[go: nahoru, domu]

Pendant l'Ancien Régime, le droit de bris, appelé aussi droit d'épave, droit de lagan, droit de varech[1] ou de wreccum[2], était le droit donnant la propriété des épaves et des cargaisons des navires naufragés au seigneur sur les terres duquel l’épave s’échouait[3].

Octave Penguilly L'Haridon : Les Pilleurs de la mer (gravure, 1848).

En fait, ce droit de bris faisait l'objet de négociations, de marchandages ou d'entorses nombreuses. Ainsi, il pouvait être donné par les seigneurs aux militaires ou religieux en échange de l'entretien et du fonctionnement du phare (fanal placé au sommet d'une tour à feu au Moyen Âge). Dans la plupart des cas, les populations, qui vivaient dans des conditions misérables, ne respectaient pas ce privilège seigneurial et profitaient des naufrages pour aller piller les bateaux.

Historique

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Le droit de bris existe probablement dès l'Antiquité. En France, Louis XI revendique ce droit comme régalien ; en Bretagne toutefois, le droit de bris est une prérogative ducale. Condamné en Bretagne par le concile de Nantes en 1127 sous l'impulsion du duc Conan III, il est aboli par Henri II sur les côtes d’Angleterre, du Poitou, de l’île d’Oléron et de Gascogne en 1174 et remplacé par une taxe de jauge, contre le versement de laquelle les capitaines de navires recevaient des « brefs de sauveté, de conduite et de victuailles », qui, en cas de sinistre, garantissaient leurs personnes et leurs biens[4]. Sous Louis XIV, ce droit est limité par l'ordonnance de Colbert de 1681 aux biens non réclamés dans un certain délai[5].

En août 1681, une ordonnance de la Marine supprime le droit de ramasser les épaves et les biens parvenant à la côte accordé jusque-là aux Ouessantins et, le , l'amirauté de Brest installe à Ouessant un bureau de greffe et un commis chargé de mettre à disposition du roi les marchandises parvenant à la côte à la suite de naufrages. Les Ouessantins continuèrent malgré tout à récupérer tout ce qui pouvait améliorer leur ordinaire[6]. Pour éviter la saisie des biens et du navire, il existait un droit de rachat du droit de bris par les « brefs de Bretagne », des attestations authentifiées par le sceau du duc de Bretagne, qui étaient mises en vente dans les ports du duché et dans deux ports français, Bordeaux et La Rochelle.

C’est en Bretagne, particulièrement dans le Pays pagan et le Pays bigouden, ou encore dans les îles comme à Ouessant, que le droit de bris eut son plus puissant développement, parfois peut-être, mais c'est douteux, en allant jusqu'à provoquer des naufrages afin de piller les épaves, d'où la réputation probablement imméritée de naufrageurs[7]. Par exemple, dans la nuit du 22 au à Plouguerneau, le Neptune, navire marchand anglais, s'échoue et est pillé par un groupe de pilleurs d'épaves du Pays pagan[8]. Il transportait entre autres de la porcelaine de Chine[9].

Ce droit reste en usage au XIXe siècle. Jules Michelet a évoqué cette pratique en ces termes, accréditant la légende des bretons « naufrageurs », en 1832 :

« La nature est atroce [sur la côte bretonne], l'homme est atroce et ils semblent s'entendre. Dès que la mer leur jette un pauvre vaisseau, ils courent à la côte, hommes, femmes et enfants, ils tombent sur cette curée. N'espérez pas arrêter ces loups ; ils pilleraient tranquillement sous le feu de la gendarmerie. Encore, s'ils attendaient toujours le naufrage, mais on assure qu'ils l'ont souvent préparé. Souvent, dit-on, une vache, promenant à ses cornes un fanal mouvant, a mené les vaisseaux sur les écueils. Dieu sait alors quelles scènes de nuit ! On en a vu qui, pour arracher une bague au doigt d'une femme qui se noyait lui coupaient le doigt avec les dents. L'homme est dur sur cette côte. Fils maudit de la création, vrai Caïn, pourquoi pardonnerait-il à Abel ? La nature ne lui pardonne pas[10]. »

