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« Oiseau de mer » : différence entre les versions

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=== Paradoxe océanique ===
[[Fichier:Spindle diagram.jpg|vignette|upright=1.5|Évolution des vertébrés selon un diagramme axial représentant les cinq grandes [[Classe (biologie)|classes]] (poissons<ref>Avec plusieurs [[clade]]s : [[Agnatha|Agnathes]] (lamproies), [[Chondrichthyes|Chondrichthyens]] ([[requin]]s, [[raie]]s), [[Placodermes]] (fossiles), [[Acanthodii|Acanthodiens]] (fossiles), [[Osteichthyes|Osteichthyens]] (poissons osseux).</ref>, amphibiens, reptiles, oiseaux et mammifères). La largeur des axes indique le nombre de [[Famille (biologie)|familles]] dans chaque classe (les [[Teleostei|téléostéens]], poissons à squelette complètement osseux et à [[Actinopterygii|nageoires rayonnantes]], représentent 99,8 % des [[espèce]]s de poissons, et près de la moitié des espèces de vertébrés)<ref>« Systématique : ordonner la diversité du vivant », Rapport sur la Science et la technologie N°11, Académie des sciences, Lavoisier, 2010, p. 65</ref>. Le paradoxe océanique est qu'à peine plus de 3 % des oiseaux sont marins alors que les océans recouvrent les deux tiers du globe, et que les [[Origine de la vie|premières formes « vivantes »]] sont apparues il y a {{nombre|4|milliards}} d'années dans l'océan primitif.]]
Sur les {{Unité|10000 espèces}} d'oiseaux recensées dans le monde, 305 sont des oiseaux marins. Alors que l'[[océan mondial]] abrite la majorité des espèces vivantes sur Terre (50 à 80 % selon les estimations)<ref>{{Article|langue=en |auteur=Camilo Mora, Derek P. Tittensor, Sina Adl, Alastair G. B. Simpson, Boris Worm |titre=How Many Species Are There on Earth and in the Ocean? |périodique={{lang|en|Plos Biology}} |date=23 août 2011 |volume=9 |numéro=8 |pages= |doi=10.1371/journal.pbio.1001127}}.</ref>{{,}}<ref> {{Article|langue=en |auteur=Mark J. Costello , Philippe Bouchet, Geoff Boxshall, Kristian Fauchald, Dennis Gordon, Bert W. Hoeksema, Gary C. B. Poore, Rob W. M. van Soest, Sabine Stöhr, T. Chad Walter, Bart Vanhoorne, Wim Decock, Ward Appeltans |titre=Global Coordination and Standardisation in Marine Biodiversity through the World Register of Marine Species (WoRMS) and Related Databases |périodique=Plos One |date=9 janvier 2013 |volume=8 |numéro=1 |pages= |doi=10.1371/journal.pone.0051629}}.</ref>, seulement 3 % des espèces d’oiseaux recensées sur la planète l'ont colonisé. Ce rapport paradoxal est imputable à l'action combinée de trois principaux [[Facteur limitant|facteurs limitants]] : uniformité du milieu marin qui offre une gamme limitée de [[Niche écologique|niches écologiques]] ([[Principe de Gause|principe d'exclusion compétitive]]), manque de sites disponibles pour la [[nidification]], grande mobilité de ces oiseaux, ce qui favorise leur [[Dispersion (biologie)|dispersion]] à grande échelle et freine les processus de [[spéciation]]<ref>{{Ouvragesfn|auteur1=Christophe Barbraud|auteur2=Fabrice Genevois|titre=Oiseaux marins. Entre ciel et mers|éditeur=éditions Quæ|année=2015|passagep=19-20}}.</ref>.
 
