[go: nahoru, domu]

Aller au contenu

Dictionnaire de théologie catholique/PURGATOIRE .I. L'enseignement de l'Ecriture

La bibliothèque libre.
Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 13.1 : PRÉEXISTENCE — PUY (ARCHANGE DU)p. 589-670).

1. PURGATOIRE. — Le présent article a pour but de retracer le développement du dogme du purgatoire, depuis la révélation qui en a été faite dans l’Écriture jusqu’à sa formulation définitive aux trois conciles généraux de Lyon (1271), de Florence (1439)et de Trente (1563). La question théologique du feu du purgatoire a déjà été abordée à l’art. Feu (t. v, col. 1246). Nous nous efforcerons de n’y point revenir ; toutefois, dans maints témoignages concernant le purgatoire, il est impossible de séparer la question du purgatoire lui-même de celle-là ; de plus, une plus grande facilité d’atteindre les sources elles-mêmes ayant permis de corriger, de modifier, de compléter certains points, on ne devra pas s’étonner si des améliorations ont trouvé place dans la présente étude. Le purgatoire chez les Orientaux, postérieurement au concile de Florence, est réservé pour l’article suivant.

Nous exposerons successivement :
I. L’enseignement de l’Écriture.
II. La tradition orientale jusqu’à la fin du iiie siècle (col. 1179).
III. La tradition orientale à l’époque classique (col. 1198).
IV. La tradition latine (col. 1212).
V. L’union réalisée à Lyon et à Florence (col. 1237).
VI. La controverse protestante et le concile de Trente (col. 1264).
VII. La théologie post-tridentine (col. 1282).
VIII. Conclusion (col. 1319).

I. L’enseignement de l’Écriture.

Il est d’autant plus nécessaire de relever l’enseignement de l’Écriture que Luther avait osé formuler la proposition suivante, condamnée par Léon X, bulle Exsurge Domine, prop. 37 : Purgatorium non potest probari ex sacra Scriptura quæ sit in canone. Denz.-Bannw., n. 777. La preuve peut être demandée soit à l’Ancien, soit au Nouveau Testament.

I.DANS L’ANCIEN TESTATMENT.

Doctrine générale, imprécise et confuse.

Il ne semble pas que les Hébreux aient eu une notion très précise de l’état des âmes dans la vie future. Le séjour des morts en général, tant pour les justes que pour les impies, est uniformément appelé le scheôl. Gen., xxxvii, 5 ; Num., xvi, 30. Avant que le Christ vînt ouvrir le paradis aux âmes justes, toutes les âmes des défunts n’étaient-elles pas en quelque sorte placées dans le même lieu, aussi loin du ciel que de la terre ? Et ce lieu du scheôl est un lieu redoutable pour tous, sans distinction. Cependant, bien qu’aucune différence explicite ne soit indiquée par les plus anciens livres inspirés (Pentateuque, Josué, Juges, Rois), touchant le sort des justes et des coupables, une discrimination très réelle existe néanmoins à leur endroit. L’enseignement des saints Livres repose en effet sur deux principes : la responsabilité individuelle devant Jahvé et l’espérance messianique appliquée à chaque âme. Ainsi la responsabilité départage dans l’au-delà justes et coupables. La mort des justes est « une réunion, dans la paix et le repos, à leurs pères et à leur peuple. » Gen., xv, 15 ; Deut., xxxi, 16, etc. Le châtiment suprême réservé aux criminels est la « séparation d’avec leur peuple ». Aux justes renfermés dans le scheôl les promesses messianiques ne sont pas retirées. Dieu reste, pour eux, dans le trépas, le Dieu favorable et bénissant. Gen., xxvi, 24 ; xxviii, 13 ; xlvi, 1, 3 ; Ex., iii, 6 ; iv, 5. L’espérance d’une vie future est invoquée pour eux. Cf. Num., xvi, 22. Jahvé est le Dieu « qui donne la vie et la mort, conduit au scheôl et en ramène ». I Reg., ii, 6 ; IV Reg., v, 7, Cette délivrance du scheôl, le psalmiste la promet aux justes. Ps., xv (Vulg. et ainsi du reste), 9, 10 ; xvi, 15 ; xlviii, 15-16 ; lxxii. Et Job sait que le scheôl est le lieu où l’on attend l’heure de la miséricorde divine. Job, xiv, 13 ; cf. xv, 18-21.

Néanmoins, ce serait grandement se tromper que de vouloir trouver dans le scheôl la forme primitive de la croyance au purgatoire. Le dogme du purgatoire éveille l’idée d’un état intermédiaire entre celui des élus et celui des réprouvés. Dans le scheôl, justes et réprouvés sont enfermés dans l’attente de l’avènement du Christ. Être délivré du scheôl c’est donc, pour le juste, voir les espérances messianiques se réaliser à son égard ; mais ce n’est pas nécessairement être délivré d’une expiation d’outre-tombe, telle que nous la concevons pour les âmes du purgatoire. Il faudrait, pour pouvoir établir un rapprochement sérieux entre les peines du scheôl et le purgatoire, montrer que dans le scheôl même les justes ont encore des peines à expier. Or, un tel rapprochement ne saurait être esquissé que d’une manière très lointaine. Toutefois certaines indications peuvent être relevées. En exposant que, sur cette terre, le juste souffre, le psalmiste rappelle que ce juste, n’est pas tout à fait sans péché : Ps. xxxviii, 5 ; xxxix, 13 ; cxlii, 1, 2. La mort, même pour le juste, est un passage plein d’angoisse et de crainte. Ps., liv, 5-6 ; cxiv, 3-5 ; cxlii, 2-7. Et Jahvé délivre le juste des douleurs du scheôl. Ps., xxix, 4 ; cvi, 10-14. Il y a là comme une vague indication que, même dans l’au-delà, le juste aura besoin de la miséricorde divine.

Les livres prophétiques ne font que développer ces données. Peut-être la différence de l’état des justes et de celui des pécheurs, s’affirme-t-elle avec plus de précision : les espérances messianiques, en particulier, sont présentées avec plus de force et de relief, et parfois en relation avec la résurrection de la chair. Os., vi, 3 ; Is., xxvi, 19-21 ; Ez. xxxvii, 1-14 ; Dan. xii, 1-3. Mais la mort et le sheôl demeurent toujours et pour tous. Justes et impies, un double objet d’effroi. Faut-il voir dans cette crainte que les prophètes inspirent à tous sans exception une indication positive de peines et d’expiations à subir dans l’au-delà avant la complète purification des âmes et la réalisation pour elles des promesses messianiques ? Certains auteurs estiment qu’on peut le supposer. L. Atzberger, Die christliche Eschatologie in den Stadien ihrer Offenbarung, Fribourg-en-B., 1890, p. 93.

Les deutérocanoniques mettent en bien meilleur relief le sort des justes par rapport au sort des pécheurs. Néanmoins, sauf dans le IIe livre des Machabées, on n’y rencontre encore aucun texte explicitement révélateur du purgatoire.

2o Les textes discutables.

Il faut douc savoir se tenter d’indications imprécises et confuses qui, par elles-mêmes, ne sauraient fournir une base sérieuse au dogme des expiations futures. Ç’a été peut être le tort, en face de l’assertion luthérienne, des apologistes catholiques de vouloir à tout prix trouver dans l’Écriture de nombreux textes à l’appui de la croyance au purgatoire. Ces apologistes ne se sont pas aperçus qu’ils affaiblissaient ainsi l’argument scripturaire. Des théologiens de la valeur d’Eck et de Bellarmin n’ont pas su résister à cet entraînement. Plusieurs textes ont ainsi été invoqués, qui sont à coup sur tout au moins fort discutables. Tel est le texte de Tobie, iv, 18, recommandant « de placer du pain et du vin sur le sépulcre du juste, ce qui déclare Bellarmin, ne peut s’entendre que d’un repas offert aux pauvres afin qu’en retour ils prient pour l’âme du défunt. Il s’agit bien plutôt de repas funèbres en usage pour célébrer la mémoire des morts. Cf. Jer., xvi, 7.

Tels les exemples de sacrifices et de jeûnes offerts par les justes de l’ancienne Loi à la nouvelle de la mort de leurs amis. Cf. I Reg., vvxi, 13 ; II Reg., i, 12 ; iii, 35. Bellarmin reconnaît que ce sont là « simples signes de deuil et de tristesse », tout en insinuant qu’on peut croire qu’il s’agit d’aider les âmes des défunts ».

Telle encore la prière du psalmiste demandant à Dieu de ne pas l’examiner dans sa colère ni le reprendre dans sa fureur. Ps., xxxvii, 2 ; cf. vi. 2. ou le remerciant d’avoir introduit son peuple dans un lieu de rafraîchissement, après qu’il a passe par le feu et l’eau. Ps., lxv, 7. Il n’est question, là, que des fautes personnelles de David ; ici, que des tribulations et de la délivrance du peuple juif.

Telles encore les descriptions des prophètes où Dieu apparaît « purifiant les souillures des filles de Sion », Is., iv, 4 ; brûlant l’impiété comme un grand feu, Is., ix, 18 ; amenant l’âme juste à la lumière après qu’elle aura supporté la colère divine, Mich., vii, 8-9 ; délivrant les captifs du lac desséché, Zach., ix, 11 ; purifiant comme au feu et affinant les enfants de Lévi, Mal., iii, 2-3. Le sens littéral de tous ces textes ne saurait être rapporte au purgatoire. Bellarmin le reconnaît lui-même. De purgatorio, l. I, c iii, et est obligé de s’appuyer sur des interprétations patristiques pour en tirer un dogme. Mais ici les Pères ne sauraient faire autorité comme en matière doctrinale, car le sens qu’ils attribuent à ses passages, en les rapportant au purgatoire, est nettement accommodatrice. Cf. Atzberger, op. cit., p. 93, note.

3o Le texte de II Mac, xii, 39-46.

Le seul texte de l’Ancien testament qui implique réellement l’idée d’un état intermédiaire, apanage dans l’autre vie des âmes justes non encore entièrement purifiées, est celui de II Mac, xii, 41-46. Au lendemain de sa victoire sur Gorgias, Judas Machabée découvrit sous la tunique de ses soldats tombes sur le champ de bataille des objets idolâtriques provenant du pillage de Jamnia. Ces objets étant essentiellement impurs au regard de la Loi, il y avait eu faute à les garder. Judas vit, dans la mort de ses soldats, un châtiment de Dieu ;

C’est pourquoi tous bénirent le juste jugement du Seigneur, qui avait rendu manifestes les choses cachées. Et ainsi, s’étant mis en prière, ils demandèrent (au Seigneur) que l’offense qui avait été commise fut livrée a l’oubli. Mais le très vaillant Judas exhortait le peuple à se conserver sans péché, voyant sous leurs yeux ce qui était arrivé a cause des pèches de ceux qui avaient été tués.

Et, une collecte ayant été faite, il envoya a Jérusalem 12000 drachmes d’argent, afin qu’un sacrifice fut offert pour les pèches des morts, pensant bien et religieusement touchant la résurrection [car s’il n’avait pas espéré que ceux qui avaient succombé devaient ressusciter, il (lui) aurait semblé superflu et vain de prier pour les morts] ; mais c’est parce qu’il considérait que ceux qui s’étaient endormis dans la piété recevraient une très grande grâce (à eux) réservée. Elle est donc sainte et salutaire, la pensée de prier pour les morts, afin qu’ils soient délivres de leurs péchés.

Le texte grec est quelque peu différent de la Vulgate, sur laquelle est faite notre traduction : « Il considérait en outre qu’une très belle récompense est réservée a ceux qui s’endorment dans la piété, et c’est là une pensée sainte et pieuse. Voilà pourquoi il fit ce sacrifice expiatoire pour les morts, afin qu’ils fussent délivrés de leur pèche. Dans le fond, l’idée est identique, sauf que l’auteur inspiré n’a en vue ici que le péché commis par les soldats morts.

L’authenticité du texte est indiscutable. Dans sa traduction latine de l’Ancien Testament, Sébastien Munster soupçonne ce passage (ꝟ 43-46) d’avoir été ajouté en cet endroit. Or, tous les exemplaires grecs, latins et syriaques, tant imprimés que manuscrits, le portent uniformément, comme la Vulgate, et les anciens Pères l’ont cité et connu, sans aucune variété ni aucun doute. Cf. Dom de Bruyne, Le texte grec des deux premiers livres des Machabées, dans Rev. biblique, 1932, p. 44.

Le sens du texte est démonstratif en faveur de l’existence du purgatoire. Sans doute. Judas Machabée a en vue, avant tout, la résurrection de ses soldats pécheurs. Mais il subordonne cette résurrection a l’expiation, dans l’autre vie, du péché commis dans le pillage de Jamnia. Ces soldats devaient ressusciter un jour ; autrement la prière pour les morts serait vaine. Ressuscités, ils auraient part à la récompense réservée à ceux qui s’endorment dans le Seigneur. Mais auparavant, ils devaient être libérés de leur péché : c’est ce résultat que procurait le sacrifice expiatoire offert a Jérusalem. Cf. Hugo Bévenot, O. S. B., Die beiden Makkabaerbücher, Bonn, 1931, p. 39-40.

II faut donc admettre que ces âmes n’étaient pas en enfer : ou leur faute n’était pas mortelle, on elles avaient eu le temps de s’en repentir avant la mort, comme l’avaient fait jadis beaucoup de ceux qui avaient péri dans le déluge ». Cf. I Pet., iii, 19-20. Mais ces âmes n’étaient pas encore au ciel et elles ne pouvaient y entrer, non seulement parce que le ciel était encore fermé aux justes, mais parce que leur péché les empêchait d’y être reçues. Leur état se trouvait donc être cet état intermédiaire que nous appelons le purgatoire, état où les âmes sont purifiées par l’expiation et aidées à cet effet par des suffrages des vivants.

L’auteur inspiré raconte le fait avec insistance et y ajoute ses réflexions, destinées à inculquer la légitimité de la croyance et des pratiques : « C’est là une pensée sainte et pieuse. »

4o Comment expliquer l’évolution de la pensée juive en cette matière ?

On constate que Judas Machabée, qui prend l’initiative de la collecte et du sacrifice, est un homme très attaché à la religion et aux traditions de ses pères ; que ses compagnons ne sont nullement surpris de sa proposition, qu’ils y répondent généreusement et que vraisemblablement à Jérusalem la demande n’étonna pas. On peut donc se demander comment cette croyance et cette pratique apparaissent tout d’un coup dans le texte sacré, sans que rien semble les préparer dans les ouvrages antérieurs. La question doit se poser, même en ne considérant les livres des Machabées que sous leur aspect historique.

Il faut observer tout d’abord qu’entre Esdras et Judas Machabée, il s’est écoulé, une période d’environ trois siècles, durant laquelle un silence à peu près complet enveloppe l’histoire des Juifs. Au cours de ces longues années, bien des points de doctrine se sont éclaircis, qui auparavant étaient demeurés dans une ombre plus ou moins proronde. Telle, par exemple, la doctrine de la vie future si fortement exposée dans le livre de la Sagesse, ii-v. Il a dû en être de même pour la doctrine du purgatoire et de la prière pour les morts. Peu à peu, à l’heure marquée par la Providence, elle s’est dégagée pour se manifester au grand jour quand l’occasion en devint propice. On voit bien, d’après le texte des Machabées, que cette doctrine est entrée dans la croyance des Juifs pieux, mais qu’elle a encore besoin d’être affirmée. Elle devait, en effet, se heurter à une vive opposition des sectaires sadducéens qui ne croyaient pas à la vie future, et même rencontrer quelques hésitations chez ceux qui n’aimaient pas les innovations et prétendaient s’en tenir à la Loi et aux prophètes. H. Lesètre, art. Purgatoire, dans Dict. de la Bible, t. v, col. 878.

C’est le cas de se demander si l’influence de religions étrangères n’aurait pas favorisé l’éclosion de cette doctrine chez les Juifs.

L’auteur que nous venons de citer examine les croyances analogues à notre croyance au purgatoire que l’on peut rencontrer dans les anciennes religions.

1. Les Égyptiens avaient l’idée nette d’un jugement subi après la mort. L’âme n’arrivait à ses juges divins qu’après avoir parcouru des régions semées de difficultés. C’était seulement après ces épreuves subies par elle que l’âme était admise au séjour bienheureux pour y continuer ses occupations de la terre, ou mieux qu’elle revenait dans les lieux habités pour s’y intéresser aux choses qui lui plaisaient. Ces épreuves ne sauraient, en général, être considérées comme l’équivalent de peines purificatrices. Toutefois, il faut reconnaître qu’au moins à un certain temps les Égyptiens admirent une sorte de purification par le feu, pour les péchés légers, après laquelle le défunt était admis parmi les bienheureux. Cette doctrine est explicitement enseignée dans quelques exemplaires du Livre des morts, conservés au musée du Louvre. Une scène représente le pèsement de l’âme et elle « est suivie de la vignette du bassin de feu gardé par quatre cynocéphales ; c’étaient les génies chargés d’effacer la souillure des iniquités qui auraient pu échapper à l’âme juste et de compléter sa purification ». Em. de Rougé, Description sommaire des salles du musée égyptien, nouvelle édition par P. Pierret, Paris, 1873, p. 102. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. i, 1895, p. 182 sq. En tout cas, le bonheur des justes n’était jamais donné immédiatement après la mort : « Avant d’y arriver, le juste doit passer par une longue série d’épreuves, triompher de nombreux ennemis qui lui barrent la route, traverser un labyrinthe de salles obscures gardées par des monstres horribles. Tout cela est décrit dans le Livre des morts. » A. Mallon, S. J., art. Égypte, dans Dict. apol., t. i, col. 1335.

2. Les Babyloniens avaient une croyance développée à la vie d’outre-tombe. La coutume d’apporter des offrandes au corps des défunts, afin que l’âme eût de quoi subsister sans venir tourmenter les vivants, est une preuve de la croyance à la survie. Le poème de La descente d’Ištar, d’ailleurs, décrit longuement l’arutou, montagne septentrionale sous laquelle séjournent les âmes des morts. L’état des âmes est différent selon que ces âmes ont fait preuve ou non de piété envers les dieux et envers la déesse des enfers, Allat. Les impies sont livrés par Allat à des supplices épouvantables ; les autres mènent une vie morne et sans joie. Personne n’est libéré de ce séjour que par exception, sur l’ordre des dieux d’en haut. On peut établir un parallèle entre la doctrine chaldéenne et la doctrine juive sur les destinées futures de l’homme. On constatera qu’ici comme là les morts descendent dans un endroit souterrain (l’aralou = le scheôl), qui inspire de l’horreur. Mais le parallélisme ne va pas plus loin : sur la condition des âmes dans l’au-delà, on manque de détails précis. Ce n’est donc pas du côté de la Chaldée qu’il faut chercher une influence doctrinale en faveur de la croyance au purgatoire. Cf. Maspero, op. cit., t. i, p. 681 sq. ; Lagrange, Etudes sur les religions sémitiques, 2e éd. Paris, 1905, p. 337 sq. ; P. Dhorme, Le séjour des morts chez les Babyloniens et les Hébreux, dans Rev. biblique, 1907, p. 59 sq.

3. Les Perses, au contraire, professaient des doctrines assez apparentées à la croyance de Judas Machabée. Au ixe siècle avant Jésus-Christ, la théologie des Perses croit à la survivance de l’âme. Après être demeurée trois jours auprès du corps, l’âme, suivant la valeur morale de ses actions, passe à travers des contrées agréables ou horribles pour aller subir son jugement. Au sortir du jugement, l’âme arrive au pont Schinvât, qui, passant au-dessus de l’enfer, mène au paradis. Condamnée, elle culbute dans l’abîme ; innocente, elle parvient au bonheur. Cf. Maspero, op. cit., t. iii, p. 589-590. Pour certaines âmes, cependant, il y a un état intermédiaire, le Hâmestakân. Toutefois, l’Avesta postérieur ignore l’état intermédiaire. C’est l’enfer qui purifie tous les coupables, de telle sorte qu’à la fin tous doivent être sauvés et participer à la résurrection. « Ainsi, jugement particulier, jugement général, paradis, enfer et purgatoire, résurrection des corps, toute cette eschatologie est assez semblable à celle du christianisme, hormis le pardon de tous, qui n’était pas étranger à la théologie d’Origène. » Lagrange, art. Iran (Religion de m’), dans Dict. apol., t. ii, col. 1120 ; cf. La religion des Perses, dans Rev. biblique, 1904. p. 188. On pourrait donc être tenté d’attribuer à l’influence des idées perses l’introduction en Israël de la croyance au purgatoire et à l’utilité des prières pour les défunts. Mais les doctrines de l’Avesta sont trop indécises et surtout trop différentes des idées exprimées dans le IIe livre des Machabées pour qu’on puisse retenir une influence directe et efficace. D’ailleurs, le judaïsme d’après l’exil était plutôt fermé aux influences étrangères ; aussi, malgré les rapprochements qu’établissent les partisans de la méthode comparative, il semble qu’on doive réduire l’influence perse à peu de chose. « Ce qu’on peut croire plus légitimement, c’est qu’au contact de la religion iranienne la doctrine juive s’est développée en vertu de sa force interne et dans le sens voulu par Dieu. L’obscurité qui enveloppe toute une période de l’histoire juive ne permet pas de suivre avec plus de précision le travail religieux accompli durant ce temps. » H. Lesêtre, art. Purgatoire, dans Dict. de la Bible, t. v, col. 877. Voir ici même, sur des sujets analogues, Judaïsme et Jugement, t. viii, col. 1659 sq., 1746. Le P. Lagrange rejette expressément l’influence iranienne. Cf. Le judaïsme avant Jésus-Christ, Paris, 1931, p. 362.

Pour expliquer l'évolution de la pensée juive, on trouve des raisons suffisantes dans les propres principes religieux d’Israël. L’individualisme des derniers prophètes serait le germe de cette évolution. Voir cette explication dans Jugement, col. 1746-1747. Il s’agit surtout du livre de Daniel, voir Daniel, t. iv, col. 74, et Jugement, t. viii, col. 1714. Cette explication de M. Touzard se trouve corroborée par celle du grand rabbin, M.-A Well, pour qui les rémunérations promises par Moïse et les premiers prophètes étaient essentiellement collectives et spirituelles, spirituelles et non futures et éternelles ». la Loi n’ayant pas pour but direct une telle rétribution. Le but de la Loi n’est que la formation d’un peuple saint, modèle pour les autres nations, dans le culte à rendre à Dieu. La sanction visera donc ce but primordial. Tant que le peuple « saura respecter et honorer son titre en marchant dans la voie qui lui est tracée, il trouvera sa légitime récompense dans l’ascendant que lui assure l’intelligent et pieux exercice du sacerdoce, et surtout dans sa durée… Il possédera aussi les biens temporels, mais… comme moyens, en tant qu’ils sont nécessaires à la sauvegarde des intérêts spirituels. » Voilà le premier idéal juif. Mais nous allons entrer dans une phase nouvelle… De terrestre qu’a été la rémunération, elle va devenir future et immortelle… Il importe de déterminer l’heure de la transformation… Elle s’est accomplie indubitablement lors du retour de la captivité, sous l’influence d’Esra et du grand synode… En ce qui concerne le rôle assigné à la rémunération future par le grand synode et ses continuateurs, nous ne croyons pas nous tromper en l’attribuant à un genre de nécessité pareil à celui qui, plus tard, à l'époque de la dispersion, provoqua la conversion de la loi orale en loi écrite. Il y aura urgence à mettre le dogme en harmonie avec la situation politique… (Les) assurances de sécurité et de prospérité matérielle faisaient un étrange contraste avec la réalité et ne pouvaient plus dés lors constituer ce mobile puissant qui remue et entraîne les masses… » Le judaïsme, ses dogmes, sa mission. Paris, 1869, t. iv, p. 264 sq., 298 sq.

C’est par un développement analogue qu’on peut expliquer la croyance exprimée au IIe lire des Machabées : ce livre témoigne que la perspective des rémunérations futures, ouverte par Daniel, avait fini par prendre consistance au moins dans les meilleures âmes du judaïsme.

D’ailleurs, il n’est pas certain que les doctrines de soient d’origine bien ancienne. Le P. Lagrange les estime plus récentes que le judaïsme, qui aurait au contraire influé sur elles. La religion des Perses. dans Rev. biblique, 1901, p. 203-212.

D’autre part, ces affirmations des religions orientales où l’on croit retrouver quelque chose du dogme du purgatoire doivent-elles nécessairement s’expliquer par l’influence d’une doctrine révélée ? Rien n’est moins certains. L’exigence d’une purification d’outre-tombe se présente si spontanément à l’intelligence humaine que l’idée en est pour ainsi dire naturellement conçue. La sanction est inséparable de la loi ; l’ordre doit être rétabli dans la mesure où il a été violé. Or, en ce monde le rétablissement de l’ordre par la justice ne peut se faire complètement. Il faut donc, dans l’autre vie, non seulement la sanction qui frappe a jamais le coupable obstiné et impénitent, mais encore celle qui punit la faute légère ou les restes de fautes qui, tout en laissant subsister la vertu dans l’âme, y marquent néanmoins une dette envers la justice divine. Par les seules lumières de la raison Platon n’était-il pas parvenu à concevoir une purification dans l’au-delà pour les âmes qui en sont capables ? Voir plus loin, col. 1286. Quoi d’étonnant que les religions anciennes se soient spontanément élevées à des conceptions de ce genre ?

5o Que reste-t-il aux Juifs de la doctrine du IIe livre des Machabées ?

Les livres postérieurs ne renferment plus aucune mention d’un état intermédiaire entre le ciel et l’enfer. Sous l’influence de la philosophie grecque, le livre de la Sagesse ouvre des perspectives assez nettes sur la vie future et les rétributions qu’elle comporte pour les justes et pour les pécheurs, mais il n’y est point question d’une expiation imposée aux justes avant leur entrée dans le bonheur. La littérature extracanonique, plus riche en détails susceptibles de satisfaire la curiosité humaine, ne conçoit pas de libération pour les pécheurs. Voir Jugement, col. 1749-1750. D’après les rabbins, les païens qui ne doivent pas bénéficier de la résurrection sont envoyés à la géhenne dès leur mort. Ils y resteront éternellement. Quant aux justes, ils triomphent dans le scheôl de leurs adversaires et ils y subissent, si c’est nécessaire, l’épreuve du feu purificateur. F. Weber, Jütische Theologie, 2e éd., Leipzig, 1897, p. 311-342, 391-392. Par la suite, les Juifs assignèrent comme séjour aux âmes ni justes ni impies la « géhenne supérieure », c’est-à-dire les régions les plus élevées de l’enter. Douze mois de souffrances y purifiaient les âmes avant qu’elles pussent être admises parmi les justes. Les prières des vivants les y aidaient : un fils devait prier pour son père défunt chaque jour pendant onze mois ; chaque sabbat, l’assemblée récitait une prière solennelle nommée le « souvenir des âmes ». Cf. Iken, Antiquitates hebraicæ, Brème, 1741, p. 614-615 ; Drach, De l’harmonie entre l'Église et la Synagogue, Paris, 1844, t. i, p. 16, et surtout Bonsirven, S. J., Le judaïsme palestinien au temps de Jésus-Christ, t. i, Paris, 1935, c. vii, p. 322-340. Le P. Lagrange note cependant que la Tosfta (sur cet écrit, voir du même auteur Le judaïsme avant Jésus-Christ, Paris, 1931, p. xvii attribue à Chammaï une doctrine bien proche de notre purgatoire, celle qui considère une classe intermédiaire entre la classe destinée à la vie éternelle et celle qui est destinée aux opprobres éternels, la classe qui doit passer par le feu et être purifiée comme l’argent, éprouvée comme l’or. Chammaï admettait ainsi un purgatoire, mais dont la vertu s’exerçait fort vite. Cf. Lagrange, op. cit., p. 361-362.

L'éternité des peines, affirmée par le Talmud, dans la Halaka comme dans l’Agada, est interprétée par les Juifs modernes avec de singuliers adoucissements. La purification de douze mois est accordée déjà dans la Mischna aux méchants sans distinction. Quant aux grands criminels, l'éternité de leurs peines ne doit être prise à la lettre que s’ils meurent absolument dans l’impénitente finale. D’ailleurs, il suffit d’avoir accompli pendant la vie, consciencieusement et religieusement, au moins une prescription de la loi sacrée, pour être admis au bonheur. L’enfer des Juifs modernes devient en réalité un immense purgatoire. Cf. M.-A. Weill, op. cit., p. 595-596. D’ailleurs, déjà au temps de Jésus Christ, de nombreux rabbins avaient tendance à supprimer l'éternité de la géhenne. Cf. Bonsirven. op. cit.. c. xiii, p. 538-541.

II. DANS LE NOUVEAU TESTAMENT.

Dans son De purgatorio, Bellarmin invoque neuf textes du Nouveau Testament en faveur de l’existence du purgatoire. Une remarque préalable s’impose. Dans ces textes, il ne saurait être question de trouver un enseignement direct des expiations d’outre tombe. Ce qu’il faut reconnaître c’est que ces textes supposent l’existence du purgatoire.

Matth., xiii, 31-32.

Tout péché et blasphème sera remis aux hommes, mais le blasphème contre l’Esprit ne sera pas remis. Et quiconque parlera contre le fils de l’homme, cela lui sera remis ; mais celui qui parlera contre l’Esprit-Saint, cela ne lui sera pas remis. ni dans ce siècle, ni dans le (siècle) à venir. »

L’expression : ἐν τούτῳ τῷ αἰῶνι signifie à coup sûr la vie présente. Cf. Matth., xiii, 22, 39 ; xxiv. 3 ; Marc, iv, 19 ; Luc, xvi, 8 ; xx, 34, etc. ; tandis que l’expression αἰῶν μέλλων, identique à αἰῶν ἐρχόμενος, se rapporte non au temps à venir sur la terre, mais au temps qui suit la mort, celui dans lequel on obtient la vie éternelle. Cf. Marc, x, 30 ; Luc, xviii, 30. Jésus affirme donc ici qu’il y a des péchés qui, n'étant pas remis en ce monde, le seront dans l’autre. Toutefois, le Sauveur ne parle pas de peines à subir en vue d’obtenir cette rémission. Il pourrait donc rester un léger doute sur la valeur pleinement démonstrative de ce texte en faveur du purgatoire, le péché pouvant être remis dans l’autre vie au moment même du jugement de l'âme, grâce à son repentir et à la miséricorde de Dieu. Toutefois, étant donné le dogme du purgatoire, le sens le plus obvie de ce texte paraît être l’expiation dans l’autre vie de certains péchés légers ou incomplètement remis. On peut raisonner ainsi : « Pour que cette formule déclarative s’explique adéquatement, il est juste d’entendre que certains péchés sont rémissibles en l’autre monde, ce qui implique une pénalité encourue, à tout le moins la privation temporaire de la vision de Dieu, et par le fait, une expiation. » Bernard, art. Purgatoire, dans Dict. apol., t. iv, col. 505. D’ailleurs, le fait que la rémission pourrait être conçue comme se réalisant dans le jugement même n’infirmerait pas la valeur de la preuve scripturaire du purgatoire, une des formes primitives de la croyance au purgatoire étant précisément la croyance à une purification d’outre-tombe par le feu du jugement. Voir Feu du jugement, t. v, col. 2242-2243 ; voir aussi ci-dessous.

2o Matth., v, 25-26.

« Sois facile avec ton adversaire au plus tôt, tandis que tu es en chemin avec lui, de peur que ton adversaire ne te livre au juge et le juge à l’appariteur, et que tu ne sois jeté en prison ; en vérité, je te le dis, tu ne sortiras pas de là que tu n’aies payé la dernière obole. »

Ce texte de Matthieu est éclairé par le texte parallèle de Luc, xii, 58-59. Notre-Seigneur use de paraboles pour enseigner aux Juifs la conduite à tenir en face du jugement futur de Dieu. Les destinataires de la parabole sont encore « en chemin », c’est-àdire en cette vie. Mais celui à qui s’adresse la recommandation : « Sois facile avec ton adversaire » est un accusé débiteur. Le châtiment divin n’est pas envisagé comme une coercition temporaire : le thème n’est donc pas la réconciliation, mais la nécessité de la pénitence pour éviter le châtiment. Ce qui ressort de la parabole, c’est donc qu’il faut être en paix avec son prochain, en règle avec Dieu, pour éviter un châtiment redoutable. Faut-il pousser plus loin l’allégorie et reconnaître dans la « prison » dont est menacé le débiteur soit l’enfer, comme le pensent les Pères latins en général, soit le purgatoire, comme opinent quelques exégètes à la suite de saint Cyprien, Epist., lv, ad Anton., n. 20, Hartel, p. 638 ? Il est difficile de le dire, encore qu’il soit certain que Jésus ne nie pas que la dernière obole puisse être payée. Tout ce qu’il est permis d’affirmer en s’en tenant au texte lui-même, c’est qu’il n’est pas impossible d’y voir une allusion au purgatoire. Mais cette interprétation ne s’impose pas exclusivement et n’a pas de valeur dogmatique absolue. Cf. Knabenbauer, Evang. sec. Matthæum, t. i, Paris, 1892, p. 220 ; Lagrange, Evang selon saint Luc, Paris, 1921, p. 370 ; Evangile selon saint Matthieu, Paris, 1923, p. 100-101. Bellarmin dépasse donc la portée du sens littéral lorsqu’il voit dans ce texte l’indication claire du purgatoire. Ce texte, dit-il en substance, ne peut s’interpréter de l’enfer, comme le voulait saint Augustin, De sermone Domini in monte, t. I, c. xi, P. L., t. xxxiv, col. 1243, ni même de l’ensemble des peines de l’enfer et du purgatoire, comme le voulaient Albert le Grand, Opera, éd. Vives, t. xx, p. 184-195, et Cajétan, In Matthæum, v, 22, puisque le texte « indique clairement » une peine qui doit finir un jour. Bellarmin ajoute que ce texte ne peut s’entendre des jugements et des peines de cette vie, comme le veut saint Jean Chrysostome, P. G., t. lvii, col. 251, puisque l’expérience de cette vie montre fréquemment que les prisonniers sont graciés avant l’expiration de leur peine. Seul donc le purgatoire répond à cette prison dont on ne sort qu’après avoir entièrement payé sa dette.

3o Luc., xvi, 9.

« Et moi je vous le dis : Faites-vous des amis avec l’argent de l’injustice, afin que, lorsqu’il fera défaut, ils vous reçoivent dans les tentes éternelles. »

D’après Bellarmin, le sens de ce texte n’est pas seulement que ceux qui auront fait l’aumône seront sauvés après leur mort à cause de leurs bonnes œuvres, mais qu’après leur mort les prières des saints soulageront leurs âmes. En réalité, une telle interprétation est excessive. Cette conclusion se lit à la fin de la parabole de l’intendant infidèle, qui avait su prendre les débiteurs de son maître par l’intérêt et en avait fait ses complices. De tels procédés, la véritable sagesse ne peut tirer, en les constatant, qu’une intense mélancolie. Mais il y a mieux à faire, et c’est ce qu’indique Jésus-Christ dans la conclusion. La parabole est alors transposée : avec cet argent, le vrai disciple du Christ saura se faire des amis dans l’autre monde, non pas en trafiquant, comme l'économe infidèle, mais en se dépouillant par l’aumône au profit des pauvres. Quand l’argent d’injustice (lisez : qui pourrait facilement devenir occasion d’injustice) fera défaut, en raison de la mort où il faut tout abandonner, l’aumône qu’on aura faite avec lui procurera des amis dans l’autre vie. Cette amitié, sans doute, se traduira d’une façon effective, mais de quelle façon. Sans doute de manière à nous faciliter l’entrée au ciel. Mais l’idée de la délivrance du purgatoire ne saurait être ici que très vague.

4o Matth., v, 22.

« Moi, je vous dis que quiconque se mettra en colère contre son frère sera justiciable du tribunal ; et quiconque dira à son frère : Raca ! sera justiciable du sanhédrin ; et quiconque dira : Fou ! sera justiciable envers la géhenne du feu. »

Bellarmin construit sur ce texte un argument dialectique en faveur du purgatoire : quand le Christ menace ainsi de sanctions celui qui s’irrite contre son frère, il parle des peines à souffrir dans l’autre vie ; or, parmi ces peines, la géhenne du feu est indiquée pour l’injure la plus grave ; il existe donc des sanctions moins sévères. Il est incontestable que Jésus oppose ici le jugement divin dans l’ordre spirituel au jugement terrestre, tel qu’il était prévu par la Loi interprétée par la tradition juive. D’après la justice juive, l’homicide est justiciable du simple tribunal de vingt-deux membres pris dans le sanhédrin ; mais, pour une simple colère d’un frère contre son frère (au ꝟ. 47, le Christ laissera entendre qu’il ne s’agit pas seulement d’un frère israélite, mais de tout homme, tous devenant frères par le christianisme), déjà un jugement comparable à celui du simple tribunal est promis. Une injure plus forte sera justiciable du sanhédrin tout entier, c’est-à-dire sera jugée par Dieu plus sévèrement encore. Enfin, la géhenne, punition suprême, est réservée à l’injure suprême. La conclusion que Bellarmin veut tirer de ce passage n’apparaît que fort lointaine : elle est légitime cependant, surtout si l’on se souvient que tout ce passage de Matthieu prépare l’allusion à la prison dont l’accusé ne sortira qu’après avoir payé la dernière obole. Voir ci-dessus, n. 2.

5o Luc., xxiii, 42.

« Il ajoutait : Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton règne. »

Il s’agit du bon larron, qui « jamais n’aurait ainsi parlé s’il n’avait cru qu’après cette vie les péchés peuvent être remis, que les âmes ont besoin de secours et peuvent en être réconfortées ». Si vague et si lointaine que soit ici l’allusion à une expiation d’outre-tombe, elle n’est cependant pas complètement négligeable. De toute évidence, le bon larron, un Juif assurément, croit au royaume messianique, dans lequel, par sa mort, le Christ va entrer. Il adresse à Jésus une humble prière, se recommandant à lui d’une manière générale. Tandis que le mauvais larron demande insolemment un miracle, le bon larron, avec une foi sans hésitation, entrevoit, après la mort, l’avènement du Messie. Il se recommande douc, pour l’état dans lequel il va entrer après la mort, a celui qu’il considère comme le chef du royaume de Dieu. En lui promettant le paradis, Jésus lui accorde bien plus qu’il n’avait demande.

6o Act., ii, 24.