Guy de Maupassant a renchéri, écrivant en 1883, faisant allusion à la réputation de naufrageurs que possédaient les Bigoudens, à l'instar des habitants du Pays pagan :

« La plage de Penmarch fait peur. C'est bien ici que les naufrageurs devaient attirer les vaisseaux perdus, en attachant aux cornes d'une vache, dont la patte était entravée pour qu'elle boitât, la lanterne trompeuse qui simulait un autre navire[11]. »

Quelques récits

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La volonté royale de supprimer le droit de bris pouvait provoquer des incidents ; ce fut le cas par exemple à Sainte-Marine le à la suite du naufrage du Tourneur, un navire de La Rochelle en provenance de Saint-Domingue :

« On entrepose les effets sauvés des eaux dans la chapelle Saint-Moran. À la fin des vêpres, un rassemblement menaçant de quelque 300 hommes, femmes et enfants, armés de bâtons et de pierres, se forme autour de l'édifice. En vertu de leur supposé droit de bris, ils revendiquent la cargaison. Il faut l'intervention des quatre employés de la Ferme [douane] qui tirent deux coups de fusil et un coup de pistolet, pour repousser l'assaut. Nouvelle tentative des assaillants, encouragée par le sergent de la milice garde-côte et menés par le domestique du recteur, une nouvelle fois repoussée. Les Combritois menacent de revenir, cette fois armés. La population est furieuse parce qu'elle s'estime lésée : le naufrage ne lui rapporte rien, sa chapelle familière, tutélaire, est ravalée au rang d'un simple entrepôt[12]. »

D'autres exemples de pratique du droit de bris existent ailleurs en Bretagne ; ainsi, le , un navire marchand, chargé de vins du Midi, fait naufrage sur les côtes d'Ouessant :

« Aussitôt, un certain nombre d'habitants se portèrent sur la grève et, malgré le zèle et la fermeté de M. Caro, syndic des gens de mer, il fut impossible d'empêcher la soustraction d'une certaine quantité de marchandises ; une barrique cerclée de fer fut défoncée et le vin fut enlevé à l'aide de bailles et de bidons. Comment en serait-il autrement dans une île où il n'existe pour ainsi dire aucune force publique, où l'autorité repose sur trois ou quatre fonctionnaires dont la voix n'est que trop souvent méconnue, et qui n'ont point de gendarmerie pour faire respecter leurs ordres ou leurs sommations ? Plusieurs prévenus ont comparu en raison de ces faits à l'une des dernières audiences du tribunal correctionnel de Brest. M. l'avocat du Roi s'est de nouveau élevé avec force contre ce pillage, qui semble organisé sur nos côtes à la honte d'une époque aussi avancée en civilisation. Les prévenus ont été condamnés à un emprisonnement plus ou moins long, selon la gravité des faits qui pesaient sur chacun d'eux[13]. »

La Bretagne n'a pas, loin de là, l'exclusivité du pillage des épaves, pratiqué par de nombreuses populations côtières sur toutes les mers du globe.

Pour rester en France, on peut citer en 1887 le naufrage du magnifique paquebot anglais de la P&0 (Peninsular and Oriental stemship company), le Tasmania, sur le récif des Moines (Monachi) au large du lion de Roccapina en Corse, pourtant correctement cartographié et balisé (l'enquête conclura à une faute de navigation de l'officier de quart[14]). La population corse se dévouera pour porter assistance aux rescapés (ce qui lui vaudra un témoignage de satisfaction de la reine Victoria) mais les biens transportés par le navire ne seront pas perdus pour tout le monde. Le sort des cassettes de bijoux transportés par un maharadjah comme cadeau pour le jubilé de la reine Victoria est incertain[15], mais bon nombre de maisons de bergers corses s'enorgueillissent de beaux meubles anglais en provenance du navire qui assurait le service Bombay-Grande-Bretagne via Marseille (la Malle des Indes)[16].