=== Distribution ===
La [[Distribution (biologie)|distribution]] des oiseaux marins est en grande partie conditionnée par la température de surface des océans : {{nombre|191|espèces}} se répartissent dans les zones tempérées<ref>Les eaux tropicales sont les plus [[Productivité primaire|abondantes en nutriments]] en raison d'une teneur moins forte [[dioxyde de carbone]] dissous (base de la [[photosynthèse]] [[phytoplancton]]ique), et d'eaux [[Stratification de l'eau|fortement stratifiées]].</ref>, 81 dans les zones tropicales et 29 dans les zones polaires<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p. =27-28</ref>}}. Si l'écologie des oiseaux des zones arctiques et antarctiques explique leur faible [[biodiversité]] (éloignement des sources de nourriture dû à la [[banquise]], climat rude imposant des adaptations spécifiques), les effectifs au sein de chaque espèce peuvent toutefois être importants : colonies de manchots qui peuvent atteindre le million de couples avec une population totale évaluée entre quarante et quatre-vingts millions d'individus, les [[Mergule nain|Mergules nains]] sont les oiseaux marins les plus abondants de l'Arctique<ref>{{Ouvrage|auteur1=Jacques Blondel|titre=Oiseaux et changement global|éditeur=[[Éditions Quæ|Quae]]|année=2015|passage=107|lire en ligne={{Google Livres|4e4iCwAAQBAJ}}}}.</ref>.
 
=== Histoire évolutive ===
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Les fossiles d'oiseaux primitifs les plus anciens connus sont ceux d'oiseaux de mer [[Oiseaux inaptes au vol|inaptes au vol]] du [[Crétacé]] il y a {{nombre|100|millions}} d'années. Faisant partie du [[clade]] des [[Hesperornithes]], ils ont des mâchoires garnies de dents et sont sans doute la plupart des oiseaux plongeurs grâce à leurs [[Palette natatoire|ailes atrophiées]] comme les [[Sphenisciformes|manchots]] actuels<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Irby J. Lovette|auteur2=John W. Fitzpatrick|titre=Handbook of Bird Biology|éditeur=[[John Wiley & Sons]]|année=2016|passage=38-39|lire en ligne={{Google Livres|OiaNDAAAQBAJ}}}}.</ref>
 
Une hypothèse spéculative propose que la {{lien|fr=vol des oiseaux|lang=en|trad=Bird flight|texte=technique du vol des oiseaux}} aurait été inventée par un ancêtre marin, considérant ainsi que les oiseaux ont colonisé les océans avant même de maîtriser le vol aérien<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p. =17</ref>}}.
 
Au [[Miocène]], à la suite de changements de facteurs environnementaux externes (température, oxygène), une [[radiation évolutive]] conduit à une explosion de [[biodiversité]] et à l'apparition de toutes les grandes familles d'oiseaux marins modernes il y a {{nombre|20|millions}} d'années<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p. =19</ref>}}.
 
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[[Image:Antarctic Prion flying over the South Atlantic (5543714379).jpg|vignette|Le bon [[camouflage]] du [[prion de la Désolation]] lui permet d'échapper à la vigilance de ses [[prédateur]]s en mer ([[labbe]]s, [[pétrel]]s).]]
 
La caractéristique la plus évidente du plumage des oiseaux de mer est l'absence générale de couleurs vives et de [[dichromatisme sexuel]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Donald L. J. Quicke|titre=Mimicry, Crypsis, Masquerade and other Adaptive Resemblances|éditeur=[[John Wiley & Sons]]|année=2017|passage=309|lire en ligne={{Google Livres|EEkzDwAAQBAJ}}}}.</ref>. Quelques espèces sont certes colorées, mais les couleurs vives sont des [[caractères sexuels secondaires]] (colorations céphaliques le plus souvent portées par le bec {{Incise|[[macareux]] ou [[goéland]]s}}, des plumes ornementales ou une plaque orangée disposée de chaque côté de la mandibule inférieure chez le manchot royal et le manchot empereur ; les pattes chez les [[Sulidae|fous]] ou les [[Mouette scopuline|mouettes]])<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p.=76</ref>}} ou des structures particulières comme la [[poche gulaire]] — dépourvue de plumes — des [[Fregatidae|frégates]]. Le plumage proprement dit est presque systématiquement une combinaison de teintes blanches, noires, grises ou brunes (telles que l'on peut le voir sur les [[pingouin]]s), présentant une dissymétrie (noir-gris sur le dos, blanc en dessous) qui résulte de [[convergences évolutives]]<ref>{{en}} R.W. Storer, Evolution in the diving birds. Proceedings of the XII International Ornithological Congress, (eds. G. Bergman, K.O. Donner and L.V. Haartman), 1958, p. 694-707</ref>. Les rares exceptions à cette règle concernent de petits toupets de plumes dorées sur la tête de certains manchots ([[Gorfou du Fiordland|gorfous]]) ou [[alcidé]]s du Pacifique ([[macareux huppé]]).
 
