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Marie-Élisabeth Joly

actrice française

Marie-Élisabeth Joly est une actrice française née le à Versailles et morte le à Paris.

Marie-Élisabeth Joly
Fonction
Sociétaire de la Comédie-Française
Biographie
Naissance
Décès
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Sépulture
Nationalité
Activités

Biographie

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Marie-Élisabeth naquit à Versailles, de père marchand quincailler à Paris (selon Paul Tissot), ou tailleur de théâtre (selon la notice de la mairie de Potigny). La mère était danseuse figurante à la Comédie-Française.

Tôt elle eut une vie de théâtre, et dès 7 ans elle joua des rôles de son âge : Louison dans Le Malade imaginaire puis Joas et aussi Attilius dans Régulus de Claude-Joseph Dorat.

Dès le mois de février 1778, Marie-Élisabeth, à peine âgée de seize ans, joua sur un théâtre particulier qui appartenait à Francastel, menuisier des Menus-Plaisirs du roi, les rôles de deux soubrettes, Finette dans Le Français à Londres, comédie de Louis de Boissy, et Dorine dans la Feinte par amour, comédie de Claude-Joseph Dorat ; puis la Marquise de Martigues dans l'Amant bourru, comédie de Monvel.

Vers l'âge de 18 ans, elle entra dans la troupe du Théâtre Montansier, en Normandie ; elle rencontra à l'occasion d'un séjour à Caen, le jeune capitaine Nicolas François Roland Fouquet Dulomboy, de la brigade des gendarmes du Dauphin, qui devint son époux.

Le renoncement (à près de 50 ans) de Madame Bellecour aux rôles de soubrettes, laissait l'emploi vacant à la Comédie-Française ; Marie-Élisabeth fut choisie pour lui succéder. Elle y débuta le 1er mai 1781 dans le rôle de Dorine, dans Le Tartuffe ou l'Imposteur. Friedrich Melchior Grimm, qui assistait à la représentation, est favorablement impressionné et il n'hésite pas à la comparer à Mademoiselle Luzy. Elle joue, au cours de cette même année 1781, les rôles de Lisette dans Le Tuteur de Dancourt et de Lisette dans La Métromanie d'Alexis Piron.

En 1782, prend le rôle d’Erminie, à la première de la pièce Les courtisanes, ou L'école des mœurs, comédie de Charles Palissot ; elle joua, cette même année, le rôle de Lisette dans Le Faux savant, de Jacques Du Vaure, puis de la femme de chambre Lisette dans Le jaloux sans amour, de Barthélemy Imbert.

Après deux années à la Comédie-Française, elle en devint sociétaire en 1783. Elle joue Miladi Splin (Milady Spleen) à la création de la pièce Le Conteur ou les Deux postes, comédie de Louis-Benoît Picard, le 4 février 1793 ; le graveur François Bonneville dessina et grava son portrait dans ce rôle.

En 1784, elle obtint un vif succès pour son jeu dans le rôle d’Orphise, la tante de Julie, dans La Coquette corrigée, comédie de Jean-Baptiste de La Noue. La même année elle joua le rôle de Constance, dans Inès de Castro, tragédie d'Antoine Houdar de La Motte

En 1785, ce furent les cadences infernales : le 11 janvier, devant la cour, elle joue l'esclave Fatmé dans Le Marchand de Smyrne, de Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort ; le surlendemain, le 13, elle joue Jacqueline dans Le Médecin malgré lui ; le 18 janvier elle joue la suivante Polly, dans Le Café ou l'Écossaise, de Voltaire, et le même jour Toinette, la suivante d'Isabelle, dans La Métamorphose amoureuse, comédie de Marc-Antoine Legrand.

La Cour en demandait toujours plus : le 25 janvier elle est l'intrigante Lisette dans L’Épreuve réciproque, de Marc-Antoine Legrand ; le 15 février, elle est la servante Nérine dans Le Joueur, de Dancourt et la servante Dorine dans Crispin médecin de Noël Lebreton de Hauteroche ; le 24 février, elle est Lisette dans La Pupille, de Barthélemy-Christophe Fagan ; le 1er mars, elle est la suivante Marine dans Le Port de Mer de Marc-Antoine Legrand ; le 3 mars, Andrée dans La Comtesse d'Escarbagnas ; le 8 mars, Marthon dans Les Deux Frères ; et pour finir le mois, la gouvernante d'Adélaïde, dans La Gageure imprévue de Michel-Jean Sedaine

Le 20 juin 1785, Marie-Élisabeth prend part à la première de Melcour et Verseuil, comédie d'André Murville. A l'automne 1785 les Comédiens-Français donnèrent sept représentations devant la Cour, à Fontainebleau ; le samedi 29 octobre, Marie-Élisabeth joue Rosette dans L'École des mères de Pierre-Claude Nivelle de La Chaussée et le vendredi 4 novembre, Cléantis dans Amphitryon de Molière.

