[go: nahoru, domu]

Charolais (cheval)

race de chevaux française éteinte

Le Charolais, ou Charollais, est une ancienne race chevaline de demi-sang d'origine française, jadis utilisée comme cheval de selle. Il est peut-être issu du cheval bourguignon du Moyen Âge. Originaire du pays de Charolais dans la région de Charolles, une origine orientale lui est également attribuée. Ce cheval robuste, de petite taille, doté d'une bonne ossature et de qualités de rusticité, est réputé pour les services de l'armée mais souffre de la popularité du trait nivernais. Il est croisé au fil du XIXe siècle avec des demi-sangs normands, des Pur-sangs et des juments charolaises pour devenir une bonne monture de dressage et de saut d'obstacles au début du XXe siècle.

Charolais
Image illustrative de l’article Charolais (cheval)
Région d’origine
Région Pays de Charolles, Drapeau de la France France
Caractéristiques
Morphologie Cheval de selle
Tête Courte mais forte
Caractère Sobre et robuste
Statut FAO (conservation) ÉteinteVoir et modifier les données sur Wikidata
Autre
Utilisation Cavalerie légère, dressage et saut d'obstacles

Comme tous les demi-sangs d'origine française, la race est fusionnée en 1958 dans le Selle français, et n'existe plus en tant que telle depuis cette date.

Histoire

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photo ancienne d'un cheval vu de profil 
Favori, demi-sang charolais.

Le cheval charolais appartient à la grande famille des chevaux dits « demi-sang » issus de croisements entre les races paysannes locales et le Pur-sang, et qui en France jusqu'en 1958 étaient désignés par le nom de leur région sans avoir de livre généalogique spécifique, à l'instar de l'Angevin, du Charentais, du Limousin ou encore du Vendéen[1],[Note 1].

Origine

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Il semble issu de races rustiques propres au département de Saône-et-Loire, telles que le cheval Bourguignon et le cheval du Morvan[2]. Les ouvrages du XIXe siècle lui revendiquent pour lointains ancêtres des chevaux arabes pris aux Sarrasins après la bataille de Poitiers[3],[4], sachant qu'une origine arabe est invoquée pour un très grand nombre de races françaises à la même époque.

Cheval Bourguignon

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Le cheval Bourguignon est élevé dans la région de Bourgogne au moins depuis le Moyen Âge. En 1490, 300 d'entre eux et 300 chevaux allemands sont reçus pour des joutes sur l'esplanade Saint-Vincent à Metz, selon le journal de Jehan Aubrion[5]. Petit cheval robuste et endurant[6], le bourguignon porte fréquemment une robe baie claire selon une source de 1777, qui ajoute que « les chevaux entiers de Bourgogne ne sont point sujets à de mauvais vices, comme ceux de Bretagne & de Normandie. Les juments de Bourgogne sont assez fécondes »[7]. Il sert indifféremment sous la selle, comme carrossier ou comme cheval de trait[6], c'est un « bon cheval de service »[7], qui pourrait également être à l'origine du Haflinger[8], et qui a formé la race du trait Auxois, bien qu'il soit moins charpenté que ce dernier, par croisement avec des Ardennais[9],[10],[11]. D'après la source de 1777, « Les Bourguignons ne sont pas curieux. Ils n'ont que des étalons du pays & quelques-uns de Franche-Comté »[7].

De la Renaissance au milieu du XIXe

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Le cheval charolais est peut-être mentionné dès la Renaissance, puisque le roi Henri II est tué durant un tournoi alors qu’il monte son cheval préféré, présumé charolais ou cheval de Bresse, et nommé « Le Malheureux »[12]. Le type ancien de ce cheval s'élève principalement à destination des armées avant le milieu du XIXe siècle. Il ne s'agit pas vraiment d'une race mais d'« une population chevaline hétérogène » répartie dans la Champagne, la Bourgogne, le Nivernais, le Morvan et le Charolais : d'après Henri Magne (1857), « les chevaux de ces provinces n'ont point de caractères tranchés qui permettent de les reconnaître ». Louis-Furcy Grognier fait un grand éloge de ses qualités en 1827[13].

Dans le Morvan et le Charolais, les chevaux de trait remplacent peu à peu le bidet sauvage et rustique du pays[14]. La popularité du cheval de trait nivernais[15] déstabilise l'élevage du cheval charolais au profit des paysans[4].

Des années 1850 à la disparition

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Au bord d'un champ, un cheval bai-brun est à l'arrêt, harnaché pour le travail; deux bœufs, eux aussi harnachés et attachés à une herse, sont situés juste derrière lui; en arrière plan, un paysan sème son champ. 
« Semailles en Charolais », peinture d'Eugène Chambellan réalisée à la fin du XIXe siècle, conservée à Mâcon, au Musée des Ursulines.

Le cheval rustique originel laisse sa place à une espèce de trait léger qui, vers 1850 et selon Alexandre-Bernard Vallon, est croisée avec le Pur-sang et le demi-sang anglais pour fournir à l'armée des chevaux de cavalerie légère et de cavalerie de ligne[16]. Ce croisement entre les juments indigènes et les étalons de sang du haras départemental de Saône-et-Loire est accusé d'amoindrir les qualités de la race sans « lui faire gagner beaucoup sous le rapport des formes »[4]. Beaucoup regrettent l'ancien cheval charolais rustique, qui disparaît faute de demandes et d'utilité[17].

