]. Les mêmes auteurs s'accordent aussi pour constater que le style de ses toiles bibliques est fortement influencé par l'école de Düsseldorf et pour reconnaître la qualité de ses portraits de grands bourgeois et de célébrités[6],[7]. L'historien de l’art et conservateur de musée Jacques Hendrick (d) considère que « ses portraits, ses tableaux de petit format, défendent mieux sa mémoire et sont supérieurs à ses grandes compositions »[44].
La conservatrice du Musée de l'Art wallon Liliane Sabatini, reprenant une remarque de l'artiste et docteur en histoire de l’art Guy Vandeloise[45],[46], signale : « Les peintres de sujets religieux, influencés par les Nazaréens qui menaient une vie quasi monastique dans un couvent désaffecté de Rome, Auguste Chauvin, Jules Helbig et Victor Fassin essayèrent en effet de retrouver par la science et la réflexion la foi et le génie des époques révolues. Ils créèrent ainsi des œuvres consciencieuses qu'aggrave le besoin de signifier »[47].
Comme le résume un article du journal La Meuse en 1865, Auguste Chauvin est l'un des quelques artistes belges qui trouvent dans l'art allemand « le langage à l'aide duquel ils peuvent convenablement s'exprimer, et qui devient même leur véritable langue maternelle »[3].
Le banquet de Jupille (1861)
Aussi connue sous le nom de Saint Lambert au banquet de Pépin de Herstal[48], cette toile monumentale, réalisée en 1861 et qui fait partie des collections du musée des Beaux-Arts[49], est actuellement exposée à la cathédrale Saint-Paul de Liège[50].
Elle représente la scène suivante : « Saint Lambert, debout, apostrophe Alpaïde et Pepin ; la première, parce qu'en mêlant sa coupe à celles des autres convives pour la faire bénir, elle a voulu surprendre la bonne foi de l'évêque ; le second, parce qu'en ayant à ses côtés Alpaïde, à la place de sa femme légitime Plectrude, il brave les lois et la défense de l'Église »[51].
Cette composition historique est « à replacer dans un courant qui s'exprime depuis la Révolution belge, celui de la peinture monumentale visant à éveiller, consolider et entretenir auprès de la population belge le sentiment national et patriotique. La peinture sert ainsi le concept d'identité nationale ; elle vise à créer et entretenir une conscience nationale »[52].
Dans le cas présent, le tableau fait référence à « deux sources justificatrices pour la Belgique de 1830 : la religion catholique et le passé national »[51]. Saint Lambert exerce le rôle de « défenseur du sacrement du mariage »[51], et donc des valeurs morales chrétiennes, mais il représente également « un clin d'œil principautaire »[51], et donc une référence à ce passé national. L'allusion au passé national se complète par l'utilisation de « l'imaginaire pippinide et carolingien » qui est évoqué « avec Pépin de "Herstal" dans son "palais" de "Jupille", sans oublier le jeune Charles Martel représenté par Chauvin aux côtés de ses parents. Ce jeu subtil d'identification peut être complété par l'image négative d'Alpaïde, cette Messaline déjà caricaturée sur la première page du bréviaire liégeois de 1622 »[51].
Le Journal des beaux-arts du publie une élogieuse critique de l'œuvre, alors exposée au Salon d'Anvers :
« La composition en est irréprochable : comme ligne, comme logique, M. Chauvin s'est placé à une grande hauteur. On devine un penseur sérieux sous l'artiste ; un homme habitué à commenter les règles de l'art et à entrer dans le vif de ce qui détermine l'étude du vrai et du beau. Il y a comme un souffle du grand Corneille sur cette scène qui forme un des points constitutifs les plus saillants de l'histoire de Liège ; on le sent dans cette grande tempête humaine soulevée par la parole de St. Lambert, et le spectateur en subit la secrète et magique influence. Chacun des personnages est parfaitement dans l'esprit de son rôle : la terreur, la colère, la foi, la crainte, toutes ces passions et tous ces sentiments occupent dans l'œuvre une place importante, et, il faut le dire, c'est, sous ce rapport, un des succès les plus larges auxquels nous ayons assisté. Nous ne nous rappelons pas avoir vu, sous le rapport de l'expression dramatique, une œuvre exécutée avec un accent plus vrai et plus profond que celle de M. Chauvin »[28].
En revanche, l'œuvre ne fait pas l'unanimité parmi les critiques d'art du XXe siècle, notamment de Jacques Hendrick (d) et Jules Bosmant qui tous les deux ont été conservateurs du musée des Beaux-Arts de Liège[53],[54]. Jules Bosmant commente que le tableau « présente, dans une couleur déplorable, une gesticulation d'acteurs tragiques qui posent pour l'objectif et se soucient plus de faire valoir la noblesse de leurs attitudes et l'harmonie de leurs grimaces que la vérité véhémente des sentiments qu'ils éprouvent »[53]. Jacques Hendrick, quant à lui, le trouve « d'une froideur glaciale de facture et de sentiment »[44].