Ici, Bellarmin lit une leçon que la critique accepte difficilement. Dans son discours, saint Pierre parle de Jésus que les Juifs ont fait mourir. « l’ayant élevé à la croix par la main des infidèles ». Et l’apôtre ajoute : « Dieu l’a ressuscité, ayant délié les liens de la mort. » Bellarmin lit : les liens de l’enfer. Sur ce texte, voir Jacquier, Les Actes des apôtres, Paris, p. 66. D’ailleurs, ce n’est pas au texte lui-même des Actes que Bellarmin se réfère pour trouver un argument en faveur du purgatoire, mais aux commentaires qu’en ont donne les Pères. De nombreux Pères appliquent le texte : « ayant délié les liens de l’enfer » aux âmes délivrées par le Christ de souffrances infernales ; et, comme il ne peut être question de damnés, il doit nécessairement s’agir des âmes qui se purifiaient dans le purgatoire. L’argument traditionnel peut avoir de la valeur ; mais l’argument scripturaire ne présente aucune base à la croyance au purgatoire. Même en admettant la leçon τὰς ὠδῖνας τοῦ ᾅδου. il ne saurait être question de trouver une libération par le Christ des âmes du purgatoire. Il n’est question que du Christ lui-même, la suite du texte l’indique clairement : Dieu l’a ressuscité, ayant délié les liens de la mort (ou de l’enfer) », parce qu’il n'était pas possible qu’il restât au pouvoir de celle-ci (ou du scheôl). Et Pierre invoque a l’appui de son assertion le ps. xv, 8-11, certainement messianique.

7o Les autres textes invoqués par Bellarmin sont de saint Paul. Le premier est pris dans I Cor., xv. 29. Saint Paul prêche aux Corinthiens la résurrection future. Et il ajoute à sa prédication un argument indirect : « D’ailleurs (s’il n’en était pas ainsi), que feront ceux qui se font baptiser pour les morts ? Si les morts ne doivent pas du tout ressusciter, pourquoi se font-il baptiser pour eux ? » Le sens obvie de ce texte est que les Corinthiens se faisaient baptiser à la place, ou, mieux, en faveur de leurs parents ou amis qui étaient morts sans avoir reçu le baptême. Ils pensaient les rendre ainsi dignes de la résurrection glorieuse. Sans approuver ni blâmer cette singulière coutume, saint Paul s’en sert pour démontrer sa thèse et il conclut qu’elle suppose la foi à la résurrection. Ce sens littéral ne suffit pas à ceux qui veulent trouver ici un argument péremptoire en faveur de l’existence du purgatoire. Le « baptême » dont il est question serait un baptême de larmes et de pénitence, qu’on accepte quand on prie, qu’on jeûne, qu’on fait des aumônes, etc. ; le sens serait donc : Que feront ceux qui prient, qui jeûnent, qui pleurent, qui se mortifient pour les morts, si les morts ne ressuscitent pas ? Nous aurions ici un témoignage explicite de l’utilité des suffrages offerts pour les âmes souffrantes. Mais cette interprétation, loin de s’imposer, paraît inadmissible. Bellarmin reconnaît lui-même qu’elle est discutable et admet comme probable l’interprétation littérale que nous avons rappelée. Toutefois, ce baptême pour les morts » n’atteste-t-il pas, lui aussi, à sa façon, que les vivants peuvent quelque chose en faveur des défunts ? Et c’est là un indice non négligeable de la croyance primitive à l’expiation dans l’au-delà. Voir Baptême pour les morts, col. 360, et B. Allo, Première épitre aux Corinthiens, Paris, 193 i, p. 113.

8o Phil., ii, 10.

« Qu’au nom de Jésus tout genoux fléchisse, au ciel, sur la terre et dans les enfers. »

Les « enfers » dont il est question peuvent représenter les âmes du purgatoire, bien qu’il puisse désigner également les damnés. Vraisemblablement les deux. En faveur des âmes du purgatoire, on peut apporter l’appui d’un texte similaire d’Apoc., vi, 13. Mais il est difficile de trouver ici une indication solide en faveur du dogme du purgatoire.

9o Deux textes que n’a pas relevés Bellarmin et qu’il convient cependant le citer, c’est Luc, iii, 48, et II Tim., i, 16-18.

Le texte de Luc est une allégorie : « Le serviteur qui connaît la volonté de son maître et qui n’a pas préparé ou agi selon sa volonté recevra un grand nombre de coups. Mais celui qui ne la connaît pas et qui agit de façon à mériter des coups, en recevra peu ».

Il s’agit du jugement de Dieu ou du Christ. Ce châtiment léger, pour ceux qui peuvent avoir des excuses, n’est il pas l’indice que, dans les jugements de Dieu, il y a une punition qui n’est pas la perte éternelle ? Cf. Lagrange, Évangile de saint Luc, Paris, 1921, p. 371 ; B. Allo, op. cit., p. 67.

II Tim., i, 16-18, est une prière : « Que le Seigneur répande sa miséricorde sur la maison d’Onésiphore, parce que souvent il m’a rafraîchi et n’a pas rougi de nos chaînes ; mais, lorsqu’il est venu à Rome, il m’a cherché avec empressement et m’a trouvé. Que le Seigneur lui donne de trouver miséricorde en ce jour »

L’expression « la maison d’Onésiphore » qu’on retrouve plus loin encore (iv, 19), semble indiquer qu’au moment où Paul écrivait sa lettre, Onésiphore était déjà mort. La prière faite au Seigneur en sa faveur indiquerait alors le suffrage « les vivants pour les morts.

10o Reste le texte classique sur lequel beaucoup de théologiens se sont fondés pour affirmer l’existence du purgatoire, I Cor., iii, 11-15 :

De fondement, nul ne peut en poser d’autre que celui « qui est là, qui est Jésus-Christ. Et si quelqu’un, en bâtissant, superpose à ce fondement de l’or, de l’argent, des pierres de prix, des pièces de bois, de l’herbe, de la paille, l’ouvrage de chacun sera mis en évidence, car le jour le montrera, parce que c’est au feu que se fait cette révélation ; et l’ouvrage de chacun, ce qu’en est la qualité, le feu l'éprouvera. Si l’ouvrage de quelqu’un, qu’il a superposé en bâtissant, subsiste, il recevra une récompense : si l’ouvrage de quelqu’un est consumé, il subira un dommage ; lui, il sera bien sauvé, mais ainsi qu’à travers le feu.

1. Exégèse du texte.

Dans cette allégorie, trois termes sont à considérer : la nature de l'édifice, le « jour », le feu qui éprouve la superstructure apportée au fondement.

a) La nature de l'édifice.

« Nous sommes les coopérateurs de Dieu ; vous êtes la culture de Dieu, la bâtisse de Dieu », écrit l’Apôtre au ꝟ. 9. Quel est cet édifice que les ouvriers apostoliques ont mission de construire et d’achever ? Saint Paul parle d’un seul édifice. Il ne s’agit donc pas de l’édifice personnel de la perfection chrétienne, propre chaque chrétien, dont le fondement est la foi, dont les matériaux sont, d’un côté, les bonnes œuvres, d’un autre côté, les péchés graves, les affections charnelles ou les péchés véniels. L’interprétation, qu’on retrouve sous des formes a peine dissemblables, chez Origène, Jean Chrysostome, Jérôme, Augustin et Grégoire le Grand, outre qu’elle se heurte à l’unité de l'édifice va contre le sens général : ce fondement de l’édifice c’est la foi, et des matériaux tels que péchés et affections charnelles ne sauraient reposer sur la foi. Il ne s’agit pas davantage de l’édifice qu’est l’Église (cf. Matth.. xvi, 18), dont les fidèles sont les pierres vivantes (cf. I Petr., ii, 4 ; Eph., ii, 20), édifiées sur la pierre angulaire qu’est le Christ, les matériaux périssables étant les pécheurs et les réprouvés. Mais alors comment ceux qui les auraient fait entrer dans l’Église pourraient-ils eux-mêmes être sauvés ? Il s’agit donc clairement de l’Évangile lui-même (cf. Rom., xv, 20), dont Paul a posé le fondement à Corinthe en prêchant Jésus-Christ, abrégé de la foi, et que ses successeurs ont mission de compléter et de parachever par leur enseignement.

Personne n’a le droit de déplacer ce fondement ou de lui en substituer un autre ; mais tout prédicateur de l’Évangile a le droit et le devoir de continuer l’édifice. Or, comme la construction est de même ordre et de même nature que le fondement, les parties surajoutées à l’édifice fondé par Paul seront nécessairement les doctrines du christianisme, non pas des doctrines mortes, purement spéculatives, sans influence aucune sur l’accroissement du corps mystique, mais des doctrines vivantes, agissantes, capables de transformer l’esprit et le cœur de ceux qui en font leur règle de vie. L’or, l’argent, les pierres de prix sont à divers degrés les doctrines utiles et fructueuses ; le bois, le foin, le chaume, substances fragiles et peu durables, symbolisent, non pas les erreurs et les hérésies, mais les enseignements frivoles, les récits futiles, bons à repaître la curiosité des auditeurs, mais sans action sérieuse sur leur vie morale. Le souverain Juge paraît soudain. Un feu dévorant le précède. L’or, l’argent, les pierres de prix, résistent à l’épreuve ; le bois, le foin, le chaume sont consumés et les imprudents ouvriers qui les employaient, voyant périr leur œuvre, se sauvent à travers les flammes. F. Prat, La théologie de saint Paul, 17e éd., t. i, p. 111.

Cette explication, jadis retenue par l’Ambrosiaster, est aujourd’hui adoptée par l’immense majorité des exégètes. L’interprétation plus large, récemment proposée par le P. Allo, op. cit., p. 59-60, ne contredit pas essentiellement celle qu’on vient de rapporter. Le fondement est le Christ lui-même, que Paul a d’ailleurs comparé à la pierre angulaire, à la tête du corps. La superstructure signifie donc tous les résultats du travail des instructeurs qui prétendent faire l’œuvre du Christ, l’accession des nouvelles recrues, les doctrines qu’elles reçoivent, les œuvres qu’on leur fait produire, etc. L’édifice, en somme, c’est l’Église, mais l’Église avec ses membres, la foi et la charité qui les unissent ; ensemble qui doit être homogène, harmonieux et parfaitement adapté au fondement. Cette interprétation extrêmement compréhensive n’est pas à confondre avec celle qu’on a rejetée tout à l’heure. Dans cet édifice, les matériaux, personnes, œuvres, doctrines, sont de qualité bien diverse. Les matériaux inférieurs peuvent se rencontrer avec ceux de qualité supérieure.

b) Le « jour ». — La Vulgate a dies Domini ; mais le texte grec porte seulement ἡ ἡμέρα, le « jour » par antonomase, c’est-à-dire le grand jour de la parousie, jour où se fera le discernement des bons et des méchants, la distribution des peines et des récompenses. Ce jour est le plus souvent appelé « le jour du Seigneur » ou « le jour du Christ » ; cf. I Cor., i, 8 ; v, 5 ; II Cor., i, 14 ; Phil., i, 6-10 ; ii, 6 ; I Thess., v, 2 ; II Thess., ii, 2 ; I Petr., iii. 10-12 ; Apoc, xvi, 14 ; il est encore désigné par ἐκείνη ἡ ἡμέρα, II Thess., i, 10 ; II Tim., i, 12-18 ; iv, 8, et par ἡ ἡμέρα tout court, Hebr., x, 25 ; cf. Rom., xiii, 12. C’est le jour du jugement. C’est là l’interprétation commune. On ne saurait donc accepter les interprétations différentes qui se présenteraient avec exclusivité de l’interprétation commune : surtout celles qui se fondent sur un sens accommodatice, la ruine de Jérusalem (Lightfoot), la tribulation (saint Augustin, qui d’ailleurs n’exclut pas d’autres interprétations, voir plus loin, col. 1177), le jour de la mort (Cajétan), un jour indéterminé (Grotius), la claire lumière de l’Évangile (Érasme. Bèze), etc. Toutefois, remarque opportunément le P. Allo, op. cit., p. 61, « ce peut être en réalité presque tout cela à la fois. On voit au chapitre suivant (Luc., xvii, 22) que Paul pouvait donner à ἡμέρα le sens très général de jugement ou de séance judiciaire. Or, le Christ exerce ses jugements et peut avoir son » jour de bien des manières. La principale, la décisive est évidemment celle de la parousie ; mais Jésus (Luc., xvii, 22), a parlé d’ « un des jours du Fils de l’homme », comme s’il pouvait y avoir plusieurs de ces jours », où il manifeste sa puissance suivant tel ou tel mode, dans tel ou tel événement… Aussi pouvons-nous croire, avec saint Thomas, que, dans ce verset, il s’agit du triple jugement de Dieu, le jugement général, le jugement particulier à la mort de chacun, et les jugements durant cette vie mortelle. Il faut toutefois remarquer que ce ꝟ. 13 ne vise expressément que le jugement qui sera porté sur l’œuvre extérieure du ministère. »

Quoi qu’il en soit, ce « jour » sera le jour du discernement du bien et du mal, des bons et des mauvais ouvriers, de la distribution des peines et des récompenses. Saint Paul nous représente les ouvriers de l’édifice surpris par ce jour, et ils se divisent en trois catégories. Les uns, auxquels il est fait allusion au ꝟ. 17, sont les mauvais ouvriers qui, au lieu de bâtir, s’efforcent de détruire le temple de Dieu que sont les fidèles, qu’est l’Église : Dieu les détruira eux-mêmes, comme ils ont détruit. D’autres ont construit un monument solide et n’ont employé que des matériaux excellents : ils recevront la récompense due aux ouvriers fidèles, Enfin, les derniers font usage de matériaux périssables : ils souffriront dommage. Saint Paul ne dit pas expressément en quoi. Mais ils se sauveront comme par le feu, pareils à l’ouvrier qui, employant des matériaux combustibles, voit l’incendie se déclarer dans l’édifice qu’il construit et se trouve obligé ue s’enfuir au milieu des flammes pour se sauver.

c) Le « feu », d’après le P. Allo, op. cit., p. 61, serait « toutes les activités destructrices dont l’édifice spirituel de Corinthe (et l’Église en général) subiront l’assaut, Dieu l’ayant ainsi ordonné pour en faire l’épreuve (ἀποκαλύπτεται) et la purification. Si cette épreuve est différée, jusqu’aux derniers jours pour certaines « superstructures », la parousie au moins, épreuve suprême, montrera ce qui valait quelque chose ou ce qui ne valait rien pour l’établissement du « règne de Dieu » éternel. » Mais d’autres exégètes veulent un sens moins général.

Il est bien évident, tout d’abord, que le feu dont parle ici saint Paul ne peut être entendu directement du feu du purgatoire : le feu du purgatoire, en effet, purifie, mais n’éprouve pas et, de plus, il n’a rien à faire avec les œuvres excellentes symbolisées par l’or, l’argent, les pierres précieuses. Ce n’est pas non plus le feu de l’enfer (interprétation de saint Jean Chrysostome), interprétation abandonnée des exégètes. Ce feu de l’enfer punit, mais n’éprouve pas, et l’on ne peut dire, sans violenter le texte, que le damné sera sauvé (σωθήσεται), c’est-à-dire conservé vivant, pour souffrir éternellement. Ce sens donné à σωθήσεται est inouï, comme l’ont démontré au concile de Florence les contradicteurs de Marc d’Éphèse. Cf. Mansi, Concil., t. xxxi, col. 489, et Feu du purgatoire, col. 2250. De plus, on ne comprendrait pas que saint Paul opposât ζημιωθήσεται, detrimentum patietur, à σωθήσεται, salvabitur, si l’un et l’autre terme signifiaient la peine du feu de l’enfer. Cf. Cornely, Commentarius in S. Pauli epistolas, I Cor., Paris. 1890. t. ii, p. 91. Il ne s’agit pas non plus du feu métaphorique de la tribulation, interprétation secondaire chez saint Augustin et saint Grégoire le Grand. Feu du purgatoire, col. 2250. Il suffira de mentionner l’opinion singulière de Bellarmin. qui veut que le premier feu du ꝟ. 13 soit le feu de la conflagration générale, le second, même verset, le feu métaphorique du jugement, et que le feu du ꝟ. 15 soit le feu réel du purgatoire : opinion insoutenable et sévèrement notée par Estius ; cf. art. cité., col. Nous avons exposé l’interprétation de nombre Pères rapportant ce feu au feu réel de la conflagration générale. « La plupart des Pères, des théologiens et des exégètes voient dans le feu dont parle saint Paul le feu de la conflagration qui s’allumera au « jour du Seigneur » (au jugement), c’est-à-dire le feu de la conflagration en tant qu’il se rapporte un jugement qui éprouve les œuvres des hommes et en tant qu’il servira de feu purificateur pour les derniers justes encore non entièrement purifiés… A ces Pères il faut ajouter saint Augustin, qui, expliquant 1 Cor., iii, 13 15, formule nettement l’hypothèse d’un feu réel purificateur qui, après la mort, tourmentera plus ou moins longtemps certains fidèles d’ailleurs sauvés en principe. » Voir les références, Feu du purgatoire, col. 2251. L’interprétation de Cajétan, qui entend le feu dont parle I Cor. du feu métaphorique du jugement, paraît aujourd’hui plus probable aux meilleurs exégètes, même catholiques. Elle est adoptée par le P. Prat, qui n’hésite pas à affirmer que le feu de la conflagration est étranger à l’enseignement de saint Paul », Op. cit., p. 113, note 1. On aurait tort de le voir dans II Thess., i, 8, ἐν πυρὶ φλογὸς διδόντος ἐκδικησιν, car ces paroles sont une citation d’Isaïe, lxvi, 15. où il est question du feu du jugement. D’ailleurs, ajoute le P. Prat, le feu du jugement est si souvent mentionné dans l’Écriture et le feu de la conflagration l’est si peu qu’il n’est guère probable que saint Paul ait voulu désigner ce dernier. L’Apôtre parle d’un feu qui éprouve les doctrines et les actions des hommes, d’un feu qui accompagne et manifeste le jour du Seigneur. Or ce feu ne peut être que le feu du jugement. Ce feu, qui fait partie obligée des théophanies, escorte le char du Seigneur venant juger le monde. C’est un feu intelligent, qui rendra manifeste le contraste entre les bonnes doctrines, durables comme l’or, l’argent et le marbre, et les doctrines frivoles, aussi corruptibles que le bois, le foin et la paille. Ce même feu sondera les consciences des imprudents architectes, en leur infligeant le châtiment mérité : « Ils seront sauvés comme par le feu ». Ici, le mot feu a son sens ordinaire ; seulement il y a une comparaison qu’on pourrait développer ainsi : ils sauvés, mais non sans douleur et sans angoisse, comme se sauvent à travers les flammes les liens surpris par un brusque incendie. Op. cit., p. 113.

2. L’argument qu’on en tire en fureur du purgatoire.

Qu’on adopte l’interprétation du feu de la conflagration ou celle du feu du jugement, on ne possède pas d’argument direct en faveur de l’existence du purgatoire ; mais l’argument indirect ne laisse pas d’avoir quelque valeur.

Voici l’argument en ce qui concerne le feu de la conflagration : Le feu de la conflagration dernière, étant placé aux confins de la vie présente et de la vie éternelle, aura, pour ainsi dire, une double action : en tant qu’il termine la vie présente, il s’attaquera à tous et à tout, brûlera et détruira les bons et les mauvais dans leur vie corporelle et, en ce sens, il ne sera pas le feu qui éprouve : en tant qu’il appartient déjà à la vie future, instrument de la divine justice, il punira et purifiera les âmes des derniers justes dont il aura causé la mort. A post., on peut donc inférer logiquement qu’après le jugement particulier, qui sera « le jour du Seigneur » pour chacun des hommes, pareille purification sera nécessaire aux âmes non complètement encore dégagées des souillures du péché ». Feu du purgatoire, col. 2252, avec les références aux théologiens ayant usé de cet argument.

Voici l’argument en ce qui concerne le feu métaphorique du jugement : « Le feu dont parle saint Paul n’est plus probablement que le feu du jugement, par lequel les bonnes œuvres seront approuvées, les mauvaises rejetées. Or, ce n’est pas au dernier jugement qu’est manifesté tout d’abord ce qui aura été bon ou mal dans les œuvres des hommes ; le jugement dernier ne fera que manifester et confirmer devant l’univers entier ce qui aura été déjà fait au jugement particulier. Donc, d’après l’Apôtre lui même, il peut arriver qu’au jugement quelqu’un soit condamne à subir des peines pour des œuvres moins parfaites et que, cependant, il soit ensuite sauvé. Mais c’est précisément là tout dogme catholique du purgatoire. » Ch. Pesch, Prælectiones theologicæ, t. ix, n. 590. Le P. Prat, op. cit., p. 112, conclut lui aussi, d’après le texte de saint Paul, qu’ « il a des fautes qui ne sont pas assez, graves pour fermer le ciel et pour ouvrir l’enfer, et qui sont punies néanmoins d’un châtiment proportionné. Le dogme catholique des péchés véniels et celui du purgatoire trouvent ainsi dans notre texte un très solide appui ». Le P. Allo présente l’argument sous une forme nouvelle : « Nous avons interprète le « feu » au sens le plus étendu, comme l’ensemble des épreuves et des jugements auxquels le Christ, juge invisible d’abord, puis visible au jour du grand avènement, soumettra l’ouvrage de ceux qui ont voulu ou prétendu travailler pour Lui. Mais le ꝟ. 15, disions-nous, montre que ce n’est pas l’ouvrage tout seul, c’est aussi l’ouvrier qui pourra être atteint par la flamme, bien qu’il soit destiné au salut. Comme rien n’indique que ces épreuves du travail de chacun doivent toutes avoir lieu durant la vie présente, il faut reconnaître que Paul envisage, pour les âmes élues qui auront quitté ce monde, la possibilité d’une dette à acquitter encore envers Dieu. Où et quand cette dette leur sera-t-elle réclamée ? On ne voit que le moment où elles comparaîtront devant le tribunal du Christ (II Cor., v, 10 ; Rom., xiv, 10). Ce jugement du Christ ne peut être le assises générales de la parousie. Car, d’après le même chapitre de II Cor., le sort de quelques-unes au moins sera déjà actuellement fixé avant cette consommation ; là, et encore dans l’épître aux Philippiens, l’Apôtre exprime l’espoir de jouir déjà, avant la résurrection. de la compagnie du Christ. Est-ce que cette détermination sera exceptionnelle ? Et la masse des élus, jusqu’au jour de la consommation, restera-t-elle en suspens, dans une espèce d’incertitude sur le sort final qui l’attend, ou condamnée à une sorte de sommeil ? Puisque certaines âmes au moins y échapperaient, c’est donc que cette attente équivaudrait à une punition pour les déficiences de leur travail à élever le « temple de Dieu » autour d’elles et en elles. De toute façon, nous serions ramenés à l’idée d’un temps ou d’un état d’expiation après la mort corporelle, à un « purgatoire. » Ajoutons néanmoins que, pour ingénieuses qu’elles soient, ces exégèses diverses témoignent d’un « concordisme », dont le moins qu’on puisse dire est qu’il ne s’impose pas.

III. CONCLUSION.

Portée exacte du fondement scripturaire du dogme du purgatoire.

Il ne s’agit pas ici de discuter l’emploi qui a été fait de l’Écriture sainte pour démontrer l’existence du purgatoire, mais d’expliquer le sens objectif de la condamnation, portée par Léon. contre la 37e proposition de Luther. Cette condamna lion, avons-nous déjà dit, n’oblige pas à trouver dans l’Écriture une révélation explicite du dogme du purgatoire. La finale quæ in canone montre bien que Luther avait en vue de rejeter la preuve du purgatoire par le texte des Machabées, dont il contestait précisément la canonicité. C’est ce texte surtout qui manifeste l’existence d’une expiation dans l’au-delà et l’efficacité des suffrages pour les morts. Aussi, ne pouvant nier l’évidence, le réformateur nia la canonicité du livre tout entier, tout comme, refusant aux bonnes œuvres toute valeur méritoire, il nia résolument, impudemment En cours la canonicité de l'épître de Jacques. Ainsi la condamnation portée par Léon X visait non seulement à proclamer le fondement scripturaire du dogme du purgatoire mais encore à restaurer la canonicité du IIe livre des Machabées niée par Luther à l’occasion de ce fondement.

L’analyse des textes du Nouveau Testament invoqués en faveur de l’existence du purgatoire montre qu’ici l’argument dém instratif est moins direct, moins efficace, on doit même convenir que plusieurs de ces textes ne sont pas ml rem ou qu’il faut employer un véritable raisonnement théologique pour en tirer une indication en faveur du purgatoire. Quelques-uns néanmoins, notamment Matth., xii, 31-32, et I Cor., m, 10, d’une façon plus nette, Matth., v, 25, et peutêtre I Cor., xv, 29, d’une façon plus lointaine, suffisent à contrecarrer les prétentions de Luther. « Sans avoir par eux-mêmes rien de démonstratif, [ces textes | s’opposent néanmoins à son principe fondamental de la justification par la foi, qui soustrait le pécheur à toute pénalité, à toute expiation ultérieure ». Bernard, art. Purgatoire, dans Dict. apol., t. iv, col. 504.

C’est, semble-t-il, sur cet aspect de l’argument scripturaire qu’il aurait fallu insister davantage dans la polémique contre les protestants, lit c’est peut-être le meilleur point de départ pour défendre, contre des négations radicales, le développement de la croyance à l’expiation d’outre-tombe. D’ailleurs, le théologien catholique sait que l’assertion scripturaire explicite n’est pas nécessaire pour appuyer la révélation : l’enseignement oral d’une tradition divine ou apostolique sullit. De plus, le purgatoire n'étant pas un dogme dont la connaissance explicite est requise pour le salut, on peut concevoir que sa révélation a tout d’abord été plus ou moins implicitement renfermée dans le dogme général de l’expiation personnelle exigée par la justice divine, sous l'économie présente de la rédemption, pour nos fautes personnelles. C’est là, estimons-nous, le meilleur argument dans la polémique antiprotestante. Aussi, sans négliger la valeur implicite des arguments scripturaires rappelés ci-dessus, devons-nous maintenant envisager, dans le dogme général de l’expiation chrétienne, les premières manifestations de la croyance implicite au purgatoire.

II. La tradition orientale jusqu'à la fin du iie siècle.

I. fondements.

1o L’expiation personnelle dans l'économie de la rédemption.

1. L’héritage de la théologie juive.

L’Ancien Testament, avons-nous dit, tout au moins jusqu'à l'époque d’Lsdras, est orienté vers les rétributions collectives de ce monde : la Loi a pour but de rappeler au peuple élu de Dieu le rôle qu’il doit jouer ici-bas, pour y conserver et propager le culte du vrai Dieu. Les fautes contre la Loi ont pour compensation des expiations d’ordre légal, expiations purement rituelles par le sacrifice extérieur, indépendant, semble-t-il, des sentiments de pénitence intérieure qui devraient les commander.

Toutefois, à côté de l’expiation rituelle par le sacrifice extérieur, moyen officiel d’expiation, on devine souvent, on saisit parfois un autre moyen d’expiation, celui-là d’ordre intérieur : l’expiation du péché par la prière et la pénitence et souvent par l’intermédiaire du juste en faveur du pécheur. La Bible offre ainsi des exemples de pardon accordé en considération des mérites des justes : voir l’intercession d’Abraham en faveur des villes coupables, Gen., xviii, 17 ; l'épisode d’Abimélech, Gen., xx ; la médiation de.Moïse en faveur du peuple rebelle Num., xiv, 13-19 ; Samuel priant pour le peuple d’Israël, I Beg., xii, 19 sq. D’autres fois, c’est le coupable lui-même qui expie par la prière et la souffrance sa propre faute : le livre des Juges et les livres des Bois contiennent maints exemples de ces expiations salutaires, soit collectives,

| soit individuelles. Voir II Beg., xi-xii : péché et confession de David ; III l'.eg., xxi, 27-29 : crime et repentir d’Achab ; IV Beg., xx, 12-19 : faute d'Ézéchias, qui s’humilie sous le châtiment divin ; II Par., xxxiii, 11-13 : repentir de Manassé. Deux idées se trouvent ainsi fréquemment juxtaposées : la nécessité d’une expiation pour le péché, la loi de solidarité qui permet au juste de se substituer au pécheur. A vrai dire, cette seconde idée apparaît assez tard dansla théologiejuive. Dans le livre de Job, la soulfrance du juste demeure encore un mystère. C’est surtout dans la prophétie messianique du « serviteur de Jahvé », Is., lui, que la substitution du juste au pécheur est affirmée nettement. Ici, en effet, le serviteur de Jahvé désigne non l’Israël réel, ni l’Israël idéal, ni aucune collectivité, ni aucun personnage de l’Ancien Testament ; il désigne le Messie : le Sauveur innocent souffre pour les coupables et à leur place ; sa substitution présente un caractère pénal, et son expiation, de la part de Dieu comme de sa part, est une œuvre d’amour.

Au Ier siècle de notre ère, la théologie juive recueille cette idée de solidarité en vue de l’expiation. Elle insiste sur les mérites des pères, les bonnes œuvres des justes, l’efficacité de leurs suffrages. Voir surtout dans le IIe et le IVe livre des Machabées les jeunes martyrs sauvant Israël par leur sacrifice expiatoire. Sur tous ces points, on consultera A. Médebielle, L' expiation dans l’Ancien et le Nouveau Testament, i, l’Ancien Testament, Borne, 1925 ; art. Expiation, dans Suppl. du Dict. de la Bible, t. iii, col. 97 sq.

Pour faire sortir de cette double idée générale : l’expiation nécessaire à foute faute et l’efficacité de l’intervention des justes en faveur des pécheurs, l’essentiel de notre dogme du purgatoire, il aurait suffi de projeter cette doctrine dans la vie de l’au-delà. A part la brève indication relevée, dans II Mac, il ne paraît pas qu’une doctrine juive se soit formée à cet égard. Du moins allons-nous trouver dans le Nouveau Testament une indication en ce genre ?

2. L’expiation personnelle en face du mystère de la rédemption.

La rédemption par le Christ est une expiation du juste pour les pécheurs : cette conception n'était pas, nous l’avons vii, inaccessible aux Juifs, puisqu’elle s'était déjà affirmée dans le Serviteur de Jahvé annoncé par Isaïe et dans les sacrifices expiatoires offerts par les jeunes martyrs des livres des Machabées. A plus forte raison faut-il accorder au Christ de s'être, dans son sacrifice, substitué aux hommes pour leur obtenir de Dieu le pardon de leurs fautes et la réconciliation de leurs âmes.

Toute la question est de savoir si l’expiation offerte par Jésus-Christ est exclusive ou non d’une expiation personnelle, à laquelle les pécheurs seraient encore tenus à l'égard de Dieu. Élucider ce point de départ est absolument nécessaire à la théologie du purgatoire.

a) Les péchés remis par le baptême ne comportent pas cette expiation personnelle du pécheur. — La voie normale du baptême, par laquelle se fait à l’homme pécheur l’application première des mérites satisfactoires du Christ, dégage l’homme régénéré de toute obligation de satisfaire à Dieu pour ses péchés effacés. Non seulement la réparation est complète, mais le fruit de la rédemption est, pour l'âme régénérée, une élévation à la vie surnaturelle. Jésus est sauveur par la croix et il ne nous sauve qu’en nous associant à sa mort. Pour devenir salutaire, cette participation à la mort du Christ se réalise en chaque homme par le baptême :

Ignorez-vous que nous tous qui avons clé baptisés en le Christ Jésus, nous avons été baptisés en sa mort ? Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême (pour nous unir) à sa mort, a fin que, comme le Christ a été ressuscité des morts par la gloire de son Père, nous marchions aussi dans la nouveauté de la vie. Si, en effet, nous avons été unis 1 181

P | RG v l' » 'l RE. I.'l. XPIATION PERSON M.l.l.l

I is.

poui croître avec lui ».h l’Image de v « mort, noua le serons

aussi quant.. I i résurrection, sachanl que notre leil homme

lin-nu', i ce lui, n un que le i<>ii>s, iu péché toi) détruit,

que nous ne soyons plus les esclaves du péché, eu

quiconque est mort est itlTrnnchi du péché. Rom., v « 'T.

i c n’est pas le lieu de refaire l’exégèse de ce texte, et d’en défendre la signification vraie contre lis Lnterpré tations plus ou moins minimisantes des protestants. Cf. I. Pr.it. Lii théologie de saint l’uni, t. i. ». Jôl 268 ; t. il. p. 368 sq. s. mit Paul est tris ailirmatif : ous êtes torts.ai péché, c’csl à-dire vous avez dépouillé la larve du péché et vous êtes délivrés de sa tyrannie : Celui qui est mort est affranchi du péché. Rom., t,

l (ans cette affirmation, pas de restriction ni d’exception : tout ce nui s’appelle péché au vrai sens du mot.

péché originel, péchés actuels, s'évanouit dans le baptême ; il n’v, i plus aucune condamnation possible a porter contre ceux qui sont dans le Christ Jésus, l es Idolâtres, les impudiques, les voleurs, les détracteurs, les blasphémateurs d’hier, ont été purifiés, sanctifiés, justifiés.tu nom du Seigneur Jésus-Christ. I Cor.,

M. 11.

Cette Idée se retrouve dans l’affirmation de la morl lu vieil homme > crucifié avec Jésus-Christ. Ce vieil homme désigne tout ce que nous avons de commun

le premier Adam, tout ce que, par notre origine, nous tenons de lui comme chef de l’humanité. Mais tout cela disparaît par le fait de notre union avec le nouvel Adam. Saint Paul marque cette union dans la métaphore revêtir le Christ. Être baptisé dans le Christ, revêtir le Christ, être unifié dans le corps mvstique du Christ, ce sont la. pour saint Paul, trois formules exprimant en des termes différents la même réalité. Le baptême en Christ (cf. Gal., m. 27-28, z'.z re) a un double effet : le premier est de nous faire revêtir le Christ (XpUJTOV r/r^TioOs) ; mais ce revêtement n’est pas comparable a un manteau qui couvrirait notre âme ; c’est une forme vitale qui nous fait v iv re de la vie même du Christ, Le second effet est de nous unifier dans le Christ : -xvteç busïç, h Xpicrnô 'Itjooù. Être baptisé dans le Christ,

ir le Christ, c’est finalement la même chose qu'être incorpore a son corps mystique, qu'être fait membre vivant du Christ et qu'être par lui assujetti a la Force surnaturelle de l’Esprit -Saint, qui est l'âme de l'Église. fait de revêtir le Christ, d'être incorporé au Christ, ce renouvellement de notre vie spirituelle, toutes affirmations très nettes d’un changement total,

nt peu de place a l’hypothèse qu’un homme régénéré, lavé du péché, revêtu du Christ, entré en lui pour vivre de sa vie, puisse encore avoir quelque expiât ion a subir pour ses péchés. Toute la tradition exclut cette hypothèse, voir Baptême, t. ii, col. 175, 201-202, et, si l’enseignement catholique admet que les pénalités de cette vie demeurent encore et sont offertes au chrétien comme une épreuve sanctifiante et un motif d vie plus surnaturelle, il exclut toutefois, du chrétien : néré. l’obligation de se soumet I re a une expiai ion pour

ver la réparation des fautes remises par le baptême. Le concile de Trente est, d’ailleurs, afflrmatii sur ce point : dans la v session (péché originel), il reprend, au c. V, quelques uns des textes pauliniens que nous

- cités et ( onclut : I)ieu ne bail rien en (eux qui et il n’v a point de condamnation pour

qui sont vraiment ensevelis dans la mort avec

Christ par le baptême, qui ne marchent pas selon la chair, mais qui, dépouillant hv ieil homme et se revêtant du nouveau, qui est créé selon Dieu, sont devenus innocents, purgréablea a

ohéritiers de Jésus-Christ ; m sorte qu’il ne reste rirn du tout qui leur faut l^i’i* ! /mur entrer dans le ciel. nnw., n. 7

b) Il n’en est pas de mime dt >, mmis aprt s le

baptême ci remis par li p> nitenet. a. Que l 'enseigne ment de Jésus aux apôtres ait envisagé une rémission des péchés plus étendue que celle du baptême, c’csi i.i un

point de doctrine qui ne lail aucun < Ion le. La situation des fidèles dans le lovaume instauré par le Messie, c’est a dire dans l'Église, ne saurait être pire que celle dis Juifs, déjà réconcilies par les sacrements de l’ancienne l.oi ou le repentir et néanmoins retombés dans le péché. Or. toute la v ie publique du Sauv eur est rein plie d’invitations a la pénitence, adressées a des pé

cheurs de ce genre : Zachée, la femme adultère, la

pécheresse du lestin de Simon le Pharisien, le pai.il>

tique de Capharnaûm ; et le divin Maître semble prévoir encore la possibilité de pèches ultérieurs ; cf..loa.,

v. i i. Cette prévision de pèches postérieurs à l’entrée

dans le rovaume par le baptême se retrouve dans 1rs

paraboles du filet, « le la zizanie, qui marquent clairement dans l'Église même le mélange des bons et « les méchants, .lesus ne prémunit-ii pas les siens contre les

scandales futurs, Mail h., v. 29 30 ; XVIII, ô '. » ; contre

le danger de tomber, corps ci âme, dans la géhenne ? .Matth., x, 28 ; Luc, xii, à. Et ceux qui auront ainsi péché contre leurs frères seront punis au jour du jugement. Mail h., xxv. : ilIti. Or. ces péchés connu is par des chrétiens sont rémissibles. Celle vérité nous est suggérée tout d’abord par la volonté i et le souci du Pire que pas un des petits du Iroupeau du Christ ne périsse ; par la sollicitude du pasteur à chercher la brebis perdue el à la ramener au bercail. Matth., XVIII, lo-i i. Ensuite, par la formule même de la prière dominicale et le lu et commentaire qui la suit. Mail h., vi, 12 ; l l-l.">. Enfin, par la recommandation expresse faite a Pierre de pardonner non une lois, mais soixante-dix fois sept fois, c’est-à-dire pratiquement toujours. Matth., xviii, 22 ; cf. Luc, xvil, 3. Sans doute, en tous ces textes, il n’est pas nécessairement question de rémission sacramentelle des péchés ; il apparaît clairement néanmoins qu’est entrevue la possibilité de péchés à expier, même après le baptême.

D’ailleurs, il est de foi que Jésus a promis à ses apôtres, comme à Pierre, le pouvoir de remettre les [léchés commis après le baptême : ce pouvoir est renfermé dans le pouvoir plus général de lier et de délier. Mail h., xviii, 15-18 ; xvi, 18-20. Jésus a conféré ce pouvoir aux apôtres, après sa résurrection. Joa., xx, 19-23 ; cf. Matth., xxviii, 18-20 ; Luc, xxiv, 17-19. El les apôtres eux mêmes, en certains cas dont les Actes et les Épîtres pauliniennes semblent apporter quelques exemples, ont exercé ce pouvoir a eux conféré. Voir Pénitence, t. xii, ccl. 749-753. Le sens de Joa., xx, 19-23, a été clairement proposé par le conciledcTrente, sess. xiv, c. 1 ; mais le concile n’a pas défini que, sans l’interprétation de la tradition, ce sens s’impose d’une façon claire et certaine. Cf. Galticr, De pœnitentia, n. 134.