 
Scène de naufrage au pays de Kerlouan (gravure de François Hippolyte Lalaisse, Musée départemental breton de Quimper).

Un autre exemple concerne Landéda, en plein Pays pagan : de tout temps, « en dépit de leurs prêtres, des douaniers, des gendarmes et des marins de profession, les riverains de Kerlouan, de Guissény, de Landéda, du Corréjou[17] et des paroisses avoisinantes récoltent comme leur propriété légitime les débris et les chargements des navires naufragés »[18]. Cette pratique du « droit de naufrage »[7], tradition du pays pagan, existait donc aussi à Landéda, comme l'illustre le récit suivant qui date de 1876 :

« Il y a quelques années, le curé de Landéda obtint un glorieux triomphe. Un dimanche, au milieu de la grand-messe, l'assistance, distraite de son recueillement par la nouvelle d'un naufrage, se précipita en foule sur la grève, et procéda lestement au "sauvetage", en appliquant sa doctrine favorite sur la charité bien ordonnée. Le bâtiment était chargé de toiles ; chacun en fit sa provision et, après l'avoir déposée dans sa ferme, s'en revint au bourg, sans remords, pour chanter les vêpres, croyant avoir fait une chose irréprochable. Le curé ne pensait pas de même. Il monta en chaire ; l'indignation le rendit éloquent ; ses paroissiens se retirèrent émus et troublés par la généreuse énergie de ses reproches ; et le lendemain matin il trouva entassé dans le jardin du presbytère, au grand préjudice de ses plates-bandes, tous les ballots de toiles, fruits du pillage de la veille[19]. »

Charles Géniaux écrit : « Dans les pays des "paganed", la région de Brignogan, […] les douaniers ont eu à soutenir des luttes souvent mortelles contre les pilleurs. La prison et les peines les plus sévères ne les arrêtent pas. Ces gens, qui ne voleraient pas un sou à leurs voisins, estiment que tout ce qui vient de la mer leur appartient, au même titre que les coquillages et les poissons. Aussi ne soyez pas surpris de trouver dans leur humble maisonnette une table ou un miroir en acajou incrusté de cuivre et de boire avec eux un verre de porto ou de madère authentique »[20].

L'échouage suivi du naufrage du Vesper, chargé de vin, sur les rochers d'Ouessant le entraîna la dérive des fûts de vin qui vinrent s'échouer en grand nombre de l'île Molène jusqu'à Santec. De mémoire d'homme, on ne vit jamais pareil afflux de vin dans la région et l'Aber-Wrac'h semblait être devenu un avant-port de Bordeaux avec ses quais surchargés de barriques de vin. Le journal Ouest-Éclair décrit ainsi les évènements :

« Tout ce qui mérite le nom de récipient est rempli de vin : pots, cruches, seaux, marmites, auges et jusque pro pudhor ! des vases nocturnes, etc. […] À Landéda, un étranger ami arrive dans une maison de la côte. On veut aussitôt lui faire goûter le gwin pense, le "vin d'épaves". Il voulut le couper par un peu d'eau et prit la cruche à eau. Mais celle-ci était remplie de vin. […] À Landéda, un fût arrive à la côte. On le défonce aussitôt, puis l'on remplit tous les vases apportés. Comme le transvasement n'allait pas assez vite au gré des personnes présentes, un homme saute dans le fût et, du vin jusqu'à la ceinture, remplit les récipients qu'on lui passe. Mais le vin n'était pas fait et ce bain extraordinaire a rendu tout le corps du pauvre homme de la couleur de l'encre violette. Lundi, une noce avait lieu à Landéda. À l'entrée de la tente du banquet deux fûts avaient été mis en perce et toute la journée le vin coula à flots. Le même jour, sur la grève de Landéda toujours, de l'embouchure de l'Aber-Benoît à l'embouchure de l'Aber-Wrac'h, une dizaine de fûts furent mis en perce. Les hommes qui étaient venus à la pêche au goémon s'oublièrent près des fûts. Pour le soir, tout le monde était gai et des rondes s'organisèrent autour des barriques sérieusement entamées. Deux bateaux, dont les patrons avaient trop fait la noce, se brisèrent sur les rochers. Il n'y eut heureusement personne de noyé[21]. »