Depuis la seconde moitié du {{s-|XIX}}, les [[naturaliste]]s se sont interrogés sur la signification de ce contraste dorsi-ventral : [[thermorégulation]], résistance à l'abrasion mécanique, camouflage, [[Théorie du signal (biologie)|signalisation sociale]] ? L'interprétation la plus classique (proposée déjà par [[Charles Darwin|Darwin]] en 1859, [[Alfred Russel Wallace|Wallace]] en 1877, [[Edward Bagnall Poulton|Poulton]] en 1888<ref>{{Article|langue=en|auteur=E.B Poulton|titre=Notes in 1887 upon Lepidopterous larvae|périodique=Trans. Entomol. Soc. Lond|date=1888|volume=36|numéro=4|pages=515-606|doi=10.1111/j.1365-2311.1888.tb01317.x}}.</ref> pour qui la [[Ombre inversée|contre-tonalité]] est une des [[Adaptation (biologie)|adaptations-clés]] parmi les stratégies de [[Camouflage|dissimulation]]) avance l'idée qu'il s'agirait là de [[Homochromie|colorations cryptiques]] permettant une sorte de [[camouflage]] par [[ombre inversée]] vis-à-vis à la fois de leurs prédateurs et de leurs proies. En 1936, l'ornithologue américain [[Robert Cushman Murphy]] fait remarquer, dans son livre ''{{Langue|en|texte=Oceanic Birds of South America}}'', que le [[prion de la Désolation]] se confond parfaitement avec la mer, grâce à la teinte gris bleuté de son dos et du dessus de ses ailes. Il pensa que cette couleur « serait un parfait [[Camouflage (militaire)|camouflage]] pour les navires militaires. Malheureusement, il ne fut pas pris au sérieux et ce n'est que plus tard que la peinture qui recouvre aujourd'hui les navires de l'[[US Navy]] fut spécialement élaborée en prenant pour modèle la teinte si particulière des prions<ref name="Genevois">{{Ouvragesfn|auteur1=Fabrice Genevois|auteur2=Christophe Barbraud|titre=Oiseaux marins. Entre ciel et mersGenevois|éditeur=Editions Quae2015|passagep=74|lire en ligne={{Google Livres|xp4cCgAAQBAJ}}}}.</ref> ». Cette teinte n'est d'ailleurs pas uniforme : une ligne plus noire (présente également chez des pétrels et des mouettes) a probablement pour fonction de renforcer le camouflage en « cassant » la silhouette de ces oiseaux<ref name="{{sfn|Barbraud|Genevois"/>|2015|p=74}}. La coloration noire est due à un pigment, la [[mélanine]], utilisé de manière sélective chez les oiseaux pour créer des formes de [[coloration disruptive]] et [[cryptozoologie|cryptique]] (taches grises ou noires permettant la formation de barres, rayures, tâches, intercalées avec des régions de plumes non colorées) leur permettant de se confondre avec les fonds marins. La présence de mélanines dans l'extrémité des rémiges primaires a quant à elle pour fonction de mieux protéger cette partie particulièrement exposée à l'abrasion mécanique<ref>{{Chapitre |langue= en |auteur1= Edward H. Burtt|titre chapitre= Tips on wings and other things|auteurs ouvrage= E. H. Burtt|titre ouvrage= The Behavioral Significance of Colour |éditeur= STPM Press|année=1979|passage=75-125 }}</ref>. Selon Simmons, la coloration uniforme noire des [[Phalacrocoracidae]] ([[cormoran]]s) est un camouflage agressif, ces espèces chassant préférentiellement des poissons et invertébrés [[benthique]]s où la lumière est réduite par les [[macrophyte]]s et les sédiments en suspension<ref>{{Article|langue=en|auteur=K. E. L. Simmon|titre=Some adaptive features of seabird plumage types|périodique=British Birds|date=1972|volume=65|pages=465– 479}}.</ref>. Par ailleurs, la coloration presque systématiquement blanche du ventre de ces oiseaux [[piscivore]]s aurait une valeur adaptative, en les rendant moins visibles (confusion avec la lumière ambiante à travers la [[fenêtre de Snell]]) pour les poissons dont ils se nourrissent<ref>Tests expérimentaux par le photographe G. Phillips dès 1964. Cf {{en}} G. Phillips, « The coloration of sea birds », ''Triton Magazine'', 1964.</ref>. Ce scénario adaptatif doit être nuancé car s'il existe quelques cas de plumage blanc ayant un rôle dans le camouflage ([[Mouette ivoire]], [[pétrel des neiges]]), la communication et la thermorégulation, les hypothèses relèvent parfois d'interprétations [[Adaptationnisme|adaptationnistes]] du mimétisme. Enfin, le plumage blanc est le plumage par défaut chez les oiseaux qui minimisent ce coût de production de pigments qui ne sont pas essentiels pour le vol, la [[photoprotection]] ou l'étanchéité<ref>{{Article|langue=en|auteur=W. L N. Tickell|titre=White Plumage|périodique=Waterbirdss: The International Journal of Waterbird Biology|date=mars 2003|volume=26|numéro=1|pages=1-12|url texte=http://cescos.fau.edu/gawliklab/papers/TickellWL2003.pdf}}.</ref>.
 