La rémission env isagée ici est « cri ainement distincte de la rémission « les péchés par le baptême. La puissance concédée aux apôtres a une extension p « ur ainsi dire infinie : -// TIVCûV àcpTJTe. Or. le baptême ne peut remet tre qu’une seule lois bs péchés. Il s’auit donc ici d’un pouvoir « brémission « pii, tout en renfermant la rémission attachée au baptême, s'étend au-delà. De plus, le pouvoi. concédé aux apôtres s’affirme comme un pouvoir judiciaire : remettre ou retenir les péchés, conforme a I i puissance générale de lier et (le délier qui avait été promise. Or, du pouveir « le baptiser, on ne saurait dire « pie c’est un pouvoir judiciaire ; ce n’est que très improprement qu’on y trouverait le pouvoir de retenir les péchés (ne pas conférer le baptême). Que, (s controverses baptismales, les Pères aient appliqué au baptême Joa.. xx. 2 t. il faut le reconnaître ; ils voyaient dans la collation du pouvoir rapporté par saint Jean un principe plus général dont ils 1183

l’UKC AT ni RE. I. EXPIATION PERSONNELLE

étaient en droit de déduire une application particulière relative à la rémission des péchés dans le baptême ; ils n’y ont pas u une Indication directe et propre <lu pouvoir de baptiser. Tout au contraire, un bon nombre-, surtout après la controverse novatienne, l’entendenl du pouvoir de remettre les péchés commis après le baptême. Ainsi Pacien, Epis t., iii, n. ii, P. L., I. xiii, col. 107(i-K171 ; saint Ambroise, De pœnitentia, t. II, n. (i-8, P. L., t. xvi, col. 407 ; saint Augustin, Episl., clxxxv, n. lit, P. L., t. xxxiii, col. 814 ; Serm., lxxi, n. 20 ; xcix, n. 9 ; ccxcv, n. 2, P. L., t. xxxviii, col. 455, 600, 1310. Et, faisant écho à cet enseignement traditionnel, le concile de Trente définit comme un dogme de loi la distinction du sacrement de pénitence par rapport au sacrement de baptême. (T. scs^. xiv, e. n ; sess. vi, e. xiv. Voir Pénitence, col. 1090.

b. — Mais, dans la rémission du péché par le sacrement de pénitence, toute la peine temporelle due au péché n’est pas nécessairement remise. — C’est ce qu’enseigne le concile de Trente : « Il est faux et contraire à l’enseignement divin d’affirmer que la faute n’est jamais remise par Dieu sans que soit remise également toute la peine due au péché. Les saintes Écritures fournissent en effet d’illustres et manifestes exemples, qui, même en dehors de toute tradition divine, réfutent péremptoirement cette erreur. D’ailleurs, le caractère même de la divine justice semble exiger que soient reçus différemment en grâce ceux qui ont péché avant le baptême par ignorance et ceux qui, délivrés une première fois du péché et de la servitude du démon, et ayant reçu le don du Saint-Esprit, n’ont pas craint de violer sciemment le temple de Dieu (I Cor., ni, 17) et de conlrister l’Esprit-Saint (Eph., iv, 30). La divine clémence se doit de ne point nous pardonner les péchés sans exiger de satisfaction, afin de nous épargner, l’occasion se présentant, de considérer tous péchés comme légers et dès lors, faisant injure et outrage à l’EspritSaint, de tomber dans des fautes plus graves, nous amassant ainsi un trésor de colère pour le jour de la colère. Hebr., x, 29 ; Rom., ii, 5 ; Jac., v, 3. » Voir Pénitence, col. 1101.

Les illustres et manifestes exemples auxquels fait allusion le concile nous montrent des justesdel’Ancicn Testament obligés par Dieu d’expier encore leur faille, même après qu’elle leur a été certainement pardonnée. Ces textes avaient été insérés dans le projet primitif du chapitre en question. Theiner, t. i, p. 589 a. C'était d’abord l’exemple d’Adam, que Dieu avait très certainement tiré de son péché, Sap., x, 2, et que cependant il soumit à de graves peines. Gen., ni, 17 sq. Marie, sœur de Moïse, reçut de Dieu le pardon de son péché, et cependant fut séparée sept jours du peuple. Num., xii, 14 sq. Moïse et Aaron, en raison de leur moment d’incrédulité — faute dont ils furent certainement pardonnés avant leur mort — furent empêchés par Dieu d’entrer dans la Terre promise. Num., xx, 1 sq. ; xxvii, 12 sq. ; Deut., xxxiv, 1 sq. De même, David, coupable d’adultère et d’homicide, voit, grâce à son repent ir, son péché pardonné. Mais, quant à l 'expiation de la faute, elle est transférée à l’enfant qui vient de naître et qui mourra en punition du péché de son père. II Reg.. xii, 13-14.

D’ailleurs, soit dans l’Ancien, soit dans le Nouveau Testament, les auteurs inspirés nous montrent Dieu promettant de remettre péché et peine due au péché si les hommes lui offrent des expiations compensatrices. Ainsi Dieu promet à Salomon fie pardonner les péchés et de purifier la terre au peuple converti qui aura invoqué son nom et fait pénitence de ses voies détestables. II Par., vii, 13-14. Ainsi Daniel conseille à Nabuchodonosor de racheter ses péchés par des aumônes, et ses iniquités par des miséricordes à l'égard des pauvres. Dan., iv, 24. Ainsi Tobie enseigne à son

(ils qu’il se délivrera par l’aumône de tout péché et de la mort et que de la sorte son âme n’ira pas dans le

ténèbres. Tob., iv, il. Ce prophète Joël montre que Dieu pardonne au pécheur, mais, à la conversion du cœur nécessaire, le pécheur ajoutera le jeûne, [et pleurs, les gémissements. Joël, ii, 12. Au repentir doit donc s’adjoindre l’expiation personnelle. C’est ce que rappelle Jean-Baptiste aux Juifs, les exhortant à faire de dignes fruits de pénitence s’ils veulent éviter la colère future. Luc, iii, 8. C’est aussi la pensée de saint Paul, félicitant les Corinthiens d’avoir eu 1p tristesse qui plaît a Dieu et pratiqué une pénitence salutaire. II Cor., ii, 10. Le même apôtre, qui a tant prêché la suffisance et la surabondance de la réparation c fierté par le Christ, attire l’attention des mêmes Corinthiens sur les maladies nombreuses et les morts fréquentes qui se produisent parmi eux, avertissements paternels de Dieu, qu’ils pourraient éviter en se jugeant eux-mêmes avec plus de rigueur. Et il note que ce jugement du Seigneur est un avertissement, pour que nous ne soyons pas condamnés avec le monde. Ceux qui avaient été ainsi punis n'étaient donc pas pécheurs impénitents ni morts dans l 'impénitence, puisqu’ils n’avaient été frappés que pour être sauvés. I Cor., xi, 31-32. On pourrait d’ailleurs ajouter d’autres textes ; voir plus loin ceux qui se rapportent à l’expiation antérieure au retour du Christ, col. 1187.

Ce ne sont pas là des cas particuliers, arbitrairement provoqués par la volonté divine. Ce sont là des applications d’un principe général qui vaut pour tous et que saint Paul exprime d’un mot : Dieu rendra à chacun selon ses ouvres. Rom., ii, 6 : « C’est le principe de la sanction morale, dans le Nouveau Testament comme dans l’Ancien et il ne faudra pas oublier que Paul luimême l’a posé quand il discutera la valeur relative de la foi et des œuvres. Or il n'était pas disposé à faire en faveur du chrétien une exception qu’il refuse à un Juif. » Lagrange, ÉLîlre aux Romains, Paris, 1916, p. 45, note 6. Cf. Gal., vi, 7 sq. ; I Cor., iii, 13-15 ; ix, 17 ; II Cor., v, 10 ; ix, 6 ; Eph., vi, 8 ; Col., iii, 24. On peut se reporter aussi à Ps., lxi, 13 ; Prov., xxiv, 12 ; Matth., xvi, 17.

c. — -Il faut donc conclure que l’expiation offerte par le Christ ne supprime pas nécessairement au pécheur rentré en grâce l’obligation d’une satisfaction pi is » nnelle pour les laides commises après le baptême et pardunnées par la pénitence.

A moins de rejeter toute la doctrine qu’on vient d’exposer, il faut accepter cette conclusion. Elleest niée par les protestants, qui, logiques avec leur doctrine sur la justification extérieure par la foi seule, ne peuvent concevoir qu’après le pardon du péché puisse encore subsister une peine à expier. Elle est également niée par les orthodoxes orientaux, qui refusent d’admettre la distinction du reatus culpæ et du reatus ptrnæ.

Pour étayer leur système du pardon total, les protestants en appellent surtout à saint Paul, Rom., viii, 1 : « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation contre ceux qui sont dans le Christ Jésus. » Saint Paul venait de parler des condamnations dont la Loi (mosaïque) avait été l’occasion et, rappelant l’abrogation de cette loi par le sacrifice du Sauveur, il conclut triomphalement : « Il n’y a donc plus de condamnation contre ceux qui sont dans le Christ Jésus. Les ennemis de l’homme, le péché, la mort, la concupiscence, la Loi elle-même, sont désormais impuissants devant la croix de Jésus. » L’exclamation de Paul résume cette victoire totale du Sauveur. S’il faut donner un sens plus précis à ce texte, ce sera le sens que lui reconnaît le concile de Trente, sess., v, c. v. Le concile cite ce texte pour prouver la rémission complète par le baptême de tout ce qui est péché. Après lui avoir accolé d’autres textes, le conelle coni lui ila ut nihil n - s retur.

m qu’il convient d’apporter .1 Hebr., . 1 i 18. I < but visé par l’auteur de

n- <.( de mettre m relief le contraste qui existe entre le sacritice du Christ et ci nid taron. La phrase, citée.ii’c' complaisance par les ennemis de l’expiation salle simplement la valeur infinie du ve de la croix en regard de la aleur resl reinte du Rce d’Aaron. Dans le sacerdoce a. ironique, le i prêtre « lirait. une fois l’an, un sacrifice solennel pour tout le peuple, et les prêtres d’un rang Inférieur offraient tous les jours d’autres sacrifices pour les particuliers. M. un l’oracle de Jërémic, xxxi, 33, 34, est se : Jésus-Christ, par une seule oblation a con-Mtnmé a jamais ceux qui ont été sanctifiés. Et là où il y a rémission des péchés, il n’y a plus d’oblation fh>ur le prWif.’Le sacrifice du Christ une seule fois offert vuilit a tout jamais pane que seul il est vraiment effl pour la rémission des péchés. Quelle que soit la rémission a intervenir, elle ne sera jamais qu’une applii du même sacrilice. Aucune opposition entre cette doctrine et la nécessité d’une expiation personnelle du pécheur pour les péchés commis après le baptême. Cette expiation, n’ayant de valeur que la valeur qu’elle emprunte aux mérites du Sauveur, n’obscur eit en rien la vertu-du mérite et de la satisfaction <le - Christ i. Conc. de Trente, sess. xiv, c. m. En ce qui concerne les péchés commis avant le baptême, l’assertion de l’épttre aux 1 lébreux trouve son application littérale : leur rémission est totale, même quant à ne, et n’appelle plus d’oblation. I : parole mise par Isaïe dans la bouche de Dieu. XLiit.’-.’">. marque la gratuité du pardon que le Seigneur est prêt a accorder a Israël, malgré ses crimes et ses Ingratitudi -t moi-même qui effacerai tes ini quités à cause « le moi, et de tes péchés je ne me souviendrai pas. C’est détourner la phrase de son sens que de lui faire signifier l’inutilité d’une expiation personnelle pour des pèches personnels. El il faut en dire autant d’un passage similaire de Jérémic, xxxi. 34 : Je pardonnerai leur iniquité et de leur pèche je ne nie souviendrai plus.

Précisément dans la discussion relative au purgatoire, les Grecs s’étonnèrent à Florence de la distinction apportée par les Latins entre la coulpe et la peine. Cette distinction leur paraît contraire a des laits certains et incontestes. On ne voit pas les princes, déclare le mémoire des Orientaux, poursuivre le châtiment d’une offense qu’ils ont pardonnée ; a plus forte raison Dieu, dont le plus insigne attribut est la honte, i voit-on dans le Nouveau Testament le puhlicain retourner non seulement absous, mais encore jus

ir. 14 ; dans l’Ancien, Manassé, après

s’être humilie, délivre de ses fers et rétabli sur son . II Par., xxxiii, 13 ; les Ninivites, qrâce a leur pénitence, soustraits.mx coups qui les menaçaient, Jon.. m. ">. Le paralytique reçoit, avec le pardon de son péché, le redressement de son i orps. Matth., ix. 6. On ne trouve pas dans l’histoire e< i lésiasl ique et dans la doctrine chrétienne trace d’une telle distinction, d, absous de son adultère et cependant frappé par la perte de son fils, n’est pas concluant. La perte de cet enfant fut moins un eh.it i ment qu’une peine insignifiante ; David eut de la même femme un autre fils qui non seulement vécut, mais hérita de son trône : ce fut le grand Salomon. Donc. on ne peut poser en principe général qu’après le pardon de l’offense il reste à subir une peine. Pour démentir ce principe, l’exemple du baptême suflll

irdon de. ! < baptisé reçoit la remise de

toute peine. Tels s « , n t les arguments mis en avant par

, les de II’1

DICr. DE rHÉOl. CATBl "

publies |ui Mgr Petit, P. 0. de Gradin Nau, l. xv, iasc. i < i d’Me--, 1, 1 question du purgatoire nu concile .dans Gregorianum, t. iii, 1922, p. 38. Sans doute nous continuons.1 nous Inspirer du mémoire de Marc d Êphèse il tau ! distinguer le reatus eulpte « lu rtatut ponte. Mais il ne les faut pas séparer, comme le tont les Latins. Remise la faute, remise aussi est la

peine par le fait même. C’est pourquoi die/ les Grecs

l’absolution n’esl donnée aux pénitents qu’après l’ac complisseinent de Vépitimit ou satisfaction. Mari die tlngue frôla sortes de rémissions : la première est celle

du baptême, qui ne comporte point de peine, mais est

toute grâce ; la seconde, après le baptême, exige l’accomplissement d’une peine : la grvce divine y a mon s

tic part, la Volonté h mua me s exerçant a apaiser I >icu. La troisième est dans l’autre vie : au moment de la

mort. l’Église, en absolvant le pénitent, lui remet par

le fait toute la peine temporelle qu’il aurait du accoin plir et qu’il n’a pas accomplie ; niais il reste les pèches

véniels, pour lesquels les âmes justifiées ne seront pas

châtiées : elles devront simplement attendre leur déli vr.iucc, soil à la fin du monde, soit au moment que leur procurera l’intercession des vivants. Voir les mêmes documents ; cf. P. Venance Grumel, Marc d’Êphèse, dans Estudis franciscans, 1926, p. 1 l’J (tiré à part, p. 20).

On verra plus loin les hésitai ions et les arial ions de Marc d’Éphèse et des Grecs sur ce sujet. Ce qui donne à penser à priori qu’à la doctrine consistante de la théo

logie latine la théologie orientale est bien embarrasser

pour opposer une doctrine terme et solide. Pour l’ins tant, il suilit de taire remarquer la fragilité des arguments opposes par Marc d’Ephèse à la thèse catholique. Il est tort vrai que les arguments scripturaires invoqués par les théologiens latins sont loin d’être pleinement démonstratifs, el c’est vraisemblablement

le motif qui les a fait éliminer par les Pères de I renie

de la rédaction définitive du c. vin de la xiv session.

Néanmoins, eu lis interprétant dans le sens d’une

expiât Ion a offrir à I >ieu en vue d’effacer le reatus pa ns qui peut encore subsister après la rémission de la coulpc. il semble qu’on soit plus près de la vérité qu’en adoptant les interprétations assez arbitraires de Marc d’Ephèse. D’ailleurs, c’est l’enseignement de la tradition qui fixe le sens de la révélation, el ici l’enseignement traditionnel, manifesté par les Pères et par la discipline pénitentielle de l’Église, a été authentiquement promulgué au concile de Trente, sess. xiv, c. VIII, can. 12 ; voir Pênitj nce, col. 1102, 1110. Les misons théologiques ne manquent pas, qui justifient cel te doctrine. Voir S viisi i : i [ON.

On voudra bien d’ailleurs faire deux remarques : y.t le cas de la rémission totale, coulpe et peine, réali sée dans le baptême, est admis par les Latins, voir col.H80, sans qu’il % voient un démenti infligé : i la loi

raie de l’expiation personnelle requise p les

fautes commises apr> is le baptême ; (3 I cel te loi générale est même compatible avec des e, is exceptionnels, où le sentiment de contrition est tellement ardent qu’il obtient de Dieu une rémi S totale de la peine.

2o I.r point de départ dt la doctrine du purgal l’expiation nécessaire projetée dans la perspective du jur/rment. — 1. Rapport de l’expiation au jugement dans le Nouveau Testament. — Si l’on examine attentivement les exhortations ; i la pénitence dont est émaillé le Nniiv 1 : 1Il lestament, on constate que fréquemment « es appels sont adressés aux hommes pour les pr< | au jugement que doit prononcer le Messie.

Saint Jean Baptiste ne distingue pus encore nettement la première et la seconde venue du Me

lies pénitence, dit-il, car le règne des deux est proche… Faites de dignes fruits de pénitence… I ><

est] lia racine des arbres : tout arbre qui

T.

XIII

38.

ne fait pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu. four moi, je vous baptise dans l’eau pour la pénitence ; mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi… Lui vous baptisera dans l’Esprit et dans le feu. Il a le van en main et il nettoiera son aire, et il amassera son froment dans le grenier, mais il brûlera la balle dans un feu qui ne s'éteint pas. « .Mal th., iii, 3, 8-10 ; Luc, iii, 3-9. Le baptême de feu dont il est ici question ne saurait être que le jugement. Voir Baptême PAR LE FEU, t. II, COl. 359.

Jésus lui-même prêche la pénitence en raison de la proximité du royaume. Matth., iv, 17. Il vaut mieux s’imposer la perte volontaire d’un œil ou d’un membre que d’exposer le corps entier à aller dans la géhenne. .Matth., v, 29 ; cf. Marc, ix, 46. Et c’est la pensée du royaume qui motive cette austère mesure. Matth., xvin, 3 sq. Les malédictions proférées contre Chorozaïn, Bethsaïda et Capharnaùm, qui, malgré les miracles du Christ, n’ont pas fait pénitence, se rapportent à leur sort au jour du jugement. Matth., xi, 21-24 ; cf. Luc, x, 13-15. Les hommes de Ninive se lèveront au jugement contre la génération incrédule, car eux du moins ont fait pénitence à la prédication de Jonas, et cependant le Christ est plus que Jonas. Matth., xii, 41 ; cf. Luc, xi, 31-32.

D’ordinaire, la prédication apostolique, telle que nous la font connaître les Actes, se contente d’inviter les hommes à la pénitence. Toutefois, quand les apôtres développent leur pensée, il apparaît bien que cette pénitence prépare le retour du MessieJuge : « Repentez-vous, déclare Pierre aux Juifs de Jérusalem, et convertissez-vous, pour que vos péchés soient effacés, de façon que viennent les temps de rafraîchissement venant de la face du Seigneur, et qu’il envoie celui qui vous a été destiné d’avance comme Messie, Jésus. » Act., iii, 19-20. Le repentir et la conversion doivent ainsi précéder, afin que puissent venir des temps de rafraîchissement et qu’ait lieu la parousie du Christ. Cf. E. Jacquier. Les Actes des apôtres, Paris, 1926, p. 111. Un écho de cette prédication, à l’adresse de tous les méchants en général se retrouve dans II Petr., ii, 1-9. Voir aussi Jac, v, 3-8, et Jude, 15, 21.

Saint Paul ne parle pas autrement devant les Athéniens : « Passant par-dessus ces temps d’ignorance, Dieu fait savoir maintenant à tous les hommes, en tous lieux, qu’ils se repentent, parce qu’il a fixé un jour où il doit juger le monde en justice, par un homm. qu’il a destiné, fournissant à tous la foi, en le ressuscitant d’entre les morts. » Act., xvii, 30-31. Paul voulait préparer les Athéniens à entendre le nom de Jésus : il leur annonce que Dieu exige des hommes la pénitence en vue du jugement que présidera celui qu’il a déjà ressuscité. Cf. Jacquier, op. cit., p. 538-539. Dans son épître aux Romains, s’adressant au Juif pécheur et orgueilleux, le même apôtre l’exhorte à la pénitence : « Estimes-tu que tu échapperas au jugement de Dieu ? Méprises-tu la richesse de sa bonté, ignorant que la bonté de Dieu t’invite au repentir ? Et alors, par ton endurcissement et ton cœur impénitent, tu t’amasses un trésor au jour de la colère et de la manifestation du juste jugement… » Rom., ii, 1 sq.

Les lettres aux sept Églises, dans l’Apocalypse, sont riches en enseignements de ce genre, bien qu’il ne soit pas toujours aisé de discerner la perspective eschatologique dans les menaces ou les promesses qui y sont faites. Jean fait parler le Christ. A Éphèse : « Convertistoi, et tes premières œuvres fais-les (de nouveau) ; sinon, je viens à toi. » ii, 5. A Pergame : « Convertistoi ; sinon, je viens à toi promptement. » ir, 16. A Thyatire : « Je lui ai donné (à la femme Jézabel) du temps pour qu’elle se convertisse… Mais à vous, et à tous ceux qui n’ont pas cette doctrine…, je ne jette pas sur vous d’autre fardeau : seulement, ce que vous avez,

tenez-y, jusqu'à ce que je vienne. » ii, 21, 24. Suit l’annonce du triomphe spirituel de l'Église, qui se consommera à la parousie. Cf. B. Allô, L’Apocalypse, l J aris 1921, p. 34. A Sardes : « Rappelle-toi comment tu as reçu et tu entendis, et observe-le et convertis-toi. Si tu n’es pas vigilant, je viendrai comme un voleur et tu ne sauras nullement à quelle heure je viendrai sur toi. m, 3. A Philadelphie, il recommande de continuer vigilance et fidélité et ajoute : « Je viens promptement. » iii, 11. La tiédeur de l’ange de Laodicée appelle une menace, iii, 16, qui n’est pas purement eschatologique ; mais la promesse faite au victorieux de s’asseoir sur le trône messianique est eschatologique et appartient à la perspective de la vie future. Voir aussi Apoc, xvi, 15.

Encore que ce rapport de l’expiation nécessaire au jugement ne signifie pas nécessairement que ce jugement soit prochain, la pensée de la première génération chrétienne semble s'être volontiers complu dans la proximité du retour de Jésus dans les fonctions de juge souverain : cette pensée correspondait d’ailleurs à une préoccupation fondamentale de l’enseignement du Christ : « Il suffit d’ouvrir tant soit peu l'Évangile pour reconnaître aussitôt que la parousie est bien véritablement l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin, le premier et le dernier mot de la prédication de Jésus ; qu’elle en est la clef, le dénouement, l’explication, la raison d'être, la sanction ; que c’est enfin l'événement suprême auquel tout le reste est rapporté et sans lequel tout le reste s’eifondre et disparaît. » Billot, La parousie, Paris, 1920, p. 10. Nous n’avons pas à discuter ici le problème de la croyance personnelle et de l’enseignement des apôtres relativement à la proximité de la parousie. Nous constatons simplement un fait inhérent à nombre de prophéties : deux événements, dont l’un est le type et l’image de l’autre, quoiqu’il en soit séparé par des siècles dans sa réalisation historique, sont placés par la prophétie sur un plan unique, comme si l’un coïncidait dans le temps avec l’autre, quant à leur propre réalisation. Ainsi, la prophétie faite par Isaïe de la Vierge mère, dont la réalisation est présentée pour ainsi dire comme coïncidant avec les événements qui la provoquent ; ainsi encore la prophétie faite par Jésus-Christ concernant la fin du monde et dont la réalisation semble se confondre avec la destruction de Jérusalem qui en est l’image anticipée. Ainsi, dans le cas présent, le jugement particulier qui. pour chaque homme pris individuellement, marque en réalité le retour du Christ-Juge, est-il confondu, dans l’enseignement du Nouveau Testament, avec le jugement général dont il est la préparation et, pour chaque âme, l’anticipation. Voir sur ce sujet, Jugement, col. 1765.

Aussi, les exhortations à la vigilance et à la pénitence en vue du jugement s’expliquent sous la plume et dans la bouche des écrivains inspirés, parce que « la parousie, telle qu’elle nous est donnée par la révélation du Nouveau Testament, se présente à nous sous deux aspects bien différents qu’il faut avoir constamment sous les yeux… : premièrement, dans sa réalité future, au jugement général, et secondement, dans ses anticipations journalières en la mort de chaque homme eu particulier. Ce que saint Jérôme a très bien exprimé en disant : « Le jour du Seigneur (ou de la parousie) : « entendez par là, soit le jour du jugement, soit le jour « de la sortie du corps de chacun d’entre nous, car ce « <iui se fera au jour du jugement pour tous les hommes « pris dans leur ensemble s’accomplit au jour de la < mort pour chacun d’eux pris individuellement. » Billot, op. cit.. p. 145. Cf. saint Jérôme, In Joël., ii, 1, P. L., t. xxv. col. 965.

Cette observation proposée, un fait reste indéniable : les chrétiens de l'âge apostolique crovaient toucher à Il-"

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. LE FEl in JUGEMENT

I 190

l.i fin ilt >s temps, el saint Pierre te v oj ait contraint de justifier les longs délais du Christ. Il Petr., iii, 9. l>' « >ù l. « propension de la première génération à ne considérer comme temps propice a l’expiation pour le péché que le temps de la vuprésente, ou s’il tant rapporter une expiation a la vie future, le moment suprême du logement.

2. Le* feu du jugement <, première forme de la croyance au purgatoire. 1 'enseignement du Christ envisage la possibilité d’une expiai ion dans le siècle a venir. Mali h., xii, 31-32. Voir ci dessus, col. 1170. Mais quelle pourra être cette expiation si la parousic est proche et le Jugement imminent ?

(i / L’indication de saint Paul. - (est ici, semble-t-il, que 1 Cor., iii, ni i. intervient utilement. Nous avons texte donne plus haut (col. 1 17 h la doubleexégèse le. avec la preuve qu’en tirent les théologiens en laveur de l’existence du purgatoire. Mais, en replaçant te dans la ligne de l'évolution doctrinale de la croyance au purgatoire ; il paraît bien qne le mot feu Lirait ici désigner que le feu métaphorique du jugement. L'Écriture a toujours représenté le feu comme un élément des manifestations de la justice divine. oir li l DU JUGEMEN i. col. 2239. Sans doute, dans la pencomplexe des auteurs sacrés, à l’idée du feu métaphorique du jugement se mêle souvent l’idée du feu réel de la conflagration générale ou de l’enfer. Cf. II Petr., iii, 12 ; Matth.. xx, 24, 1Il hess., i, 8. Il est probable qu’en employant ici le mot feu, saint Paul fait une allusion au moins lointaine à tout cet ensemble. Mais, puisqu’il s’agit d’un feu qui éprouvera tout le inonde, il ne peut être question du feu de l’enfer ; puisqu’il s’agit d’un feu qui s’attaquera aux œuvres plus ou moins bonnes de chacun, il ne peut être question du leu de la conflagration. Toutefois, le feu métaphorique du jugement, réduit à la simple illumination de l'âme projetant, sur le bien et le mal dont elle a à rendre compte, la sentence divine, n’explique pas encore le profond du texte de saint Paul. Ce feu métaphorique est aetif, il éprouve les actions des justes afin d’en manifester la valeur réelle, il corrige les défauts qui v sont encore attaches puisqut par cette rectification même, il procure le salut a l'âme jugée. Ainsi, dans saint Paul, le jugement paraît avoir une double raison B en ce qui concerne les ouvriers de l'Évangile, à-dire les justes : t, .ul il abord, éprouver la valeur tirs actions et, au besoin, purifier en elles ce qui est encore imparfait ; le feu éprouvera ce qu’est l’ouvrage de chacun : l’ouvrage peut subsister, il peut être consumé ; ensuite, accorder la récompense : si l’ouvrage subsiste, » n recevra une récompense ; si l’ouvraue est iime. la récompense pour cet ouvrage défectueux rdue. mais le jugement divin donnera cependant avricr une sentente de salut. En raison d’une unique perspective, ces deux effets sont présentes sur le même plan. En realite, ils devraient être sépari purification précédant la sentence d’admission tu bonheur du salut. C’estle travail théologique des siècles rieurs qui dégagera cette double perspective, te double action du jugement correspond d’ailleurs parfaitement a ce que saint Paul nous dit de l’objet du jugement, même lorsqu’il niparle pas de feu. Voir JuŒMl NT, col. 1758. Si chacun doit recevoir rie I selon ses <i u Ma formule qui résume le

mieux la pensée de l’Apôtre — il est bien évident que i uvres imparfaites devront d’abord être corrigées de leurs imperfections avant qui l’ouvrier puisse aspii la récompense. Le jugement divin sera donc recitif de toutes les anomalies, petites et grandes, rie Ire moral d’ici-bas.

Mime perspective unique chez / « ; autre » apôtres. — ' au jucement de Dieu que saint Jacques rapporte ivre ultime ri., salut ou île la damnation : Il n’y a

qu’un législateur et qu’un juge qui puisse perdre et sauv er. IV, 12. I.e jugement sera plus ou moins sevei v m. 1. sans miséricorde pour celui qui n’a pas fail

miséricorde, ii, 13, et cependant la miséricorde s'éU

vera encore au dessus du jugement, ///<I. Il il s’agil bien ici du jugement lin. il. qui coïncide avec l’avcuc ment du Seigneur, v..S 9.

Saint Pierrt, reprenant une formule de saint Paul, rappelle que I >icu juge sans acception de personne

selon l'œuvre de chacun, i Petr., i, 17. Bientôl se pro

dlllra ce jllgement qui commencera par la maison de Dieu, C’esl a dire par les justes. el. si le juste est a

peine sauve, l’impie et le pécheur ou se présenteront ils.' iv. 17 18. Cette difficulté du salul pour les justes

au moment du jugement attesterait que le jugement devra purifier leurs.'unes des restes d’imperfections.

la chose est dite equiv aleinmeut des le début de l'é pitre. OÙ l’apôtre déclare que lui et les liricles ont été régénères… eu vue du salul qui doit être révélé a la lin

des temps, Or, peu de jours les en séparent, el cepen

daut il leur faut encore être cont listes par diverses leu tations, afin que l'épreuve de leur loi, bien plus pré cicuse que l’or (qu’on éprouve par le feu), soit trouvée

digne de louange, de gloire et d’honneur, à la révélai ion

tau jugement) de Jésus-Christ, i. 5-7. La deuxième épttre, corrigeant l’impatience des chrétiens à l'égard du jour du Seigneur, fait de multiples allusions au feu du dernier jour ; mais. ici. de toute évidence, il s’agit d’un feu réel de la conflagration. Quant au jugement lui-même, il se produira après le temps que la patience divine laisse a tous pour faire pénitence, ni, 5-12.

l’eu d’indications dans les épttres johanniques ; toutefois, c’est encore au jour du Seigneur que l’apôtre rapporte la confusion des pécheurs, la confiance des justes, I Joa., ii, 28, et la manifestation publique de leur filiation divine, m. 2 ; cf. iv, 17.

L'épître de saint Jude contient, au contraire, un enseignement direct sur lu-livre tpii s’accomplira au jugement. Empruntant la prophétie d’Hénoch, elle annonce que le Seigneur vient exercer son jugement contre tous les hommes sans exception, convaincre les impies touchant les œuvres d’iniquité qu’ils ont faites. tandis que les justes pourront attendre la miséricorde rie Notre -Seigireur Jésus-Christ, 15, 21. Toutefois, les justes devront s’efforcer encore de sauver les pécheurs

en les arrachant au feu. Ici. l’allusion au feu du (1er nier jour — conflagration, enfer, jugement, qui sait '.' .si claire.

Dans l’Apocalypse, pas d’autre perspect ive que celle du jugement final. Voir JUGEMENT, col. 1 7li.'S. Du point rie vue qui nous occupe, une formule surtout est a nie nir a cause de sa généralité même : 1 >ieu rendra à cha i un selon ses uuv res. Cf. H. 2 : i : xx. 12. 13 ; xxii. 12. Dans cette généralité même, il y a place pour la proba lion des œuvres imparfaites.

i Les Pères apostoliques. On retrouve chez eux la même attitude. I.e feu de l'épreuve, dans la Didachè, xvi..">. ne se rapporte pas au jugement. Voir Fi.i iu .m ai mi xi. col. 22 il.

Parmi lis trois dogmes du Seigneur ». le pseudoBarnabe énumère i la justice du jugement, principe el fin de la foi. i. (i. Ce jugement sera accompagné de l.i peine éternelle du feu pour les impies. Mari. Polyc., xi. 2. (, )ui nie ce jugement est le premier-né de Satan. i.jiisi. Polyc, vu. i : ci. // Clan., rx, i : Barn. Bpist.,

iv, 12.

I.e jugement, ici encore, est présenté comme rectifiant les anomalies morales de la vie présente et de v a ni rendre a chacun selon ses œuvres. <i. / Clan., xxvii, i : I brinas. Simil.. I. m. 6. Dans la Suiiil.. IV. Herma ! établit une comparaison qui rappelle un peu I Cor.. m. 11-15 : le jugement futur révélera la valeur des

œuvres 'hchacun ; ces œuvres sont comparées.< de I lui

l’UHt ; ATOI RE. 1/ E XPIATION D’OUTRE-TOMBE

1 102

arbres ; les arbres que la vie future rendra verdoyants sont les œuvres des justes ; ceux que la vie future laissera secs et arides sont les œuvres des impies, œuvres destinées à être consumées par le feu. A L'égard des justes, le jour du Seigneur est un jour de miséricorde ; aussi ne devons-nous pas nous laisser troubler par les injustices de la présente vie. // Clem., xviii-xx, 4. De toute évidence, c’est au juge souverain que fait allusion Hermas, Simil., IX, vi, 2 sq., faisant entrer en scène un homme de haute taille, dépassant la tour et venant, au milieu d’une multitude d’autres, inspecter la valeur des matériaux. Bien plus, vii, 1-2, ce juge ordonne de corriger les défauts des pierres reconnues impropres à la construction : celles qui pourront être rectifiées seront employées, les autres définitivement rejetees. Bien qu’il soit difficile de rapporter au jugement dernier cet examen et cette rectification des pierres non employées, la personnalité du juge permet de songer qu'à ce moment-là il y aura vraisemblablement une rectification de ce genre.

Il faut remarquer, en effet, que déjà les Pères apostoliques ont une sorte d’intuition que la rétribution des récompenses et des peines commence dès la mort. Voir Jugement, col. 1767. C’est en germe, la doctrine du jugement particulier, mais c’est aussi, posée devant la théologie, la question d’une expiation antérieure au jugement dernier, déjà préparée cependant par le premier jugement subi par l'âme au moment de sa séparation d’avec le corps.

II. PREMIERS DÉVELOPPEMENTS DE LA DOCTRINE D’UNE EXPIATION D’OUTRE-TOMBE. — i° Remarques préliminaires. — Au moment où, vers le milieu du ne siècle, la pensée chrétienne commence à systématiser les doctrines eschatologiques, il semble que plusieurs causes soient intervenues pour empêcher et même parfois entraver l'évolution de la croyance à une expiation d’outre-tombe. Nous n’insisterons pas sur le millénarisme (voir ce mot, t. x, col. 1760), qui d’ailleurs ne fit jamais figure d’enseignement officiel dansl'Église ; mais deux points semblent devoir plus particulièrement être retenus.

Au premier, il a déjà été fait allusion à Feu du purgatoire, col. 2252, et à Jugement, col. 1768. Au ne siècle, la conception du scheôl judaïque s’est trouvée presque naturellement transposée dans la théologie chrétienne, tout en subissant de notables perfectionnements. La croyance à la proximité de la parousie aidait d’ailleurs singulièrement à cette transposition. Le Christ devait revenir bientôt ; pendant ce temps, que feraient les âmes déjà séparées de leur corps ? L’unique perspective réunissant à la fois l’expiation et le jugement n'étant pas dédoublée, il s’ensuivait que l'état des âmes séparées était un état d’attente, dans le bonheur ou le malheur déjà entrevu du jugement final. A la différence des âmes du scheôl, « ce sont des âmes vivantes, capables de joie ou de souffrance, ayant déjà reçu comme un acompte de leur misère ou de leur félicité futures ». Labauche, Dogmatique spéciale, t. ii, Paris, 1911, p. 378. Ainsi, saint Justin pense que les âmes attendent, celles des bons dans un endroit meilleur, celles des mauvais dans un endroit pire, le jour du grand jugement. DiaL, v, 3, P. G., t. vi, col. 488. Mais le moment de la véritable rétribution est reporté au jugement lui-même, et sur ce point, tous les apologistes sont d’accord. Jugement, col. 1769.

Un commencement timide d’explication se trouve cependant chez saint Irénée. Quoi qu’ait prétendu Bellarmin, Irénée partage de tout point le sentiment de Justin sur le délai d’attente des âmes après la mort. "Voir Irénée, t. vii, col. 2499 sq. Mais « l'état des justes qui attendent la résurrection semble susceptible de progrès. Le progrès est la loi de la vie présente et de la vie future. Ut semper quidem Deus

doceal, homo nulem semper discal qu : c sunt n Deo, cette formule, t. II, c. xxviii, n. 3, l>. (', ., t. vii, col. 806, et la suivante, t. IV, c. xxxvii, n. 7, cul. 1 lui : uti… tandem aliquando maturus fiât liomo, in tantis maturescens ad videndum et capiendain Deum, s’appliquent à tout le développement de la vie humaine ». Art. Irénée, col. 2500. Ce progrès dans l'état d’attente, cette « maturation » des âmes, est une vue nouvelle, dont on peut regretter l’imprécision, mais qui à coup sûr s’accorde avec l’idée d’une purification incessante dans la vie future.

Nous retrouverons plus loin, à la base des négations de l'Église orthodoxe concernant le purgatoire, cette doctrine de l'état d’attente des âmes dans l’au-delà.

Un second point ne saurait être négligé et il se rapporte plus ou moins directement à la discipline pénitentielle. Mais ici nous manquent les documents positifs, et nous ne le pouvons proposer qu'à titre de conjecture vraisemblable. Si la possibilité d’une seconde pénitence après celle du baptême fut si parcimonieusement concédée par l'Église ou si l'Église ne la découvrit qu’avec prudence aux nouveaux chrétiens, c’est que l'Église entendait tenir la vie morale de ses membres à la hauteur d’idéal que lui avait léguée la première génération. Faire entrevoir, au lendemain du baptême, que des facilités de pardon pouvaient être accordées eût été une prime à la lâcheté. Voir Pénitence, col. 761. D’où il semble qu’on puisse légitimement inférer qu’une prédication trop affirmative d’une expiation dans l’au-delà eût encore ajouté à ces tentations de lâcheté. L'Église n’y arrivera que progressivement, poussée parles événements, comme progressivement elle est venue à la pénitence fréquemment réitérée, à la satisfaction facile accomplie seulement après le pardon reçu. Cette seconde remarque serait susceptible d’expliquer le silence de plus d’un apologiste de la fin du ii c siècle.