« Quinze pilleurs d'épaves du vapeur Vesper, naufragé en novembre, […] viennent de comparaître devant le tribunal correctionnel de Brest. Cette affaire n'aurait qu'une importance minime sans les scènes scandaleuses qui suivirent le naufrage. En effet, environ trois cents fûts de vin de six cents litres allèrent s'échouer sur tous les points de la côte depuis Molène jusqu'à Roscoff, et le procureur de retracer à l'audience les scènes auxquelles se livrèrent les riverains qui se ruèrent sur les tonneaux et les défoncèrent. Les hommes et les femmes ivres dansaient autour des tonneaux. Une femme, furieuse de voir les hommes boire plus qu'elle, s'élança tout habillée dans une barrique défoncée et dansa dans le tonneau. Les pêcheurs et les cultivateurs manquant d'ustensiles pour loger le vin emplirent tous les récipients en leur possession, jusqu'à des vases de nuit. Toute cette malheureuse côte, a continué le procureur, a été ravagée par une ivresse qui a duré plusieurs mois. Dans une ferme, père, mère et enfants sont restés ivres si longtemps qu'ils ont laissé mourir de faim leurs bestiaux. Il y eut aussi des scènes incroyablement comiques à Ouessant. Un tonneau d'huile de ricin fut bu. La cire qui se trouvait à bord du Vesper fut pillée, et tout le monde fabriquait des cierges pour s'éclairer[22]. »

 
Le guetteur d'épaves dans les brisants de Kerlouan (carte postale ND Photo, début XXe siècle).

Le journal La Lanterne raconte ainsi les mêmes évènements :

« Le 2 novembre dernier, le vapeur Vesper était jeté à la côte de l'île d'Ouessant avec un chargement de quarante fûts de vin d'une contenance respective de 600 litres. Aussitôt les pêcheurs de s'élancer pour recueillir ces précieuses épaves, dépistant les douaniers qui ne savaient plus où donner de la tête. De la côte du Conquet à celle de Plouguerneau, c'est-à-dire sur une longueur de plus de 50 kilomètres, toutes les maisons étaient comme autant d'auberges où l'on donnait du vin à boire à discrétion. »

« Lorsqu'on sut que le vin était arrivé, les voisins furent convoqués et arrivèrent avec des récipients : pots, cruches, seaux, marmites, auges, et jusqu'à, proh pudor ! des vases de nuit qui furent remplis de vin. À Ouessant, à Molène, il y eut des scènes inénarrables : des hommes ivres avaient organisé des rondes autour des barriques éventrées. À Plouguerneau, une barrique s'étant engagée entre les rochers, on ne put la retirer ; elle fut mise en perce, et les pêcheurs, accourus en grand nombre, se collèrent à tour de rôle à la barrique. Les têtes s'échauffant, une bataille s'engagea entre les pêcheurs ; lorsque les douaniers arrivèrent, ce fut un tollé général. On allait tomber à bras raccourcis sur eux. Mais ils dégainèrent et mirent les pêcheurs en déroute. Des habitants qui avaient déclaré à l'Inscription maritime des fûts qu'ils avaient recueillis furent garrottés et leurs barriques vidées. Une femme de Plouguerneau buvant dans un fût y tomba et faillit se noyer. »

« À Kerlouan, les choses prirent une tournure comique. Un fût ayant été trouvé sur la grève, il fut éventré ; et comme les pêcheurs n'avaient pas de récipients, ils burent à pleins sabots. À Landéda, il y avait une noce. On mit deux fûts en perce, et le soir toute la noce était ivre. Bref, toute la contrée se grisa pendant huit jours[23]. »

Le , le brick Théodore, échoué depuis plusieurs jours sur un rocher de l'île de Quéménès dans l'archipel de Molène, finit par couler[24]. Avant qu'il ne coule, « huit pêcheurs des communes de Plouarzel et Lampaul ont été surpris au moment où ils procédaient au pillage du bateau. Les pilleurs d'épave ont été arrêtés »[25].

