Kaiserbrief
La Kaiserbrief est la lettre rédigée par Otto von Bismarck, portée par le comte Holnstein à Louis II pour qu'il la recopie et la signe. Elle était destinée à reconnaître Guillaume Ier de Prusse comme Empereur d’Allemagne.
Genèse de la lettre
Les circonstances historiques de la genèse de la Kaiserbrief sont maintenant bien connues des historiens, mais il reste des points très controversés. Ce document si important dans la formation de l'Empire allemand est constitutionnellement douteux. Certains évoquent même une forme de corruption.
Les hésitations de Guillaume de Prusse
Guillaume n'envisage pas d'abord la possibilité de devenir Empereur d'Allemagne. Il se considère avant tout comme le roi de Prusse. D'autre part, les princes du sud de l'Allemagne ne semble pas disposés à accepter que Guillaume soit Empereur et reconnaître en lui un nouveau souverain. Enfin, l'initiative revient essentiellement à Bismarck et non aux parlements. Cependant, en 1848, l'Assemblée nationale de Francfort avait offert la couronne impériale à Frédéric-Guillaume IV de Prusse, le frère et prédécesseur de Guillaume. Mais à défaut de succession héréditaire, le titre d'Empereur ne peut être donné sans « le consentement libre des têtes couronnées, princes et villes libres d'Allemagne ». Bismarck doit donc convaincre à la fois Guillaume, des princes et des villes d'Allemagne et en particulier du roi de Bavière, considéré comme le deuxième dans la hiérarchie des princes de haut-rang qui se rallieront si Louis II donne son accord.
L'opposition de Louis II à la Prusse
Louis II, en poste depuis 1864, est un adepte de l'unification allemande mais dirigée par l'Empereur d'Autriche, avec un respect de la souveraineté de la Bavière. Louis II entre en guerre contre la Prusse avec la Saxe, Bade, Wurtemberg, Hanovre, Hesse-Darmstadt, Hesse-Cassel et Nassau comme alliés à côté de l'Autriche. Après la défaite de Sadowa, la Bavière est contrainte de payer des indemnités de guerre à Prusse (30 millions de florins) et admettre le commandement prussien de son armée en cas de conflit.
C'est ainsi que 55 000 soldats bavarois participent à la guerre franco-prussienne de 1870. À la fin du conflit Louis II déplore la défaite de la France et ne participe pas aux célébrations à Versailles de la victoire prussienne tandis que son gouvernement envisage de plus en plus la reconnaissance comme Empereur de Guillaume de Prusse.
Les problèmes financiers de Louis II
Louis II est, depuis le début de son règne, plus intéressé par la culture et l'architecture qu'aux affaires gouvernementales. Il suit en cela l'exemple de ses prédécesseurs Maximilien Ier et surtout son grand-père Louis Ier qui ont utilisé une grande partie du budget de l’État pour des améliorations à la résidence royale de Munich, mais aussi pour la promotion de l'art, l'éducation et la science. Pour la construction de ses châteaux, Louis II dépense son patrimoine à la limite du possible. Le prince d'Eulenberg-Hertefeld, secrétaire de l'ambassadeur de Prusse à Munich, décrit comment le roi a brisé les finances publiques et essaie en privé d'obtenir de l'argent de tous les côtés possibles, comme un prêt de 20 millions de florins des princes de Thurn et Taxis. Il contacte aussi, pour demander le l'argent, l'empereur d'Autriche, le roi des Belges, le roi de Suède, et même le Sultan de Turquie et le Shah d'Iran.
Les négociations
Le télégramme du comte Werthen
La situation financière e Louis II est préoccupante, en particulier sa fortune personnelle. Ce fait est bien connu de Bismarck et de son propre premier ministre. L'ambassadeur prussien, le comte Werthern, envoie le 19 novembre 1870 un télégramme à Bismarck :
« Très secret. Le roi de Bavière est confronté à de grandes difficultés financières à cause de ses constructions et théâtres. Six millions de florins lui serait très agréable, à condition que le ministre ne l'apprenne pas. Pour cette somme, il serait également décidé d'accepter la proclamation de l'Empire et de se rendre à Versailles. Dans ce but, le comte Holnstein parlera de cela avec son Excellence. »
Le 20 novembre 1870, Bismarck télégraphie au chef de la Chancellerie fédérale à Berlin, Rudolph von Delbrück :
« J'espère parvenir à un accord avec la Bavière. Si nous réussissons, il semble incontestable que la question de l'Empire sera résolue. »
L'accord avec la Bavière et le roi Louis II
Le 23 novembre 1870, à Versailles, Bismarck convient avec les représentants du gouvernement bavarois de l'adhésion du Reich allemand. Il fait quelques concessions : les postes, télécommunications et chemins de fer restent bavarois,ainsi que l'armée en temps de paix. Lorsqu'il est revient de la réunion, il dit : «Maintenant, l'accord avec la Bavière est achevé et signé. L'unité allemande est faite, et l'empereur aussi.» Ses collaborateurs trouve le contrat signé avec deux bouteilles de champagne vides.