2° Développement de la doctrine d’une expiation d’outre-tombe en Orient : Clément d' Alexandrie et Origène. — On a voulu voir dans ces deux auteurs les inventeurs de la doctrine du purgatoire. Voir l'étude de G. Anrich, Clemens und Origenes als Begrùnder der Lettre vom Fegfeuer, dans Theologische Abhandlungen, Tubingue 1902. L’auteur allemand, s’emparant de la doctrine du progrès incessant qui est à la base du système philosophique des deux Alexandrins, montre une application de ce principe dans la loi de purification universelle qui, dans l’autre vie, aboutira à la restauration de tous les êtres dans l’amitié de Dieu. La doctrine générale de l’apocatastase, transposée à une catégorie de fautes. telle serait l’origine du dogme catholique du purgatoire. Sur la théorie de l’apocatastase chez Clément d’Alexandrie, voir Clément d’Alexandrie, t. iii, col. 186-187, et surtout Enfer, t. v, col. 56-57 ; chez Origène, voir Enfer, col. 58-59, et Origène, t. xi, col. 1547-1548.

La vérité, semble-t-il, est que Clément d’Alexandrie et Origène, chacun à leur façon, ont formulé un premier essai de systématisation sur l’expiation purificatrice des âmes encore capables de pleinement se réconcilier avec Dieu. Si le principe de progrès intervient ici, c’est à juste titre. L’erreur parallèle de l’apocatastase ne doit pas nous empêcher de reconnaître en Clément et en Origène, les deux premiers témoins explicites de la croyance au purgatoire.

1. Clément d’Alexandrie.

Bien que la doctrine de

Clémentsoit assez confuse en ce qui concerne le caractère médicinal des châtiments d’outre-tombe infligés par Dieu aux impies, et qu’on ne puisse conclure à la théorie de l’apocatastase qu’avec vraisemblance, les critiques s’accordent généralement pour trouver en Clément une réponse ferme en ce qui concerne les âmes pécheresses, mais non scélérates. Déjà, en effet, pour 1 L93

PL RGA1 OIRE. il XPIATION D’OUTR E-TOMBE

l L9

, iquer le rôle du châtiment n l'égard des pécheurs e en ie.il dist ingue expressément en ceux a deux s : celle des corrigibles et celle des incorrigibles :.i i i. urd des premiers, le châtiment est 8 xj>.'.>. i il dis autres, il est xoXa<rru « ç.Strom.,

1. wi. P, (. t. viii, col. 1364 ; cf. I. xiv, t. i. Rien d'étonnant qu’après la mort on puisse encoi oi ic des coi i igibles dans l’au de la : elle est constituée par des pécheurs ré ivec liieu au lit de la mort, mais sans avoir eu le temps île faire pénitence de leurs fautes, sur lis . la justice de l>icu s’exercera avec bonté e( sa bonté s’exercej i justice. Ces âmes pécheresses

sanctifiées (àvucÇeiv) par un feu intelligent, tanne le feu punira cgalemen rats : que ce feu sanctifie, non les chairs, mais u n’est pas un feu, consumant imme le feu de la forge : c « si un teu Intell rant l 'âme, qui est 1 1 avei , Vil. vi, P. G., t. i. col, 140 ; cf. V, xr> ' » « lément montre toul d’abord qu’il n’est pas possible d’interpréter d’une manière purement métaphorique ii teu purificateur. Le sens indique une cause extérieure à l'âme, devant provoquer en elle et en di a volonté même une lion purificatrice. Il ne peut être question, liant, d’envisager un feu qui ressemblerait à notre feu matériel : Clément l’exclut positivement, un feu « l’une nature spéciale, un feu intelligent, qui pénètre les i-.j>rit ^ el les purifie de Unis souillures. Cf. li. Schmid, Dos ], I ; ixen, 1904, p. 98. Pan-. Slrom., VI, xi. Clément rappelle que la purifleation dis fimes se fait au moyen des châtiments néires | oiir parvenir à la demeure réservée. P. (, .. t. ix. col. 332. Cette phrase indique d’abord le délai de la béatitude, opinion si fréquente dans les premiers s ; elle énumère ensuite la nature des châtiments qui subsisteront, d’après l’auteur, même après la purification : délai de béatitude, confusion en raison des t. mis. peines morales. //> ; <L. xv, P. < ;.. t. ix. es indicat - ues se retrouveront plus tard dans la théologie des Orientaux.

(>n U ojt. chez Clément, il i re qu’un indice

plutôt qu’une « nfession explicite de la croyance au

at< ire. L’indice cependant n « eable.

- trouve r ch< une doctrine déjà

mieux i ssun e.

re. — On aurait tort de considérer l’apocairbant toute la doctrine orpéniste . en « Efet, au moins tir d’une. ipporté une distinc tion fondamentale entre la pu mes justes

s la doi trine de la

I rouve, à notri a K

laire manifestation de la croyance d’Origène au

l <i [ urificatii n d< s justt s. —

l< s homn i s : même les justes d< ront

reuve du feu annoncé par I Cor., iii, 13,

rouvei quelb est l'œuvre de chacun. In

m. iii, n. 1, P. < :.. t. xit. I i

feu sur le ; traduira par une purifl me, introductive des

le ( iel : I tous

le feu est réservé

a baptisés du baptême d’eau. In

xiv, t. xiii, col. 1861 1865 1e but de

par le feu > st la purification des souillures

que nul ne peut a flatter d'éviter urificatim

surtout lorsqu’il s’agit d’un

Paul on d’un Pierre, qui ont 1 ittu pour Dieu

umeros, nom, xxv, prouver la ni d une

purifleatten après la mon. Origène cite Job, xiv, i. qu’il apporte dans la vin* homélie in Leoitieum pour démontrer la nécessité du baptême pour les petits enfants. L’Ame est donc souillée par le fait de son union avec le corps, lnsi, aucune.'nue ne pourra se trouver, à la résurrection, dégagée de tous ses défauts. In Lucam, boni. xi. t. XIII, col. 1836. Ainsi. Ions seront purifiés

de leurs souillures, du plomb qui les alourdit et qui

doit él le i ésolu dans |e leu, pour m' plus laisser paraît re

que l’or. in Exodum, hom. vi, L xii, col. 334 cf. In Leoitieum, boni. i. n. 8, t. xii, col. 519. / i La purification <les pécheurs. - Le véritable pé

i heur est -. mbolisé par du plomb pur. sans alliage d’or

/<L, ibid. L’cpi euve.sera plus lerrible pour lui ; mais ses

souffrances cependant auront un terme, car le pécheur, mêle juste, quoique plus difficilement, sera purifié. Cette purification, postérieure à la résurrection, sera faite par le moyen d’une souffrance d’autanl plus véhé menti que le corps ressuscité est plus subtil et pluspai fait. Combien de siècles durera cette purification, Dieu seul le sait. In epist. ad Romanos, viii, n. 12, t. xiv, col. 1 198 ; cf. Ci mment. m ps. F/(ex Apologia Pamphili Origené), t. xii. col. 1177-1178. On trouvera (cl le résumé de la doctrine de l’apocatastase d’Origène, art. Eni i r, col. 58. Tout en condamnanl comme hérétique la doctrine de l’apocatastase, on peut être en droit d’y trouver une manifestation encore confuse, mais réelle. de la croyance catholique à des souffrances purgatives de l’au delà. Certains textes, notamment In Numéros, boni, xxv, t. xii, col. 769 770 ; In Jeremiam, boni, ii, t. xiii, col. 280 281, semblent indiquer que telle était la p< iis te d’Origène pour une certaine catégorie de pécheurs. Cette impression est nettement confirmée p. n la posil ion adoptée par t Irigène en ce qui concerne la purification des justes.

c) La doctrine <ln purgatoire proposée par Origène (tans sa conception de la purification des justes. Tandis que l'épreuve du feu réservée aux pécheurs est une idée courante, en dehors des milieux chrétiens, dans l’eschatologie juive, pai exemple (voir Feu de i 'eni i r, t.. col. 2199), l’idée de laire passer les justes euxmémes par le feu purificateur est une idée spécifiquement chrétienne. Cf. Baptême pah le peu, t. ii, col. 359 (à propos des Oracula sibyllina). Mais, chez ne. d’autres raisons tout voir dans la purification

des âmes jusies une action divine, différente de celle que Dieu exerce à l'égard des pécheurs. L’examen de ei s raisons permet de conclure avec certitude au témoignage d’Origène en faveur du purgatoire.

a. Les « sordes » opposées aux peccata ». — La purification des justes s. : de celle des pécheurs, tout d’abord en ce quille a pour matière les fautes inhérentes à la nature humaine, souillures beaucoup plus que véritables péchés. /// Lucam, boni, iv, P. '.. t. xiii, col. 1836. Souillures contractées dans la lutte avec l<- démon. /// Numéros, hom. xxv. n. <>. t. xii. col. 770. Souillures comparables, chez les justes, au plomb mêlé a l’or ; l’or seul doit demeurer après le

preuvi de la purification. /// Exodum, hom. vi, n. i. ibid., col. 334 335. Un i semble I il qu’Origène distingue deux sortes de pi i hés a purifier : les un s. simples

SOtlilluri s l y-.'.z). les aul les plus graves, (-p'.r (I-/V77V/

-i i.-j y-vi i : les premiers sont relativement plus lé] f ! uiles seconds ; comparables aux souillures queu lèvent le nitre et l’herbe de liorilb (cf..1er., Il, 22), n suffira de l’espril du jugement pour les purifier ; les ds sont pires (6nxv /-- : y, -j-/ ixfuxprco|xev) el ne seronl purifiés que par l’esprit de combustion. In .ii remiam, boni. n. t. xiii, col. '-'.su. On notera l’expn sion esprit du jugement opposéeà esprit de coin bustion. C’est le feu du jugement puriflcateui d< es moins graves, opposé au teu de l’enfer.

b. Purification instantanée et purification de longut

darde. — Les sordes étant différcntes des peccata, leur purification ne se fera pas de la même façon : les souillures seront purifiées en passant par le feu ; les iniquités, en y restant. Le juste, comparable à l’or, ne fera que déposer dans le feu son alliage de plomb ; le pécheur sera englouti dans le feu pour y être longuement purifié. Les textes déjà cités sulliraient à établir cette opposition. On peut y ajouter In ps. XXXVI, n. l, t.xii, col. 1337, et surtout In Levit., hom. viii, n. 4, où Origène interprète allégoriquement la durée des purifications légales par rapport à la purification des derniers temps. « C’est au bout d’une semaine de jours qu’arrivera la consommât ion du monde. Tandis que nous sommes encore revêtus de notre chair mortelle, il nous est impossible d’atteindre à une pureté sans tache, sinon au huitième jour, c’est-à-dire au moment où arrivera le temps du siècle à venir. En ce jour-là, toutefois, celui qui est mâle et aura agi virilement, aussitôt à l’entrée du siècle à venir est purifié… ; il recevra de la résurrection une chair purifiée de tous ses vices (c’est-à-dire le juste sera instantanément purifié). Mais si, au contraire, en lui-même il n’a rien montré de viril pour s’opposer au péché, si dans ses actions il s’est conduit en lâche et en efféminé, s’il s’est laissé aller surtout à commettre un péché tel qu’il ne peut être remis ni en ce siècle ni en l’autre (Matth., xii, 31), il devra passer une ou deux semaines dans son péché ( c’est-à-dire subir une purification de très longue durée), et ce n’est qu’au commencement de la troisième semaine qu’il sera purifié… » P. G., t.xii, col. 497.

c. Époque des purifications. — L'épreuve par le feu étant commune aux justes et aux pécheurs, il ne peut y avoir d’opposition quant à leur époque initiale, qui est le jour du jugement coïncidant avec la conflagration finale. Mais, puisque l’une est instantanée, son époque coïncidera exactement avec le dernier jour ; l’autre, étant de longue durée, se prolongera dans les siècles. Fidèle à la conception de l’eschatologie juive, Origène, comme Justin et frénée, enseigne que les justes trouveront après leur mort, une demeure dans un lieu caché. C’est, pour les âmes justes, le paradis, préparatoire au véritable paradis de délices que l'âme n’obtiendra qu’après le jugement dernier. Cf. De principiis, 1.11, c. xi, n.6, P. G., t. xi, col. 1642 ; In Ezechiclem, hom. xiii, n.2, t. xiii, col. 763 ; In Numéros, hom. xxvi.n. 4, t.xii, col. 776. De même, les pécheurs attendentle dernier jour pour subir l'épreuve du feu. In Exodum, hom. vi, n. 3, t.xii, col. 334. Mais cette attente ne constitue pas en réalité un véritable recal : pour Origène comme pour Clément d’Alexandrie, la fin du monde est imminente ; cf. De principiis, t. III, c. v, n. 6, t. xi, col. 330, et l’on peut donc encore, même dans cette hypothèse, parler de l'épreuve du feu comme d’une épreuve qui nous attend au sortir de la vie. Cf. In Lucam, hom. xxiv, P. G., t. xiii, col. 1861-1865. Toutefois, c’est biui au jour du jugement, après la résurrection générale qu’a lieu l'épreuve du feu : la pensée d’Origène est ferme sur ce point. Cf. In Jeremiam, hom. ii, t. xiii, col. 280-281 ; In Leviticum, hom. viii, n. 4, t.xii, col. 497 ; In Exodum, hom. vi, n. 3, t.xii, col. 334 ; In Lucam, hom. xiv, t. xiii, col. 1836 ; In ps. vi, fragment tiré de l’Apologia pro Origène, t.xii, col. 1177-1178. L'épreuve des justes ne se prolongera pas au-delà de ce dernier jour ; aussitôt la consommation des temps arrivée, elle se fera, elle sera faite ; aussitôt baptisé dans le feu, le juste passera au bonheur auquel il aspire. In Lucam, hom. xxiv, t. xiii, col. 1865. L'épreuve des pécheurs, au contraire, se prolongera longtemps après le dernier jour, non seulement pendant tout le siècle à venir, mais encore pendant les siècles des siècles. Sur l’expression origéniste, siècles des siècles, cf. In Exodum, hom. vi, n. 13, t.xii, col. 340 ; De principiis. t. II, c. m. n. 3, t. xi, col. 183184 ; In Joannem, tom. xix, n. 3, t. xiv, col. 551 ;

voir Iluet, Origeniana, I. II, c. ii, q. xi, n. 26, dans P. G., t. xvii, col. 1013 sq.

d. Instrument de la purification. — Des oppositions relevées ci-dessus entre la purification des pécheurs et celle des justes, on peut déduire, semble-t-il, une considération importante touchant la nature de l’instrument de la purification. Peut-être pourrait-on dire que la purification des justes, ou plus exactement l'épreuve du feu à laquelle sont conviés tous les hommes à la fin du monde, se fait par le moyen d’un feu réel, tandis que le châtiment des impies se fait par le moyen d’un feu métaphorique, succédant à l'épreuve du feu réel. La thèse du feu métaphorique de l’enfer est très certainement d’Origène : si tous les damnés doivent un jour être réconciliés avec le Christ, à quoi servirait un feu réel dans l’enfer, vide de ses victimes ? Sur le feu métaphorique voir De principiis, t. II, c. x, n. 4 ; Conl. Celsum, t. IV, n. 13 ; t. VI, n. 71, P. G., t. xi, col. 236-237, 1042-1043, 1405-1408 ; In Numéros, hom. xxvii, n. 8, t.xii, col. 789 ; In Matth., commentariorum séries, n. 72, t. xiii, col. 1716. Cf. Feu de l’enfer, col. 2201. Mais il paraît bien que l'épreuve générale du feu au dernier jour et, partant, la purification des justes, dite baptême par le feu, se font, au sentiment d’Origène par un feu réel. Ici, en effet, il s’agit d’une épreuve passagère, d’une purification instantanée, laquelle peut emprunter le feu de la conflagration générale, ce feu agissant sur les corps ressuscites pour purifier en eux les sordes peccati.

e. Conclusion. — On a noté que la purification des justes est réservée, selon Origène, à l’esprit du jugement. Cet esprit du jugement, que dans l’homélie In Jeremiam Origène oppose à 1' « esprit de combustion », purifie cependant par le feu — tous les autres textes l’affirment — et probablement par le feu réel de la conflagration dernière, les justes qui, sans exception, ont tous à se dégager de quelque souillure avant d’entrer au ciel. Sans doute, la conception qui envisage une purification de tous les justes sans exception est erronée. Voir Feu du jugement, col. 2244. Sans doute encore, la conception qui recule au jour du jugement la purification des justes qui peuvent en avoir besoin renferme une erreur de perspective ; mais elle est excusable chez Origène comme chez tant d’autres Pères qui l’ont commise avant ou après lui. Mais nous pouvons retenir, comme expression certaine d’une croyance à la purification des fautes légères dans l’au-delà, la conception origéniste du baptême par le feu, c’est-à-dire de la purification des justes avant leur entrée au paradis. Cette conception est spécifiquement différente de l’apocatastase : elle fournit donc un témoignage nouveau et doctrinalement bien plus certain que l’apocatastase en faveur de la croyance primitive au purgatoire. En ce sens, il est permis de saluer en Origène non le fondateur, mais le premier témoin du dogme catholique.

3. Après Origène.

La conception d’un feu purificateur au moment du jugement se continue, après Origène, en Orient, tout comme nous la retrouverons en

Occident. L’un des adversaires les plus acharnés de l’origénisme, Méthode d’Olympe, enseigne expressément qu' « après la résurrection, il n’y aura aucune nouvelle loi, aucun nouvel enseignement, mais le jugement et le feu : oùxs-rt. [lezàt. Taor /]v (se. àyvstav) sasaOai voaov 7) StSacrxxXîav szkpxv, àXXà xpïaiv xal Trîjp ». Convivium, x, 4, P. G., t. xviii, col. 200. Ce feu aura pour objet la purification et le renouvellement du monde. Voir Fin du monde, col. 2530. Méthode ne parle pas de la purification des âmes ; toutefois, il nous avertit que, si des châtiments nous éprouvent en cette vie à cause de nos péchés antérieurs, nous devons nous en réjouir, parce que le jugement nous deviendra facile. De dist. cib., ii, 2, éd. Bonwetsch, p. 428. Cf. Atzberger, op. cit., p. 490. 1197

PURGATOIR] LES PÈRES GRECS (IV » -VII « SIÈCLE)

I l'.IS

l partie chrétienne des Oracles sibyllins reprend d’une façon plus nette la conception d’Origène. Laruine tlu inonde a la Rn des temps sera réalisée par le feu ; mais les justes eux mêmes passeront, quoique s.ui’douleur, par ce feu, tandis >imles méchants, atteints par le feu dans leurs corps et dans leurs.'mus. en soûl friront éternellement. Il 5.1 certainement ici un écho de I Cor., m. 15. Voir lii Dt JVŒMBNT, t. v.

ool..'il : ci..1. Geiîcken, Die oracula sibylltna, Leipzig,

p. 10, H>8. On trouve également des allusions au feu purificateur dans les pseudo Clémentines, ftiiliones. I. IX. ". 13. P. (… t. 1. col. 1404 sq. Cf. Mzl>i rgei. p. <"/L. p. 1

Parallèlement <i la doctrine du feu du jugement, on t déjà l’usaye de la prière pour Us défunts. — 1. Le texte du II* livre des Machabées devait exprimer une pratique déjà courante : rien d'étonnant que cette pratique trouve sa place dans le christianisme naissant. Elle y constituera un élément essentiel de la croyance m purgatoire, parallèlement a l’expiation d’outretombe.

Des eerits inspires du Nouveau Testament nous 'avons pu relever que II Dm.. 1. 18, qui doive vraisemblablement s’entendre d’un souvenir accordé devant Dieu à la mémoire d’Onésiphore. Mais, à part cette fugitive allusion, aucun autre texte ne peut être relevé a 1 âge apostolique, ni dans la [ démentis, ni dans la Didachè, ni dans les épttres Ignatiennes, ni chez frénée ou Justin. Le texte le plus ancien impliquant le souvenir des défunts dans le culte se lit dans le Martyrium Polycarpi et nous reporte à l’année 155 : Nous plaçâmes ses ossements dans un lieu convenable. Ces ! là que nous nous réunirons, dés que nous le pourrons. dans la joie, et Dieu nous fera la grâce de célébrer le jour anniversaire de son martyre, tant pour honorer la mémoire de celui qui a combattu que pour exercer les générations futures à l’imiter. C. xviii. 2-3, l-'unk, Patres apostolici, 1. 1, p. 336. Ce texte est d’autant plus intéressant que certaines de se-, expressions, àyfltX- : et y ?~y. suggèrent la célébration d’une agape eucharistique. On en trouve une confirmation dans les S de saint PioniUS ( nr siècle) : ce dernier venait ne, et Asclépiade, au jour anniversaire de Polycarpe, priant et jeûnant, lorsqu’il fut averti en songe qu’il serait pris le lendemain. Adu sanctorum, fehr. t. 1. p. ::

_'. lis, ;  ; ryphes du Nouveau Testament apportent quelques indications non négligeables.

I es -tr/u l’tiuli et Theclæ sont d’inspiration catholique. Cf. Suppl. du Dict. tir la Bible, t. 1. col. 195. Leur date approximative est entre 160 et 170. Il y est raconté que la reine Tryphène entend, dans un songe, sa fille morte lui demander de recourir aux prières de Thèclc pour obtenu* d'être placée parmi les justes (Iva [xera. Sixalwv Torov). Trv phène s’en acquitte et formule sa demande en ces termes : « Prie pourmon enfant, afin qu’elle vive dans l'éternité. Acta Puuli et Therl.r. n. JK. 29 dans Acta apostolorum apocrgpha, éd. Lipsius-Bonnet, t. 1. p, 256.

- Aria Joannis, qui paraissent antérieurs (cf. Suppl.. col. 491 I, sont vraisemblablement l'œuvre d’un catholique sincère, mais plus ou moins touché par certaines erreurs : ils apportent un témoignage tout aussi significatif. Le troisième jour après la mort d’une chrétienne, l’apotre Jean se rend sur sa tombe et v célèbre la fraction du pain.ee qui est, sans contestation pos sible, le sacrifice eucharistique Acta Joannis, n. 72. dans Acta apostolorum apoerypha, t. Il a. p. 180.

3. Clément d' Alexandrie recommande au parfait iniostiqur la i ompassion envers les morts. Simm., VII, xii, 78, /' '-. t. ix. col. 508. Origine, a son tour donnerait-il un témoignage en faveur de la prière pour les morts dans son commentaire sur Itom.. xii. l.'i ? On

s. ut que le texte de ce verset esi discuté < 1 qu’un cor tain nombre de manuscrits portent, qu’un certain

nombre d’auteurs lisent, iivelïtç au lieu de /pciv. I 1

commentaire d’Origène, d’après la version latine que nous eu possédons, semble Indiquer qu’une commémo

raison des saints avait lieu dans l'Église de Ces. née ;

memini in latinis exemplaribus magts haberi : mbmoriis

s w, rORI H I OMMTJNN 1 1 s. et elle ajoute que l coin memorer les saints soit dans les collectes solennelles, soit pour mettre a profil leur souvenir, paraît elle une chose convenable et bonne ». P. G., t. xiv, col. 1220.

Mais est-ce Origène ou Rufln qui parle'.' La chose esi discutée.

les Curions d’Hippolyte contiennent une fugitive allusion à la prière pour les défunts : Si /il ananinesis pro Us qui defuncti sunt, primum antequam consideant mysteria sumant, neque lumen die prima ; post oblationem distribuatur fis partis exorcismou antequam consideant. n. 169-170. Cf. Duchesne, Origines du culte chrétien, 4 r éd.. p. 544. l'.n plaçant les canons d’Hippolyte dans la tradition orientale, on pense demeurer ici dans les limites de la vraisemblance. Cf. A. d’Alès, La théologie de saint Hippolyte, Paris, 1906, p. 169 sq.

Enfin, l’ancienne version latine de la Didascalie.

contenue dans le palimpseste de Vérone, est très explicite : « Dans les commémoraisons, réunissez-vous, lisez les saintes Écritures et offrez des prières à Dieu ; offrez aussi la royale eucharistie qui est à l’image du corps royal du Christ, tant dans vos collectes que dans le cimetière : et le pain pur que le feu a purifié et que l’invocation sanctifie, ofïrez-le en priant pour les morts. Didascalie, fragm. de Vérone, dans Cabrol et Leclercq, Muniimenla Ecclesix lilurgica, t. i, 2*' part., p. 238. Cf. Dict. d’archéol.. t. iv, col. 1 13.

Cet usage de la prière pour les morls. bien plus explicitement attesté en Occident grâce aux inscriptions funéraires retrouvées en nombre considérable, était une de ces pratiques qui, sans aucune, solution de continuité, se relient aux ensi ignements apostoliques. C’est à coup sur le fondement le plus solide de la croyance chrétienne au purgatoire. A partir du rV siècle, même en Orient nous en trouverons des attestations nombreuses.

III. Profession plus explicite du dogme DANS les Églises orientales a partir du rve siècle. — Le dogme du purgatoire apparaît dans l'Église orientale

sous les deux aspects que mms lui connaissons déjà : une expiation purificatrice dans l’au-delà, la prière des vivants offerte à Dieu pour l’allégement des souffrances des morts. Sous son premier aspect, le dogme i rvera toujours plus ou moins les obscurités que nous avons relevées dans ses formules archaïques : projection de l’expiation future dans l’unique perspective du jugement et. par voie de conséquence, lorsque l’imminence de la parousie ne s’impose plus à l’attente religieuse, situation mal définie des âmes déjà séparées du corps mais non encore soumises au jugement final. Ces caractères inconsistants de l’expiation dans l’aude la provoqueront peu à peu entre l'Église Orientale et l'Église occidentale des malentendus qu’il sera difficile de dissiper.

I. L’EXPIATION PI BIFICATRICB DAKS L’AU-DELA. — l » SaintCyrille de Jérusalem ne se contente pas (comme

la plupart des pères que l’on va citer) d’inviter les Chrétiens à prier pour les défunts (voir plus loini : il

enseigne expressément qu’un fleuve de feu purifiera

nos œuvres inconsistantes, conformément à renseignement de I Cor., [Il, 15. L’archange le proclamera et dira

a dais : Levez-vous, au-devant du Seigneur. I >av Id l’a dit : Dieu viendra manifestement ; notre I lieu i v iendrai et il ne gardera pas le silence. I n feu s’allumera en sa présence, et, autour de lui, s'élèvera une tempête violente. l’s.. xi. ix..'i. (Dans le psaume, comme dans la 1 L99

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. LES PÈRES GRECS (IVe-VII « SIÈCLE)

1200

pensée de Cyrille, il s’agit du jugement.) Le Lils de l’homme viendra, selon l'Écriture qu’on a lue, vers son Père, dans les nuées du ciel, accompagné du fleuve de feu, dans lequel seront éprouvés les hommes. Si quelqu’un a des œuvres en or, il deviendra plus brillant ; mais si quelqu’un ne présente que des œuvres semblables à la paille et sans consistance, il sera brûlé par le feu (xaraxaleTou inzb toG rojpôç). Cal., xv, n. 21, P. G., t. xxxiii, col. 900. Il y a ici, de toute évidence, la même conception que chez Origène. Le feu est bien celui de la conflagration générale du dernier jour, mais il servira en même temps à la purification des œuvres que Paul a comparées a la paille, au foin, au bois. Il n’est pas question du feu de l’enfer, qui attend les damnés.

2° Saint Basile lait écho pareillement aux enseignements antérieurs sur le « baptême par le feu », dans son traité De Spiritu sancto. Après avoir établi la différence entre le baptême de Jean dans l’eau, en vue de la pénitence, et le baptême de Jésus-Christ, dans l’EspritSaint et le feu, il rapproche ce dernier baptême par le feu de l'épreuve qui se fera au jour du jugement, Invoquant l’autorité de l’Apôtre, I Cor., iii, 15, il rappelle que le jour du Seigneur révélera ce qui sera manifesté par le feu. C. xv, n. 36, P. G., t. xxxii, col. 132. Ce que sera la conclusion de cette épreuve par le feu, Basile nous le déclare dans ses homélies sur les psaumes : « Celui qui est à l’article de la mort, sachant qu’il n’existe qu’un sauveur et un libérateur, lui dit : J’ai espéré en toi, sauve-moi de mon infirmité et délivre-moi de la captivité (cf. ps. vii, 1). J’estime que les vaillants athlètes de Dieu, qui, pendant toute leur vie, ont beaucoup lutté contre les ennemis invisibles, une fois placés au terme de leur vie, seront jugés par le prince du siècle ; s’ils sont trouvés ayant gardé quelques blessures, suite de leurs combats, ou quelques taches ou des vestiges de péché, ils seront enfermés ; mais s’ils sont trouvés sans tache et sans blessure, invaincus et libres, ils reposeront sous le Christ. » 77) ps. vii, n. 2, P. G., t. xxix, col. 232. On retrouve ce texte dans le De futuro judicio (inséré en appendice des œuvres de saint Basile), recueil de sentences basiliennes par Siméon le Métaphraste, P. G., t. xxxii, col. 1300.

Dans ces textes, l’expiation reste au premier plan ; la nature du feu du jugement est incertaine. Mais le Commentaire sur Isaïe est moins réservé : faut-il toutefois y voir une œuvre authentique de Basile ou simplement l’ouvrage d’un contemporain ? Voir Basile (Saint), t. ii, col. 446 et aussi Rev. des sciences rel., t. x, 1930, p. 47 sq. On y distingue différents jugements de Dieu sur les pécheurs. Certains qui jusqu'à là mort ont offensé Dieu par malice sont condamnés au feu éternel ; mais il existe un feu purificateur pour ceux qui ont péché légèrement ou qui, pendant cette vie, ont fait pénitence de leurs fautes graves. Ainsi, « en attachant notre âme aux plaisirs défendus, nous l’entraînons loin de Dieu et nous la soumettons à la cruelle tyrannie du démon inexorable, lequel, condamné au feu éternel, s’efforce d’avoir des compagnons de son supplice. » In Jsaiam, x. 20, P. G., t. xxx, col. 550. Mais Dieu a préparé un feu pour d’autres fautes : « S’il livre des attaches terrestres au feu vengeur, c’est par manière de bienfait pour l'âme… Dieu ne la menace pas de ruine totale, mais il indique la purification selon le mot de l’Apôtre : si l’ouvrage de quelqu’un est consumé… (allusion à I Cor., ni, 15). Ce feu purificateur ne saurait cependant consumer les péchés demeurés à l'état d’herbe verte, mais seulement ceux qui, par la pénitence, ont été desséchés à l’instar du foin : « Ainsi, en découvrant le péché par la confes- « sion, nous en faisons un grain aride, qui sera dévoré « par le feu purificateur (toù xaOxpTixo’j Tiupôç). » En conséquence, si nous ne desséchons pas ainsi notre péché comme une herbe aride, le feu ne pourra le dévo rer et le brûler. Ibid., ix, 16 sq., col. 519. Enfin, commentant Is., iv, 4, l’auteur s’empare de la double expression du prophète : saïujuinem Jérusalem purgabit in medio eorum in spiritu judicii et combustionis. II expose que trois acceptions sont possibles du baptême : la purification des souillures, la régénération par l’Esprit-Saint et cette probation dans le feu du jugement, qui doit être rapportée au temps de la conflagration finale, (/ ; èv tû rcupfe t/, : xpîerscoç (îdcToev Col. 312.

3° Saint Grégoire de Nazianze ne semble-t-il pas faire une allusion à la purification d’outre-tombe, lorsque, faisant l'éloge d’Athanase, il le compare au feu purificateur de la matière vile et perverse, nûp x.a6ap-rr)piov -r7, < ; « paoXrjç 6>, t)ç xal ; j.o/0v ; pà :.? Oral., XXI, in laudemvthanasii, n. 7, P. G., t.xxxv, col. 1089. Le texte suivant, emprunté à VOral. xl, in sanctum baptisma, n. 36, le ferait supposer. On a souvent cru trouver, dans ce dernier texte, un écho de l’erreur origéniste. La chose est loin d'être prouvée. Cf. Enfer, t. v, col. 69. Il semble bien que l’orthodoxie de Grégoire soit indiscutable non seulement ici, mais encore dans tous les textes où il parle d’un feu purificateur devant ouvrir le ciel au pécheur.

D’une part, en effet, saint Grégoire enseigne formellement l'éternité des peines infernales, Oral., xvi, in Palrem tacenlem, n. 7, t. xxxv, col. 944 ; n. 9, col. 946 ; Carm., II, i, n. 46. t. xxxvii, col. 1380 ; d’autre part, même dans cette Orat. xl, in sanctum baptisma, n. 36, il commence par affirmer, après le jugement terrible, la séparation définitive et le supplice de l'éternelle ignominie. P. G., t. xxxvi, col. 412. Ce n’est qu’ensuite qu’il rappelle ce qu’est « le feu purificateur (du baptême) que le Christ, mystiquement appelé feu luimême, est venu apporter sur la terre. La propriété de ce feu est de consumer la matière vile et les affections vicieuses de l'âme ; aussi le Christ veut-il qu’il soit rapidement allumé… Mais il y a un autre feu, qui ne purifie pas, qui venge les crimes commis : c’est le feu qui a dévoré Sodome et dont Dieu punit tous les pécheurs ; c’est aussi le feu qui a été préparé au démon et à ses anges ; c’est aussi le feu qui sort de la face de Dieu et qui brûle autour de Dieu tous ses ennemis ; ou bien encore c’est le feu le plus terrible de tous, celui qui est joint au ver sans sommeil, qui ne s'éteint jamais, qui punit éternellement les hommes scélérats. Tous ces feux ont la même force pour perdre et détruire ; ù moins toutefois qu’on ne veuille comprendre ici un feu plus doux et digne de Dieu, vengeur (du péché). » Ibid.. col. 412. L’interprétation suggérée par les éditeurs bénédictins et développée par Billot, De novissimis. Rome, 1903, p. 58, entend séparer complètement la cause du mitior ignis de celle des feux énumérés précédemment. Ce feu plus doux serait soit celui des pénitences acceptées en cette vie, soit celui du purgatoire dans l’autre vie.

Cette interprétation est rendue plus plausible encore par la comparaison des autres textes où vraisemblablement s’affirme la croyance au purgatoire. C’est d’abord, dans VOral. iii, n. 7, Ad eos. qui ipsum acciverunt…, une invitation à aimer Dieu, à fuir le vice, à pratiquer la vertu, à suivre les inspirations de l 'EspritSaint ; en un mot, à « édifier sur le fondement de la foi, non du bois, du foin, de la paille, matière légère et facilement combustible, puisque nos actions doivent être jugées ou purifiées par le feu (f, v£y.a av 77Up ! xpîvTjTai Ta i]iézsç>ix y) xa0a£p7)Tai.), mais de l’or, de l’argent et des pierres précieuses, matières solides et fermes. P. G.. t. xxxv, col. 524. C’est encore la formule archaïque du feu du jugement ; mais du moins l’idée de purification morale est incontestable. Ailleurs, Grégoire pleure sur ceux qui se croient absolument purs : au lieu de s’enorgueillir faussement, qu’ils prennent la voie tracée par 1201

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. LES PÈRES GRECS IV » -VII « SIÈCL1

L202

la Christ : Dans l’antre monde peut être seront Us baptises dans le reu. Ce (ai est le dernier baptême, plus douloureux certes et surtout d’une durée plu*, consldé rable, baptême qui dévorera, a l’instar du foin, toute matière vile et qui consumera la vanité de nos vit

. i, 1/1 sancta luniiiui.u. 19, t. 1. col

- deux derniers textes montrent bien en quel feu

purificateur le saint docteur de Nazianze met son espé il.iit> les Carmina 1, 523 ; cf.. ; i" :  ; rj ;

xii. 195 ; i. P. (… !. xxxvii, col. 1009, 995, 1202,

1422

S il est Impossible de disculper s. mit Grégoire de N> ssc du reproche d’oi nisme ioir Enfer, col. 70 71>. on pourrait tout au moins voir en cette erreur même un commencement

munit en faveur <lu purgatoire. C’est déjà ce que nous avons indiqué à propos d’Origène (col. 1

.1 cote dotext » > certainement entachés d’erreur, nous en lisons quelques autres dont le mus » i.umrapporte à une expiation d’outre tombe, temporaire et

lée à une catégorie bien déterminée de pécheurs. Dans l’opuscule De infantibus qui pracmaturt ubripiuntur. Grégoire pose la question de l'état des anus qui quittent ainsi la terre : Qu’en dev ons-nous penser ? tue telle âme verra-t-elle le juge ? Comparaltra-t-elle au tribunal avec les autres ? Recevra-t-elle la récompour ses mérites ? Sera-t-elle purifiée dans le feu, don les paroles de IKv angile ? Sera-t-elle rafraîchie et

fortée par la rosée de bénédiction ? A ces questions la réponse paraît difficile puisque celui qui n’a pas vécu ne peut apporter aujugement divin matière à mpense ou à punition. P. G., t. t.vi. col. 108. Mans le sermon De mortuis exhortation à ne point

-"h r du trépas de ceux qui se sont endormis dans le Seigneur — l’auteur développe vi pensée sur le feu purificateur : Dieu non-- a laisse ici-bas notre liberté el. nonobstant les fautes dans lesquelles nous pouvons tomber, le moyen de revenir à la félicite : c’est ou bien île nous purifier, dès la vie présente, par les prières et la

rche de la sagesse, ou, après la mort, d’expier dans

l’ardeur du feu purificateur Sut rr_- toO rcupoç x.xOotp uvetatç). Celui qui aura négligé de se préserver du

n cette ie. pour parvenir au bien après la mort

litra la différence qui sépare la vertu du ice et ne

pourra devenir participant de la divinité qu’après

s souillures dans le feu purificateur

xxOapoiou nupoç). Ainsi, parmi les hommes, les un>. tels les apôtres, les patriarches et les prophètes, ont su garder, malgré leur union au corps et à la ma . une vie vraiment spirituelle et exempte de troubtes et de vices, mais d’autres devront, après cette vie. par le feu purificateur, effacer les souillures de la matière et leur propension au mal ; et c’est ainsi que. par le désir d< s vrais bil 11s. ils reviendront a la grâce qui fut concédée au début a la nature humaine. P. G., 1 1. 52 I..">25. Il n’est point nécessaire d’interpréter ces textes en fonction de l’erreur origéniste : la 1 rovance au purpa -ullit : aussi pensons-nous qu’il convient d'étendre rtains passages du De anima et resurrectione, où les critiques trouvent avec raison plus d’une trace d’origénisme. Mais certains pas : s’apparentent trop visiblement aux textes d’Origène où nous avons t rouvé une manifestation de la croyance au purgatoire pour qu’on puisse leur accorder onesigni "ii différente. Grégoire reprend la comparaison de l’or mélangé de matière étrangère : Pour purifier

r, il faut pass.T au creuset non seulement la matière étrangère, mais |'or lui-même, de telle sorte que,

r le feu, l’or demeure

insj. tandis que notre défectuosité est détruite par le feu pui-r-. /-i/ri : rû : /v.'.vi.r-<

1e qui est

unie a cette défectuosité, soit elle-même dans le feu

(r’ry EV6)6c(oOCV v ', T 'i V'/'. ~' J ttj> TtUpl CÏVOCl), jusqu'à

ce que l.i matière étrangère qui lui est mêlée soit détruite, consumée par le feu [xtji xtcûvltp iropl Sanaviipisvov Il not re auteur conclut que la purification sera

plus ou moins longue et pénible selon que ['âme plus ou moins allai lue.1 une matière plus ou i

viciée. P. t… t. i vi. col. "7 100, un.