 
Pilleurs d'épaves condamnés en 1910 (journal L'Univers).

Un cantique breton ne dit-il pas :

Madame Marie de Molène
À mon île envoyez naufrage
Et vous Monsieur Saint Renan[26]
N'en envoyez pas un seulement
Envoyez-en deux, trois plutôt[27]

Cinéma et faits réels : le naufrage du SS politician sur l'île d'Eriskay

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L'échouage en pleine Seconde Guerre mondiale (1941) du vapeur SS (Steam Ship) Politician de l'armateur TJ Harrison, sur l'île écossaise d'Eriskay est passée à la postérité, la cargaison de ce navire étant des plus alléchantes pour la population locale, très pauvre et soumise aux rationnements du temps de guerre : 145 000 livres sterling de monnaie papier (plus de six millions au cours actuel) et surtout… 264 000 bouteilles de whisky[28].

Les îliens pillèrent allègrement le navire, utilisant mille subterfuges pour dissimuler les précieux flacons sans que le constable ou le juge de paix local ne fasse trop de zèle, ce qui indigna Charles Mac Coll, l'officier des douanes de Sa Majesté, lequel finit par obtenir l'autorisation de pétarder l'épave à l'explosif, à la grande fureur des insulaires d'Eriskay. L'écrivain Compton Mac Kenzie en tira une nouvelle humoristique, qui fut adaptée au cinéma par Alexander Mackendrick. Il s'agit d'une des meilleures comédies d'Ealing, intitulée Whisky à gogo ! (Whisky galore en V.O.), qui fut un succès planétaire au début des années 1950. Un peu partout des débits de boissons prirent le nom du film, notamment à Paris.

Les noms des lieux et du navire sont à peine transposés dans le film (tourné sur l'île de Barra dans les Hébrides du large[29]). Le navire est renommé SS Cabinet Minister (ministre d'État) et l'île reçoit le nom fictif de Todday, mais les figurants et les acteurs de second rang du film rendent une puissante impression de vérité… et pour cause, puisqu'il s'agit de non professionnels qui ont participé avec enthousiasme au tournage.

En 2013, un homme-grenouille local remonta de ce qui restait de l'épave deux bouteilles miraculeusement épargnées par les explosifs et l'action des vagues : bénéficiant de la légende créée autour de ce naufrage, elles atteignirent la très coquette somme de 12 050 livres lors d'une vente aux enchères chez Christie's.

Actualité du droit de bris

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Actuellement, la récupération de biens sur une épave est interdite en France (mais souvent pratiquée), l'inventeur du bien ne pouvant le récupérer qu'au terme d'une procédure complexe.

Concernant la récupération en eaux profondes des marchandises, l'invention du scaphandre autonome, rendant accessible assez facilement la zone des 50 m de profondeur (située dans la juridiction des eaux territoriales) a bouleversé la donne à partir du début des années 1950. En particulier, les épaves antiques de Méditerranée, et leurs gisements d'amphores romaines,sont devenues accessibles et elles ont longtemps relevé en France d'un vide juridique, car la loi Carcopino (datant du régime de Vichy, en 1941) n'avait envisagé que la protection des biens archéologiques terrestres.

C'est André Malraux, ministre de la culture, qui s'en émut et fut à l'origine d'une loi de protection des biens culturels engloutis, loi qui fut considérablement renforcée en 1989[30]. Les épaves modernes relèvent du droit commun mais la limite juridique entre les deux types de biens peut être floue, certaines épaves d'avions tombées au large de la Corse comme le bombardier B17 de Calvi ou le B25 d'Alistro ont été malheureusement la proie des chasseurs de souvenirs.