===== Étanchéité =====
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{{Citation|L’utilisation des ailes à la fois pour le vol et pour la nage soulève un conflit [[biomécanique]] du fait des pressions propres à chaque milieu s’exerçant sur une morphologie d’aile unique. En effet, un vol efficace en milieu marin semble s’accorder plutôt avec une aile relativement longue et pointue, de faible [[charge alaire]] et d’allongement élevé. La densité de l’eau est, elle, égale à 850 fois celle de l’air ; la production de force en est modifiée, la [[Portance (aérodynamique)|portance]] et la [[traînée]] atteignent des valeurs 4 fois plus élevées que dans les airs. Les contraintes biomécaniques s’exerçant sur l’ossature et les plumes sont augmentées, tout comme le coût énergétique de la contraction musculaire. Il est alors plus intéressant dans ce milieu de disposer d’une aile courte d’allongement élevé, alors plus favorable pour atteindre des vitesses de plongée élevée à moindre coût<ref>Vincent Roinac, [http://oatao.univ-toulouse.fr/1555/1/picco_1555.PDF Adaptation du vol à la prédation chez certains oiseaux chasseurs et pêcheurs], Thèse d'exercice, Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse - ENVT, 2004, p. 109.</ref>}}.
 
La forme générale des ailes des oiseaux de mer résulte ainsi d'un compromis biomécanique et se décline en quatre grands modèles avec des propriétés [[aérodynamique]]s spécifiques : des ailes longues et effilées adaptées au [[vol plané]] (albatros, pétrels, frégates, fous, phaethons, goélands, sternes et labbes) ; des ailes longues et larges adaptées au vol à voile par [[ascendance thermique]] (pélicans) ; des ailes courtes et larges adaptées à un vol battu bas sur l'eau mais puissant ([[cormoran]]s) ; des ailes courtes et étroites adaptées au plongeon ([[Alcidés]] tels que les [[pingouin]]s, [[macareux]], et [[Procellariiformes]] tels que les [[puffinure]]s)<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p.=63-64</ref>}}.
 