5° Un mot Jeté en passant par saint Isidore de l'< souligne la même conception. Expliquant comment le

bon grain doit être sépare de la paille, celle ci devani

être brûlée, et celui la conservé, il exhorte son coi pondant Lampétius a ne point s’agiter aux vents de la

volupté, leur dispersant ses allions, a l’instar de fétus

de paille : 1 Considère que ion Inconstance se terminera

dans le feu. OU le tell qui purifie et expie, ou le ton qui

brûle pour toujours. ("OpocTolvuv 8n rcûpex 6 ' T ;  ;

tô à6éoa'.ov. ïj x.xOxïpov. 7, elç, réXoç èxxoci.' Epist.,

I. I, ep. cccx, P. G., 1. 1 xxv ni. col. 381.

6° Faut il rapporter à la même époque l’apocrv plie

Histoire de Joseph le Charpentier ? Cet apocryphe, qui a

coup sur n’est pas antérieur au rv siècle, est d’origine égyptienne, mais il est conserve seulement en arabe

et en copte ; il contient, sous la tonne d’un entre ! ien de

Jésus av ec les apôtres, la vie de saint Joseph et surtoul sa mort. Relevons dans cette dernière partie L’idée

de la traversée que l'âme doit accomplir après avoir quitte le corps ; guidée p a r l’archange Michel, elle pourra franchir sans encombre les /lits de lu mer île feu que doivent afjronter toutes les âmes. Cf. É. Amaiin. Les apocryphes du Nouveau Testament, dans le Suppl. /lu Dict. de lu Bible, t. t, col. 48 I. X avons-nous pas ici une affirmation implicite des purifications douloureuses réservées aux hommes avant leur entrée dans le bonheur du ciel'. 1

7° Saint Cyrille d’Alexandrie, contempi rain d’Isidon de Péluse, a laissé sur.loa.. XV, 2. un commentaire que les théologiens ont retenu comme favorable au dogme du purgatoire. Cyrille rappelle les paroles de l'Évangile : « Je suis la vigne véritable, et mon l'ère est le vigneron. Tout sarment en moi qui ne porte pas de fruit, il l'ôte, et tout sarment qui porte du Huit, il le nettoie, afin qu’il porte du fruit davantage. Et il continue :

I.e chœur des saints lui même, loin de repousser cette purification, la subit volontiers. Reprenez mm. Seigneur, dit-il. mais que ce soit dans votre justice et non dans votre colère..1er., x. 24. (.'est dans la colère que sont détruits les sarments improductifs : Dieu les envoie au supplice. Mais dans le m emint… sifait i a purification des sarments qui fructifient : dans une modiqui épreuve abondance et fécondité leur sont restituées… Petite est la t rilmlat ion qui nous

puritie. et cependant, nous impos ml d’en haut sa discipline, elle nous rend bienheureux. l>aid nous in est témoin, lui qui s'écrie : Bienheureux l’homme que vous aurez vousmême Instruit, Seigneur, et a qui vous aurez enseigné votre mi que vous lui accordiez quelque douceur dans les (ours m 1 1 1 v ; i i - : Ps., v< m. 12..louis a coup sûr indésirables i t mauvais, ceux des (pécheurs) totalement retranchés (de la vie de la grâce) et destin.-s au suppliée du feu ; jours, dis-Je, de ce jugement sévère et sans compromission. Mais alors Dieu se montrera doux.1 l'égard de ceux qu’il aura

Celui qui 1 si tel m' Subira en rien la

damnation et la peine, car il aura été trouvé sarment non improductif, lu Joannem, w, 2. I'. (, ., t. ixi. col. 352.

Ce passage Oppose l'étal irrémédiable des impies, VOUéfl a la damnation (sarmeiils absolument iinpro dUCtifs) a l'étal de ceux que I épreuve corrige et qui Ile sont pas des sarments totalement improductifs. Il v a la une indication très nette d’une purification dans

l’au-delà. Ave< Cyrille, cependant, nous ne sommes plus a la conception archaïque de la rétribution repoi

tee au jour du jugement dernier. Ce l'ère admet que la

rétribution définitive suit immédiatemi ni la mort. Cf. fixeront, Hist.da dogmes, 1. m. p. 270. (.est donc au moment même du jugement particuliei qu’aurait lieu 1203 PURGATOIRE. LES SUFFRAGES POUR LES MORTS (ORIENT) 1204

la discrimination des œuvres : il n’apparaît pas cependant que la purification même des œuvres moins lionnes soil Faite, comme l’insinue Tixeront, loc, cit., dans le jugement même. Les assertions des Pères doivent être, sur ce point, complétées par leur enseignement touchant l’utilité et l’efficacité des prières pour les défunts.

8° Le nom de Théodoret a été souvent cité comme celui d’un témoin de la croyance au purgatoire dans l'Église grecque. Saint Thomas invoque son autorité dans son opuscule Contra errores Grœcorum ; Gagnée cite un autre texte dans ses scolies des Pères grecs. Les deux textes sont reproduits par Nicolaï dans ses annotations à la Somme théologique. Mais il semble bien que ces deux textes soient apocryphes. Voir la note dans la P. G., t. lxxxiv, col. 445. Les Grecs ne les ont pas reconnus au concile de Florence.

La vraie pensée de Théodoret se trouve exprimée dans son commentaire sur I Cor., iii, f5. Elle mérite d'être rapportée, car elle contient deux interprétations dont la seconde au moins pourrait présenter un sens favorable au dogme de la purification dans l’au-delà. Dans la première interprétation, Théodoret distingue le prédicateur de la foi de son œuvre, qui est l’auditeur agissant à sa guise. Au jour du Seigneur, ceux qui auront bien agi et pourront présenter des œuvres, or et argent, ne recevront de l'épreuve du feu qu’une splendeur plus grande : ceux qui auront mal agi et auront fait l’iniquité seront brûlés comme foin, bois et paille, tandis que lui, le prédicateur de la bonne doctrine, ne sera jugé digne d’aucune peine et il obtiendra le salut. Le prédicateur sera sauvé, car il ne saurait être tenu responsable du mauvais usage que ses auditeurs auront fait de la bonne doctrine. Mais, « si l’on veut rapporter l’expression tanquam per ignem non à l'œuvre, mais au prédicateur, on devra la comprendre ainsi : le prédicateur n’aura aucune peine à subir pour ses œuvres, mais il sera lui-même conservé, tout en subissant l'épreuve du feu, puisque sa vie est conforme à sa doctrine. » P. G., t. lxxxii, col. 249-252.

9° Dans la deuxième moitié du ve siècle, Basile de Séleucie exhorte les pécheurs à détester leurs fautes, à l’exemple de David pénitent, afin de ne pas être laissés pour la purification du feu (o.yi o.£lvo>[xsv 0epa7T£u6^vai jrupî). Orat., xviii, in Davidem, P. G., t. lxxxv, col. 225. L’expression 6epa7reu0YJvoa enlève toute probabilité à l’interprétation visant le feu de l’enfer.

10° A la fin du siècle suivant ou au début du vu", la question du purgatoire est plus nettement posée par Maxime le Confesseur († 662), dans ses Quæstiones et dubia, interrog. x. Il s’agit d’expliquer l’expression suivante : « Dans le siècle futur, certains devront être jugés et purifiés par le feu. » « Cette purification, répond Maxime, ne concerne pas ceux qui sont parvenus à un amour parfait de Dieu, mais ceux qui ne sont pas arrivés à la complète perfection et qui ont leurs vertus mélangées de péchés. Ceux-ci comparaîtront au tribunal du jugement et, suivant l’examen comparatif de leurs bonnes et de leurs mauvaises actions, seront éprouvés comme par le feu. Si, dans la balance, le plateau des bonnes œuvres l’emporte, les mauvaises seront expiées dans une juste crainte et peine. » P. G., t. xc, col. 792-793. Encore une fois, il n’est pas dit que cette expiation sera dans et par le feu.

11° Dans l’opuscule De iis qui in fïde dormierunt, attribué (faussement d’ailleurs) à saint Jean Damascène, l’auteur narre l’histoire d’un disciple très négligent qui, malgré son peu de préparai ion au moment de la mort, fut pris en pitié par Dieu, touché des larmes et des prières de son vieux maître. Ce dernier vit son malheureux disciple tout d’abord plongé dans le feu jusqu’au cou, puis, une autre fois, émergeant jusqu'à la ceinture, enfin totalement libéré. N. 11, P. G., t. xcv,

col. 256. C’est un peu plus loin qu’on trouve l’histoire de Trajan libéré de l’enfer par les prières de saint Grégoire. Quoi qu’il en soit de ces historiettes, le seul fait qu’elles soient rapportées montre bien la croyance de l'Église d’Orient à une expiation ultra-terrestre.

Conclusion. — Nous arrêtons ici cette première partie de notre enquête concernant l’expiation ultra-terrestre. Désormais, la théologie orientale ira s’obscurcissant de plus en plus par l’apport de considérations plus ou moins erronées. Elle était pourtant déjà loin d'être claire ! On l’a constaté par tous les textes qui précèdent : l’influence de I Cor., ni, 15, sur la purification des fautes dans l’au-delà est prépondérante. L’influence de l’exégèse d’Origène ne l’est peut-être pas moins et, sauf quelques rares indications concernant un feu métaphorique (voir saint Cyrille d’Alexandrie, In Genesim, t. IV, n. 1, P. G., t. lix, col. 177 BC), la plupart de nos théologiens n’envisagent que le feu réel de la conflagration générale. Il ne saurait être question pour eux d’un feu spécial préparé, dans un lieu spécial. Cette interprétation doit être d’autant plus fermement écartée que, jusqu’au ve siècle, les Pères sont encore la plupart du temps confinés dans la formule archaïque de l'âme vraisemblablement déjà jugée tout aussitôt après la mort, mais placée dans un état d’attente du jugement définitif, lequel ne se produira qu'à la fin du monde. Voir Feu du purgatoire, t. v, col. 2252. Sans doute, à partir du ive siècle, bon nombre de Pères entrevoient déjà la rétribution immédiate, au moins pour les récompenses (voir Jugement, t. viii, col. 1786. sq.) ; mais beaucoup retiennent encore les formules archaïques de l'état d’attente. Ces formules trahissent l’embarras du théologien qui ne peut encore adapter complètement ses formules explicatives aux données positives de sa foi. Voir art. cit., col. 1787-1788. Elles nous permettent du moins de constater que les Pères des IVe et ve siècles, et spécialement saint Cyrille d’Alexandrie et Maxime le Confesseur, auraient facilement adapté leur conception d’une purification dans l’au-delà à notre croyance actuelle au purgatoire.

Pour arriver à une conception plus nette, il aurait fallu que la théologie orientale se dégageât complètement des formules archaïques et notamment de celles qui ont trait à la dilation des châtiments. Mais c’est le contraire qui peu à peu se produira et, lors du schisme du ixe siècle, Photius ne contribuera pas peu à faire accepter cette erreur par tous, creusant ainsi entrela théologie orientale et l’enseignement de l'Église romaine un fossé bien difficile à combler. Cf. Jugie, Theologia dogmatica christianorum orientalium, t. iv, p. 63 sq. Toutefois, en se dégageant des formules accessoires et que le progrès du dogme eût dû rendre caduques, on constate que le fond de la théologie orientale des IVe et ve siècles admet la doctrine d’une expiation dans l’audelà, réservée et proportionnée à certaines fautes qui ne séparent pas définitivement l'âme de Dieu ; or, c’est là l’essence même du purgatoire.

Il convient — et ceci renforce encore cette dernière constatation — d’y ajouter l’autre élément du dogme : la prière pour les défunts. Sur ce point, les témoignages de l'Église orientale des IVe et v° siècles sont pleinement concordants.

II. LES SUFFRAGES POUR LES DÉFVXTS.

A partir du IVe siècle, nombreux sont les témoignages qui se rapportent à la prière faite par les vivants pour les défunts en vue de leur soulagement. Nous interrogerons les Pères, les liturgies et l'épigraphie.

Les Pères.

Eusèbe de Césarée rapporte qu’en

337 le corps de Constantin le Grand fut déposé devant l’autel où prêtres et fidèles offrirent à Dieu des prières pour l’empereur défunt. Vzfa Constanlini. t. IV, c. lxxi, P. G., t. xx, col. 1225.

En 348, saint Cyrille de Jérusalem nous montre quelle l’i RGAT01RE. LES SUF1 RAG1 S POl R LES MORT (ORIENT)

L206

est la croyance de l'Église touchant l’offrande <lu saint

sacrifice de la messe I la mémoire de ceux m 1 " n « M, , lt plus. Nous faisons mémoire, dit il. des s.unt x patriarches, apôtres, prophètes, martyrs, afin de faire accep ter par Dieu, (trace.1 leurs prières et supplications, nos propres prières : ensuite, nous f. lisons mémoire des saints Pères et évéques et généralement de tons les saints qui reposent parmi nous (le mot 1 s.iint » c-t

pris ici pour chrétiens morts dans la communion de la foi ; cf. Rom., . c> : w. 16, etc.), persuadés qu’un grand secours sera accorde a Kmvmes, pour les quelles est présentée notre prière en présence de la très sainte et très redoutable victime du sacrifice, Catech. myst.. v, 11. 9, P. G., t. xxxiii, col. 1115. Et Cyrille continue en expliquant par un exemple l’efficacité des prières pour les défunts :

ucoup posent celle question : Quel profil peut Urei de lu prière faite a sa m< moire une Ame qui a quitte ce monde dans le péché ou sans péché? SI un toi envoyait en exil des

sujets qui l’ont offensé et qu’ensuite 1rs procheparents île

dïes, tressant une couronne, l’offrissent au roi en

réparation pour adoucir la peine Infligée a leur-, amiexilés

le roi ne leur ferait-il pas la gracieuse remise des châtiments ? de la même (, n<>n que nous offrons à Dieu nos prières

pour les défunts, ni. me s’ilsont pécheurs : nous ne tres 1- de couronne, mais nonunionle Christ Immolé

pour nos péchés i cep « » v

1, nonefforçant de rendre la clé menée divine propice aux défunts au— 1 bien qu’A nous in.mes. Ibid., n. 10, col. 1 1 16-1 117.

Saint Jean Chrysostome insisW à plusieurs reprises sur l’utilité deprières et du sacrifice eucharistique pour les défunts : < Portons-leur secours, dit-il, et faisons leur commenu raison. Si les lils de Job ont été purifiés par le sacrifice de leur père, pourquoi douterions-nous que nos offrandes pour les morts leur apportent quelque consolation ? N’hésitons pas a porter

- a ceux qui sont partis et a offrir nos prières

pour eux. » In I epist. ad Cor., liom. XXX, n. 5, P. G., t. ixi. col. 361. Et, quelques lignes auparavant. C.hryïne insistait sur la nature de ce secours : pas de larmes, maides prières, desupplications, des aumônes, des oraisons. Ailleurs, il fait remonter aux apôtres eux-mêmes l’institution du Mémento des morts au sacrifice eucharistique : Songeons au soulagement que nous pouvons obtenir pour les mort-. Ce n’e-t pas en vain que les apôtres ont établi eux-mêmes qu’il ' fait mémoire des défunts au saint sacrifice. Lorsque tout le peuple est assemblé et qu’il prie, les mains levées irle ciel, ri que la Victime trois foi- -ainte se trouve -ur l’autel, comment notre voix ne s'élèveraitelle pas avec confiance vers Dieu en faveur des défunts ? ! In Ad., hnm. xxi. n. 1. t. i x. col. 170. Voir aussi De sacerdotio. I. VI, n. I. t. xi.vm. col. 680. Chrysostome insiste tellement -ur le secours apporte par nos prières aux défunts qu’il ne paraît exclure « le leur efficacité aucune catégorie de disparus, pas même les pécheurs les

plus coupables et les infidèles. I n passage de l’Ilomc lie m sur l'épître aux Philippiens, n. 1. P. <>.. t. i xjii, iccentue tellement la pensée de l’orateur en

is que certaincritiques s’en sont fail une arme

pour attaquer l’orthodoxie de l'évêque de Constantinople relativement a la mitigation des peinede l’enfer.

veut voir une dernière trace d’origéni-me. Voir notre Interprétation, Mitigation des peines de j v vif ptrnnii. t. x. col. 2001.

le, est déjà si fermement

lie que soin/ l-piphane range parmi les hérésies nues et condamnées la doctrine d. Vérins allirmant l’inutilité de la prière pour lis morts. Voir, t. i. 515 :

f.iiioi de plus utile que île faire un moire des mort-? '.moi

de plus opportun et de pluadmirable que cette persuasion

at le< fidèleprésents, que lemortvivent et ne -ont

panMnJtl au néant, niaiqu’ilexistent et vivent piedu

Seigneur ? Quelle prédication plus religieuse que celle qui donne une telle espérance aux i.uitpriant pour leurs

ti ère-, col un le -'il -'a ; '.i— a il de o agOUl - pal 1 1- puni l’elian

ger ?.., Noui faisons mémoire des | us tes et des pécheurs.

Pour les pécheurs, nonnuplomnla mi-ciicoide dnine.

Des iu-tenonfaisons mention afin de séparer, d’un non iicnr particulier. Notre Seigneur Jésus Christ de l’ordre des humains, et de lui rendre un >aiiie supérieur qui le dlftéren cie des mortels, quelle que soii la sainteté pour ainsi dire Infinie dont ilsont revêtus… Mais, même abstraction faite de ces raisons, je dis que ri gllse se doit de faire nécessaire ment ce qu’elle a reçu comme m rite transmis pai les an clens. Et, comme touteces choses excellentes et admirables -ont établies dans l'Église, rien qu’a ce titre vérius est con vaincu d’imposture. Ado. ruer., ucxv, n. 8, P. G., t. xlii, col. 513 B ; cf. n. : s, 7. col..".os c. 513 A.

Une seule phrase pourrait faire difficulté dans ce texte : Les prières que nous faisons pour les morts leur sont utiles, bien qu’elles ne détruisent pas louslc peches. 5 il n’est pas nécessaire de songer a la mitlga I ion des peines de renier pour trouver a cette formule,

même en l’appliquanl au purgatoire, un sens accep table.

Dans le livre Ilepi £Eô80u -^u/yjç 81xa£<ov xal à|xv.ptcoXwv, attribué à Macaire d’Alexandrie (rv siècle), on rencontre plusieurs allusions aux prières liturgiques faites pour le- âmes justes des défunts, aux neuvième, trentième et quarantième jours. P. G., t. xxxiv, col. 392.

Au v siècle. Théodoret, dans son Histoire ecclésiastique, rapporte que l’empereur l’héodose II fil ramener en grande solennité les reliques de saint Jean Chrysostome et qu'à cette occasion il recommanda ses parents défunts à l’intercession de ce saint. Hist. eccl., 1. Y, c. xxxvi. I'. G., t. lxxxii, col. 1268.

Le pseudo-Denys enseigne également que le prêtre prie pour les défunts afin de les libérer des fautes échappées à la faiblesse humaine, et qu’il soient placés dans le lieu de lumière, dans le sein d’Abraham, loin de la tristesse et de l’affliction. De hier, eccl., vii, « m. g n. P. (', .. t. iii, col. 500 Ali. Toutefois, l’auteur fait observer que les prières des justes ne peuvent, soit en cette vie, soit après la mort, être utiles qu'à ceux qui en sont dignes. Id., ibid., § 0, col. 500 I).

Eustrale, prêtre attaché a l'église Sainte-Sophie, familier du patriarche Eutychius, dont il prononça l’oraison funèbre en 583, a publié un ouvrage intitulé Discours réfutant ceux qui disent que les âmes humaines, après lu séparation d’avec leurs corps, n’ont plus aucune activité et qu’elles ne retirent aucun profit des prières et des sacrifices offerts (i Dieu pour elles. Celles, elles en profilent et en tirent du soulagement, ai/isi qu’on va le voir dans ce volume. Ce discours a élé traduit par Allatius, d’une manière incomplète, dans son De utriusque Ecclesise occidentalis algue orientalis perpétua in dogmate de purgatorio consensione, Rome, 1655, p..'<li*580 itexte mec et i radiici ion latine). Texte latin dans M igné, Patrologie grecque-latine, t. lxxx, col. 823889, et danTheologise cursus completus, t. xviii,

col. 401 Sq. C’est d’après le Cursus que nous citons.

L’ouvrage est d’autant plus Intéressant qu’il réfute la théorie qui devait dans la suite avoir tant de vogue chez fis Byzantins, d’un état purement passif pour les âmes entre la mort et le Jugement dernier. Bien au

contraire, toutes les âmeaprès la mort, soit les âmes des bons lu. 13 sq., col. 180), soit (elles des pécheurs

m. 25, <oi. rail), manifestent leur activité. L’auteur répond ensuite affirmativement a la question si les

prières des vivants sont utiles aux âmes des défunts : la raison en est que IT'.glisc prie pour elles. Et, parce que le peuple d’Israël porta le deuil de Moïse pendant quarante jours, parce que le Christ est ressuscité au troisième jour, parce qu’il est apparu après huit jours

à ses apôtres et qu’il est monté aux cieux au bout de quarante jours, l'Église a déterminé que les troisième, neuvième et quarantième jours seraient consacrés à la mémoire de chaque défunt, les solennisant par l’offrande de ses prières et du sacrifice de la messe. Or, elle ne le fait pas en vain puisque déjà le sacrifice offert par.Judas Machabée fut agréable à Dieu et que Denys l’Aréopagite, Éphrem le Syrien, Cyrille de Jérusalem, Cyrille d’Alexandrie, promettent tant d’avantages aux défunts par le moyen de la prière et du sacrifice eucharistique. N. 28, col. 508 sq. D’ailleurs, le choix du troisième, neuvième, quarantième jour et du jour anniversaire était consacré dans l'Église grecque, comme ayant une origine apostolique. Voir Constitutions apostoliques, t. VIII, c. XLII.

L’auteur du De iis qui in fide dormicruut, rapporte, sous le nom d’Athanase, le texte qu’Eustrate attribue à Cyrille d’Alexandrie. N. 19, P. G., t. xcv, col. 265. Quoi qu’il en soit du véritable auteur qui semble bien n'être ni l’un ni l’autre, ce texte exprime la doctrine courante déjà au vie siècle.

De ces auteurs de langue grecque, il faut rapprocher le témoignage du Syrien saint Éphrem (ive siècle), dans son Testament : il demande qu’on se souvienne de lui, une fois mort, dans les prières des vivants. Il le demande surtout au trentième jour, car, dit-il, « les morts sont aidés par l’offrande faite par les vivants. » Testamentum, n. 72, éd. Assemani, Opéra græce et latine, t. ii, p. 401.

Liturgies orientales.

1. Le « Mémento » des

morts. — « La prière pour les morts, ainsi que leur mémoire pendant les offices sacrés, est une pratique perpétuelle et commune chez tous les chrétiens orientaux, qui la font remonter aux apôtres. » Ainsi parle Renaudot, Liturgiarum orienlalium collcctio, t. i, p. 193, que nous citons d’après la 2e édition, plus correcte, Francfort-sur-Mein, 1847.

Les Constitutions ajiostoliques auxquelles se réfèrent les Orientaux sont, on le sait, une compilation qui, tout au moins dans son terminus a quo, remonte au début du ve siècle. Dans la liturgie du VIIIe livre, on trouve la prescription suivante : « Prions pour le repos de tel (ou telle), afin que le Dieu bon, recevant son âme, lui remette toutes ses fautes volontaires et involontaires et que, dans sa miséricorde, il la place dans le lieu des âmes saintes. » C’est d’ailleurs, à peu de chose près, la formule qu’on rencontre dans toutes les liturgies orientales et qui correspond à notre Mémento des morts : après la lecture des diptyques qui renfermaient les noms des évêques et des fidèles morts dans la paix du Christ, le célébrant récitait l’oraison dite Oralio post nomina par laquelle prêtres et assistants demandaient à Dieu pour ces âmes le repos éternel.

La messe de saint Basile fait prier le prêtre « pour tous ceux qui se sont endormis dans l’espérance de la résurrection future ». fl demande à Dieu « de les faire reposer dans le lieu de lumière, d’où s’enfuit la tristesse ». Goar, Eù^oXôyt.ov sive rituale Grœcorum, éd. de Venise, 1730, p. 145 AB. La messe de saint Jean Chrysostome, si importante dans le rite byzantin, emploie des termes presque identiques. Ibid., p. 63 2.

Toutes les messes trancrites par Renaudot dans sa collection contiennent des prières analogues et souvent plus développées. Ainsi, parmi les liturgies d’Alexandrie (coptes), celle de saint Basile : « Souvenez-vous aussi, Seigneur, de tous ceux qui se sont endormis et reposent, prêtres ou laïques dans tous les ordres. Daignez, Seigneur, accorder à leurs âmes le repos dans le sein d’Abraham, Isaac et Jacob dans le paradis de volupté », t. i, p. 22 ; la liturgie de saint Grégoire de Nazianze : « Souvenez-vous, Seigneur, de nos pères et frères qui se sont endormis déjà dans la foi orthodoxe ;

donnez-leur à tous le repos, avec vos saints… », p. 33 ; la liturgie de saint Cyrille : « Souvenez-vous. Seigneur, de nos Pères, les archevêques orthodoxes, qui déjà sont morts, et de tous ceux… dont la mémoire ne nous est pas présente, mais qui dorment et reposent dans la foi du Christ. Daignez, Seigneur, accorder que leurs âmes reposent toutes dans le sein de nos pères… >., p. 41. Voir des prières analogues dans les liturgies coptes, transcrites du ras. grec-arabe, Bibl. nat., ms. 3023 ; laliturgic de saint Basile, Renaudot, op. cit., t. r. p. 71 ; celle de saint Grégoire, p. 103-104 ; la liturgie grei dite de saint Marc, p. 135-136. La liturgie éthiopi contient des formules semblables : « Nous vous prions aussi, Seigneur, pour ceux qui déjà se sont endormis, afin que vous leur donniez le repos, s P. 483.

Les liturgies jacobites présentent les mêmes particularités : les deux textes, ordo communis et ordo generalis, traduits par Renaudot, contiennent expressément le souvenir des défunts : « Souvenez-vous, Seigneur, de ceux qui sont morts, et donnez-leur le repos, à eux qui vous ont revêtu dans le baptême et vous ont reçu de l’autel. » Le diacre continue cette prière du célébrant en formant le vœu que ceux qui ont mangé le corps et bu le sang du Sauveur reposent avec Abraham, à la table de Dieu (nous dirions aujourd’hui au banquet éternel). On doit souligner la dépendance ici marquée entre la communion eucharistique et le salut éternel. T. ii, p. 10 ; cf. p. 37. La liturgie de Jacques, frère du Seigneur, contient une prière caractéristique : « Voici l’oblation présentée, et voici que les âmes sont purifiées. Que par elle soit accordé le repos aux défunts peur qui elle a été offerte. Cette oblation, présentée à Dieu par les vivants pour les défunts, expie l’iniquité de l'âme et par elle leur sont remis leurs péchés… Agneau de Dieu et pasteur mort pour vos brebis, donnez, Seigneur, par votre grâce, le repos aux fidèles défunts… Joie dans les sphères supérieures, espérances heureuses dans les inférieures, par les oblations que font les vivants pour leurs défunts. » Ibid., p. 43. Dans la liturgie de saint Xyste, pape romain, laquelle appartient néanmoins aux liturgies orientales, le souvenir des défunts intervient ; on demande pour eux à Dieu « une résurrection bénie d’entre les morts et, dans le royaume des cieux, une vie nouvelle et éternelle. » P. 137. La liturgie de saint Pierre, prince des apôtres, fait mémoire de tous les défunts du lieu où l’on prie et de tous lieux, mais principalement de ceux pour qui est offert le sacrifice. P. 150 ; cf. p. 158. Sous une forme différente, la liturgie de saint Jean l'Évangéliste insiste sur l’aspect universel de cette prière pour les morts : « Souvenez-vous, Seigneur, par votre grâce, de ceux qui sont séparés de nous et ont émigré vers vous, qui ont reçu votre corps et votre sang précieux, et ont été marqués de votre caractère, depuis le temps de la première institution chrétienne jusqu'à nos jours. P. 167. Voir aussi la liturgie des douze apôtres, dite de saint Lac, p. 173, et celle de saint Marc, p. 181, où l’on rencontre des traits analogues. Celle de saint Clément, p. 195-196, contient un très long mémento des morts : elle prie, demandant une « mémoire honorable et la félicité pour tous corps, âmes et esprits de tous nos pères, frères et maîtres, temporels et spirituels, qui sont morts dans n’importe quelles régions ou cités ou provinces, ou qui ont été étouffés dans la mer ou les fleuves, ou qui sont morts en voyage et dont aucune Église constituée sur la terre ne fait mémoire. » Cette insistance à prier pour tous, en développant sous divers aspects cette universalité, est ici très caractéristique.

D’autres formules analogues et tour, aussi touchantes se lisent dans la liturgie de saint Denys, évêque d’Athènes, p. 208-209, de saint Ignace, p. 221, du pape romain Jules, p. 226, 230 ; de saint Jean Chrysostome, p. 247, de Marouta, éveque de Takrit († 649). p. 266 ; l’i RG Im|i ; i. LES SUFFRAGES POUR LES MORTS ORIEISn

L210

de Dioscorc. p 292, de Philoxène de Mabboug, p. 304, de Sévère d’Antioche, p. 326, de Jacques Barvdai, v i.i liturgie de Jacques de Saroug, évéque de Batnan, est aussi touchante que possible : Souvenei S [neur, « ! < tous ceux qui déjà se sont endormis dans la vraie foi, depuis Adam Jusqu'à ce Jour… Don nez. Seigneur, le repos aux.'mus de ceux dont nous faisons mémoire ; inscrive ! leurs noms dans votre liv re de vie… Que personne d’entre eux, que personne parmi nous ne soit condamné, rejeté, exclu de votre royaume céleste ! Seul est apparu sur terre, exempt de péché, votre 1 ilunique et Notre Seigneur et Dieu, Jésus Christ : par lui, et a cause de lui. nous aussi espérons obtenir miséricorde et pardon des péchés, tant pour nous que pour eux. i P. 363 364. Voir également la liturgie de Jacques d'Édesse, p. 376, et de quelques autres jacobites. I 1. :  ; '">. 404, llô.

Les liturgies de Michel le Syrien, p. 143, et de plusieurs autres, qui terminent le recueil de Renaudot (cf. p. 450, 164, 186, 499, 516, 533, 587, 815), bien que moins expressives, renferment toutes explicitement le souvenir des défunts. Mais déjà, avec ees dernières liturgies, nous avons de beaucoup dépassé l'époque où devait se cantonner notre enquête. I ne certitude du moins s’en dégage très nettement, c’est que les Églises orientales ont toutes pieusement gardé la pratique immémoriale de recommander a Dieu, au saint sacrifice de la messe, les Bdèles trépasse-..

SUT le rapport de ees liturgies orientales entre elles.

on consultera les articles du Dicf. d’archéol. : AlexanLilurgie), t. i. col. 1182 sq. ; Egypte, t. iv, col. Grecques (Liturgies I. t. m. col. 1591. Voir sur les liturgies orientales, prières pour les morts. F. Probst. Liturgie der drei ersten christlichenJahrhunderte, Muns 13 ; l-.-.I. Mone, Lateinische mul Griechischr Messen ans den n.-ri. Jahrhunderten, Francfort-s.-M., 1850 ; E. Freistedt, Altchristliche Toten. htnistage. Munster-en-W.. 10J8. 2. Prières pour les morts, spécialement aux funérailles. — Le Sarnimentaire de Sérapion. découvert te de rituel ou de pontifical, contenant trente prières, dont quelques-unes sont nommément attribuées a sérapion de Thmuis (f après 362). Nous trouvons une formule d’intercession : Pour tous funts dont on fait la mémoire, nous pi ions ainsi : Sanctifiez ces âmes, car otis [es connaisse/, toutes ; sanctifiez toutes i elles qui dorment dans le Seigneur et mettez-les au rang de toutes nos saintes puissances et donnez-leur place, t séjour dans votre royaume, » Le même Scrapion a conservé une prière pour l’inhumation : … Nous VOUS prions pour le repos de l’une de serviteur (OU de Votre servante. : donnez le repus

t dans un Heu verdoyant et paisible et res nn corps au jour que vous aurez marqué.

mal o/ tht idies, t. r, p. 106, 275.

L’euehologe de Goar contient lis prières pour lis

funérailles d, s fidèles défunts, p. 123 138. On y retrouve

exprimés les sentiments que nous avons t rouv es dans

la liturgie de la messe ordinaire, au Mémento des morts.

. par exemple, une prière du début : Prions le

eur. O I >ieu de tous esprits et de toute chair ! qui.

linquant la mort. avez, vaincu le démon et donne

au monde la vie. donnez. Seigneur, le repos a l'âme de

votre serviteur N…. défunt, dans un lieu de lumière,

dans un lieu agréable, dans un lieu de rafraîchissement.

d’où sont exclus la douleur, le chagrin et les soupirs.

Pardonnez-lui. Dieu clément, tout délit, commis par

lui, soit en parole, soit en œuvre, soit en pensée. Il

n’est pas un seul homme qui vive sans pécher ; vous

seulmanifesté exempt de faute ; votre justice

i justice éternelle : vos paroles sont la vérité.

Parce que vous êtes la résurrection et la vie et le repos

serviteur, nous vous rendons gloire, ô Christ

notre Dieu ! … = 1'. 13 I. iln insiste aussi pour que soient

pardonnes les pèches commis sciemment ou incons ciemment, volontairement ou involontairement. p. 124, 126. L’invocation a la sainte lerge en faveur du défunt revient fréquemment, p. 126, 127. tus. 132,

alternant avec les leçons morales que Suggère la pensée

de la mort et qui, dans l’otiice oriental, font songer aux

leçons de Job de nOl re r r nocturne. Et linalenient cette prière, qui condense tout le dogme de la communion

des s. unis relativement au soulagement <les âmes du purgatoire : Que, par les intercessions de sa Mère sans

tache, des saints apôtres glorieux et célèbres dans tout

l’univers, de nos ancêtres bienheureux qui ont porte

Dieu sur terre, que le Christ, notre vrai Dieu, qui est ressuscite des morts, place dans les tabernacles des

justes l’Ame de son serviteur défunt, qu’il la dépose dans le sein d’Abraham, qu’il l’adjoigne aux justes et

que, bon et clément, il prenne pitié de nous. Amen]

P. 13$1-$233. Les notes de Goar mont rent que ces ri les ne

sont que l'écho de la doctrine traditionnelle des Pères. Suivent, dans le même recueil, les prières pour les

funérailles des moines, p. 138, des prêtres, p. 151, et,

d’après certains euchologes antiques, des textes distincts pour les funérailles des hommes, p. 168, et des femmes, p. 171. Les prières pour les funérailles des enfants apportent ici encore leur valeur dogmatique. Pour les enfants, nulle intercession demandant le pardon de taules dont ils sont incapables, mais l’expression d’une confiance filiale dans le bonheur concède imuié diatement à leur innocence : i Seigneur, qui dansée siècle gardez les enfants et. dans le siècle futur, à

cause de la simplicité de leur àme et de leur état d’innocence, en remplissez le sein d’Abraham et les laites habiter dans les lieux splendides OÙ séjournent les esprits des justes, recevez, aussi dans la paix l'âme de votre serviteur, N… Car vous-même l’avez dit : le royaume des cieux appartient à de folles (âmes). » P. 178. On trouve même, dans les liturgies orientales pour les défunts, des formules qui rassemblent à celles de l’offertoire de nos messes de Requiem : Délivrez, Seigneur, les serviteurs de votre Église du jeu terrible… des ténèbres denses, des grincements de dents et du ver qui punit toujours. » Office in sabbato aniinurum. vigile de la Pentecôte. I >e toute évidence, le contexte exige qu’on interprète ces formules comme nous le faisons nous mêmes des formules latines. Noir plus loin, col. 1300.

On le voit. dans les lit urgies orientales, la prière pour les mort s présente exactement les mêmes caractères que les prières des liturgies occidentales. Elles manifestent donc la même croyance relal iv enient aux situai ions de l’au-delà. On trouvera un bon expose, en raccourci, de .es prières des liturgies orientales dans Jugie, Theologia dogmatica christianorum orientalium, t. iv, p. 89-95.

.'{. L'épigraphie orientale. lis documents épigraphiques qu’on a cités dans ce dictionnaire sur les n lations île l'Église militante et de l'Église sou lira nie sont presque tous empruntés aux catacombes romaines on

aux monuments de l'Église latine. Voir Communion ius saints (Monum. de l’antiquité chrétienne), i. iii,

COl. 160. Il est donc utile de rappeler brièvement que de tels documents existent encore dans les Églises oriin

laies et attestent, comme a Rome et en Afrique, la croyance a l’efficacité des suffrages en faveur des |

des défunts.

Il ne saurait être question de dresser ici un répertoire complet des épigraphes funéraires de l’Orient, ni même de reproduire en fac-similé celles que nousi il' nuis. I.e travail a été fait d’une façon abondante par dom Leclercq, dans le Dictionnaire d’archéologie chrétienne et de liturgie. Quelques rappels suffiront ici pour

le bul théologique que nous poursuivons., 1 l’on vou dia b)l i se reporte ! aux articles de dom Leclercq pour retrouver les formules originales.

A Alexandrie même, l'éplgraphie funéraire n’offre que rarement dis formules intéressantes. En voici cependant deux assez suggestives : « Seigneur, Dieu de nos pères, ayez pitié de l'âme de votre serviteur et faites-la reposer dans le sein de nos pères saints, Abraham, Isaac et Jacob, nourrie du bois de la vie. Le diacre Jean a été enterré au mois de phamenoth… » G. Botti, Steli cristiane di epoca bizanlina esistenli nel museo di Alessandria, dans Bessarione, 1900, p. 438, n. -1. « Que le Seigneur.se souvienne de la dormition et du repos de Makara, la très douce ; que le lecteur prie (pour elle). » Ibid., p. 277, n. 14 ; Dict. d’arcliéol., t. la, col. 1157, 1159.