En 2019, 270 conteneurs passèrent par-dessus bord du MSC Zoe, et leur contenu, échoué sur la plage, fut récupéré par les résidents de Vlieland. Les autorités se sont montrées inquiètes à propos du sort de trois grandes caisses de peroxyde organique[31],[32].

Au Royaume-Uni, la récupération d'épaves est une tradition bien ancrée, comme en témoigne le film de 1950 d'Alexander Mackendrick Whisky à Gogo !, basé sur des faits réels (cf. supra).

Les biens échoués sur les côtes peuvent être récupérés après déclaration à un fonctionnaire de la Couronne britannique, le receiver of wrecks (receveur des épaves). En 2007, un navire porte conteneurs, le MSC Napoli, s'est échoué sur la côte du Devon et les conteneurs, mal arrimés (un problème récurrent dans le transport maritime conteneurisé) se sont échoués sur les grèves voisines. La population locale s'est ruée sur les conteneurs, récupérant notamment des parfums de luxe et de puissantes motos BMW 1200 cm3, flambant neuves, avec les clés sur le contact. La police, présente sur les plages n'a rien pu faire d'autre que de distribuer des feuillets rappelant l'obligation de déclaration au receiver of wrecks des objets récupérés avant de réussir à bloquer tout accès à la plage[33],[34],[35].

Il est possible d'acheter à la Couronne britannique les droits de sauvetage d'une épave moderne, même si la récupération des débris est économiquement non viable, ou d'être institué gardien d'une épave protégée (sans droit de remonter des artefacts)[36]; c'est ce que font certains centres de plongée sous-marine afin de se réserver officiellement l'exclusivité des plongées sur une épave pittoresque et facile d'accès.

Notes et références

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  1. Encyclopédie du dix-neuvième siècle, éditée par A. de Saint-Priest
  2. Nouvelle chronique de la ville de Bayonne, par Jean Baptiste Bailac
  3. Cabantous 1993.
  4. Annales de Bretagne et des pays de l'ouest, Anjou, Maine, Touraine, par l'Université d'Angers
  5. Code maritime ou lois de la marine marchande, administratives, de commerce, civiles et pénales, par Francia
  6. Élisabeth Courtot, Ouessant, chemins et légendes, Coop Breizh, 2012, (ISBN 978-2-84346-561-1)
  7. a et b Naufrageurs et pilleurs d'épaves, consultable http://www.wiki-brest.net/index.php/Naufrageurs_et_pilleurs_d%27%C3%A9paves
  8. Jean-Pierre Hirrien, « L’affaire du Neptune, janvier-avril 1792 », consultable http://www.plouguerneau.net/spip.php?article110
  9. René Ogor, « De la porcelaine de Chine au pays des naufrageurs », consultable http://scubaland.org/page_report9.html
  10. Jules Michelet, « Tableau de la France », paru dans La Revue des Deux Mondes, 1832
  11. Guy de Maupassant, « En Bretagne », article publié dans la Nouvelle Revue du
  12. Serge Duigou, L'Odet, plus belle rivière de France, éditions Palantines, 2010, page 101 (ISBN 978-2-35678-026-3)
  13. Journal des débats politiques et littéraires du 17 juin 1846, consultable sur Gallica
  14. (en) « Wreck Report for 'Tasmania', 1887 - PortCities Southampton », sur plimsoll.org (consulté le )
  15. Benjamin Chaix, « 1887 Le «Tasmania» sombre avec les bijoux d’un maharaja », tdg.ch,‎ (lire en ligne, consulté le )
  16. Le Tasmania sur YouTube
  17. Port de Plouguerneau
  18. Guillaume Joseph Gabriel de La Landelle, La Semaine des familles, Paris, n° du 27 avril 1867
  19. Alfred de Courcy, Les Français peints par eux-mêmes, tome 2, Philippart, Paris, 1876-1878, consultable sur Gallica
  20. Charles Géniaux, « Les Marins sauveteurs », Journal de la Jeunesse, 1911, consultable sur Gallica
  21. Journal Ouest-Éclair n°1559 du 2 novembre 1903, consultable sur Gallica
  22. Journal L'Extrême-gauche (Alliance radicale-socialiste) n° du 19 mars 1904, consultable sur Gallica
  23. Journal La Lanterne no 9715 du 28 novembre 1903, consultable sur Gallica
  24. Journal L'Humanité no 881 du 15 septembre 1906, consultable https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k251062p/f3.image.r=Ouessant.langFR
  25. Journal Le Figaro n° 251 du 8 septembre 1906, consultable https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k287470w/f4.image.r=Molene.langFR
  26. Saint Renan est le saint patron de Molène
  27. Cité par L'Universel. magazine hebdomadaire illustré, n° du 24 septembre 1903, consultable https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5782538p/f324.image.r=Molene.langFR
  28. (en-GB) « The true story behind Whisky Galore! », sur scotchwhisky.com (consulté le )
  29. « The Making of Whisky Galore! », sur whiskygalore.me.uk (consulté le )
  30. Colette Saujot-Besnier, « Chronique juridique : L'archéologie sous-marine et subaquatique », Revue Archéologique de l'Ouest, vol. 17, no 1,‎ , p. 239–243 (DOI 10.3406/rao.2000.1110, lire en ligne, consulté le )
  31. « Conteneurs perdus en mer du Nord : aux Pays-Bas, les habitants des îles viennent se servir en frigos, téléviseurs et sommiers échoués sur la plage », sur Franceinfo, (consulté le )
  32. « Conteneurs perdus en mer du Nord : du peroxyde organique retrouvé sur une île aux Pays-Bas », sur Franceinfo, (consulté le )
  33. « Les conteneurs du cargo échoué livrent leurs trésors sur la plage », sur Le Monde.fr (consulté le )
  34. « Grande-Bretagne : le pillage du "MSC-Napoli" a servi d'exutoire dans une région frappée par la précarité », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  35. « MSC Napoli: Les Britanniques face au pillage des conteneurs », sur Mer et Marine, (consulté le )
  36. (en) « accessing england's protected wreck sites », sur historicengland.co.uk,