La Comédie-Française créée, le 22 février 1788, L’Optimiste, ou l’homme toujours content, comédie de Jean-François Collin d’Harleville ; Mary Joly y joue Rose, la jeune suivante d'Angélique.

Le mercredi 7 janvier 1789, Marie Joly interprète Juliette à la première de la pièce de Fabre d'Églantine, Le présomptueux, ou L'heureux imaginaire ; son époux, jaloux, provoque un scandale indescriptible, et s'ensuit, sous les huées, l’arrêt des représentations ; le mari jaloux fit l'objet d'une plainte et d'un procès contre lui... ce qui n'empêcha pas Marie Joly et Fabre d’Eglantine de persévérer dans une liaison qui dura à peine une année[1]. La pièce ne put être représentée que le 20 février 1790, sans Marie-Élisabeth.

A sa création le 20 février 1789, elle est Justine, la femme de chambre d'Henriette, dans Les Châteaux en Espagne, comédie de Jean-François Collin d’Harleville .

Début 1790, elle joue, dans Le réveil d’Épiménide, comédie de Flins Des Oliviers, le rôle de madame Brochure, la vendeuse de journaux politiques ; le 23 janvier 1790, l'opéra-comique Les Trois Noces, paroles et la musique de Nicolas Dezède, fut créé à Paris, au Théâtre de la Nation ; Marie-Élisabeth y tenait le rôle de la Mère.

Elle joue dans Paméla ou La vertu récompensée, comédie de Nicolas François de Neufchâteau, créée le 1er août 1793, suspendue après huit représentations [2]. Dès lors, la situation des Comédiens-Français s'envenima ; ils furent arrêtés et enfermés, les hommes aux Madelonnettes, les femmes à Sainte-Pélagie, dans la nuit du 3 au 4 septembre 1793. La citoyenne Joly fut libérée le 15 nivôse an II (4 janvier 1794). Elle brûla aussitôt les planches : dix jours après son élargissement, elle joue Dorine dans Le Tartuffe, le lendemain, Finette dans Le dissipateur ou l'honnête-friponne, comédie de Philippe Néricault Destouches et trois jours plus tard, Toinette dans Le Malade imaginaire.

La Comédie-Française, devenue le Théâtre de l’Égalité, tente de se reconstituer et joue le 29 thermidor an II, sans lendemain ; la troupe se disperse. Elle se produit, le 6 vendémiaire de l'an III (27 septembre 1794), au Théâtre de la République où Marie-Élisabeth joue Pétronille dans Le Sourd, ou l'auberge pleine, comédie de Desforges. Au cours de l'an IV, l'on trouve sa présence au Théâtre de Lille.

Au début de l'an V, Mademoiselle Raucourt tente de reconstituer la Comédie-Française avec tous ses sociétaires ; la première représentation eut lieu le 5 nivôse avec Iphigénie en Aulide, par une troupe encore incomplète. Le même jour on y créa Les Deux sœurs, petite pièce de circonstance, du citoyen Laya, en un acte et en vers, écrite pour cette inauguration ; Marie Joly y jouait Thalie.

Au cours de l'automne de l'an V, gravement atteinte d'une maladie pulmonaire contractée à Sainte-Pélagie, elle abandonna les planches, n'y revenant que pour jouer L'Oracle, comédie de Germain François Poullain de Saint-Foix, avec ses deux filles ; la mère jouait la Fée ; la fille aînée était Alcindor et la cadette était Lucinde.

Elle mourut le 16 floréal an VI (5 mai 1798) à 11 heures du matin dans son appartement de la rue Helvétius à Paris. Elle fut inhumée le 15 prairial an VI (3 juin 1798) à Saint-Quentin-de-la-Roche. Son imposant tombeau est près de l'église de Saint-Quentin-de-la-Roche, commune aujourd'hui intégrée à Soumont-Saint-Quentin, dans le Calvados, sur une hauteur dénommée depuis mont Joly[3].