L'épigraphie copte fournit en revanche des spécimens nombreux. En Basse-Egypte, on cite l’inscription suivante (ix° siècle), de dialecte mêlé, mi-bohaïrique et mi-sahidique : « Dieu qui avez fourni le repos de l'âme de nos ancêtres, donnez aussi le repos à l'âme de votre serviteur Abraham, afin qu’il soit nourri dans les verts pâturages, au bord des eaux du rafraîchissement (cf. ps. xxii, 2), dans le paradis de la joie, lieu d’où ont fui la peine et la douleur (cf. Is., li, 11), dans la lumière de vos saints. Amen » Bergmann, Inschri/tliche Denkmàler, dans Recueil de travaux, 1886, t. vii, p. 195 ; Dict. d’archéol., t. ni b, col. 2835. D’autres, assez nombreuses, demandent à Dieu de « faire miséricorde » au défunt : « Moi, Jean, diacre, j’ai quitté ma mère veuve. Je suis venu dans la ville de Cos, j’y suis mort ; on m’a emporté, on m’a placé dans ce tombeau : souvenezvous de moi, mes bien-aimés, afin que Dieu me pardonne. » E. Revillout, Les prières pour les morts, dans l'épigraphie égyptienne, dans Rev. égyplologique, t. iv, 1885, p. 2, n. 1. « Jeûnez tous pour moi, afin que Dieu (fasse miséricorde) à mon âme. » Ibid., p. 3, n. 2. « Dieu de nos seigneurs les apôtres saints, vous ferez miséricorde avec l'âme du bienheureux Épimaque, le maçon, qui s’est reposée le 11 du mois de pagni de cette année, Xe indiction. Ayez la charité de prier pour moi, vous tous qui me connaissez, afin que Dieu fasse miséricorde à ma malheureuse âme. Amen ! Fiat ! JésusChrist. » Ibid., p. 4, n. 4. C’est par dizaines que l’inscription " Dieu fasse miséricorde » se lit dans les documents épigraphiques publiés jusqu'à ce jour. Voir art. Défunts, dans Dict. d’archéol., t. iv a, col. 450 ; art. Copte, ibid., t. m b, col. 2836, 2851-2883, passim. Un certain nombre d'épitaphes funéraires invoquent, avec la protection de Dieu ou de la Trinité, celle de la Vierge Marie, des anges et des saints : « Apa Jérémie, apa Enoch, notre mère Sibylle, sainte Marie, tous les saints selon leurs noms, souvenez-vous de notre frère Georges. » Teza, Iscrizioni cristiane d’Egitto, Pise, 1878, p. 5. « Le Père et le Fils et le Saint-Esprit ; Sainte-Marie, l’archange Michel et Gabriel, apa Jérémie, apa Enoch, apa Panesneu, ama Sibylle, tous les saints qui ont fait la volonté de Dieu, implorez le Seigneur pour l'âme de notre défunt frère Callinique, le « notaire », afin qu’il lui fasse grande miséricorde dans les lieux où il se trouve, comme (il fit) à l'âme du larron et de Lazare… » Thompson, n. 84, dans J.-E. Quibel, Excavations at Saqqara (1907-1908), with sections bij sir Herbert Thompson and prof. W. Spiegelberg, Le Caire, 1909 ; les inscriptions coptes publiées par Thompson se trouvent, p. 27-77 ; Dict. d’archéol., t. m b, col. 2814-2846. Voici la fin d’une longue épitaphe mutilée ; c’est le défunt qui parle : « Moi, Victor, le malheureux, j'étais heureux et content au milieu de mes enfants, soudain survinrent les messagers de la mort (cf. Job, xx, 15). Ils se fermèrent les « entendant » et les « percevant », c’est-à-dire le nez qui est défait et n’odore plus, la bouche qui s’est tue et ne parle plus pour toujours. J’ai dit : Il eût été bon pour moi de n'être pas né (Matth., xxvi, 24). Priez donc pour moi afin que Dieu fasse miséricorde à mon âme, car pas un homme

n’est exempt de péché, lors même que sa vie serait d’un seul jour sur la terre (cf. Job, xiv, 4-5), pour que je sois digne d’entendre cette parole bienheureuse : Entre dans la joie de ton Seigneur » Biondi, Inscriptions copies, dans Annales du serv. des antiquités de V Egypte, t. viii, 1907, p. 179 ; Dict. d’archéol., t. m b, col. 2857.

Voici, pour terminer cet aperçu sur les inscriptions égyptiennes, un texte qui, pour être du xiie siècle, n’en rellète pas moins la doctrine traditionnelle de l’Orient sur les suffrages pour les morts. C’est l’inscription du prêtre Marianos, à Assouan (1157). « Dieu des esprits et de toute chair, vous qui avez ennobli la mort, foulé aux pieds l’enfer et dispensé la vie au monde, faites reposer l'âme de votre serviteur Marianos, prêtre, dans le sein d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, où il n’y a ni douleur, ni chagrin, ni soupir ; tout acte (répréhensible) qu’il a commis par parole, en fait ou d’intention, oubliez-le, Seigneur, vous qui êtes bon et miséricordieux ; pardonnez-lui puisqu’il n’y a pas d’homme qui puisse vivre sans péché ; car vous seul, ô mon Dieu ! êtes la justice sans défaillance ; votre justice est éternelle, Seigneur, et votre parole, qui est la vérité, demeure éternellement ; vous êtes la résurrection et le repos… de votre serviteur Marianos, prêtre. Nous rendrons gloire au Père, au Fils, au Saint-Esprit… » Musée du Caire, n. 8396 ; art. Egypte, dans Dict. d’archéol., t. iv b, col. 2495-2496. On rapprochera le texte de cette stèle de la prière du début des funérailles, citée par Goar dans son Euchologe, voir col. 1209.

Proche de l’Egypte, l’Ethiopie fournit de multiples exemples d’inscriptions funéraires où les vivants demandent à Dieu d’accorder sa miséricorde, un lieu de rafraîchissement et de paix, la lumière et la gloire à ceux qui ne sont plus. Souvent, la sainte Trinité est invoquée ; parfois, mais rarement, il est fait mention de la Vierge. Voir les textes art. Ethiopie, dans Dict. d’archéol., t. v a, col. 617-623.

L'épigraphie à Anlioche est pauvre. Elle fournit cependant quelques éléments en faveur de l’existence des suffrages pour les défunts. Dom Leclercq reproduit une inscription assez suggestive, publiée par W.-K. Prentice, Fragments of an early Christian liturgy in Syrian inscriptions, dans Transactions and proceedings of the American philological Association, t. xxxiii, 1902, p. 96. C’est une prière au Christ : « Toi qui donnes la vie au genre humain et la mort en punition du péché, et qui dans ta bienveillance promets la résurrection et nous en donnes un gage, Christ, daigne visiter par ton salut ton serviteur Antonin, fils de Diogène, Sométia, sa femme, et les autres qui reposent ici, afin qu’ils puissent voir le bien de tes élus. » Dict. d’archéol., 1. 1 b. col. 2418-2419. Il semble que cette inscription soit la même que celle qui est rapportée, comme provenant des tombeaux de Hass. Voir ce motdansDiW.d’are/ieoL t. vi b, col. 2066-2067.

IV. La tradition latine.

La tradition occidentale suit à peu de chose près le même mouvement d'évolution que lr tradition orientale. Sur le point des peines purificatrices d’outre-tombe, elle part de conceptions archaïques analogues à celles des Pères grecs ; mais assez rapidement elle aboutit, avec saint Augustin, à des positions plus logiques. Quant aux suffrages pour les morts, tout comme l’Orient, l’Occident en proclame l’utilité sans hésitation. Nous étudierons donc d’abord l’enseignement relatif àl’existence d’une peine positive, purificatrice des fautes, dans l’autre vie ; ensuite la doctrine des suffrages pour les morts.

I. L' ENSEIGNEMENT DES PÈRES RELATIVEMENT A UNE PEINE POSITIVE, PURIFICATRICE DES FAUTES

dans l’autre VIE. — 1o Avant saint Augustin. — 1. La passion des saintes Perpétue et Félicité.

Ces saintes subirent le martyre vraisemblablement le 7 mars 203. Les Actes relatant leur passion datent du 1213

PU lu ; AT Ol HE. LES 1 Il > ^ V AN T SAINT AUGUSTIN

L 2 1 k

début du m Mille. On connaît le curieux épisode rela tii au Jeune Dinocrate. Sainte Perpétue, en prison el déjà condamnée aux bêtes, eut deux visions. Elle vit d’abord son Jeune frère Dinocrate, mort peu de temps auparavant, qui essayait de s’approcher d’une ton talne pour v étancher sa soif. M. us la margelle était trop haute pour l’enfant. Elle compril qu’il était dans un lieu de souffrances et elle pria pour lui sans arrêt. ait suivante, Perpétue revoit encore Dinocrate, mis tout brillant de lumière et tout Joyeux, la margelle de la piscine était abaissée, et l’enfant pouvait boire. idi Dinocraten… re/rigerantem. Je m'éveillai, eontinue-t-elle, et je compris qu’il était sorti de peine trtinsliitiim esse de pana. L’expression refrigerantem fait naturellement songer aux expressions analogues recueillies dans les inscriptions funéraires et semble être une allusion au purgatoire. C’est en ce sens que la gracieuse vision a été maintes fois interprétée, l n critique catholique contemporain se demande s’il ne vau lirait pas mieux voir, ilans le récit de Perpétue, des

tr.ues de croyances populaires plus ou moins apparentées a des idées antiques. Cf. F. J. Dôlger, Antike und Christentum, Lu. fasc. 1. AntikeparaUelen uun leidenden Dinocrates in der Passio Perpétua, Munster en W.,

On trouvera du moins dans l'étude de Dôlger, une diligente recenslon des opinions qui se sont produites. Tixeront et Mgr Chauvin n’hésitent pas à rapporter au purgatoire le récit concernant Dinocrate. Tixeront, Hist. des dogmes, 8° éd., 1. 1. p. i.">7 : G. Chauvin, Le purgatoire. coU. Science et religion, Paris. 1908, p. 29 'M.

l ertullien. — Tertullien admet encore qu’après la mort, les Ames descendent aux enfers, pour v attendre la résurrection. Cette conception est en rapport avilies idées millénaristes dont il se faisait le défenseur et continue l’idée empruntée par la théologie grecque au

I des.luifs. Voir ci-dessus, col. 1 16 I. Mais, dans ces « enfers. les âmes trouvent des peines et des récomomme des arrhes de l'éternité. L'âme n’est elle pas capable par elle-même, indépendamment du corps, de douleur et de joie ; elle peut dont- éprom er les effets de la justice divine sans attendre d'être réunie au corps. Elle a eu ses actes propres a elle, dont elle doit rendre compte, et Us actes qu’elle a eus en commun avec le corps, elle en est la principale responsable puisque à elle en appartient l’initiative. En définitive, les enfers, pour l'âme, c’est cette prison dont parle l'Évangile (Mat (h.. 25-26), dans laquelle il lui faudra payer jusqu'à la dernière obole, c’est-à-dire racheter, par un retard de la résurrection, même ses moindres pèches.

-imuni quadrantem modicum queque deliclum mon rts.nr : Hic luendum interpretamur. De anima,

c. LVin, P. /… t. II, 1866, COl. 796 C. En termes a peu pris identiques, mi retrouve, avec la même exégèse de Mat th.. v. 26, l’allusion a la dernière obole a paver dans l’autre vie. De anima, c. xxxv ; De n surreclinne carnis, .. xi n. P. ; … t. ii, col. 753 C, 901 A.

L’idée millénariste qui préside a celle conception est

imée dans V Advenus Mareionem. Après les mille

e du Christ, les saints ressusciteront.

plus lot ou /</i/s tardivement selon leurs mérites…, et nous

s transportes dans le royaume céleste. L. III. iv, P. /… t. ii. col. 385 A. 1. : itique de ces textes en faveur du

purgatoire.t été dis* utée. J.-A. M a son a soutenu que le

lima. c. lviii, ne contenait pas d’allusion au pur re : il ne serait question, dans ce passage, que de tourments pour les futurs damnés, de joies pour les futurs élus, et. si ( es derniers souffrent. c’est de n’avoir point part à la première résurrection. Cf. Journal oj taological ttudies, t. iii, 1902, p. 598-801. A. d Aies

nait en ces observations une part de vérité, car :

lus comme < Iles des *" » "* « , trouvent un

enfers les arrhes. i.- leur étemiti : de plus, les élus ressus citent plus ou moins tôt, selon leurs mérites. Nous recon

liai ss, mis > 1 1 1 <- La iloi’l i me des : ii I lies de la resiu icclion es ! dis

tincte de celle du purgatoire, m. us nous mous que cette dei nièie soit absente, n est vrai qu’elle se teinte de nuiirna

usine : l’eitullien ailmrl, 1, u.i 1 1 suit, et ions successives, et

son purgatoire est préliminaire.1 la pn mu rt des deux résui reliions ; mais cette transposition du dogme ne doit pas taire prendre le change sur s.i pensée qui, sur ce point, nous parât) tout < fait catégorique. Les élus devront explei ins qu’aux moindres fautes, avant d'être admis 1 La première résurrection, et leur millentum s’en trouvera plus ou moins .coin le. si même il n’est pas, pour quelques-uns, totalement supprime. Qu’est ce que cette attente douloureuse, sinon un purgatoire ? La théologie de Terlullten, l’a ris. 1905, p. 134.

Citons, en terminant, un brel commentaire de l Cor.,

w, 50, où rcrtullioi laisse entendre q 1 si l'âme, auteur des œuvres de la chair, purifiée par le feu dont parle

l’Apôtre, mérite le royaume de Dieu grâce à l’expiation

des fautes qu’elle a commises unie au corps, le corps. qui n’a été que sou instrument ne saurait demeurer dans la damnation, Advenus Mareionem, I. Y. c. x. P. 1… t. n. col. 529 B.

>. sami Cyprien. I.'idée millénariste n’a laissé' chez

Cyprien aucune trace ; mais chez lui comme chez 1er tullien nous trouvons du purgatoire la chose sans le

mot. L’idée du purgatoire se présente chez lui par voie de déduction et d’antithèse. Dans l'écril Ad Fortunatum de exhortatione marlyrii, piaf., n. I, le mari vie est appelé baptisma qimd ims de mundo recedentes statim Deocopulat. Ilartel. p. 319. Il est donc naturel de conclure que ceux qui ne meurent pas mari v rs ne soûl pas tous immédiatement réunis à Dieu. Que deviennent-ils en attendant'.' Saint Cyprien expose sa pensée a ce sujet dans la Lettre à Antonien, où il explique que dans l’autre inonde différents traitements sont réservés aux .'unes, qui cependant finiront toutes par entrer dans le royaume des deux : Autre chose est attendre le pardon, autre chose, parvenir a la gloire ; autre chose être envoyé en prison pour n’en sortir qu’après la dernière obole pavée, autre chose recevoir immédiatement la récompense de la foi et de la vertu ; autre chose être débarrassé et purifié de ses péchés par une longue souffrance dans le feu et autre chose avoir effacé toutes ses fautes par le martyre ; autre chose enfin être suspendu au jour du jugement à la sentence du Seigneur et autrechose être immédiatement couronné par lui. Epist., lv, n. 20, Martel. p. 638. Cette souffrance purificatrice, ce feu d’oui retombe, ne peuv eni et re que le purgatoire.

Sans parvenir a la netteté d’expression qu’on Irouvera dans les àucs suivants, Cyprien est déjà en progrès sur Tertullien. ci. A. d Aies. La théologie de saint Cyprien, l’ai Ls, 1922, p. 35, noie L

I. Lactance. - Quelques auteurs en appellent au témoignage de Lactance en laveur de la peine du feu purificateur dans l’autre vie. ci. Atzberger, Gescluchte ihr christlichen Eschatologie innerhalb der vornicànischen y.eit. p. 605 ; Fr. Schmid, M/s Fegfeuer, Brixen, l 905, p, ko. Mais Lactance est un écho de l’eschatologie

archaïque des premiers temps, où I oui ce qui concerne le

sort des défunts est projeté sur l’unique perspecl Ivedu jugement Dnal ; c’est ainsi que les justes eux-mêmes seront éprouvés par le feu, Insliluliones, . VII, c. xxi,

/'. /… t. vi, col. 802 A. Mais cette épreuve n’aura pas

lieu immédiatement après la mort : les âmes sont enfer niées en attendant que vienne le jugement. Ces âmes que le feu du jugement aura épargnées ou purifiées recommencent sur terre une nouvelle vie. ibid., col. 803 A. l n tel enseignement, tout Imprégné de mtllénarisme et venant après celui de saint Cyprien. ne saurait être retenu comme marquant une étape de la tradition,

5. Saint Hilaire et 'Linnn de Yi’rutie. L’inllin d’Origène se fait sentir assez peu sur ces deux ailleurs.

Voici comment. dans leurs concept ionseschatologiques,

peut s’encadrer l’idée d’un purgatoire. Poureux, immé121 !

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. LES LATINS A VA NT SA] T A UGUSTIN

1216

diatement après la mort, les âmes descendent toutes aux enfers, après avoir été soumises à un jugemenl

préalable. Les justes VOnl se reposer dans le sein

d’Abraham, tandis que les coupables sont châtiés par le l’eu. Cf. Ililaire. In ps. CXXXVIII, n. 22 : U, n. 22 ; cxxii, n. 11 : cxx, n. 16 ; £F//, n. 5, 7 ; //, n. 18, P.L., t. ix, col. 804 A, 322 B. 673 li. 660 BC, 372 A t-t 37.1 A, 290B ; Zenon, Tract., t. I, c. jcvi, n. 2 : t. II, c. xxi, n. 3, P. L., t. xi, col. 372 A, 161 Ali. Nous avons ici comme un écho de l’hypothèse des Grecs, d’une dilation de la récompense et du châtiment jusqu'à la fin du monde. Quand viendra la fin du monde, tous les morts ressusciteront. Tous les hommes ne seront pas jugés : [es justes non plus que les infidèles et les impies manifestes n’ont pas besoin de jugement : ils sont jugés pour ainsi dire d’avance et ont déjà été traités selon leurs mérites. Seuls les pécheurs ordinaires, c’est-à-dire les chrétiens ayant mal vécu, seront jugés. Hilaire, In ps. i, n. 1518 (cf. n. 1-3) ; LVII, n. 7, P. L., t. ix, col. 259-261 (cl. col. 250-252), 373 A ; Zenon, Tract., t. II, c. xxi, n. 1-3 ; P. L., t. xi, col. 461. Les pécheurs impénitents seront alors cruellement tourmentés en enfer. Hilaire, In Matth., c. v, n. 12 ; In ps. LIT, n. 14, t. ix, col. 948 C, 354 C ; Zenon, Tract., t. II, c. xxi, n. 3, t. xi, col. 401 B. Tout laisse donc supposer qu’une catégorie de pécheurs sera purifiée par le jugement. C’est l’interprétation de Schwane, Hist. des dogmes, trad. fr., t. iii, Paris, 1903, p. 256. Et le théologien allemand appuie son interprétation sur le texte In ps. CXvm, litt. 3, n. 5, P.L., t. ix, col. 519 A. Il semble qu’ici Hilaire connaisse, outre le baptême d’eau, quatre autres baptêmes : la venue du Saint-Esprit (vraisemblablement la confirmation), la purification par le feu du jugement (emundatio puritatis… quæ judicii igni nos decoquat), la mort qui nous délivrera de notre corps grossier et matériel, enfin le martyre. Le feu du jugement, ici comme chez Origène, est déjà, en tant qu’il purifie les pécheurs, une forme archaïque de la croyance au purgatoire. On pourrait invoquer aussi, du même commentaire, le n. 12, col. 522 C, où Hilaire rappelle que le jugement ne saurait être désirable pour personne, car personne n’est absolument pur devant Dieu, et la moindre parole inutile devra être expiée dans le feu qui s’imposera à nous.

L’influence d’Origène sera plus sensible dans les conceptions de saint Ambroise, de l’Ambrosiaster et de saint Jérôme ; mais la doctrine du purgatoire s’y manifestera déjà plus clairement.

6. Saint Ambroise.

L’autorité de saint Ambroise est déjà plus nette. Sans doute sa doctrine des peines purificatrices d’outre-tombe est encore imprégnée d’idées empruntées à la théologie juive et à Origène. mais il est déjà possible d’y retrouver les grandes lignes du dogme chrétien.

Appuyé sur le IVe livre d’Esdras, saint Ambroise place les âmes, au sortir de leurs corps, dans des habitacles, des promptuaria supérieurs, où elles attendent la fin des temps. Mais déjà un jugement s’est exercé sur elles, et leur sort n’est pas identique : alias manet peena, alias manet gloria ; et lamen nec Mec intérim sine injuria, nec istse sine fruclu sunt. Il y a donc déjà un commencement de récompense et de punition, les justes jouissant par avance du bonheur qui leur est réservé, les méchants souffrant de la colère de Dieu qu’ils savent devoir encourir, De bono mortis, n. 45-48 ; cf. De Caïn et Abel, t. II, n. 35-37, P. L., 1866, t. xiv, col. 588-589, 377. Cette situation néanmoins ne sera pas commune à toutes les âmes sans exception, car il en est qui déjà sont au paradis et unies au Christ, cf. In ps. CXVIII, serm. xx. n. 12 ; In Lucam, . VII, n. 5 ; t. X, n. 12 ; De excessu fratris, t. II, n. 94 ; De flde, t. IV, n. 8 ; Epist.. xv, n. 4, 8, t. xv, col. 1564 B, 1787 BC, 1899 BC ; t. xvi, col. 1400 C, 644 AB, 997 A, 998 A. Ces

unies sont celles des pat riarches, des prophètes, des apôtres, des martyrs des deux Testaments et même de quelques autres personnages du Nouveau.

A la fin du monde, les morts ressusciteront. Saint Ambroise distingue deux et même quatre ou cinq résurrections, la première marquant pour L'âme la reprise réelle du corps, les autres, métaphoriques, désignant l’entrée des élus au ciel ou leurs diverses purifications avant d’entrer définitivement au ciel. La première résurreel ion est suivie du jugement. Si, en réalité, tous les hommes doivent être juf>és, Ambroise cependant, se conformant au langage de son temps, enseigne que ni les justes ni les impies (entendons par impies, les infidèles et les apostats) ne seront jugés, les premiers n’ayant pas besoin du jugement, les autres étant déjà jugés. Seuls donc seront examinés les pécheurs, c’està-dire les chrétiens dont les œuvres n’ont pas correspondu à la foi. In ps. i, n. 51, 54, 56, P. L., t. xiv. col. 995. Ce jugement comporte ou entraîne immédiatement l'épreuve du feu : « Un feu est devant les ressuscites, que tous absolument doivent traverser. C’est le baptême de feu annoncé par Jean-Baptiste, in Spirilu sancto et igné (Matth., iii, 11) ; c’est le glaive ardent du chérubin qui garde le paradis et au travers duquel il faut passer : omnes igné examinabuntiir ; omnes oportet per ignem probari quicumque ad paradisam redire desideranl. Omnes : Ambroise n’excepte pas Jésus-Christ lui-même ni ses apôtres ; les saints qui dès maintenant sont entrés au ciel n’y sont entrés qu'à travers le feu du jugement. In ps. CXVIII, serm. iii, n. 14-16 ; serm. xx, n. 12-14 ; in ps. XXXVI, n. 20, P. L.. t. xv, col. 1292-1293, 1564 : t. xiv, col. 1026-1027. Seulement l’effet de ce feu sur ceux qui le traversent est fort différent suivant la condition morale où ils se trouvent ; si différent que notre auteur, en un passage, distingue deux sortes de feu. proprement purificateur pour les fautes légères, l’autre vengeur pour les fautes plus lourdes et qui se confond avec le feu préparé au diable et à ses anges. In ps. cxviii, serm. ni, n. 15-17, P. L., t. xv, col. 1293. Cette distinction cependant n’est pas partout maintenue ; cf. In ps. XXXVI, n. 26, t. xiv, col. 1026 C, et l’on peut croire que le même feu, dans ses hauteurs, purifie les justes et, dans ses profondeurs, torture les méchants. Quoi qu’il en soit, tous, avonsnous dit, traversent le feu du jugement. Les impies et les apostats, sacrilegi </ui superbi in Deum jactavere convicia, en sont saisis comme par un feu vengeur qui les retient : alii in igné remanebunt… ministros autem impietalis ultor ignis exuret : ils sont précipités dans le lac de feu brûlant. In ps. XXXVI, n. 26, t. xiv. col. 1026 C. Aux justes parfaits, au contraire, ce feu paraît comme une rosée qui les rafraîchit : argent pur, ils ne contiennent pas de plomb à séparer : tels ont été les apôtres : Joanni (evangelislœ) cilo versabitur igneus gladius ; quia non invenitur in eo iniquitas quem dilexil œquitas. In ps. CXVIII, serm. xx, n. 12, 13, t. xv. col. 1564 ; cf. In ps., XXXVI, n. 26. t. xiv, col. 1027 A. Quant aux chrétiens ordinaires, ou bien leurs bonnes œuvres l’emportent sur leurs fautes et leur souffrance du feu de l'épreuve, proportionnée à ces fautes, sera relativement de peu de durée (Dieu a eu soin de les châtier d’avance) et leur délivrance sera prompte : absolutio enim matura sanctorum est… prieslo est venia. In ps. CXVIII. serm. xx, n. 22 sq. ; Epist., H, n. 16, t. xv. col. 1568 ; t. xvi, col. 921 D ; ou bien — et ce sont les plus nombreux (cf. In ps.xi, n. 7, t. xiv, col. 1122 C) — leurs fautes l’emporteront sur leurs bonnes œuvres, et ils partageront, pour un temps du moins, le sort des impies et des apostats : ils seront brûlés du même feu et épurés comme un vil plomb qui ne contient que peu d’argent. 7/i ps. cxrin. serm. xx, n. 13 ; serm., iii, n. 15, t. xv, col. 1564 BC. 1293 A.

En quoi consisteront proprement leurs tourments ? i : i

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE, LES LATINS w N I SAINT l t ; l STI N

1218

Ils consisteront tout d’abord dans l’exclusion du royaume de Jésus Christ, dans l'élolgnement de Dieu et des élus. In ps. i v, n. 17 ; De Nabuthe, n. 16, 18 ;

fratris, I. II. n. il. t. xiv, col. 1 1 15 B, 771 ; t. xvi, col. 1375. Mais ils comporteront aussi des peines positives. Dans son commentaire sur saint Luc, |. VII, n. 204, 205. t. xiv. col. 1844 VB, saint Ambroise, a l.i suite d’Origène, a expliqué métaphoriquement le feu, les vers. les grincements de dents, les ténèbres exté heures des remords, du désespoir, des obscurités iuterieures des damnés. » n ne saurait méconnaître cependant qu’ailleurs il a représenté l’enfer comme an lac de feu, et la peine des damnés comme le tourment du feu. In ps. xxxri, n. 26 ; / « Xabuthe, n..">'J : />< / « /<. I. II. n. Il", t. xiv, col. 1026 i. 783 A. ; t. xvi, col. 608 B

usée mit ci point, in.iiHiii.ut sans doute de consis lance.

Mais où elle (st très consistante, c’est sur la durée

. ctive de ces peines. Pour les (Unions et les impies,

les infidèles et les apostats, cette durée sera éternelle.

seront p.is anéantis, leur châtiment n’aura pas

de tin. In ps. ;. n. 17 sq. ; I>> bono morlis, a. Il : lu » s.

Il, senn. m. n. 17 : serin., viii, n. 58 ; serm. xxi,

De fide, I. 11. c. in' : De pwnitenlia, I. I. n. 22 ;

t. xi. col. 990 Bl. 526 D ; (. xv, col. 1293 D, 1388 BC,

('. : t. xiii. col. i'"* B. IW IU'.. Pour les simples pécheurs, il en.i autrement : la justice à leur égard est mêlée « le miséricorde : ils sont loin du salut, niais ils n’en sont pas complètement sépares : Leur loi les

irra et leur obtiendra leur pardon, bien qu’il y ait de l’injustice dans leurs œuvres. Ils seront sauves par leur foi, sic tamen salvi quasi per ignem. Et c’est pour qu>u ils seront brûlés, niais non consumés (si non exurimur, tamen uremur). Omnes enim qui sacrosanctse <pulati. dii’ini nominis appellalione censentur

qatiram resurrectioms et delectationis xternse qru tiam consequentur. In ps. CXYlll, serin, xx. n. 23, 24,

nn. xxii. n. 'iil : In ps. A..rI. n 26 ; De excessu

fraitris.l. II. n. 1 16, t. x. col. 1568, 1569, 1598 C ; t. xiv,

. : t. xiii. col.l 108 BC. Les peines des pécheurs

condamnés seront donc seulement temporaires ; elles

nt une tin. Ambroise en marque-t-il la durée ? Oui, d’une manière générale ; il écrit : Quiautemnon veniunt ad primam resurrectionem, sed ad secundam reservantur, isti urentur donec impleant (empora inter primam et secundam resurrectionem. <iut si non impleverint, iliutius in su[>plicio permanebunt. In ps. i. n. 5 I. P. /… t. xiv,

seignement eschatologique, dont nous empruntons le résume à J. Tixeront, Hist. des dogmes, t. ii. p. 345-348, contient, a côté d’hésitations et même d’erreurs héritées d’Origène, tout le dogme du purga toire et même un commencement d’explication théologique. Sans doute il > a erreur a vouloir sauver tous

royants, a cause même de leur foi (saint Jérôme lui-mêiii.- a adopté cette erreur) ; mais cette longue purification (Ls pécheurs avant leur entrée définitive

le paradis, voila bien le purgatoire. Il n' manque que le mot. La seconde résurrection, avons-nous dit,

I métaphorique et désignerait l’accession des i félicité éternelle. C’est ce que laisse entendre

mmentaire In Lucam, I. V, n. 61, P. /… t. xv.

- (.. La peine des pécheurs durerait donc au

moins jusque-là. Au moins, disons-nous : sinon impie

', . du tu s in supplicio permanebunt. En sorte que,

pour certains, la résurrection compterait quatre on

moments divers. Cf. In ps. i. n. 5(
/ « ccessu fra

I. II, n. 116, t. xiv, col. 995-996 ; t. xvi, col.l 108 BC. La délivrance du corps constitue un premier royaume de l>ieu : être avec le Llirist après la résurrection en

' itue un second, et même dans ce second roj auiiie. il > aura un processus mansionum parce que l'élu n’ar .i que progressivement et uraduellement à la pleine

D1CT. DE 1HÉOL. CAIIIOI..

possession de s.i félicite : Absolutus igitur per Domtni crucem… consolationem in ipaa possessione (terra tua) reperles : consolationem sequitur deleetatto, delectalionem divina mtseratio. Quem autem Domlnus miseretur tl vo cat ; qui vocatur videl voeantem ; qm Deum vtderlt in jus divins : generationis assumitur, tuneque demain quasi Dei fllius, calestis regni dioitits delectatur. llle igitur inetpit, hierepletur. In Lucam, l. V, n. 61, t. xv, col, 1738 BC Non seulement les li pot hèses sur la liai lire des peines purificatrices de l’autre vie sont touchées par Ain broise, m. us encore la conception d’une ascension pro

gresslve vers la béatitude, dont Catherine de Gênes

parlera plus tard avec tant d’amour, se retrouve déjà dans les écrits de l'évêque de Milan.

7. L’Ambrosiaster. La doctrine de V Ambrosiastei sur la purification d’outre tombe a beaucoup de points

de similitude avec celle de saint Ambroise.

Comme saint Hllaireel saint Ambroise, VAmbrosiaster partage les hommes en trois catégories : les saints et les justes, qui ont mis d’accord buis œuvres et leur

foi : les pécheurs, c’est a dire les Chrétiens, qui. noiiobs tant leur foi. ont mal vécu, et enfin les impies, apostats Infidèles, athées. Tous ressusciteront, mais seuls les pécheurs seront jugés, le cas des autres étanl manifeste, Les pécheurs seront condamnés au feu, mais seulement pour un temps. IN en sortiront, solulo débita. A la dif

lerence des impies que le feu tournieiil era éternelle ment, les pécheurs seront purifiés par le feu, et la rai

son en esi qu’il doit leur être utile d’avoir cru au Christ. Cette doctrine est exprimée dans le commentaire sur I Cor., iii, 13-15.

l 'niuscu jusque opUS qu.de sil. i^nis probabit… Si CUJUS

opus arserit, detrimentum patietur. Opus, quod arderedicitur. ni ila doctrine est, qiue Interibit… Damnum autem pati, est pœnas perpeti. Quis enim in pœna positus, jacturam non facit ? Ipse autem salvus cri t, sic tamen quasi per ignem… Ideo autem dixit : sic tamen quasi per ignem, ut salus tisec

non sine pœna sit ; quia non dixil ; salvus eril per ignem ;

sed fiini dicil : sic tamen quasi per ignem, ostendit salvum illum quidem [uturum, sed pœnas innis passurum ; ut per ignem purgutus liai salvus. et non sicut perfidi æ témoigne in perpetuum torqueatur ; u1 ex aliqua parte opene pretlum sii. credidisse in Christum. P. /… t. wn. col. 211 ; cf. In epist. « d liiiîn.. e. V, 11 ; fn epist. // ad Jim.. C. II, 20. /'.L., t. i, col. 99 C, 518 I).

Avec l’erreur miséricordieuse du salut de tous les chrétiens, c’est encore la forme archaïque du feu du jugement, inspirée de I Cor., iii, 11-15, qui domine la pensée de VAmbrosiaster. On se 1 ramperait donc él rau gement, en jouant pour ainsi dire sur l’expression « purifiés par le feu. si l’on voulait trouver ici mot pour mot la formule des théologiens lai ins après saint Grégoire le Grand du « feu du purgatoire

8. Saint Jérôme. Si farouche adversaire qu’ail étésaint Jérôme à l'égard d’Origène (qu’il avait cepen dant tant admiré avant 394), Il n’en est pas moins vrai que Jérôme continue, comme Ambroise et VAmbro ialer. a penser que tous les chrétiens, si pécheurs qu’Us soient, seront linalement sauvés. Et c’est la proprement une conception origéniste. C’est la conclusion de son commentaire sur Isafe, lxvi, 24. Si le

démon et les impies, les apostats et les athées doivent

souffrir éternellement, les pécheurs chrétiens seront purifiés, el leur sentence au jugement sera mêlée de miséricorde : Et siail diaboli et omnium negalorum aique impiorum qui dixerunt in corde suo : Non est Dais, credimus aternatormenta ; sic peccatorum et tamen diris tianorum, quorum opéra in igné probanda sunt algue purganda, moderatam arbllramur et mtxtam clementia tententiam judicis. P. /… 1866, t. xxiv, col. 704 B. Plus nettement encore, dans Epist., exix, n. 7 (vers 406) : Qui enim Iota mente m Christo confiait, etiamsi ni homo lapsus mortuus fucril in peccato, fide sua vtvli in perpetuum. Alloqui mors ista communis et credentibus ci non

T. — XIII — 39.

credentibus debetur œquuliter ; et omnes pariter resurrecturi sunt, alii in confusionem œternam, alii, ex eo quod credunt, in sempiternam vitam. P. L., t. xxii, col. 973 ; cf. Episl., xxxix, n. 3 ; In Dunielem, vii, 9 ; In Lucam, xvi, t. xxii, col. 469 ; t. xxv, col. 550 BC ; t. xxix, col. 673 I).

9. Saint Paulin de Noie et Prudence.

Peut-être serait-il possible de trouver chez ces deux auteurs quelques allusions à la peine purificatrice du feu dans le jugement futur. Le premier, en effet, exhorte les fidèles à prier Dieu, afin que leurs œuvres ne soient pas semblables au bois, au foin, à la paille, mais plutôt a l’argent, à l’or, aux pierres précieuses. Il parle de ce feu savant (ignis ille sapiens) par lequel nous passerons pour être examinés ; il importe de n’en être pas enveloppé pour subir la punition de sa brûlure. Epist., xxviii, n. 1, 2, P. L., t. lxi, col. 309 BC ; cf. xxxvi, n. 2, col. 351 D. Même pensée dans un poème, vii, ibi<L, col. 449 U :

Opus per omne curret ignis arbiter,

Quod non crenwrit llamma, sed pro ! >averit,

Illud perenni præmio pensabitur.

Quod concremanda gesserit, damnum feret,

Sed ipse salvus evolabit ignibus

Tamen subusti corporis signis miser

Vitam tenebit…

Le poète Prudence a, lui aussi, des vers où il chante « la peine légère qui doit le brûler miséricordieusement. » Hamarligenia, v. 966, P. L., t. Lix.col. 1078 B.

Paulin de Noie admettait, lui aussi, que le pécheur croyant serait sauvé en raison de sa foi. Cf. Poema, vii, P. L., t. lxi, col. 450 A.

Conclusion. — De cette première partie de notre enquête chez les Pères latins, nous conclurons que, malgré les obscurités de pensée et les hésitations d’expression, la foi en des peines purificatrices dans l’aude la est déjà très nettement formulée par les Pères. Sans doute c’est une croyance répandue communément au ive siècle que tous les chrétiens, si pécheurs qu’ils soient, seront tôt ou tard, en raison de leur foi, réunis à Dieu. Affirmer que cette foi est, en toute hypothèse, la fides caritate formata, comme l’insinue le P. de Groot, Conspectus historix dogmatum, 1. 1, Rome, 1931, p. 498, c’est proposer une exégèse quelque peu facile. Ce serait trop beau et les textes ne fournissent aucune base à cette interprétation.

Aussi bien la croyance miséricordieuse des Pères semblait solidement appuyée par I Cor., ni, 15 ; et c’est pourquoi ce texte de saint Paul revient sans cesse à la base de toutes les affirmations sur le sort futur des âmes. C’est dans la foi chrétienne qu’on plaçait la vertu, capable d’opérer le salut de tous ceux qui la professaient. Par cette foi, le chrétien est fondé sur JésusChrist, et, quelles que soient les œuvres inutiles ou mauvaises édifiées sur ce fondement, si te feu doit dévorer les œuvres, le fondement étant solide, le chrétien lui-même sera épargné.

Un instant de réflexion suffit à nous convaincre que ce feu purificateur du jugement contient implicitement ou mieux constitue sous sa forme première le dogme du purgatoire, aussi bien chez les Latins que chez les Grecs. Sans doute les Latins, jusqu'à la fin du ive siècle, exagèrent cette doctrine puisqu’ils regardent comme susceptibles d'être purifiés tous les chrétiens pécheurs sans exception. Sans doute aussi l’expression de la doctrine du purgatoire est encore entourée de bien des hésitations héritées des conceptions plus ou moins archaïques touchant l'état des âmes dans l’autre vie. Il faudra donc, pour que la ligne traditionnelle de la doctrine du purgatoire s’affirme plus ferme et plus nette que le génie de saint Augustin vienne, sur ce point, comme sur tant d’autres, imposer la direction de sa lumineuse théologie.

Saint Augustin.