Catalogue et musées
Des œuvres d'Auguste Chauvin font partie des collections du Museum Kunstpalast de Düsseldorf[55] et du musée d'Art wallon[56], mais elles sont également présentes à l'évêché de Liège[56], à la cathédrale Saint-Paul de Liège[50], au Sénat[56], dans les collections d'art et de patrimoine culturel de la Fédération Wallonie-Bruxelles[57] et dans de nombreuses collections particulières[3].
Réception critique
Du vivant de l'artiste, ses œuvres sont habituellement bien reçues par la critique[3],[4],[28]. Les avis de certains commentateurs du XXe siècle sont, par contre, plus discordants[44],[53]. En 1930 par exemple, Jules Bosmant caractérise Chauvin, en tant que peintre, de « froid, emphatique et guindé »[53] le qualifiant de « Monsieur Prud'homme » de la peinture d'histoire[53]. Il poursuit sur sa lancée : « Solennel et morose, cet élève de l'Académie de Düsseldorf a tourné le dos, sa vie durant, à la simple et vulgaire nature […][53]. » À continuation, il souligne néanmoins : « […] pour son excuse et celle de ses malheureux confrères en peinture d'histoire, la difficulté de leur tâche et l'indigence des sujets offerts à leur palette. Entre St-Lambert (dont Gérard de Lairesse peignait déjà le martyre en 1660) et Laruelle, leur verve s'épuise vite »[58].
En réalité, la critique de Bosmant s'adresse à l'ensemble de l'école de peinture de Düsseldorf qui va « déplacer momentanément les centres d'attraction et de direction des peintres liégeois »[18], déplacement qui entraîne que « [...] nos peintres durent de connaître si tard le magnifique réalisme français, car ces faux modèles perpétuèrent chez nous un goût du pittoresque artificiel et d'anecdote sentimentale, que le grand vent naturaliste qui soufflait du Sud ne parvint que difficilement à balayer »[59]. Pour Bosmant, Chauvin est donc surtout coupable d'appartenir et promouvoir cette école de peinture : « Or, ancien élève de Bastiné, puis de Schadow, il se rattache à la vieille école de Düsseldorf. De plus son éducation, voire sa famille, le tournent irrésistiblement vers l'Est »[18].
La thèse reprise par Jules Bosmant en 1930 est déjà défendue en 1921 par l'auteur, poète, bibliophile et mécène Albert de Neuville (d), qui observe une véritable « épidémie dusseldorfienne »[60] dans les salons triennaux organisés à Liège durant la seconde moitié du XIXe siècle[61]. Il considère Jules Helbig et Chauvin comme principaux responsables de cette situation[62], qui, selon son analyse, contamine « le goût de beaucoup de Liégeois en habituant leurs yeux à un coloris fade et terne, à une atmosphère sans vibration, à la recherche des lignes plutôt qu'à celle des masses, à l'amour de l'extrême complication au détriment de la simplification synthétique »[63] et surtout éloigne « l'esprit de la contemplation de la peinture pour elle-même, pour le porter vers l'étude du sujet »[63]. L'auteur poursuit remarquant que, face à « des œuvres modernes où la distribution de la lumière et des couleurs tient une si grande place, où l'expression caractéristique l'emporte sur l'exactitude photographique, où le motif est presque tout et le sujet peu de chose », « on crie alors à l'horreur et à l'excentricité »[63]. Il achève, conseillant de hausser les épaules et répondre : « Düsseldorf ! ».
Dans le même registre, Guy Vandeloise pointe en 1978 que « Chauvin, Helbig et Fassin, à l'instar des peintres d'histoire de l'École de Düsseldorf, préfèrent le geste théâtral à l'expression vraie, la couleur fade et cireuse à la touche virulente et passionnée »[64].
Le professeur et ses élèves
Un article de 1865 du journal La Meuse commente que Chauvin, en tant que professeur, « n'a pas seulement cherché à employer les meilleures méthodes dans l'enseignement du dessin, du modelage et de la peinture » mais qu'il s'emploie également à « former le goût des élèves d'après les meilleurs modèles et de leur faire connaître les différents styles »[3]. Le même article remarque que le professeur « attache surtout une grande importance à l'enseignement scientifique », car il est conscient que « la science et l'éducation assurent à l'ouvrier comme à l'artiste une place plus honorable et plus indépendante dans la société, et en même temps une activité plus étendue »[3].
Lors des obsèques d'Auguste Chauvin, Achille Chainaye, l'un de ses anciens élèves, brosse le portrait suivant de l'enseignement reçu de son maître :
« M. Chauvin ne dirigeait pas une école, mais un atelier. Il nous parlait d'art autant qu'il nous faisait pratiquer, et alors qu'il encourageait en développant chez nous la pensée, nous apercevions au-delà de l'étude le tableau, la statue. Quoiqu'il eut enseigné de nombreuses années, il comprenait les progrès récents. Parfois même, il s'émerveillait, c'est le mot, devant un simple contour, une silhouette expressive tracée par un débutant. […] sa nature pénétrante, délicate, allait de la saillie gauloise à l'attendrissement réel : croyez que l'homme qui avait de ces admirables enthousiasmes était un véritable artiste »[17].