Portrait

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Ses contemporains dressent d'elle d’aimables portraits. Son époux d'abord:

« Un jour que dans une pièce allégorique l'on représentait cette muse de la Comédie, l'on fut tout à coup si absolument transporté de la réalité aux apparences, que l'on crut un instant que la déesse avait quitté le Parnasse pour embellir notre scène. La citoyenne Joly, douée d'un superbe organe, avait une figure fort agréable, un peu maigre, mais spirituelle, très mobile, très fine et très distinguée; sa chevelure d'un joli brun clair, sa taille assez haute, svelte et gracieuse, enfin, tout en elle au moral comme au physique, tout contribuait à produire dans ce rôle une illusion complète » [4].

Un autre contemporain, Ricord aîné, dit d'elle :

« Son physique était plus agréable que joli et ses yeux, d'une extrême vivacité, animaient la scène qu'elle n'oubliait jamais. Sa taille n'était pas grande et l'ensemble de sa personne avait plus d'élégance que de beauté » [5].

Son amant Fabre d'Églantine s'enflamme :

« La figure de Marie offre, au premier coup d’œil, un tout petit air chiffonné, un caractère de jeunesse, un ensemble piquant. L'esprit, la finesse, la mutinerie, la naïveté, la tendresse y dominent tour à tour; et telle en est la mobilité, que chacun de ses divers caractères se peint à la fois et distinctement sur son visage à des yeux différents. Le tour de ce visage n'a rien de régulier, tantôt rond, tantôt aminci... Marie a le front noble, découvert, bien arrondi, d'une proportion juste, uni et bombé; par un seul trait il s'élargit vers les tempes, où ses cheveux naturellement échancrés, laissent à découvert des petits rameaux de pourpre. De ce front, la nature a légèrement approfondi un trait de physionomie, entre les sourcils et jusqu'au nez. Le pinceau ne peut pas tracer un nez d'une forme plus fine et mieux choisie : ni aquilin, ni retroussé il tient alternativement de ces deux formes, au gré de l'expression que lui donne Marie... Plutôt grande que petite, sa bouche est pure et merveille, sa lèvre inférieure a je ne sais quoi de boudeur qui disparaît au moindre sourire. Alors c'est la bouche de la gaieté, dont le caractère malin est surtout sensible de profil. »[6]

Famille

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Nous ne connaissons pas la date exacte de son mariage avec Fouquet-Dulomboy ; nous avons connaissance d'un contrat de mariage de 1785, mais ses enfants naquirent bien avant[7].

Elle eut 5 enfants :

  • Marie Antoinette Fouquet-Dulomboy (1779 ou 1780-1830)
  • Marie Françoise Marguerite Julie Fouquet-Dulomboy (1780-1857)
  • Alexis Élisabeth Fouquet-Dulomboy (1785-1833)
  • Louise Françoise Victoire Fouquet-Dulomboy (vers 1787-1839)
  • Caroline Laure Fouquet-Dulomboy (1797-1831)

Nous savons ce que devinrent trois d'entre eux[8]:

  • Alexis Élisabeth, le fils, était propriétaire et professeur de peinture à Falaise, en 1831. C'est peut-être lui qui apparaît comme maire de Tassilly en 1828
  • La fille aînée, Marie-Antoinette, qui ressemblait beaucoup à sa mère, vive, intelligente, mais petite de taille, jouait les soubrettes ; elle débuta le 25 novembre 1798 à l'Odéon, dans Les Folies amoureuses, comédie de Jean-François Regnard
  • La cadette, Marie Françoise Marguerite Julie, jouait les ingénues.
Toutes deux parurent sur la scène de la Cité (après l'incendie de l'Odéon, en 1799), puis au Théâtre Louvois. En 1802, l'ainée, est soubrette au Théâtre Molière, et la cadette, jeune première à Rouen. En 1815, l'aînée demandait des débuts au Théâtre français ; on la jugea de trop petite taille pour tenir l'emploi des confidentes. Enfin en 1822-24, l'aînée habitait Brest, et la cadette Lons-le-Saulnier. Toutes deux étaient restées célibataires ; Marie-Antoinette eut un fils de père inconnu : Louis Marius Édouard Fouquet-Dulomboy.