D'autres auteurs supposent que des apparentements sans croisements ont fait du charolais un bon cheval de cavalerie légère ou d'artillerie[18]. En 1919, l'élevage du charolais est réputé s'effectuer dans d'excellentes conditions[19]. Une revue d'agriculture française rapporte que le cheval préféré du roi Albert Ier de Belgique était un Charolais nommé « Titanic »[20], don des haras du marquis de Croix[21].

Comme de très nombreuses races françaises destinées à la selle, le cheval charolais est fusionné en 1958, lors de la réorganisation de l'élevage des chevaux dits « demi-sang », afin de former la race nationale du selle français, sur lequel il a eu une forte influence[1] tout comme l'Anglo-normand[2].

Description

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Photo en noir et blanc du profil droit d'un cheval présenté au modèle ; sa robe est sombre et sa queue est coupée ; la tête est massive et son encolure longue par rapport au reste du corps. 
Demi-sang de Saône-et-Loire, issu du croisement entre un trait léger et un Pur Sang.

Le cheval charolais est de petite taille, présentant « la plus grande analogie avec le cheval du Morvan », mais avec plus de distinction dans la tête et les formes[15]. On le dit « petit et sans élégance, mais réputé pour sa vigueur »[4]. Il est moins léger et élégant que le cheval des montagnes du centre[18], mais doté d'une bonne ossature[2]. Au fil des croisements, le charolais acquiert davantage « de sang », même en comparaison avec l'Anglo-normand[2].

La tête est courte mais forte, avec de petites oreilles hardies[18]. L'encolure, également courte et forte, est attachée à un garrot bas[18]. Le corps est court et arrondi[18]. La croupe est assez large ainsi que les reins, et souvent un peu double. Les membres sont forts et l'animal doté de bons aplombs[18].

Comme tous les chevaux des contrées montueuses et calcaires, le charolais est réputé sobre et robuste[18], en particulier l'ancienne race, reconnue pour sa rusticité[15].

Utilisations

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Le charolais est apprécié pour ses qualités de trotteur infatigable et rapide[18], très estimé pour les services de l'armée[15], au point d'être qualifié en 1933 de « type accompli du cheval de guerre, comparable au cheval irlandais »[22]. Outre dans la cavalerie légère, il est largement apprécié par les écoles de dressage[19] et pour le saut d'obstacles[2], où il s'est illustré de manière internationale[23]. C'est un meilleur galopeur que l'Anglo-normand[24].

Diffusion de l'élevage

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Ce cheval était principalement élevé dans la circonscription du dépôt d'étalons du haras de Cluny[25], c'est-à-dire l'actuel département de Saône-et-Loire. Le meilleur lieu d'élevage se trouvait être, selon une thèse soutenue en 1905, entre Cluny, Charolles, Blanzy, Paray-le-Monial et Digoin, où les sols argilo-calcaires favorisent le développement du squelette des chevaux[26]. La race est mentionnée comme éteinte (statut « X ») sur l'évaluation de la FAO[27]. Cependant, l'ouvrage Equine Science (4e édition de 2012) le classe parmi les races de chevaux de selle toujours existantes, mais peu connues au niveau international[28].

Notes et références

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  1. D'autres pays ont pratiqué la politique inverse pour les chevaux demi-sang. En Allemagne, par exemple, en raison du droit du sol, chaque land a conservé le nom de sa race locale : Hanovrien, Westphalien, cheval de Hesse, etc.