Toute l’enquête qui précède

montre la part d’exagération contenue dans l’affirmation tle Hofmann, selon qui saint Augustin aurait été le premier l'ère à formuler d’une manière précise la doctrine du purgatoire, simplement insinuée chez les Pères antérieurs. Voir plus loin, col. 1221. L’exposé qui va suivre en montrera la part de vérité. On y verra aussi ce qu’il y a de tendancieux dans l’assertion de J. Turmel, selon qui Augustin n’affirmerait pas le purgatoire et fui simplement, à la fin de sa vie, sur le point de l’accorder. Eschatologie à la fin du IVe siècle, dans Reo. d’hist.et de lilt.relig., 1900 (tiré à part, p. 59 61),

1. Précisions apportées par saint Augustin sur l'étui des âmes après la mort. — Le premier bienfait apporté par la théologie augustinienne fut de réagir sensiblement contre la théorie si répandue dans les premiers siècles d’une période d’attente pour les âmes avant l’entrée dans le bonheur ou dans le malheur éternels. Sans doute, même avant Saint Augustin, on pourrait trouver, aussi bien chez les Grecs (voir ici Jugement, t. viii, col. 1786-1787), que chez les Latins (col. 1796, et ci-dessus, col. 1215 au bas), des textes montrant que les âmes sont en possession du bonheur ou du malheur éternels aussitôt après le jugement particulier. Néanmoins il reste encore un certain flottement dans la pensée de beaucoup de Pères concernant le séjour des âmes et la plénitude de la récompense des élus ou de la punition des damnés. Tout en demeurant encore à bonne distance de nos précisions actuelles, la théologie d’Augustin apporte sur ce sujet difficile des lumières qui orientent la pensée chrétienne vers les solutions définitives. Pour saint Augustin, aussitôt après la mort, le sort éternel est fixé, et les âmes criminelles sont enfermées dans un lieu de tourments, et les âmes justes dans un séjour de repos et de bonheur : les damnés souffrent déjà du feu infernal, et les élus jouissent de la vision de Dieu. Il ne s’agit pas de restreindre cette vision aux seuls martyrs ; si Augustin parle spécialement des martyrs, c’est qu'à eux principalement il appartient de régner avec Jésus-Christ. Mais les autres saints sont dans la même paix qu’eux. Paradis et sein d' Abraham ne sont qu’une façon de parler pour désigner une des nombreuses demeures du ciel. Sur tous ces points, voir Augustin (Saint), t. i, col. 2444-2447. Là où la théologie d’Augustin est encore en hésitation, c’est sur la question de l’apport réalisé à la résurrection, par le fait de la reprise du corps par l'âme au bonheur ou au malheur éternels. > A la résurrection supplices et récompenses des âmes recevront, d’après Augustin, un complément bien plus substantiel que la théologie ne l’enseignera plui tard, et c’est là, croyonsnous, la différence essentielle entre sa théorie et l’enseignement commun. » Col. 2117.

Il n’en reste pas moins vrai que la perspective d’un jugement purificateur après la résurrection générale se trouve nettement brisée. C’est après le jugement particulier qu’il conviendra désormais de chercher l'époque des peines purificatrices. Mais encore faudra-t-il dissiper les équivoques fondées sur l’interprétation de I Cor., iii, 15. Ce sera le deuxième service rendu à la théologie du purgatoire par l'évêque d’Hippone.

2. L’interprétation miséricordieuse de I Cor., ///, 11-15, rejetée par saint Augustin. — Nous avons entendu les partisans du salut de tous les chrétiens invo quer I Cor., ni, 11-15, en faveur de leur opinion ; pour être sauvé, il suffit de demeurer dans l’unité catholique, car ainsi l’on conserve le Christ comme fondement. Augustin connaît cette opinion. De civ. Dei, 1. XXI. C. xxi. xxvi, P.L., t. xli, col. 734, 743. D’autres, ajouh' Augustin, considèrent que la foi seule procure le salut. quelles que soient les œuvres. Ibid., t. XXI, c. xxvi, n. 1, col. 743 ; De fide et operibus, n. 24, t. XL, col. 213. Sans doute la sentence du jugement dernier concerne

In œuvres ; mais le feu éternel qu’elle comporte ne concerne pas les chrétiens, De luitet operibus, n. 25, col. -'m cette argumentation des miséricordieux, ust iti réplique que le Christ lui-même.i voulu dis i ont i- équivoque ; n’a t il pas ajouté, en pariant des méchant *. coupables d'œu res mau> aises :. « ibunt Mi m combustionem irternam ? Matth., xxv, (6. Donc il faut conclure que leur combusl ion sera étemelle comme le feu, eril erge teltma combustio, sicut ignis. De fl.de ei optribus. loc. cit.

D’autres arguments montrent bien l’insuffisance < ! » , , m. 11-15, pour prouver la thèse miséricordieuse. D’autres textes, en nombre impressionnant, Indiquent clairement la nécessité des œuvres pour le salut : Insule de la foi sans U-s œuvres, proclamée par saint Jacques, ii, 14 ; nécessité d’une conscience pure pour que le baptême produise le salut, 1 Pet., iii, 21 ; inutilité de la foi en l’absence de la charité, 1 Cor., xiii, 2 3 ; exclusion des criminels de toute espèce « lu royaume de I Cor., iii, . 10 : G ;.l.. v. 19-21 ; enfin nécessite. proclamée par Jésus Christ lui-même d’observer U-s commandements. Matth., xix, 17. D’ailleurs, dans la entence du jugement dernier, Jésus Christ ne reproche tus damnés de n’avoir pas cru en lui, mais de n’avoir pas accompli les bonnes œuvres. En conséquence,

. iii, 15, ne doit pas être interprété dans te sens

que lui donnent les miséricordieux. De fide et operibus, n. 26, col. 21 l. Ailleurs saint Augustin fait observer que ce feu doit éprouver tous les hommes sans distinction, bons et méchants : les parfaits eux-mêmes doivent le traverser pour parvenir au salut. Il n’est donc pas possihle de l’identifier avec le feu de l’enfer. Enchir., c. ucvin, t. xi., col. 264 ; cf. De eiv. Dei., t. XXI, c xxvi, n. 3, t. xli. col. 711.

Que sera donc ce feu ? C’est ici que commence la partie construit ive de la doctrine de saint Augustin. Pour l’exposer objectivement, il faut séparer nettement ce qui est présenté comme certain, ce qui est présenté comme possible ou vraisemblable.

3. L’existence de peines purificatrices dans l’autre vie est, pour Augustin, une vérité absolument certaine. — Dans ses différentes explications sur le feu, instrument du salut annoncé par saint Paul. I Cor., iii, 13-15, saint Augustin considère toujours que le bois, le foin, la paille, symbolisent des attachements coupables, doute, mais non cependant au point de faire passer.lésus-Christ après les biens terrestres. De fide et operibus. a. 27. 28, t. xi., col. 21o), 216 ; Enchir..

(vin, col. 264 ; De eiv. Dei, 1. XXI. c. xxv, n. 2, t. m.i. col. 744. Il y a donc des fidèles qui. tout en gardant l’essentiel des préceptes de Jésus-Christ, sont trop attachés aux plaisirs des sens et aux affections permises. /<L. ibid. ; Enchir., c. lxviii, col. 264. Ce sont de tels chrétiens qui ont besoin de miséricorde, et ils n’en sont pas indignes. De <ir. Dei., I. XXI.

s iv. n. 2 ; Enchir.. c. ex, col. 283. chrétiens, entaches d’une culpabilité qui cependant n’est pas suffisante pour entraîner leur damnation, devront expier, avant le jugement dernier, soit en ce monde, soit dans l’autre, leur trop grand attachement aux biens terrestres. Voilà ceux qui seront sauvés quasi ptr ignem, c’est-à-dire après avoir subi différentes peines : temporarias pa nus alii in hoc ril<i Umlum, alii posl morlem. alii rt nunc et tune, verumtamen anle judicium illud severissimum novissimumque patiuntur. De eiv. Dei. I. XXI. c. xiii. t. xi.i. col. 72*. On le voit, il ne s’agit plus d’une expiation au jugement même, mais antérieure au jugement ; assertion très ferme (liez Augustin et qu’il renouvelle plus loin sans l’ombre d’hésitation, c. xvi, col. 7.'51. I’Iils nettement encore, I. 738, il affirme que ces peines, souffertes par les anus des défunts, leur obtiendront, au jugement, miséricorde ut in ignem non mitlantur ceternum.

Ainsi donc, après la mort, L’Ame coupable devra subir, selon la nature de sa culpabilité, l’une ou l’antre peine : rel ignem purgalionis, vei patnean etternam, J>c Genesi contra Mon., c xx, ii, 30, P. L., t. xxxiv,

col. 212. Aussi Augustin demande t-il a Mien pour luimême de le purifier en cette vie. pour n’avoir pas è souffrir après la mort le feu purificateur, emendatorio igné. In />.<.. i . n. : t. P. L., t. xxxvi, col. 397.

(est toujours d’ailleurs I Cor., m. 13-15, qui inspire ainsi sa pensée et lui lait distinguer du feu des damiies le feu qui sert d’expiation pour les justes, emciuliibit

cas qui per ignem salvi erunt. /<L. ibid.

I. La nature du feu purificateur est encore, pour Augustin, incertaine. Jusqu’ici, il est bien acquis, contre Us miséricordieux, que le texte de saint Paul, quasi per ignem, ne saurait concerner que les fautes

plus ou moins légères, (.'est sans conteste, d’un feu purificateur qu’il est ici question. Mais de q u lie nature est ce feu ? Saint Augustin reste hésitant sur la réponse exacte a donner. Ordinairement, il s’attache au sens métaphorique : Feu des épreuves et des châtiments de

cette ie ? De < i' /), i. I. XXI, C XXVI, P. L., I. xi.i.

col. 743 ; De fide et oper., n. 27. t. xi. col. 216. C’est ainsi que, par rapport aux objets sj mbolisés par le bois la paille, le foin, ce feu est une douleur purifiante, qui

résulte nécessairement de la perte (de ces) objets, non pas certes préférés à Jésus-Christ, mais tout de même aimés avec excès ». A. I.ehaul, L'éternité des peines de l’enfer dans saint Augustin, Paris, L912, p. 69. Esl ce la mort avec ses douleurs et ses séparations inévi tables ? De cii>. Dei. I. XXI. c. xxvi, n. I, t. xi.i. col. 745 ; Enchir., c. lxviu, P. L., t. XL, col. 264. Ainsi, « le feu, ce n’est plus la souffrance causée par la perte de biens temporels, mais celle perle elle-même qui effectivement laisse intacts les édifices d’or, d’argent, de pierres précieuses, c’est-à-dire les trésors de pensées divines, tandis qu’elle détruit les édifices de bois. de foin, de paille, c’est-à-dire les affections purement terrestres, mais exemptes d’un caractère criminel qui arracherait l'âme du fondement qu’est le Christ i, Lehaut, ibid.

Mais la pensée d’Augustin sur ce point n’est ni ferme ni définitive : d’autres interprétations lui paraissent possibles. De cii>. Dei.. t. XXI, c. XXVI, n. 2, P. L., t. xi.i, col. 744. Aussi peut-être existe-t-il, entre la mort et le jugement, un feu réel qu’on peut concevoir à la manière du feu de l’enfer. De cin. Dei., loc. cit., n. A, col, 7 15. Son redarguo, quia forsitan verum est, déclare saint Augustin. Xous l’avons déjà entendu d’ailleurs désigner les peines d’outre-tombe par les expressions ignis purgalionis, Ignis emendatorius. L’expression ignis purgatorius, qui va désormais avoir droit de cité dans la théologie catholique, est employée dans l’Enchiridion, c. lxix, t. xl, col. 265. C’est la dernière explication probable que le grand cvêque donne de quasi per ignem. Il vient de parler des purifications possibles en cette vie par l'épreuve de la tribulal ion, et il ajoute : Taie aliquid eliam posl hanc vitam fteri, incredibile non est, et utrum ita sit, quieri potest et mil inveniri aut latere.nonnullos fidèles per ignem qtiemdam purgatorium, quanlo magis minusve bona pereuntia dilexerurd. tanto tardius citiusque saluari. non lumen tales, de quibus dicium est, quod regnum Dei non possidebunt, nisi eonvenienter paaiitentibus eadem crimina remittantur. El si quelque purification est encore nécessaire au moment du jugement, k feu du jugement achèvera cette purification en certaines âmes : igné judieii nooissimi mundabuntur. De eiv. Dei, t. XX, c. xxvi, n. 1, t. xi i. col. 701.

Pour être bien comprise, la pensée d’Augustin doit être rétablie dans sa synthèse générale. Il appareil ainsi, d’une pari. qu’Augustin tient comme liés certaines les peines purificatrices de l’autre ic ; d’autre L22 ;

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. APRÈS SAINT AUGUSTIN

1224

part, qu’il est très hésitant sur la nature même de ces peines : sa pensée oscille entre le feu métaphorique et le

feu réel. Ce sera, Minime toute, la position qu’adoptera l'Église ellemenuen proposant aux fidèles la roj ance au purgatoire.

5. Questions secondaires. Saint Augustin a exprimé sa pensée sur l’intensité des peines purificatrices de l’autre vie. Il ne faut pas se faire illusion : elles dépasseront toutes les douleurs de la terre. Parce que l’Apôtre a dit : salvus erit…, on méprise ce feu. -Mais prenez garde : ita plane quamvis salvi per ignem, gravior tumen erit ille ignis, quam quidquid potest homo pâli in bac l’ila. Et Augustin ajoute : Et nostis quanta hic passi suntmaliet possunt pâli. In ps. xxxvii, n. 3, t. xxxvi, col. 397.

La durée du purgatoire ne peut être conçue au delà du jugement dernier. La sentence finale ne connaît plus que les élus et les réprouvés. De civ. Dei, t. XXI, c. xiii, t. xli, col. 728 ; cf. c. xvi, col. 730. Et nous avons déjà vu que, si certaines âmes ont encore besoin de purification à ce moment, elles seront purifiées complètement par le feu du jugement. Augustin fait appel à ce sujet à l’autorité de Malachie, iii, l-(i, et d’Isaïe, iv, 4 : videtur evidentius apparere in illo judicio quasdam quorundam purgatorias pœnas futuras. De civ. Dei, 1. XX. c. xxv, col. 700.

Enfin, Vétat des âmes du purgatoire est suffisamment indiqué par Augustin au cours de toutes ses explications du quasi per ignem. Ce sont des âmes qui ont encore à expier, mais qui néanmoins ont gardé ou recouvré la grâce de Dieu. Dans V Enchiridion, c. ex, P. L., t. xl, col. 283, il redit que ceux-là seuls sont soulagés par les prières de l'Église, qui ont mérité durant leur vie, d'être aidés par les suffrages des vivants. Cf. De octo Dulc. queest., q. ii, P. L., t.XL, col. 157158. Enfin, il signale expressément que les enfants baptisés, morts avant d’avoir commis des fautes personnelles, sont délivrés non seulement de l’enfer, mais de toute peine purificatrice : non solum pœnis non juæparetur œternis, sed ne ulla quidem post mortem purgaturia tormenta patiatur. De civ. Dei. t. XXI, c. xvi, P. L., t. xli, col. 730.

Après saint Augustin.

1. Le cadre de l’enseignement. — La grande autorité de saint Augustin a réduit

les perspectives eschatologiques à leurs exactes proportions. Désormais l’idée d’une rétribution repoussée jusqu'à l'époque du jugement dernier est bannie de l’enseignement commun des auteurs. Seul Cassien fait encore exception, n’accordant aux âmes, avant le jugement général, qu’un avant-goût de ce qui les rttend après. Collationes, t. I, c. xiv, P. L., t. xlix, col. 503 B. La doctrine commune est ainsi formulée par saint Césaire d’Arles : « Quand le corps, pour lequel nous avons tant de complaisance, commence à être dévoré par les vers dans le tombeau, l'âme est présentée à Dieu par les anges dans le ciel ; et là déjà, si elle est juste, elle sera couronnée, ou, si elle est pécheresse, elle sera projetée dans les ténèbres. » Serm., ceci, n. 3, P. L., t. xxxviii, col. 1382. Cf. Gennade, De eccles. dogmat., c. lxxix, P. L., t. lviii, col. 998 C ; saint Grégoire, Moral., t. IV, n. 56 ; t. XIII, n. 48 ; In evangel., hom. xix, n. 4 ; Dialog., t. IV, c. xxviii, P. L., t. lxxv, col. 666, 1037, 1156 ; t. xxxvi, col. 365 ; saint Isidore, Sentent., t. I, c. xiv, n. 16, P. L., t. lxxxiii. col. 568 ; saint Julien de Tolède, Prognosticon, t. I, c. xiii, P. L., t. xevi, col. 468 ; saint Bède le Vénérable, Hist. eccl., t. V, c.xii, P. L., t. xcv, col. 250.

Tout naturellement la doctrine du purgatoire s’insère entre le moment du jugement particulier et l’entrée au ciel des âmes justes. Il semble que les hésita tions de saint Augustin sur la nature du feu disparaissent et que les auteurs envisagent un feu réel, analogue à celui de l’enfer. Nous arrivons ainsi par eux à

la conception latine, telle que nous la trouverons systématisée (he/ [es théologiens du Moyen Age.

2. Saint Césaire d’Arles. - - L’enseignement de saint Césaire est en corrélation avec sa doctrine sur les péchés. Césaire distingue deux sortes de péchés : les péchés capitaux (capitalia) et les péchés menus (minuta >. Des uns et des autres il dresse même une liste détaillée. Voir Césaire d’Arles, t. ii, col. 2180.

Les péchés capitaux non pardonnes conduisent infailliblement l'âme en enfer. Cf. col. 2182. Mais les péchés menus n’empêchent pas l’entrée de l'âme au ciel : ils doivent simplement être auparavant expiés, soit sur cette terre par les bonnes œuvres, soit dans l’autre vie par les peines du purgatoire. L’enseignement de Césaire sur ce point est très net et très ferme. Commentant I Cor., iii, 15, il écrit :

Ceux qui comprennent mil ce texte se laissent tromper liai' une fausse sécurité. Ils croient que, édifiant sur le fondement du Christ des crimes capitaux, ces péchés pourront être purifiés en passant à travers le feu et qu’ainsi ils pourront parvenir ensuite à la vie éternelle. Corrigez, mes frères, cette m.inière de comprendre : se llatter d’une pareille issue, c’est se tromper lourdement. Dans ce feu de passage ( Irtinsitoriu igné), dont l’Apôtre a dit : lui-même sent sauvé, mais comme à travers le feu, ce ne sont pas les péchés capitaux, m lis les péchés menus qui seront purifiés… Bien que ces péchés, selon notre croyance, ne tuent pas l'âme, ils la défigurent… et ne lui permettent de s’unir à l'époux céleste qu’au prix d’une extrême confusion… C’est par des prières continuelles et des jeûnes fréquents, que nous parvenons à les racheter…, et ce qui n’a pas été racheté par nous devra être purifié dans ce feu dont l’Apôtre a dit : (l’ouvrage de chacun) sera révélé par le feu ; ainsi le feu éprouvera l'œuvre de chacun. I Cor., ni, 13… Ainsi donc, pendant que nous vivons en ce monde, mortifions-nous…. et ainsi ces péchés seront purifiés en cette vie, de telle sorte que, dans l’autre, ce feu du purgatoire ou ne trouve rien ou ne trouve en nous que peu de chose à dévorer. Mais, si nous ne rendons pas grâces à Dieu dans nos afflictions et si nous ne rachetons pas nos fautes par de bonnes œuvres, il nous faudra demeurer dans le feu du purgatoire aussi longtemps que nos péchés menus l’exigeront pour être consumés, comme du bois, du foin et de la paille.

Que personne ne dise : Que m’importe de demeurer au purgatoire si je dois ensuite parvenir a la vie éternelle ! Ah ! ne parlez pas ainsi, très chers frères, car ce feu du purgatoire sera plus pénible que toute peine que nous pouvons concevoir, éprouver et sentir en ce monde… Serin. civ, n. 1 sq., P. L., t. xxxix, col. 1946-1948.

Le sermon se continue par des exhortations à la pénitence et pour les péchés graves, dont les flammes éternelles ne nous purifieraient jamais (n. 2, col. 1946), et pour les péchés menus, afin de ne pas demeurer longtemps dans la souffrance avant d’entrer sans tache et sans rouille, dans la vie éternelle. Ibid.. n. 5. col. 1947-1948.

Dans un autre sermon (cclii, n. 3, col. 2212), Césaire applique au feu purificateur de l’autre vie le « fleuve de feu » dont parle Daniel, vii, 10, en rapprochant cette expression de I Cor., ni, 15 : plus nos péchés fourniront de matière au feu, et plus notre séjour en ce feu sera long. Quanta fuerit peccati materia, tanta et perlranseundi mora ; quantum exegeril culpa, lantum sibi ex homine vindicabit quædam flamnuc rationabilis disciplina. L'âme non encore purifiée est semblable à la marmite vide. qu'Ézéchiel commande de placer sur des charbons ardents afin qu’elle soit dégagée de sa rouille. Ez., xxiv, 11.

On voit en quel sens réaliste a évolué la tradition latine en ce qui concerne la nature des peines purificatrices de l’autre vie !

3. L’auteur inconnu du De vera et falsa pœnilentia (qui est certainement d’une époque bien postérieure, voir Pénitence, col. 911) rappelle à celui qui cherche au moment de la mort une pénitence vraie qu’il doit s’at tendre à trouver la miséricorde divine plus PURGA rOIRl. FIN Dl L' f, l. P VI RISTIQUE

L226

grande encore que -.1 propre Iniquité. Mais, même si -.1 conversion lui rend la if (de la grâce), » n ne peut lui promettre d'échapper a toute peine, car il lui faudra auparavant être purifié dans le feu <lu purgatoire, qui reporte il.nis l’autre vie le fruit de la conversion. Bien que ce feu ne soit pas éternel, il es ! néanmoins remarquablement douloureux et la si uffrance qu’on endure par lui dépasse tout a 1 qu’on peu ! souffrir ici-bas. » N. 17. 18, P. / … t. i. col. 1 1 18.

1. Suint Grégoire le Grand. e, lui l'évolution de lu théologie >lu purgatoire est terminée. Ses œuvres fournissent sur le sujet une abondante littérature.

I, s ;., s posent directement la question : l’a util croire a un feu du purgatoire après la mort ? l.a réponse est nettement affirmative : il faut admettre un feu purificateur pour effacer les petites fautes. 1 a Vérité a déclaré que celui qui blasphémerait contre

rit-Saint ne verrait son péché remis ni en ce momie ni dans l’autre. Matth., xii. 31-32, nous laissant entendre que certaines fautes peinent être remises sur terre, d’autres même dans l’autre vie. Mais un tel traitement est réservé aux petits péchés ou aux péchés L.r.ies qui comportent une erreur d’ignorance. Cette croyance au purgatoire s’appuie également sur l’affirmation de s. im t Paul, 1 Cor., m. là. Gn

qu’il est difficile d’entendre ce feu du feu de la tribulation présente ; il s’agit donc n un feu purifica leurfutur. Celui-là sera sauvépar ce feu. qui aura édifié tar le fondement (du Christ i non du fer. île i airain ou du plomb, c’est-à-dire des péchés plus graves et doue une matière trop dure pour être fondue par le leu. mais du bois, du foin et de la paille, c’est-à-dire des péchés

s que le feu consume facilement. Dial., I. IV. wxix. P. /… t. îxxvii. eol. 396. Plus loin saint

ire confirme son enseignement en rapportant une singulière complaisance certaines révélations

privées sur le sort d'âmes tourmentées dans le feu. où visiblement l’imagination se donne libre carrièn c. iv. eol. 120. On trouve également des allusions <lifeu du purgatoire. iotiis purgationis, dans l’Expositio in seplem psalmos ptenitentiales, i (ps. vi, l) et dans le commentaire sur le I" livre des Rois, c. H, n. 26, 27, deux œuvres attribuées a Grégoire le Grand, mais certainement apocryphes, P. /…t. i xxix. col 123.

II est intéressant d’ailleurs de constater que, pour saint Grégoire, le fait de n'être point reunie à Dieu constitue déjà, pour l'âme séparée du corps, une sorte de châtiment : sunt quorumdam juslorum animai/ux a emlesli regno quibusdam adhuc mansionibus difjeruntur ; in quo dilationis damno quid aliud innuitur. niai quod de per/ecta justitia aliquid minus hnbuerunt ? Dial., I. IV. i. xxv. P. L.. t. lxxvii. eol. 357. (.'est déjà, esquissi-e d’un mot. la distinction appliquée par la

postérieure aux peines du purgatoire, peine du dam et peine du

l 'autres questions subsidiaires sont agitées par

."ire : nous n’en retiendrons ici qu’une, qui prélude

aux investigations curieuses des théologiens : De quelle

nature sera ce feu purificateur ? Comment pnurra-t-il

s’alimenter ? Comment brùlera-t-il sans consumer ?

Pour Grégoire, le feu atteindra l'âme tout en brûlant

le corps lil s’agil évidemment du feu de l’enfer, mais

celui du purgatoire est de même naturel. Ce feu de la

rporel. sans quoi il ne serait pas un feu

Véritable. Mais H n’est allumé par aucune industrie

humaine et n’a pas besoin d'être alimenté par du bois.

une fois pour toutes par Dieu, il dure inextin le et n’a besoin d’aucun entretien pour conserver

toute s., ii ardeur. Moral.. I. XV, c. xxix : cf. c. lxvi.

P. !.. t. lxxvi. col. 1094.1915 1916. Quant à l'âme

ons qu’elle est saisie par le feu.

dans le tourment du feu et en le voyant

et en le sentant. Dial., 1. IV. e. xxix. P.L. I. i x II, eol. 365. Ce n’est pas seulement en oant le feu. mais

en expérimentant son ardeur que l’Ame souffre, sotumoidendo, sedeiiamexperiendo. D’ailleurs, ! îrégi glisse rapidement sur le problème, car il conclut aussitôt : > Si le diable et ses anges, Incorporels qu’ils sont

doivent être tort lires par un leu corporel, quoi d'étOl liant que les aines ayant délie réunies a leurs C0

puissent sentir les tourments corporels ? iCol, 368.

.">. Les docteur* espagnols de L'époque font écho saint Grégoire.

Saint Falon, évêque de Saragosse, reprend l’interprétation île i Cor., m. 15, favorable au feu du purga toire. tout en concédant que l’expression ignis désigne Ici le feu de la conflagration, il rappelle l’exégèse apportée par saint Grégoire : les péchés légers seuls

sont désignés par le bois, le loin, la paille ; car. pOU

symboliser les | échés gi a es. il faudrait prendre le ter,

l’airain, le plomb. Enfin, dernière précision, qui est in écho de la doctrine di' saint Augustin, lie prolil, l’on

du feu purificateur que ceux qui l 'auront mérité pendant leur vie mortelle. Sent., I. N. c. xxi, P. L., i. i xw col. 975 UU.

Saint Isidore de Séville s'étend assez longuement sur la nécessité morale d’un purgatoire. Plusieurs textes scripturaires indiquent que seuls entreront direct*

ment dans le royaume des civux ceux qui auront souffert Ici bas. cf. Matth., . 3 ; v, 1o. ou auxquels aui été appliqué le pouvoir de lier et de délier. Matth.. xviii. 18. Donc ceux qui. sans se séparer du Christ, se seronl quelque peu éloignés de lui (longiuscule) devront a ant d’entendre la sentence du juge, venite bem dicti, être purifiés. Il y aura donc une purification dans l’au-delà, cf. Marc m. 29, une sorte de baptême par le feu. Matth. iii, 11. Isidore applique la première partie de LUC, III, 17. à l'épreuve du purgatoire, insistant sur la différence du baptême par le leu et de la combustion par le feu : aliud est enim if/ne baptizari, aliud igné coniburi inexstinguibili. Le feu de la géhenne ne Matth., v. 22, n’est que le feu du purgatoire, celui dont parle saint Paul, I Cor., iii, 1o>. De ordine ereaturarum. c. xi. /'. L.. t. ixxxiii, col. 947-918. Interprétant comme Grégoire le bois, le foin, la paille des péchés légers, crimina non principalia, quæ non multum nocent, Isidon nous donne de ces péchés un certain nombre d’exemples colères, négligences dans la prière, paroles inutiles. usage immodéré du mariage, gourmandise, levers tardifs., tc. Ibid., n. 1 l.col. 19. Notre auteur se demande si les pénitents qui reçoivent la réconciliation à l’article de la mort, reçoivent alors la pleine rémission de leurfautes, de telle sorte qu’ils soient dispensés de passer par le feu purificateur. Ipse scil. répond-il, gui, renés et corda conspiciens, pœnitentiæ dignitatem considérai. Ibid.. n. 12, col. 949 C. Enfin, la peine du purgatoire est une peine plus grave, plus acerbe, plus longue que n’importe quelle peine qu’on puisse concevoir SUT terre. Ibid., n. 12. col. 950 A.

Julien de Tolède reprend pour son compte celle dei nière assertion, mais il se réfère à Augustin. Il invoque l’autorité de saint Grégoire pour affirmer l’existence d’un feu purificateur des fautes légères avant le [uge ment. A la suite d’Augustin, il distingue donc entre le feu de l’enfer, réservé a ceux à qui le Christ dira : Retirez-vous de moi, maudits, dans le leu éternel. et le fin du purgatoire, créé pour ceux qu’il doit sauver. L’autorité d' Augustin l’incite aussi a confesser que i i feu du purgatoire existera avant le jugement Henni i i précédera cet autre feu dans lequel les Impies eronl plongés par le jugement du Christ. Il est peut être encore plus intéressant de souligner la différence dan l’intensité et la durée des peines du purgatoire : puio quod sicui non omnes reprobi, qui m selernum i§ damnandi sunt , una eademqm supplicii qualitate ardi

bunt, sic omnes, qui per grimes purgalorias pa : nas suivi esse creduntur, non une eudemque spatio lemporis cruciatus spirittuini suslinebunl, ut quod in reprobis discrelione pœnarum, hoc in istis, qui per ignem saluandi sunt , rnensura temporis agiletur. Prognoslica…, t. II, c. xix-xxiii, P. L., t. xevi, col. 483-486.

6. Bide le Vénérable.

Dans les œuvres de ce docteur, deux genres de textes sont à relever. Les uns,

empruntés aux œuvres exégétiques, font écho à l’enseignement doctrinal des Pères précédents. D’autres, tirés de l’Histoire ecclésiastique, s’attachent au récit de certains faits merveilleux, lesquels n’ont vraisemblablement pas de fondement bien sérieux. Ces récits, du moins, témoignent de l'état d’esprit des chroniqueurs concernant la notion du purgatoire. On peut d’ailleurs en dire autant des anecdotes dont saint Grégoire a émaillé ses Dialogues.

Au point de vue doctrinal, Bède est un disciple de Grégoire. Dans le Commentaire sur les psaumes (œuvre d’authenticité douteuse), au ps. xxxvii, 1, on distingue ceux qui seront repris par Dieu dans sa fureur, c’est-à-dire ceux qui n’auront pas construit l'édifice de leur vie sur le Christ, et ceux qui seront repris par Dieu dans sa colère, c’est-à-dire ceux qui auront bâti leur édifice sur le fondement du Christ, mais auront mêlé à l’or, le bois, la paille, le foin, c’est-à-dire auront commis des péchés véniels, plus ou moins considérables, Ceux-ci seront donc repris par Dieu dans sa colère, c’est-à-dire seront, avant le jugement dernier, placés dans le feu du purgatoire, afin que soit purifié tout ce qui en eux est impur. P. L., t. xcnr, col. 680. Comm » les auteurs précédents, Bède pense que les peines du purgatoire sont plus graves que tout ce qu’on peut imaginer. Ibid., col. 681 B. Voir également Hist. eccl., t. III, c. xix, P. L., t. xcv, col. 147.

Sur la durée du purgatoire, Bède sait qu’après le jugement dernier il n’y aura plus de purgatoire. Mais il estime que, si leur peine n’est pas abrégée par les prières, les aumônes et les suffrages des vivants, certaines âmes resteront en purgatoire jusqu'à ce jugement ; de ce nombre sont en particulier les âmes qui n’ont fait pénitence qu’au moment de la mort. Hom., i, n. 4, P. L., t. xciv, col. 30 ; cf. Hist. eccl., t. V, c. xii, P. L., t. xcv, col. 250.

Dans ce chapitre de son Histoire ecclésiastique, Bède rapporte la vision d’un chrétien mort, puis ressuscité, à qui le purgatoire et l’enfer ont été montrés. Le purgatoire renferme deux lieux différents. Dans l’un, à côté de tourbillons de flammes dévorantes, soufflent en ouragans la neige et les frimas : les âmes vont des flammes à la glace, sans trouver jamais de repos. Ces âmes sont « les âmes de ceux qui, différant la confession de leurs fautes et remettant sans cesse leur amendement, se réfugient cependant dans la pénitence au moment même de la mort et quittent leurs corps en cet état. Ceux-là cependant, parce qu’ils se sont confessés ou tout au moins repentis à l’heure de la mort, parviendront tous au royaume des cieux au jour du jugement. » L’autre lieu est un lieu agréable et fleuri. « Là sont rassemblées les âmes de ceux qui meurent ayant accompli de bonnes œuvres, mais qui cependant ne sont pas assez parfaits pour entrer immédiatement dans le royaume des cieux. Tous cependant, au jour du jugement, entreront dans la joie du royaume céleste et seront admis à la vision du Christ. Et tous ceux qui sont parfaits en toute parole, œuvre ou pensée, parviennent, aussitôt leur âme séparée du corps, au royaume céleste. » P. L., t. xcv, col. 250.

On trouve là déjà comme un avant-goût des spéculations théologiques postérieures sur l’inégalité des peines du purgatoire, intensité et durée.

7. Du viiie au xue siècle. — Nous avons déjà indiqué les auteurs qui durant ce laps de temps, ont continué,

sur les peines du purgatoire, l’enseignement traditionnel de l'Église latine. Voir Feu du purgatoire, t. v, col. 2259. Il n’en est peut-être aucun qui ne s’appuie sur I Cor., iii, 15, pour y trouver, soit directement, soit indirectement, mais le plus souvent directement, l’enseignement d’un feu purificateur dans l’autre vie. Pour un certain nombre même, c’est là tout leur enseignement : citons Rémi d’Auxerre, Ratifier de Vérone, Burchard de Worms, Rupert de Deutz, Hildebert du Mans. Saint Bruno invoque également II Pet., III, 10-12, et Bruno de Segni, Matth., xii, 31-32. Hildebert du Mans est vraisemblablement le premier qui ait employé l’expression : « le purgatoire ». Serm., lxxxv, P. L.. t. clxxi, col. 741. Plusieurs ajoutent à cette idée centrale l 'affirmation du soulagement des âmes souffrantes par les suffrages : ainsi saint Boniface de Mayence, Gérard de Cambrai.

Si les autres auteurs sont un peu plus explicites, ils manquent en général d’originalité.

Alcuin reconnaît que I Cor., iii, 15, se rapporte au feu du jugement ; mais il pense qu’on peut y voirie feu du purgatoire. C’est ce feu qui séparera les justes des impies, les justes encore entachés de menus péchés. De plus les mérites divers des justes (auxquels répondent les multee mansiones de l'Évangile) appellent divers degrés de purification. De fide SS. Trinitatis, t. III, c. xxi, P. L., t. ci, col. 53.

Raban Maur, après avoir invoqué en faveur du purgatoire le texte de Matth., iii, 11, donne de I Cor., iii, 13-15, une interprétation plus complète. Bien qu’on puisse entendre ce feu du feu de la tribulation, on peut l’appliquer au feu du purgatoire qui fera la séparation des justes, comme l’insinue Luc, iii, 17. In Matth., t. I, c. iii, P. L., t. cvii, col. 773. Toutefois, dans son commentaire sur I Cor., iii, 15, l’auteur observe que le feu doit éprouver même les justes complètement innocents. Il y aura donc comme un double feu, le feu spirituel qui touchera les parfaits dès cette vie, le feu de l'épreuve judiciaire dans l’autre : quos ignis spirilalis in prœsenli temporum examinât, in futuro judicio per ignem probabit. In I Cor., P. L., t. cxii, col. 36. Maisil ne faut pas s’abuser et croire que tout péché sera purifié : il ne saurait être question ici que des péchés moindres. Ibid., col. 38 A. Et, plus complet qu’Isidore de Séville (auquel il semble avoir emprunté plus d’un trait), l’archevêque de Mayence énumère un certain nombre de péchés pour lesquels aucune purification n’est à envisager en dehors de la pénitence de cette vie. Enfin le purgatoire sera de longue durée, longo tempore cruciandi. Col. 39 D. Tandis que les pécheurs non per purgatorium ignem transire merebuntur ad vitam, sed œterno incendio præcipitabuntur ad mortem. là., ibid.

Haymond d' Halberstadt est sur le purgatoire un des auteurs les plus complets du haut Moyen Age. Dans le De varietate librorum, il établit, par I Cor., iii, 15, l’existence du purgatoire, réservant aux péchés légers les expressions bois, foin, paille, qu’il oppose au fer, plomb, airain des péchés graves. C. i, P. L., t. cxviii, col. 933. L’or, l’argent, les pierres précieuses représentent les pensées que les justes ont pour Dieu (cogitare quæ sunt Dei) ; tandis que le bois, le foin, la paille, représentent les pensées qui s’attachent aux choses du monde. Le feu séparera les unes des autres. Mais, plus les justes auront donné d’affection aux biens périssables, plus tard aussi seront-ils sauvés ; quantomagis minusve bona pereuntia dilexerunl, tanto tardius citiusque salvari… Mais les criminels ne doivent pas attendre le salut dans l’autre vie, à moins de s'être repentis ici-bas de leurs crimes et d’en avoir obtenu rémission. Col. 934. Plus loin (c. v), traitant de la différence des peines, il insistera sur une idée analogue : tanto illis minus vel majus ignis purgatorii extendetur supplicium, quanto hic minus vel amplius bona transitoria dilexerunt. Col. 935. IM RGATOIKE I ES SI FFRAGES r » U R LES MORTS OCCIDENT

IJ.ii »

Donc inégalité « l<s peines. Le c. x oppose l<- peines puriticatrices de la vie présente aux peines purifies triées de la ie future. Les un-- expient dès maintenant, Im autres expieront après la mort. Col. 935. Haymond réfute ensuite l’opinion, m courante au iv siècle, qu’il sutlit d’avoir le fondement de la foi pour être purifié par le fru : contra rus qui » rr [idem solam absque bonis tperibus per ignem purgatorium sa iuntur. La

foi seule ne sutlit pas : ro serait faire mentir saint

ues, et mmi ! Paul lui-même, qui énumère les œuvres qui méritent l’enfer (cf. ICor., vi, 9 10), 3 con tiédirait. Col. 935 936. Parmi les justes, certains iront immédiatement au ciel à leur mort, d’autres passeront par le purgatoire. Col. 936 C. Lesc. vu 1 x. tout valoir l.i puissance de l’intercession il » l'Église en faveur des Ames souffrantes, par la prière, les aumônes, l’offrande « tu saint sacrifice de la messe : l’auteur s’appuie sur saint iiu goire. Col. 937. Enfin, après avoir rappelé que la crainte a l’heure de la mort pouvait, pour certaines âmes peu coupables, être un moyen de purification, Haymond conclut que le purgatoire aura 1 ii-n ayant le jugement. Col. 943. Du même écrivain on trouve encore quelques lignes sur le purgatoire dans son Commrntuirr sur Isate, I. III. c. lxvi, P. I… t. cxvi, col. 1081.