Voir aussi

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Articles connexes

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Bibliographie

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  • Alain Cabantous, Les côtes barbares : pilleurs d'épaves et sociétés littorales en France, 1680-1830, Paris, Fayard, , 311 p. (ISBN 2-213-03055-3, présentation en ligne).
  • L.-A. Boiteux, La Fortune de mer, le besoin de sécurité et les débuts de l’assurance maritime, Paris, S.E.P.V.E.N., 1968, p. 32.
  • Joachim Darsel, « Les Seigneuries maritimes en Bretagne », Bulletin philologique et historique (jusqu’en 1610), Paris, 1966, vol. 1, p. 34-59.
  • Alexander H. Krappe, « Le Droit de Bris », The University of Toronto Law Journal, Toronto, University of Toronto Press, vol. 5, no 1,‎ , p. 113-132 (DOI 10.2307/824513, JSTOR 824513).
  • Laurence Moal, « À propos du droit de bris, un exemple de solidarité anglo-bretonne ? (Morlaix, 1501) », Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t. 134, 2005, p. 211-228.
  • Yves Pasquiou, Du droit d’épave, bris et naufrage, Paris, Libr. Arthur Rousseau éd., 1896.
  • Marcel Planiol, Histoire des institutions de la Bretagne, Rennes, nouvelle édition par Bréjon de Lavergnée, Mayenne, 1981- 1982, t. IV, p. 182-189.
  • Marcel Planiol, La Très Ancienne Coutume de Bretagne, 1896, Paris, Genève, rééd. Slatkine, 1984, p. 466-467.
  • Barthélémy-A. Pocquet du Haut-Jussé, « L’Origine des brefs de sauveté », Annales de Bretagne, t. LXVI, 1959, p. 255-262.
  • Henri Touchard, « Les Brefs de Bretagne », Revue d’histoire économique et sociale, t. XXXIV, 1956, p. 116-140.