Références

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  1. a et b Chevaux et poneys, Éditions Artemis, , 128 p. (ISBN 978-2-84416-025-6, lire en ligne), p. 63
  2. a b c d et e « Cheval Charolais », sur a-horseman.com (consulté le )
  3. Le cheval : Revue des agriculteurs de France, , 98 p. (lire en ligne), p. 20
  4. a b c et d Académie de Mâcon. Société des Arts, Sciences, Belles-lettres et Agriculture de Saône-et-Loire, Compte-rendu des travaux ..., (lire en ligne), p. 31.
  5. Paul Delsalle et Laurence Delobette, La Franche-Comté à la charnière du Moyen Âge et de la Renaissance, 1450-1550 : actes du colloque de Besançon, 10-11 octobre 2002, Franche-Comté, Presses Univ., , 512 p. (ISBN 978-2-84867-027-0, lire en ligne), p. 172.
  6. a et b Collectif, Chevaux et poneys, Éditions Artemis, , 128 p. (ISBN 978-2-84416-025-6, lire en ligne), p. 108.
  7. a b et c Le Parfait cocher, ou, L'art d'entretenir et conduire un équipage en ville et en campagne : avec une instruccion aux cochers sur les chevaux de carrosse, leurs maladies & remedes progres à leur guérison, chez F. J. Desoer imprimier-libraire, (lire en ligne), p. 214-215.
  8. Prévot et Ribémont 1994, p. 114
  9. Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, vol. 1, Librairie Larousse, , 960 p. (lire en ligne), p. 773
  10. (en) Longmeadow Press, Illustrated Guide to Horses of the World, Longmeadow Press, , 224 p. (ISBN 978-0-681-41894-3), p. 198.
  11. (en) Daphne Machin Goodall, Horses of the world : an illustrated survey ... of breeds of horses and ponies, David and Charles, , 3e éd., 272 p. (présentation en ligne), p. 134.
  12. « L'épopée du cheval en Bourgogne » [PDF], Les haras nationaux (consulté le ).
  13. Magne 1857, p. 287.
  14. Pierre Joigneaux, Le livre de la ferme et des maisons de campagne, vol. 1, V. Masson et fils, , p. 534.
  15. a b c et d Moll et Gayot 1861, p. 655
  16. Vallon 1863
  17. École de Lyon, Journal de Médecine Vétérinaire, vol. 14, , p. 269
  18. a b c d e f g et h Lecoq 1850, p. 246
  19. a et b Journal d'agriculture pratique, vol. 83, (lire en ligne), p. 583
  20. Société des agriculteurs de France, Revue des agriculteurs de France, vol. 68, , p. 407
  21. Carlo Bronne, Albert Ier : premier le roi sans terre, Plon, (lire en ligne), p. 389
  22. Académie de Mâcon. Société des arts, sciences, belles-lettres, et agriculture de Saône-et-Loire, Annales de l'Académie de Mâcon, L'Académie, (lire en ligne), p. 499
  23. Les succès des chevaux charolais : Leurs vitrines en épreuves internationales, Mâcon, Imprimerie générale X. Perroux et Fils, , 20 p.
  24. Journal d'agriculture pratique, vol. 86, , p. 369
  25. Gallier 1908, p. 267
  26. de Croix 1905, p. 53
  27. (en) « Breeds Currently Recorded In The Global Databank For Animal Genetic Resources » [PDF], Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, .
  28. (en) Rick Parker, Equine Science, Cengage Learning, , 4e éd., 608 p. (ISBN 1-111-13877-X), p. 62.Voir et modifier les données sur Wikidata .

Annexes

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Articles connexes

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Bibliographie

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  • Felix Lecoq, Dictionnaire général de médecine et de chirurgie vétérinaires, et des sciences qui s'y rattachent : Anatomie, Physiologie, Pathologie, Chirurgie, ..., Masson, , 1160 p. (lire en ligne), p. 246
  • Jean Henri Magne, Hygiène vétérinaire appliquée étude de nos races d'animaux domestiques et des moyens de les améliorer, vol. 1, Labe, (lire en ligne), p. 287
  • Louis Moll et Eugène Nicolas Gayot, La connaissance générale du cheval : études de zootechnie pratique, avec un atlas de 160 pages et de 103 figures, Didot, , 722 p. (lire en ligne)
  • Alexandre-Bernard Vallon, Cours d'hippologie à l'usage de MM. les officiers de l'armée..., vol. 2, Javaud, (lire en ligne)
  • Jean Henri Magne, Hygiène vétérinaire appliquée. Races chevalines, leur amélioration. Entretien, multiplication, élevage, éducation du cheval, de l'âne et du mulet, Garnier frères, , 654 p. (lire en ligne), p. 251
  • Charles-J. Seltensperger et D. Lasset, L'Élevage du cheval dans le Charolais et le Bourbonnais, conseils pratiques aux éleveurs, impr. de L. Guillemin, , 8 p. (lire en ligne)
  • Jean de Croix, « L'élevage du cheval de demi-sang dans le charolais », dans Notes agricoles sur le Charolais: thèse agricole soutenue en 1905 à l'Institut agricole de Beauvais devant MM. les délégués de la Société des agriculteurs de France, Impr. départementale de l'Oise, , p. 50-55
  • Alfred Gallier, Le cheval de demi-sang, races françaises, Laveur, , 332 p. (lire en ligne)
  • Société hippique française, Le cheval de demi-sang francais : Charolais ; Forez, Berry et Dombes, Adolphe le Goupy, , 95 p. (lire en ligne)
  • Les succès des chevaux charolais : Leurs vitrines en épreuves internationales, Mâcon, Imprimerie générale X. Perroux et Fils, , 20 p.
  • Jean François, Le Cheval de demi sang charollais, Faculté de médecine et de pharmacie de Lyon, Impr. du Salut public, , 10 p. (lire en ligne)
  • Le Cheval en Nivernais, Charolais, Morvan, Crépin-Leblond et Cie, , 72 p. (lire en ligne)
  • Eric Bietola, Le haras national de Cluny et l'élevage du cheval dans le Charolais, , 128 p. (lire en ligne)
  • Brigitte Prévot et Bernard Ribémont, Le Cheval en France au Moyen Âge : sa place dans le monde médiéval ; sa médecine, l'exemple d'un traité vétérinaire du XIVe siècle, la Cirurgie des chevaux, vol. 10 de Medievalia, Caen, Paradigme, , 522 p. (ISBN 978-2-86878-072-0, présentation en ligne)