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[[Fichier:DefecatingSeagull.jpg|vignette|[[Goéland argenté]] en train de [[Défécation|déféquer]] ses [[fiente]]s en plein vol<ref>Ces fientes résultant d'un mélange d'[[urine]] et de [[fèces]] au niveau du [[Cloaque (anatomie)|cloaque]], sont liées à l'absence de [[vessie|vessie urinaire]] chez les [[oiseau]]x, laquelle peut être interprétée comme une {{lien|fr=Vol chez les oiseaux|lang=en|trad=Bird flight|texte=adaptation au vol}} (les organes les plus lourds étant rassemblés au centre du corps). Elles sont composées d'urine liquide très concentrée (économie d'eau, adaptation à la [[Sortie des eaux|conquête des airs]]), d'[[acide urique|acides uriques]] ([[Précipité|précipitant]] sous forme d'[[urate]]s, sels d'acide urique qui protègent les [[Néphron|tubules rénaux]] de la [[Cristallogenèse|cristallisation]] de ces acides) et de fèces. Les urates forment cet enduit blanchâtre qui recouvre les [[matière fécale|excréments]] aviaires et correspondent aux [[Excrément|déchets azotés]] chez ces animaux (ces déchets formant une substance pâteuse blanchâtre plus importante chez les oiseaux de mer dont le [[régime alimentaire]] est plus riche en [[protéine]]s). Cf {{Ouvrage|auteur1=[[Paul Géroudet]]|titre=Les passereaux et ordres apparentés|éditeur=[[Delachaux & Niestlé]]|année=1951|passage=113}}, et {{Ouvrage|langue=en|auteur1=E. A. Schreiber, Joanna Burger|titre=Biology of Marine Birds|éditeur=[[CRC Press]]|année=2001|passage=475|lire en ligne={{Google Livres|iI69BwAAQBAJ}}}}</ref>.]]
[[Fichier:Klepto.JPG|vignette|La [[Frégate du Pacifique]] est une espèce encline au [[cleptoparasitisme]], chassant occasionnellement d'autres oiseaux, ici un [[Fou à pieds rouges]], pour voler les proies attrapées par ce dernier.]]
Les oiseaux marins sont tous zoophages mais montrent une diversité de régimes alimentaires (disparité géographique selon les zones polaires, tempérées et tropicales, disparité saisonnière…)<ref>Christophe Barbraud, {{opcitsfn|Barbraud|Genevois|2015|p=139}}, p.139</ref>. Ils ont une [[Métabolisme de base|dépense énergétique quotidienne]] élevée, en lien avec leur adaptation à la vie dans des milieux ouverts et ventés. Ce mode de vie augmente les besoins énergétiques liés à la [[thermorégulation]] et implique de consacrer un temps important à la [[recherche de nourriture]]<ref>{{Article|langue=en|auteur=Marcel Kersten, Theunis Piersma|titre=High levels of energy expenditure in shorebirds: metabolic adaptations to an energetically expensive way of life|périodique=Ardea|date=1987|volume=75|numéro=2|pages=175-187|doi=10.5253/arde.v75.p175|url texte=https://www.nps.gov/goga/learn/management/upload/-1975-Kersten-and-Piersma_1987_shorebird-metabolism.pdf}}.</ref>. {{Citation|À eux seuls, ils consomment annuellement 70 millions de tonnes de poissons, céphalopodes et crustacés dans les océans du globe, chiffre comparable aux prises annuelles de l'ensemble des [[pêcherie]]s mondiales}}. En raison de leurs effectifs, les [[Sphenisciformes|manchot]]s et les [[Procellariiformes]] ([[pétrel]]s et [[Diomedeidae|albatros]]) prélèvent près des deux tiers de ces 70 tonnes<ref>Christophe Barbraud, {{opcitsfn|Barbraud|Genevois|2015|p=137}}, p.137</ref>.
 