L'on ne lui trouve qu'un frère devenu adulte ; les autres enfants étant morts en bas-âge :

  • Jacques Charles Jolly (ou Joly) (1765-1798)

Notes et références

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  1. Paul Tisseau dans son ouvrage, note 1 p.79, indique que la liaison daterait du début de l'année 1788, date à laquelle Fabre aurait eu aussi une liaison avec l'actrice Caroline Remy. Marie-Élisabeth semble rompre cette liaison au début de l'année 1789.
  2. La pièce ne fut remise au spectacle que le 6 thermidor an III (24 juillet 1795), avec Mademoiselle Lange dans le rôle de Paméla.
  3. « Marie-Élisabeth Joly, un monument du théâtre français », sur patrimoine-normand.com, Patrimoine normand (consulté le )
  4. Fouquet Dulomboy, Aux mânes de Marie-Élisabeth JOLY
  5. Alexandre Ricord, Les Fastes de la Comédie-Française, Paris , 1821, p. 278
  6. Correspondance amoureuse de Fabre d'Églantine, Hambourg & Paris, non daté, tome 1, p. 162
  7. Marie-Elisabeth Joly, sur Geneanet, consulté le 4 novembre 2024 [1]
  8. Dictionnaire des comédiens français, ceux d'hier, tome 2, par Henry Lyonnet, p. 228

Bibliographie

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Frontispice de l'ouvrage de Paul Tisseau, 1928
  • Friedrich Melchior Grimm, « Épitaphe d'un perroquet », mai 1781, dans Correspondance littéraire, philosophique et critique, par Grimm, Diderot, Raynal, Meister etc., comprenant outre ce qui a été publié, les fragments supprimés en 1813 par la censure, les parties inédites conservées à Gotha et à l'Arsenal à Paris, édité par Maurice Tourneux, tome 12, Paris : chez Garnier frères, 1880, pp. 506-507 (lire en ligne)
  • Nicolas François Roland Fouquet Dulomboy, Aux mânes de Marie-Élisabeth JOLY, artiste célèbre du théâtre français, Paris : imprimerie de Delance, an VII
  • Extrait d'un éloge de la citoyenne Joly, actrice du théâtre Français, prononcé au Lycée républicain, par le C. Sylvestre, dans La Décade philosophique, littéraire et politique, n° 4, du 10 brumaire, 1er trimestre an VII, Paris : Imprimerie des Sciences & des Arts, pp. 225-228 (En ligne)
  • Alexandre Ricord, « Mademoiselle JOLY », dans Les fastes de la Comédie française, et portraits des plus célèbres acteurs qui se sont illustrés, et de ceux qui s'illustrent encore sur notre théâtre, tome 1, Paris : chez Alexandre, chez Delaunay, chez Petit & chez Mougie, 1821, pp. 277-280 (Lire en ligne)
  • Henry Lumière, Marie Joly, sociétaire de la Comédie Française 1761-1798, extrait du Bulletin de la Société des Beaux-Arts de Caen, Caen : imprimerie H. Delesques, 1890, 28 pp., Paris : chez Tresse et Stock, 1891, 29 pp. & planches.
  • « Falaise : Le tombeau de Marie Joly », dans En flânant : A travers la France, Touraine, Velay, Normandie, Bourgogne, Provence, par André Hallays, Paris : chez Perrin & Cie, 1903, p. 278 (lire en ligne)
  • « JOLY, Me Marie, Elisabeth Jolly, dite », dans le Dictionnaire des comédiens français, ceux d'hier : biographie, bibliographie, iconographie, tome 2, par Henry Lyonnet, Genève : Revue Universelle Internationale Illustrée, non daté (entre 1902 & 1908), pp. 225-228 (Lire en ligne)
  • Paul Tisseau, Une comédienne sous la Révolution : Marie-Élisabeth Joly, sociétaire de la Comédie-Française, 1761-1798, préface de Frantz Funck-Brentano, Paris : Éditions de La Bonne Idée, 1928, 151 pp. Document utilisé pour la rédaction de l’article 
  • Pierre Efratas, Marie Joly : l'histoire extraordinaire d'une actrice normande de Louis XV à la Révolution, Bayeux : Éditions OREP, 2018, 64 pp.
  • Jérôme Garcin, « Marie-Elisabeth Joly (1761-1798) », dans Amazones : Femmes de cheval chez tous les peuples de la terre, depuis les temps les plus anciens jusqu’à nos jours, sous la direction de Jean-Louis Gouraud, Éditions Actes Sud, 2024

Liens externes

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