Élèves notables
- Pierre Joseph Antoine (1840-1913)[65]
- Achille Chainaye (1862-1915)[17]
- Émile Delperée (1850-1896)[66],[67],[68]
- Adrien de Witte (1850-1935)[69],[70],[71]
- Edgar D'Hont (d) (1861-1941)[72],[70],[73]
- Victor Fassin (1826-1906)[74],[75]
- Léon Philippet (1843-1906)[76],[77]
Expositions
Il expose en diverses occasions en Allemagne, entre autres à Berlin[31].
- 1840 : Salon d'Anvers, du 1er août au 15 septembre, rue Vénus, Anvers (le peintre y expose 2 toiles : La Châtelaine ; épisode de la chasse au faucon et Portrait d'homme)[10].
- 1845 : Salon de Bruxelles, du 15 août au 6 octobre, anciens appartements du palais de Charles de Lorraine, Bruxelles (l'artiste y expose La mort de Moïse)[22].
- 1848 : Salon de Bruxelles, du 16 août au 2 octobre, anciens appartements du palais de Charles de Lorraine, Bruxelles (Chauvin y expose 5 toiles : La prière de Moïse, La Fuite en Égypte, Judas, Une dernière entrevue des bourgmestres Beeckman et Laruelle et le Portrait de Père Jean Baptiste Henri Lacordaire)[23],[25].
- 1851 : Salon de Bruxelles, du 15 août au 31 octobre, anciens appartements du palais de Charles de Lorraine, Bruxelles (l'artiste y expose le Portrait du Baron Louis de Schiervel)[26].
- 1861 : Salon d'Anvers, du 4 août au 30 septembre, rue Vénus, Anvers (Chauvin y expose Le banquet de Jupille)[28],[27].
- 1862 : Exposition universelle de 1862, du 1er mai au 1er novembre, Londres[32].
- 1864 : Salon d'Anvers, du 7 août au 2 octobre, rue Vénus, Anvers (il y expose Remords de Caïn)[33].
- 1870 : Salon d'Anvers, du 14 août au 2 octobre, rue Vénus, Anvers (le peintre y expose l'Arrivée de la Sainte Famille en Égypte)[34].
- 1871 : XXVIIIe Exposition nationale et triennale - Salon de Gand, du 10 septembre à octobre, casino de Gand, Gand (l'artiste y expose la toile L'éducation de la Sainte Vierge)[36].
- 1873 : Salon d'Anvers, du 10 août au 5 octobre, rue Vénus, Anvers (il y expose 2 œuvres : L'adoration des enfants des bergers et L'éducation de la Sainte Vierge)[35].
- 1874 : XXIXe Exposition triennale - Salon de Gand, du 30 août au 18 octobre, casino de Gand, Gand (Chauvin y expose la toile Jeune fille à sa toilette)[37].
- 1875 : Salon de Bruxelles, du 23 août au 15 novembre, place du Petit Sablon, Bruxelles (le peintre y expose Judas Iscariote)[38].
- 1880 : XXXIe Exposition triennale - Salon de Gand, du 15 août au 2 novembre, casino de Gand, Gand (l'artiste y expose la toile Moïse au Mont Sinaï)[39].
Prix et distinctions
- 1848 : médaille en vermeil au Salon de Bruxelles pour son tableau Une dernière entrevue des bourgmestres Beeckman et Laruelle[24].
- 1861 : Chevalier de l'ordre de Léopold (le 8 octobre)[29],[78].
Notes et références
- « Naissance Auguste Adolphe Chauvin le 24 octobre 1810 à Liège », sur Archives Ouvertes (consulté le )
- « Généalogie de Pierre Jean Jacques CHAUVIN », sur Geneanet (consulté le )
- « Auguste Chauvin », sur uurl.kbr.be, La Meuse, Liège, (consulté le ), p. 3
- Nor. et Lemaître 1873, p. 2.
- Piron 2003-2006, p. 211.
- Goijen 2014, p. 103.
- Valcke et Warzée 1995, p. CHAUVIN, Auguste.
- « Auguste Chauvin (Les collections du Musée de la Vie wallonne) », sur collections.viewallonne.be (consulté le )
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Annexes
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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Liens externes
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Peintre belge du XIXe siècle
- Peintre liégeois
- Directeur de l'Académie royale des beaux-arts de Liège
- Professeur à l'Académie royale des beaux-arts de Liège
- Directeur belge de musée
- Chevalier de l'ordre de Léopold
- Étudiant de l'académie des beaux-arts de Düsseldorf
- Naissance en octobre 1810
- Naissance à Liège
- Décès en mai 1884
- Décès à Liège
- Décès à 73 ans
- Personnalité inhumée au cimetière de Robermont