La distance de prospection variable permet de distinguer les espèces côtières (cormorans, pélicans, sternes, mouettes et goélands) qui s'approvisionnent à moins de {{Unité|20 km}} du littoral ; les espèces [[Zone néritique|néritiques]] (nombreux manchots, sternes, pingouins, [[starique]]s, [[Morus (oiseau)|fous]]) qui pêchent au-dessus du [[Plateau continental (géophysique)|plateau continental]] (de largeur moyenne de {{Unité|74 km}}) très riche en proies, pendant deux ou trois jours maximum avant de revenir dans leurs colonies à terre ; les espèces océaniques ou [[pélagique]]s (albatros, puffins et pétrels, manchot royal, phaéthons, frégates) qui prospectent en haute mer (au-delà du plateau continental) pendant plusieurs semaines<ref>La technologie utilisée pour étudier la [[migration des oiseaux]] ([[balise Argos]], [[Global Positioning System|GPS]], [[Global location sensor|géolocateur]]) sert désormais à analyser le comportement en mer des oiseaux marins et permet d'obtenir des données impressionnantes. {{Citation|Entre le début et la fin d'un cycle reproducteur qui s'étale sur près d'un an, un [[albatros hurleur]] passe 80 % de son temps en mer et effectue 70 voyages alimentaires à partir de la colonie, parcourant une distance cumulée de {{Unité|155000 km}}… à la fin de ses 50 années d'existence en moyenne, un albatros hurleur aura parcouru environ 8,5 millions de kilomètres, soit 22 fois la distance entre la Terre et la Lune}}. Cf. Christophe Barbraud, {{opcit}}, harvsp|Barbraud|Genevois|2015|p.=146}}</ref>.
 
La [[Compétition intraspécifique|compétition intra]] et [[Compétition interspécifique|interspécifique]] peut induire des comportements de [[cleptoparasitisme]]. Véritables « pirates des mers », les frégates et les labbes harcèlent d'autres oiseaux de mer pour les faire régurgiter. Les goélands et sternes tente aussi de dérober les proies d'autres oiseaux. Cet opportunisme alimentaire joue un rôle de complément aux [[Régime alimentaire|régimes alimentaires]] classiques<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=E. A. Schreiber, Joanna Burger|titre=Biology of Marine Birds|éditeur=[[CRC Press]]|année=2001|passage=160-161}}.</ref>. Le [[Pétrel géant]], le [[pétrel de Hall]], les [[labbe]]s et les [[goéland]]s se font [[charognard]] à l'occasion<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p.=69 et 140</ref>}}
 