Le comte Holnstein, confident et représentant personnel de Louis II se rend deux jours plus tard, le 25 novembre 1870 à Versailles, où il est immédiatement reçu par Bismarck, sans avoir pris contact avec les négociateurs bavarois. On ne connaît pas le contenu de la conversation, mais bien le résultat : un accord entre les parties. Le 26 novembre, Bismarck fait rédiger une lettre officielle à l'intention du président de l'administration de la chancellerie Rudolph von Delbrück concernant l'accord conclu avec les représentants du roi sur ses créances monétaires et le contenu de la future Kaiserbrief que Bismarck rédige lui-même. Au départ, Louis II devait venir personnellement à Versailles, mais il renonce. La lettre est confiée à Holntsein avec pour mission de la faire signer par le roi.
Le 30 novembre 1870, le roi souffre de névralgie dentaire et est alité. Maladie diplomatique ? Holnstein attend, des heures durant. À trois heures quarante-cinq, comme le roi ne semble pas aller mieux, il exige qu’on informe Sa Majesté qu'il doit repartir dans deux heures au plus tard pour Versailles et que le message du chancelier Bismarck est de la plus haute importance. Louis II, la tête couverte de linges reçoit Holnstein dans une chambre où l’on peut à peine respirer à cause de l’odeur du chloroforme. Louis II étudie le texte soin que le temps passe vite. Le sort de l’Allemagne est en jeu Mais impossible de revenir en arrière... Le roi se met à son bureau et recopie la Kaiserbrief, à peu de choses près :
« L’entrée de l’Allemagne du Sud dans la Confédération va étendre sur tous les États allemands les droits de présidence que possède Votre Majesté. J’ai déjà approuvé l’idée de leur réunion en une seule main dans la conviction que ce changement répondrait aux intérêts de la patrie commune et de tous les princes alliés ; ayant en même temps confiance que ces droits qui, d’après la constitution, sont l’apanage de la présidence fédérale, demeureront, après la restauration d’un Empire allemand et de la dignité impériale, les droits qu'exercera Votre Majesté au nom de la patrie entière en vertu de l’union des princes. En conséquence, je me suis tourné vers les souverains allemands pour leur proposer en ma compagnie d’inviter Votre Majesté à joindre le titre d’Empereur allemand à l’exercice des droits de la présidence fédérale. Dès que Votre Majesté et les souverains alliés auront fait connaître leur décision, je chargerai mon Gouvernement d’étudier et d’établir les conventions conformes à ces vues... »
Ensuite Louis II recopie un autre modèle, également préparé par Bismarck, pour le cabinet bavarois. Il s’agit d’informer les princes allemands du Sud. La lettre est une circulaire, un plaidoyer et un encouragement à approuver son initiative.
« Sérénissime Altesse, Les peuples allemands, unis depuis des siècles par la langue et les mœurs, les sciences et les arts, conduits à la victoire par l’héroïque Roi de Prusse, fêtent aujourd’hui une fraternité d’armes qui est l’éclatant témoignage de la puissance de l’Allemagne unie. Désireux de travailler de toutes mes forces à aider cette unité, je n’ai pas hésité à entrer en négociations avec la Chancellerie de la Confédération du Nord. Ces négociations viennent de se terminer récemment à Versailles. En conséquence, je me suis adressé aux souverains allemands et en particulier à Votre Majesté royale pour proposer en ma compagnie à Sa Majesté le Roi de Prusse de joindre le titre d’Empereur allemand à l’exercice des droits de la Présidence fédérale. Je suis fier à la pensée que ma situation en Allemagne et l’histoire de mon pays m’appellent, à ce qu'il me semble, à faire le premier pas pour le couronnement de l’œuvre de l’unité allemande. Et je me livre à l’espoir que Votre Majesté accueillera avec sympathie mon intervention... »
Le 18 janvier 1871, dans la Galerie des Glaces du palais de Versailles, Guillaume Ier est proclamé Empereur d’Allemagne.
Le comte Holnstein
Indemnités financières à Louis II
Le comportement du roi
Situation financière
- (de) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en allemand intitulé « Kaiserbrief » (voir la liste des auteurs).