=== Dépendance du milieu marin ===
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* la [[monogamie]] liée à la nécessité du [[Investissement parental|soin parental]], la fidélité corrélée à la longévité en raison de grandes distances à parcourir<ref>{{Article|langue=en|auteur=DW. Mock, M. Fujioka|titre=Monogamy and long-term pair bonding in vertebrates|périodique=Trends in Ecology & Evolution|date=février 1990|volume=5|numéro=2|pages=39-43|doi=10.1016/0169-5347(90)90045-F}}</ref>. Si la monogamie est la règle, les {{lien|fr=Copulation extra-conjugale|lang=en|trad=Extra-pair copulation|texte=copulations extra-conjugales}} sont fréquentes : chez l'[[Albatros des Galapagos]], jusqu'à 25 % des familles ont des poussins illégitimes<ref>{{Article|langue=en|auteur=Kathryn P. Huyvaert & Patricia G. Parker|titre=Extra-pair paternity in waved albatrosses: genetic relationships among females, social mates and genetic sires|périodique=Behaviour|date=2010|volume=147|numéro=12|pages=1591-1613}}.</ref>.
* la nécessité du retour à terre ([[oviparité]])
* l'[[Incubation (zoologie)|incubation]] effectuée par la femelle comme le mâle (l'exception notable étant le [[manchot empereur]] dont le mâle prend seul en charge l'incubation de l'œuf pendant plus de deux mois sur la [[banquise]]), généralement grâce à une [[plaque incubatrice]], a des durées variables : un mois pour les petites espèces (goélands), 2 mois pour les moyennes (fous, frégates), jusqu'à 80 jours pour les espèces imposantes (albatros)<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p.=115-116</ref>115}}. L'élevage pour ces espèces varie de 2 mois à un an pour le [[manchot royal]] et la [[frégate du Pacifique]]<ref name="Barbraud p95">Christophe Barbraud, {{opcitsfn|Barbraud|Genevois|2015|p=95}}, p.95</ref>
* la reproduction coloniale (plus de 95 % des espèces des oiseaux marins se reproduisent au sein de colonies contre 13 % chez les oiseaux terrestres)<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[David Lack]]|titre=Ecological Adaptations for Breeding in Birds|éditeur=[[Methuen (maison d'édition)|Methuen]]|année=1968|passage=138}}.</ref>. Rolland et al ont montré que la colonialité<ref>[[Trait de vie]] à travers lequel les individus forment des groupes larges et denses durant la période de reproduction et où le site de nidification est disjoint de la zone d’alimentation.</ref> des oiseaux précède leur passage en milieu marin dont l'exploitation semble particulièrement difficile pour des individus solitaires<ref name="Danchin">{{Article|langue=en|auteur=Cecile Rolland, Etienne Danchin and Michelle de Fraipont|titre=The evolution of coloniality in birds in relation to food, habitat, predation, and life-history traits: A comparative analysis|périodique=The American Naturalist|date=1998|volume=151|numéro=6|pages=514-529|doi=10.1086/286137}}.</ref>. Cette colonialité permet de [[Évolution des défenses anti-prédation|diminuer la pression de prédation]] (dilution de la prédation sur un grand nombre d’individus, plus grande efficacité de la [[Investissement parental|protection parentale]] par une défense collective)<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=E. A. Schreiber, Joanna Burger|titre=Biology of Marine Birds|éditeur=[[CRC Press]]|année=2001|passage=93}}</ref>, bénéfice supérieur aux coûts liés à la [[Compétition (biologie)|compétition]] pour les ressources<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Nicholas E. Collias|auteur2=Elsie C. Collias|titre=Nest Building and Bird Behavior|éditeur=[[Princeton University Press]]|année=2014|passage=122-126}}.</ref>, au [[parasitisme de couvée]]<ref>{{en}} Collias, p. 131-141</ref>, à une plus forte exposition aux épidémies et aux parasites<ref>{{Article|langue=en|auteur=Charles R. Brown et Mary Bomberger Brown|titre=Empirical Measurement of Parasite Transmission Between Groups in a Colonial Bird|périodique=Ecology|date=2004|volume=85|numéro=6|pages=1619-1926|doi=10.1890/03-0206}}.</ref> ainsi qu’au [[cannibalisme]]<ref>{{Article|auteur=Etienne Danchin et Richard H. Wagner|titre=The Evolution of Coloniality: The Emergence of New Perspectives|périodique=Trends in Ecology & Evolution|date=1997|volume=12|numéro=9|pages=342-347|doi=10.1016/S0169-5347(97)01124-5}}.</ref>. D'autres hypothèses suggèrent que les colonies sont un {{lien|fr=Hypothèse du centre d'information|lang=en|trad=Information centre hypothesis|texte=centre d'information}} (échange d'informations pour la recherche de nourriture) et que l'évolution de la colonialité serait liée non pas directement aux bénéfices de la vie en colonie mais aux stratégies convergentes de [[Habitat (écologie)#Sélection de l'habitat|sélection d'un habitat]] de qualité commun à tous les individus<ref name="Danchin"/>.
 
=== Profil démographique ===
Les principaux paramètres du profil démographique des oiseaux de mer découlent d'une [[Modèle évolutif r/K|stratégie de reproduction K]] et sont, comme les vautours, une [[maturité sexuelle]] différée (4 ans chez les strens, 9 ans chez les albatros)<ref>Christophe Barbraud, {{opcitsfn|Barbraud|Genevois|2015|p=109}}, p.109</ref>, une [[fécondité]] limitée (beaucoup d'espèces ne pondent qu'un seul [[Œuf amniotique|œuf]]<ref>Albatros et pétrels, frégates, phaethons, majorité des pingouins, deux manchots ([[manchot empereur]] et [[manchot royal]], quelques sternes, certains goélands</ref>, parfois deux ou trois, la ponte pouvant exceptionnellement comporter quatre ou cinq œufs chez les cormorans)<ref>Christophe Barbraud, {{opcitsfn|Barbraud|Genevois|2015|p=46}}, p.46</ref> associée à une faible fréquence de reproduction (reproduction généralement une seule fois par an, reproduction biennale chez certains albatros, chez le [[pétrel de Lesson]] et des frégates). Cette très faible [[fécondité]] et la [[maturité sexuelle]] tardive sont compensées par une [[longévité]] élevée, variant en moyenne entre 7 et 34 ans selon les espèces<ref name="Genevois_49">{{ouvragesfn|Barbraud|auteur=Fabrice Genevois|titre=Oiseaux marins: Entre ciel et mers2015|éditeur=Quæ|date=2020|passagep=49}}</ref>. L'[[espérance de vie]] moyenne des sternes atteint 10 ans, celle des pétrels 26 ans et des albatros 34 ans)<ref>Christophe Barbraud, {{opcit}}, sfn|Barbraud|Genevois|2015|p.=48-50</ref>}}. L'[[albatros hurleur]] a ainsi une longévité moyenne de 32 ans, mais il peut atteindre une espérance de vie théorique<ref>Valeur théorique basée sur le calcul des {{lien|fr=taux de survie|lang=en|trad=Survival rate}}, c'est-à-dire la fraction d'une population adulte non affectée par la mortalité l'année suivante.</ref> de 80 ans<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=H. Resit Akcakaya, Mark A. Burgman, Oskar Kindvall, Chris C. Wood, Per Sjogren-Gulve, Jeff S. Hatfield, Michael A. McCarthy|titre=Species Conservation and Management|éditeur=[[Oxford University Press]]|année=2004|passage=421}}.</ref>. Le record de longévité est détenu par une femelle [[albatros de Laysan]], [[Wisdom (albatros)|Wisdom]], âgée de 70 ans en 2021 (record pour un oiseau dans la nature, certains perroquets en captivité dépassant 80 ans)<ref name{{sfn|Barbraud|Genevois|2015|p="Genevois_49"/>49}}.
 
== Menaces et conservation ==
Les populations d'oiseaux marins ont diminué de 69,7% entre 1950 et 2010, en raison principalement de la dégradation des écosystèmes marins imputable à l'espèce humaine<ref>http://www.seaaroundus.org/doc/publications/chapters/2014/Booth-et-al-Greenland.pdf</ref>. 46 % des espèces d'[[Déclin des populations d'oiseaux|oiseaux marins sont en déclin]] (chasse<ref>Le [[Cormoran de Pallas]] et le [[Grand Pingouin]] sont ainsi deux [[Espèce disparue|espèces exterminées par l'homme]].</ref>, victimes de la [[pêche industrielle]]<ref>Captures lors de certaines pêches à la [[palangre]].</ref>, de la [[pollution marine]]<ref>[[Marée noire]], [[contamination du milieu marin par les plastiques]] responsable de la mortalité de poussins par [[occlusion intestinale]], [[pollution chimique]] par les [[métaux lourds]], les [[Polluant organique persistant|polluants organiques persistants]], les plastiques ([[plasticose]]).</ref>, des [[espèces introduites]]<ref>Introduction de chats et de souris qui déciment les nids de poussins.</ref> et du [[changement climatique]]<ref>L'augmentation de la température des eaux de surface influe sur la disponibilité des proies, ce qui entraîne des déclins et parfois une expansion. Par exemple le réchauffement graduel de l'océan Atlantique Nord depuis les années 1930 perturbe la [[chaîne alimentaire]], favorisant l'expansion du [[maquereau commun]] au détriment des [[Lançon (poisson)|lançon]]s, ce qui favorise le [[fou de Bassan]] au détriment du [[macareux moine]].</ref>), 28 % sont [[Liste rouge de l'UICN#Espèce en danger (EN)|en danger]] (inscrites sur la [[liste rouge de l'UICN]])<ref name="{{sfn|Barbraud p95" />|Genevois|2015|p=95}}.
 
=== Fluctuations naturelles ===
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== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
* {{Ouvrage|auteur1=Christophe Barbraud|auteur2=Fabrice Genevois|titre=Oiseaux marins. Entre ciel et mers|éditeur=éditions Quæ|année=2015|pages totales=200|lire en ligne={{Google Livres|YokjCwAAQBAJ}}}}.
* Cadiou, B., Pons, J.M., Yésou, P., ''Oiseaux marins nicheurs de France métropolitaine (1960-2000)'', Éditions Biotope, 2004, 218 p.
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=E. A. Schreiber, Joanna Burger|titre=Biology of Marine Birds|éditeur=[[CRC Press]]|année=2001|pages totales=740|lire en ligne={{Google Livres|iI69BwAAQBAJ}}}}
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