On pourrait citer également divers ouvrages d’ima tinat nui où les auteurs font « lu purgatoire et de l’efficacité des suffrages en faveur des âmes soutirantes un tableau qui a du moins la valeur de témoignage historique par rapport a la croyance fondamentale de l'Église. Ainsi le J.ibrr de visione et ubitu Wetini m< natta. d’Hetton, ancien évêque de Baie, P. P.. t. cv, col. 771 sq. : et plus tard, le curieux Tractatusde Purputorio saneti Patricii, Hibernorum apostoli, P. I… t. ci xx. col. 977 sq.

tchase Radberi appuie le dogme du purgatoire sur Mat th., iii, 1 1. Bien que le Saint-Esprit soit feu. on dit iei que le baptême se fera dans l’Esprit-Saint et par le feu. Mais de quel feu s’agit-il ? S’il faut l’entendre du purgatoire, la purification apportée par ce baptême ne pourra se produire que sur les péchés légers, comme

Ki 1 (<>r.. m. 15. Mais Paschase Radberi admet un autre feu. le feu du divin amour, qui est allumé au saint autel par l’eucharistie et doit dévorer tous les fidèles. In Matin., I. U.c. m. P. L., t. cxx, col. 165-166. Pierre Damien a deux siècles de distance, parle incidemment du purgatoire dans deux sermons (i.vm et

La seule note spéciale qu’il donne a son enseignement, c’est — et tant d’autres l’avaient déjà fait axant lui - d’insister sur la nécessite de n’admettre à la purification du feu que es pèches légers. Les crimes sont destines a l’enfer. P. L. t. 1 xi iv. col. 831 A. 837

1 nature des peines du purgatoire inspire a Honorius d’Autun des suggestions assez hasardées : posi mortfm rrrn purgatio eril mit nimius ealor ignis, atit magntis rigar frigoris, mit aliud quadlibct genus peenarum. Elucidarium, I. III. n..'<. P. L., t. clxmi. col. 1 158 D. L’auteur veut de toute évidence établir un parallélisme entre les pénalités du purgatoire et celles que certains auteurs contemporains et lui même

1159 iii entrevoyaient en enfer, interprétant de l’enfer.h>b. xxi. 19. oir Eni eb, t. x. col. 108, Hononus reste davantage dans la note traditionnelle en affirmant que la plus petite peine du purgatoire est supérieure au plus yrand mal qu’on puisse concevoir sur terre. Ibid.. col. 1 158 1).

derniers textes patristiques a signaler sont de saint liernard. Nous en axons relevé cinq. Sermo in obitu Domni liumbrrti. n. H. I>. /… t. « ixxxiii,

18 BC ; Srrm., xvi, De dioersis, n. 5, col. 571 F) : xxxxiii. De divertis, n. 6, col. 619 B. Ce sont de simples

allusions au feu par lequel il faudra passer afin que soit éprouvée l’or-uvre de chacun. Le serin, xi.n. Dr quinque

regionibus, ajoute à la not ion du purgatoire, crucifiant Us.unes qui attendent la résurrecl ion, l’idée de peinai diverses, prius cruciandi aut calort ignis, nui rigore fri goris, mit alieu/us graoitale doloris. L’hypothèse très hasardée du froid, juxtaposée à la conception de la peine du (eu. montre bien « pie la peine du leu n’est pas

considérée encore comme une vérité absolument car

taine. liernard ajoute « pie nous poux uns « t « lexons SOU lager les Ames soutirantes : les damnés ne méritent pas d'être rachetés, les élus « lu ciel n’ont pas besoin « U' rédemption ; rrstat ut ad médius Iranscainns per coin passionem, quibua juncti fuimus per humanitaton. Col. 663 1 >. El il conclut : Siin/ani m adiuluriuiii illis, interpellabo gemitibus, implorabo suspiriis, orationibus intercédant, satisfaciam sacrifteio singulari. Col. 664 A. Enfin, dans le In Cantica, serin. lxx 1. n. 11, saint liernard réfute ceux qui n’admettent pas le purgatoire. « t contre eux il eu appelle a Mail h., xii. 32, Col. 1 L00,

Ceux-là sont les « albanais « 1 les apostoliques. voir ces mots. t. 1, col. 658 ; 1631. Conclusion. Partie des mêmes perspectives que la

tradition orientale, la tradition latine s’est engagée,

sous l’influence du génie « le saint Augustin, dans une

voie nouvelle, plus précise et plus logique que la position adoptée par les Pères grecs. Tandis que ceux ci, en ce « pii concerne la peine positive, purificatrice des (léchés, dans l’autre vie. s’en tiennent plus ou moins à la conception archaïque du feu du jugement, les Pères latins se sont aperçus des difficultés théologiques inhé rentes à cette conception. Reléguer la peine purificatrice au moment de la parousie, c’est s’obliger pour ainsi dire à maintenir, pour les âmes séparées de leurs corps, cet état d’attente mal défini qui, dans la logique « lu système, ne peut prendre On qu’au jour du jugement général. Situation difficilement conciliable avec le sentiment de l'Église touchant la rétribution immédiate réservée aux martyrs et aux grands saints. Augustin en est donc arrivé a concevoir la peine purificatrice comme infligée entre la mort et le jugement dernier, mais il hésitait encore à considérer cette peine comme infligée par l’instrument du feu. Au jugement dernier le feu de la conflagration générale se présentait naturellement a l’esprit comme Instrument de purification. Axant le jugement on pouvait se demander quel feu serait cet instrument. Les hésitations d’Augustin ne se retrouvent plus chez ses successeurs et disciples : une transposition fut bien vite faite, et le « feu du purgatoire proposé comme instrument de purification, au lieu et place du feu de la tin « lu monde. E1 c’est toujours à I (air., III, l.'i, fine les auteurs se réfèrent pour justifier leur thinru par 1 1 triture sainte.

On ne saurait voir dans cette référence commune une interprétation dogmatique du texte. Les Pères ont trop varié entre eux sur ce point au cours des siècles ; ils ont même trop liésilé sur le sens a donner à ce passaue. et surtout ils n’ont jamais laissé entendre qu’ils prétendaient donner la pensée du magistère. D’où il suit qu’autant leur doctrine sur l’existence d’une peine

ultra-terrestre, purificatrice des fautes légères OU des restes du péché, doit être tenue comme l’expression authentique d’une croyance officielle de l'Église, autant leurs explications sur la nature de cette peine— le feu — devra être considérée comme une simple opinion n’engageant pas l’enseignement de l'Église elle-même. C’est ce que plus tard, conscient des exigences de la vérité, le concile de Florence saura reconnaître.

II. I. 1 DOCTRIBB DES 8UFFRAOB8 POUR 11 : s MORTS DAJTB ÏÉOLI8B LATIBB. - Dans l'Église latine, comme dans les Églises orientales, aucune hésitation sur l’utilité des suffrages des xixants offerts pour le soulagement des âmes des défunts. Pour ne pas multiplier sans nécessité les textes — aucune controverse n'étant ici possible nous nous contenterons de l’es

sentiel, en interrogeant successivement les Pères, les conciles, la liturgie, l'épigraphie.

Les Pères.

1. Avant saint Augustin. — Nous

avons signalé la célèbre Passion de Perpétue, qui nous montre la martyre implorant Dieu en faveur de l'âme de son petit frère Dinocrate et lui obtenant de passer du lieu de misère où il était retenu « tans un lieu de rafraîchissement, de rassasiement et de joie. Passio S. Perpétua, vii-viii, éd. Arm. Robinson, dans Texts and studies, t. i, fasc. 2, p. 72 ; cf. P. L., t. iii, col. 34.

Ce texte nous reporte à Cartilage et c’est aussi dans l'Église d’Afrique que l’on trouve les premiers témoignages explicites sur l’efficacité des suffrages pour les défunts. Tertullien écrit, à propos d’un défunt, que, dans l’intervalle écoulé entre sa mort et sa sépulture, il fut accompagné de la prière du prêtre : eum in pace dormisset et morante adliuc sepullura, intérim oratione presbijteri componcretur. De anima, c. LI, P. L., 1860, t. ii, col. 782 B. On ne sait si cette prière du prêtre est déjà un acte liturgique, mais du moins on sait que déjà l’on priait pour les morts. Dans le De exhortatiune eastitatis, Tertullien tire argument, contre les secondes noces, de l’embarras où se trouverait un veuf remarié et tenu par l’usage à faire les prières et les oblations annuelles pour l'âme de sa femme défunte. C. xi, P.L., t. ii, col. 975 C. Même embarras pour la veuve remariée, qui « pour l'âme de son mari (défunt) prie et demande pour lui le rafraîchissement et la réunion dans la première résurrection, et fait des offrandes au jour anniversaire de sa mort ». De monogamia, c. x, P. L., t. ii, col. 992 C. C’est encore à Tertullien qu’on doit le renseignement relatif à la coutume d’offrir l’eucharistie pour les défunts le jour de leur enterrement et le jour anniversaire de leur mort. De eorona, c. iii, P. L., t. ii, col. 99 A.

Saint Cyprien relate que les évêques ses prédécesseurs ont porté une loi interdisant à un mourant de constituer un clerc son exécuteur testamentaire, ac si quis hoc fecisset, non ofjerretur pro eo, nec sacrificium pro dormitione ejus celebraretur ; neque enim apud altare Dei meretur nominari in sacerdolum prece, qui ab altari sacerdotes et ministros voluit avocare. Epist., i, n. 2, Hartel, p. 466. Ce texte nous apprend deux faits intéressants. Tout d’abord que l’habitude d’offrir le sacrifice eucharistique pour les défunts était une tradition reçue à l'époque de Cyprien dans l'Église de Carthage ; ensuite qu'être nommé au Mémento de la liturgie était un privilège hautement apprécié. La discipline qui privait de cette faveur certains coupables était déjà une arme redoutable entre les mains des évêques. Les anniversaires des martyrs étaient également commémorés par l’offrande du sacrifice eucharistique, mais avec une intention toute différente, comme il ressort des expressions différentes de Cyprien, qui ne donne pas à entendre que les martyrs puissent avoir besoin des prières des vivants. Epist., xii, n. 2, Hartel, p. 503 ; xxxix, n. 3, p. 583. Au contraire, les vivants peuvent avec raison se recommander aux prières des trépassés. De habitu virginum, n. 24 ; Epist. lx, n. 5, Hartel, p. 205 et ( 95.

Arnobe, aux environs de 300, présente un curieux témoignage. Il proteste contre la destruction des églises parce qu’on y prie pour les vivants et pour les morts : Cur immaniter convenlicula dirui ? in quibus summus oratur Deus, pax cunctis et venia postulatur…, adhuc vitam degenlibus et resolutis corporum vinctione. Adv. Nationes, t. IV, c. xxxvi, P. L., t. v, col. 1076.

Au iv p siècle les témoignages de saint Ambroise et de saint Jérôme sont à recueillir. Le premier, écrivant à un ami qui pleure la mort de sa sœur, fait cette recommandation : « Il ne faut pas tant la pleurer que l’assister de vos prières ; ne l’attristez pas par vos larmes, mais recommandez plutôt son âme à Dieu par des oblations. » Epist., xxxix, n. 4 ; voir aussi, dans le

même sens, De obitu Valenliniani, n. 56, 78, P. L.,

t. xvi, col. 1116 H, 1136, 1112 C. Dans l’oraison funèbre de l’empereur Théodose, saint Ambroise rappelle la coutume des Églises de consacrer certains jours

i la prière pour les morts, en certaines Églises, le troisième et le trentième ; en d’autres, le septième et le

quarantième. N. 3, col. 1448 H. Plus loin il s’adresse à Dieu en ces termes : Accorde, Seigneur, le repos à ton serviteur Théodose, ce repos que tu as préparé a tes suints… Je l’aimais, c’est pourquoi je veux l’accompagner au séjour de la vie ; je ne le quitterai pas tant que, par mes prières et mes lamentations, il ne sera pas reçu là-haut, sur la montagne sainte du Seigneur, où ceux qu’il a perdus l’appellent. » De obitu Theodosii, n.36, 37, P. L., t. xvi, col. 1460 AB.

Jérôme, lui, dans sa lettre à Pammachius pour le consoler de la mort de sa femme, fait l'éloge de sa conduite. « D’autres, dit-il, répandent sur les tombeaux de leurs épouses des bouquets de violettes, de roses, de lis, de fleurs empourprées 1 et c’est là toute leur consolation. Notre cher Pammachius verse le parfum de l’aumône sur une cendre sanctifiée, sur des ossements vénérables. Oui, voilà les aromates qu’il répand en leur honneur, se souvenant qu’il est écrit : « Comme l’eau « éteint le feu, ainsi l’aumône efface le péché. » (Eccli., m, 33). » Epist., lxvi, n. 5, P. L., t. xxii, col. 642.

2. Saint Augustin.

Ce maître si ferme dans son enseignement sur l’existence de peines purificatrices dans l’autre vie, est tout aussi affirmatif sur le secours apporté aux défunts par nos prières, nos aumônes, nos offrandes du saint sacrifice. « Nul doute, dit-il, que les prières de la sainte Église et le sacrifice salutaire et les aumônes des fidèles n’aident les défunts à être traités plus doucement que leurs péchés ne mériteraient. En effet, ce que nous avons appris de nos Pères (c’est-àdire de la primitive Église) et ce qu’observe l'Église universelle, c’est de faire mémoire, dans le sacrifice, de ceux qui sont morts dans la communion du corps et du sang de Jésus-Christ et, en même temps, de prier et d’offrir pour eux ce sacrifice. Par ailleurs, qui doute que les œuvres de miséricorde soient profitables aux morts, si toutefois ils ont vécu comme il convenait ? » Serm., clxxii, n. 2, P. L., t. xxxviii, col. 936. Même doctrine dans VEnchiridion, avec la remarque finale plus accentuée : « On doit alfirmer que les âmes des défunts sont soulagées par la piété de leurs (amis) vivants, quand pour elles sont offerts dans l'Église le sacrifice du divin Médiateur ou des aumônes. Mais ces suffrages profitent à ceux qui, pendant leur vie, ont mérité d’en tirer profit après leur mort. Car on peut avoir eu un genre de vie éloigné aussi bien de la perfection, qui après la mort se passe de tels secours, que de l’impiété, qui les rend inutiles… » Loc. cit., c. ex, t. xl, col. 283 ; Cf. De octo Dulcitii quæstionibus, q. ii, n. 3, col. 158.

Saint Augustin est revenu sur cette doctrine dans le petit traité De cura gerenda pro mortuis, écrit vers 421 en réponse à une question de Paulin de Noie sur l’avantage qu’il y a d'être enseveli près des tombeaux des martyrs. Saint Paulin ne pouvait mettre d’accord la dévotion à ce genre de sépulture dans le voisinage d’un corps saint et la parole de saint Paul : Tous les hommes seront jugés suivant ce qu’ils auront fait pendant leur vie. Cf. Rom., ii, 6. Augustin lui répond que les bonnes œuvres des vivants peuvent être utiles aux défunts dont la vie fut édifiante. La sépulture dans le voisinage des corps saints a ce bénéfice indirect de provoquer des prières plus ferventes dont les défunts retirent profit. Qu’importe si les défunts ignorent le soin que nous prenons de leurs tombeaux. L’important est de prier pour eux. Et Augustin d’invoquer l’autorité de II Macta., xii, 32. Mais la tradition seule suffirait à nous inciter à ce devoir, car, « même si la prière pour les morts ne se trouvait pas indiquée dans les Écritures, 1

PI RGATOIRE. I ES SI FFRAGES l’oi R I ES MORTS (OCCIDENT

L23

l’autorité de I Ègliseesl Ici souveraine, puisqu’elle cons. h ii l.i coutume de réserver une place, dans les prières du prêtre a l’autel, pour lo mémento des morts. V '. t i. col. 593. Aussi Augustin conclut il : N’omettons pas Us supplications pour les ftmea des défunts ;

ise prif il ordonne de prier pour tous ceux qui sont mort-- dans la famille chrétienne, même --ans les nom mut tous et dans un mémento général, afin que la mère commune supplée ainsi aux pères et mères, aux Bis, parents et amis qui tusont pas la pour remplir ce Ibid., n. (>. col. 596.

-i iltmille manières différentes que le grand évêque exprime >.> pensée sur ce point. Dans ses Con. relate la coutume d’offrir le saint sacrifice pour lidéfunt devant la tombe même, avant la dép< siiion du corps. Conf., I. I. c.xii, P. L. I. xxxii, col. 777 ; cf. Cont. Faustum, I. XX, c. xxi, l. xi.ii, col. 184. Contre l’hérésiarque vérius il affirme l’utilité des suffi iges pour les défunts. De har.. mm, l. xin. col. 593. Quoi de plus touchant qu<' les paroles d’Augustin sur sa mère défunte ? De toute son Ame, il prie pour elle : Dieu de mon cœur…, je nisonge pas aux vertus de ma mère, pour laquelle je vous rends grâces avec bonheur. C’est pour ses péchés que je vous prie. Pardonnez lui. Seigneur, ses dettes. N’entre/ pas en Jugement avec elle. Souvenez-vous qu'étant près de finir sa % ie elle ne pensa pas a m>h corps et qu’elle s’abs tint de demander la pompe des funérailles ; tout ce quelle souhaita ee lut qu’on il mémoire d’elle à votre autel, où elle savait que Ton offre la victime sainte qui efface l’arrêt de notre condamnation. Conf., 1. IX. i. xiii. r. 35 sii. t. XXXII, col. 778. Et le Bis et ses amis prièrent pour elle avec ferveur pendant quon offrait

i ifice de notre rédemption a son intention. Ibid., -. eol. 777. l.t tout n’est pas tini avec ces prières immédiates, car elles peuvent se succéder Indéfiniment. IbiJ.. n. 37, eol. 779.

In texte de l’Enchiridion mérite une attention particulière, car il a donne lieu a une interprétation défectueuse, que nous avons relevée iei même. Voir Mil iii s. t.. roi. 1998 : i Lorsqu’on oITrc, dit Augustin, pour tous les défunts baptises le sacriDcc de l’autel ou celui de l’aumône, tous n’en profitent

-dément. Pour ceux qui ont été très bons, ce sont

i t ions de grâces. Pour ceux qui n'étaient pas très mauvais, ce sont des propitiations. Pour les très mauvais, si elles tus., nt d’aucun secours aux morts, elles sont une consolation pour les vivants ; a ceux à qui elles sont utiles, elles le sont pour leur obtenir une pleine rémission de leurs fautes ou du moins pour que leur damnation devienne plus tolérable. C. xxix. P. /… t. XL, col. 246. I.a damnation - n’est ici pas autre

que la peine du purgatoire. lin revanche, saint Augustin enseigne que les sutvivants ne peuvent profiter aux damnes. ' la nui li ure preuve de l’exactitude île notre préccdi nte intt rprétation. ~oirDe cura prvmortuis gerenda P. /… t. xt. col

s saint Augustin. L’enseignement de la

tradition est si nettement établi qu’il devient inutile

d’insister. Rappelons simplement pour mémoire deux

! saint Grégoire le Grand où ce pape relate

pparitions de défunts demandant des prières pour ment de leurs âmes et confirmant ee soulagement : pour l'âme du diacre Pascbase, DmL, I. IV. c. xi.. P. /… t. lxxvii. col. 397 ; pour l'âme du moine Justus, délivrée par la célébration de trente misses (origine du trentain grégorien i, c. lv, col. 121. On peut

iquement, faire remonter jusqu’au ix ou au

la prat ique di goriennes :

an la retrouverait mémi antérieurement, surtout dans

l’ordre bénédictin. Cf. Béringcr, Les indulgences, trad.

fr.. t. i. Paiis. 1925, p. 5

Saint bidon de Séville rapporte a l’insl it ut mu apostolique l’usage universel de prier pour fis morts cl d’offrir pour eux le sacrifice eucharistique i Sacriflcium pro defanctorum ftdelium animabus ofjerre vel pro eis orare, quia per totum hoc orbem custoditur, crtdimus quod <//> ipsis apostolts traditum stt. Hoc enim ubtque catholica tenet L' « lesta, quanisi crederel ftdelibusdefunclis dimitti peccata, mm pro eorum spiritibus, v l elee mosynam faceret vel sacriflcium Deo ojjerret. De < siast. offlciis, I. I, c. xviii, n. il. P. /… i. ixxxiii.

COl. 7Ô7 A. C’est même en parlant de ce fail de la

prière pour les défunts qu' Isidore conclu) à l’existence

dans l’autre vie d’un purgatoire OÙ s.>nt remis certains

péchés. N. 12, col. 7ô7 ah. il se demande ensuite poui

quoi la rémission n’est pas accordée à Ions, et il n’a

pas d’autre réponse que le texte de saint Augustin, Enchir., c. xxix ; voir ci dessus, col. 1233. l<L. ibid,

2o ('.mu tics. Les anciens conciles de l'Église latine renleriiient fréquemment des décisions qui sont d’ex

Illicites confirmations de la doctrine catholique touchant l’efficacité de la prière et du sacrifia eucharisI ique pour les dclunt s.

l. Certains conciles règlent l’application du sacrifice eucharistique d l'âme de pénitents décédés avant leur complète réconciliation. - Les statu/a Ecclesiæ antiqua (qu’on donnait jadis comme canons du [Ve concile de Carthage) donnent l’indication suivante : Lorsque les pénitents qui se montrent /des meurent par hasard pendant un voyage ou une traversée, alors qu’on ne peut leur porter secours, on doit prier et offrir fi saint sacrifice pour eux. Can. 79, l tefele Leclercq, Hist. des conc, t. ii. p. 1 19.

Le I or concile do Vaison | 1 12) est plus explicite encore : Si les fidèles, après avoir reçu la pénitence, mènent une v ie correcte en accomplissant les exercices

de la satisfaction et viennent à mourir subitement dans les champs ou en voyage sans avoir été admis a la communion, ou doit offrir pour eux le saint sacrifice foblationem recipiendam) ; ils doivent aussi être ensevelis comme les fidèles, car il serait in juste d’exclure des saints sacrifices ceux qui aspiraient avec ferveur aux saints mystères et qui. après s'être regardés pendant

longtemps comme indignes a cause de leurs pécfiés, désiraient vivement y être admis, s’ils sont venus a mourir, sans le secours des sacrements, et alors qu’un piètre ne leur aurait pas refusé la réconciliation. «  Can. 2, Hefele-Leclercq, op. cit., t. ii, p. 155.

Plus brièvement le II concile d’Arles ( I l.'i ou 15271 (que certains auteurs dénomment IIP), s’exprime ainsi : Quant a ceux qui meurent encore dans l'état de pénitence, on décide qu’on ne doit abandonner aucun d’eux sans la communion ; mais, puisqu’il 9 honorablement pratiqué la pénitence, on doit accepter pour lui l’offrande (du sacrifice). Hefele-Leclercq, op. cit., t. ii, p. 166.

Le II' concile d’Orléans (533) prescrit de recevoir

les oblations des défunts pour ceux qui auront été exécutés à cause de quelque crime, à condition qu’ils ne

se soient pas donné la mort de leurs propres mains. Can. 15, I Iclele I.eclcrcq. op. cit., t. II, p. I l.'i").

Le l concile de Tolède (675) es) tout aussi condes

cend.int : Au sujet de ceux qui, avant reçu la pénitence, meurent avant d'être réconciliés…, on décrète

que leur mémoire soit rappelée dans les églises et que

l’offrande soit reçue par les prêtres pour leur délit.

(Autre texte : et que l’offrande destinée a leurs âmes.

soit reçue. | On trouve ici. en effet, deux leçons. Soil : oblalio pro connu delicto, Eiardouin, t. tu, p. 1029, et oblatio pro eorum dedicata spiritibus, Mansi, ConciL, t. vi. col. 15.8.

'i. D’autres concile : interdisent l’application du sacri In, - eucharistique à certaines catégories de criminels. Nous avons déjà trouvé- cette restriction dans Le die d’Orléans, de 533.

Le I Ie ( ?) concile de Braga, en 563, interdit de faire mémoire au sacrifice de la messe de tous ceux qui, de quelque façon que ce soit, se sont donné à eux-mêmes la mort ; leurs corps ne seront pas ensevelis au chant des psaumes. Can. 1 (>, I lefele-Leclercq, op. cit., t. iii, p. 1 80.

Le concile d’Auxerre (578), interdit d’accepter les offrandes pour les suicidés. Can. 17, Hefele-Leclercq, op. cit., t. iii, p. 219.

3. Enfin l’on troupe, dans nombre de conciles anciens, certaines réglementations concernant la célébration des messes pour les dé/unts. — Voici d’abord un canon d’un concile de Carthage, vers la fin du ive siècle : interdiction de célébrer la messe sans être à jeun, sauf à l’anniversaire de la Cène. Si l’on doit faire mémoire de personnes mortes l’après-midi, on se contentera de réciter de simples oraisons, s’il ne se trouve personne à jeun pour célébrer. Mansi, ConciL, t. iii, col. 885 A.

Le IIe concile de Braga (563) nous fait connaître une coutume priscillianiste qu’il réprouve : « Quiconque, le jeudi saint, n’assiste pas à la messe, à jeun, dans l’église à une heure déterminée après none, mais, suivant l’usage de la secte des priscillianistes, célèbre, à partir de tierce, la solennité de ce jour, en interrompant le jeûne après avoir assisté à une messe des morts, qu’il soit anathôme. » Hefele-Leclercq, op. cit., t. iii, p. 178. Quelques années après (572), le IIIe (IIe) concile du même nom réprouve un autre usage priscillianiste, qui est de consacrer aux messes des morts après avoir bu du vin. Can. 10, Hefele-Leclercq, op. cit., t. iii, p. 195.

Le IIe concile de Vaison (529) fait mention des messes pour les défunts à propos du Kyrie eleison et du Sanctus. « Aux messes du matin ainsi qu’à celles du carême et aux messes des morts, on doit dire trois fois Sanctus, ainsi que cela se pratique pour les messes solennelles. » Hefele-Leclercq, op. cit., t. ii, p. 1114.

Le synode romain de 502 considère comme une impiété et un sacrilège de détourner de leur destination les biens laissés pour les pauvres aux églises, en vue d’obtenir de Dieu le salut et le repos éternel pour l’âme du donateur. Hardouin, t ii, p. 978.

Voici une curieuse interdiction portée par le XVIIe concile de Tolèdî (694) : « Quelques prêtres disent des messes des morts pour des vivants afin que ceux-ci meurent bientôt. Le clerc qui dira une pareille messe et celui qui la lui aura demandée seront l’un et l’autre déposés, bannis et à tout jamais excommuniés, a Can. 5 ; Hefele-Leclercq, op. cit.. t. iii, p. 586.

On pourrait également citer les conciles d’une époque plus tardive, de Chalon-sur-Saône (813), can. 39, Hefele-Leclercq, op. cit., t. iii, p. 1145, et de Worms (868), can. 80, Hefele-Leclercq, op. cit., t. iv, p. 465.

Un certain nombre de textes patristiques et conciliaires sont entrés dans le Décret, I a part., dist. XXV, c. 4 Qualis (S. Grégoire), c. 5 Qui in aliud (Ps. -Augustin), Friedberg, col. 94 ; II a part., caus. XIII, q. ii, c. 2124, col. 728-729 ; caus. XXVI, q. vi, c. Il (Conc. d’Épaone), col. 1039 ; III » part., dist. V, c. 35 Nullus, col. 1422.

3o La liturgie.

Les textes rapportés plus haut de Tertullien et de saint Cyprien indiquent assez nettement que déjà au iiie siècle la liturgie comportait le Mémento des morts. Voir col. 1231. Au für et à mesure de notre enquête, nous avons relevé des allusions au Mémento des morts à la messe. Saint Augustin en témoigne au ve siècle. Les anciennes liturgies en fournissent d’ailleurs maintes preuves par les prières intitulées Post nomina, super diptycha. Voir Muratori, Liturgia romana velus, Venise, 1748, t. i, p. 761 ; t. ii, p. 223 ; Mabillon, Liturgia gallicana vêtus, 2o éd., Paris, 1729, p. 278, 289. Le canon de la messe romaine est décisif : Mémento, Domine, famulorum famularumque luarum qui nos præcesserunt cum signo fidei et dormiunt in somno pacis. Ipsis, Domine, et omnibus in

Christo quiescentibus, locum re/rigerii, lucis et pacis, ut indulgeas, deprecamur.

Le Mémento des morts est très certainement » une portion authentique du canon romain dans les deux recensions A et B ». Bisiiop, On the early texts o/ the Roman Canon, dans The Journal oj theol. studies, t.iv, p. 577. Il ne figure pas cependant dans le sacramentaire gélasien, ni dans le ms. 164 de Cambrai, ni dans le ms. Val. Regin. 837. Mais on le trouve dans le ms. Val. Ottob.’il’i, aussi bien que dans le missel de Bobbio, Paris, Bibl. nat., lot. 13 246, dans le Missale de Stowe, Bibl. de l’Académie royale d’Irlande, et dans le Missale Francorum, ms. Val. Regin., 257. S’il manque dans ces quelques exemplaires, c’est, dit Mgr Duchesne, parce que « cette formule servait de cadre aux diptyques des morts, que l’on récitait sur un texte spécial, un rouleau, un tableau ou autre chose de ce genre. » Origines du culte chrétien, Paris, 1908, p. 185, note. Ordinairement, en efïet, après la lecture des diptyques qui renfermaient les noms des évêques et de » fidèles morts dans la paix du Christ, le célébrant récitait l’oraison dite Oratio post nomina, par laquelle prêtre et assistants, demandaient à Dieu pour ces âmes le repos éternel. Duchesne, op. cit., p. 124. Sur le Mémento des morts dans le canon romain, voir dom Cabrol, art. Canon, dans Dict. d’archéol., t. ii, col. 1868.

Dans le rite ambrosien nous retrouvons le texte romain à un mot près : Mémento etiam, Domine, etc., lucis ac pacis ut indulgeas, deprecamur, Cf. Paul Lejay, Ambrosien (Rite), dans Dict. d’archéol., t. i, col. 1411.

La liturgie mozarabe offre de nombreux exemples du souvenir des morts. Dom Férotin a publié un certain nombre de textes dans le Liber sacramentorum mozarabicus, 1912. Voir dom Cabrol, Diptyques, dans Dict. d’archéol., t. iv, col. 1069-1071. Sur la lecture des noms des morts à la messe, voir ici Mozarabe (Messe), t. x, col. 2529.

Dans la messe gallicane, les noms des morts étaient lus même en temps que ceux des vivants, à l’offertoire, avant la préface. Voir dom Cabrol, art. Diptyques, loc. cit., col. 1074, et ici Messe dans la liturgie, t. x, col. 1375. On trouvera, empruntés aux différents textes d’anciennes messes gallicanes, de nombreuses formules où revient le souvenir des morts. Voir l’art. Diptyques, loc. cit., col. 1071-1073. Pour le Mémento dans la messe celtique, voir ici t. x, col. 1382.

Sur les sacramentaires qui n’ont pas le Mémento des morts après la consécration, voir Diptyques, loc. cit., col. 1077 sq.

Dans le sacramentaire grégorien on trouve une série de messes pro defunclis : pro episcopo dejunclo ; pro sacerdote de/uncto ; unius defuncti ; in die depositionis, sive tertio, septimo trigesimoque ; in anniversario ; plurimorum defunctorum. P. L., t. lxxviii, col. 214-218. Ces dernières indications nous remémorent que, dès les premiers siècles, l’usage s’est introduit de célébrer la mémoire des défunts à des jours déterminés. D’après les Constitutions apostoliques, t. VIII, c. xlii, c’est le troisième, le neuvième, le quarantième jour et le jour anniversaire. Ces dates sont conservées dans l’Église grecque. Voir ci-dessus, col. 1207. Le quarantième jour est attesté également par saint Ambroise. Voir col. 1 232. En fixant le neuvième jour, les Constitutions semblent se référer aux usages civils du novemdiale. Le septième jour, dit saint Augustin, auctoritatem habet in scripturis. .. septenarius numerus propter sabbati sacramentum prœcipue quielis indicium est. Quæst. in Heptateuchum, t. I, q. clxxii, P. L., t. xxxiv, col. 596.

4o L’épigraphie.

L’épigraphie, en Occident comme en Orient, atteste la prière et l’offrande du saint sacrifice pour les morts. Mais cette question historique a déjà été abondamment traitée ici, à Communion des saints (Monuments de l’antiquité chrétienne), t. iii, 12

Pi RG Tiil i ; i LES PREM1 1. RS THÉOLOG l l NS

L238

col. 160 167. H est iu.iiiin.Mii-. utile de dégager une synthèse doctrinale de tons eea documents. Dom Leclercq l’a fuit heureusement tracée en un paragraphe que nous citons :

Il existe une série considérable de témoignants explicites Éa ii prière pour les morts, ( s son) les acckunattona al les vivu que les Ddèles tormulent pour les défunts. Parfois, c', st un simple souhait il>' félicité, de p.iix. car, pour les Bdéles, ces mots i/i pue* ne sionlflent pas seulement que le sort n i.lit en paix avec l'Église, dans l’orthodoxie des formules, mais encore qu’il |oull de la paix éternelle. i 'est pourquoi on rencontre in pacb iu. iv > vi i m m nouai rappellent la vie passée sur la terre et ces autres laraauJea <|in se rapportent a la le future : qi h s, 1 1 in p m i n et -< - v.u Unîtes : Ri qvikscji in I’ace ; vi s îs rtii ; VAAJ IN PACK ; m PAO homini DOIUflAS ; i PACK… 1 1 IN HOMO 1 1 i us m i : in PAC ! i i m i u u. I 1 ! u m. Il f ; mt

donc se garder de croire que la formule dors en paix veuille exprimer une pensée analogue i celle des gentils qui

110 croient ni : i l.i vie future ni la résurrection, et pour

lexpielosa mots auraient le sens de repose ici a Jamais

le rapOS est une allusion a la posture du cadav re étendu et liuuiohile connue on l’est pour dormir, île un me que

cimetière évoque l’idée ilu dortoir, mus simplement jusqu'à l.i résurrection… ; c’est une paix qui n’est pas la

mort : M m ri u ii in PACK ; i i i kin in PACE, puisque

c’est î.i vie dans le riirist : n is in oi obj di o et i » p m i DotfiNi Nosnu ; c’est le séjour avec les anges : pax i i m anoblis ; c’est la possession de la béatitude : in paci i i

m ni DM i ioni ; c’est l : i société de Pieu : i i M DI (> in p i F …

L'é qui v a lent de la p : ii. c’est le rafraîchissement : in pa< i et iiniui.i.mi m.. La paix et le rafraîchissement vont liar finir l’objel du désir des Qdéles pour ceux qu’ils ne délaissent pas de leurs prières… (Car) les survivants ne se contentent pas d’affirmer leur croyance ; ils expriment leur espoir et prient pour obtenir aux morts la grâce qu’ils leur souhaitent. Nous en avons déjà cite quelques exemples, en voici d’autres. Au cimetière de Sainte-Agnès : MNHC0H O GCOC CYrCNIHC ; Gai di mum s. ipiati rinpai i ; 1 1 in

paciat. Une épitaphe romaine du îir siècle présente cette formule caractéristique : me n(bi) iinis

1 l I m i i issimi MATS CS SET PATEH oMNleol 1 Ns HM viisFiti in LAB forum /tamoiu m misi ni Are) ANiM.r : non Bêo(na) ii mmis… Voir les références dans H. l.eclercq, art. Défunts, dans Diet. i/'.irc/i…L, t. i col. 447-448.

Il est temps de conclure. Tous ces document s. enseignement des Pères, prescriptions des conciles, formules liturgiques, inscriptions épigraphiques, nous amènent, pour l'Église latine, a la même conclusion que pour l'Église grecque : depuis les temps les plus recules ce qui nous permet de dire depuis les temps apostoliques — la croyance à l’efficacité des suiïrages pour les defuntsestun dogme universellement reconnu.

v. L’union réalisée aux conciles de Lyon et di 1 i.ni : i ni i — L'étude de la tradition dans l'Église orientale et dans l'Église latine devrait nous faire conclure au rapprochement facile de ces deux Églises dans l’enseignement relatif aux peines purificatrices de l’autre vie. Peut-être si cet effort de conciliation avait été tenté au vi siècle, l’union eut-elle étéréalisée. Malheureusement les premiers essais théologiques, en Orient surtout, ne favorisèrent pas ce rapprochement : tout an i ontraire, ils aboutirent à créer un malentendu que les deux conciles de Lyon et de Florence dissiperont a peine. Aussi semble-t-il logique de rappeler, en de préface a l'étude des textes conciliaires, les

divergences créées par l’enseignement des théologiens. Nmis examinerons donc successivement : 1° L’enseignement des théologiens latins de la fin de l'époque patristique an xiv siècle : 2' l’enseignement des théoas byzantins de la fin de l'âge patristique au Il i oncile de Lyon ; 3° la doctrine du purgatoire au II* concile de Lyon (1274) ; 1° la doctrine du purgatu concile de Florence 1 1 139). t. LESSEIGSEUK.ST DES TBÉOLOQlMa LATIB8 DR LA FIS DE L'ÉPOQUE PATRISTIQUE A XIV* SIÈCLE. —

Avant les sententiaires.

C’est l’influence de salnf

Augustin et surtoul de saint i irégoire le < irand qui in s

pire Ions les auteurs.

1. Utilities de Sailli ; <L/ (.'est dans son l><

sacramentia, I. II. pari. N i. P. /… i. i lxxvi, consa crée aux ims dernières de l’homme, qu’Hugues expose ses niées sur le purgatoire. Le dogme lui même est suppose acquis, Après avoir traité du dépari de l’Ame, c ii, col. 580, Hugues étudie les peines elles mêmes, dont la

principale est le l’eu, feue idemmeiil matériel connue celui que nous connaissons : aul renient que sérail il'.' Comment ce feu al leiiulrail il les finies ? In tO ardent.

quod se ardentes rident : 1 Col. 585 A. N’est ce pas là pré Index à l’explicat Ion que donneronl Richard de Media villa, Sent et Ockam ? Voir Feu di l’enfer, i. vii, coi. 1230. Le c iv étudie la question de lacis pœnarum. Col. 586. 1 u réalité, pour 1 lugues, le lieu du purgatoire est une question accessoire, a laquelle l’auteur ne saii répondre que par une timide hypothèse : lésâmes souf lrent la OÙ elles ont pèche. Col. 586 I ». I le plus le pur

gatolre al tend tous ceux qui ne sont pas parvenus à une complète purification de leurs rimes. Ce sont les non

ralde boni. Mais, parmi les malt, il y a les valde mali et les non rallie malt. Les premiers sont sûrement damnés. Mais des mm ralde mali OU des minus mali quel sera le

sort ? Hugues les estime damnés, sans cependant rien vouloir définir. Le c.v, Dcqualitatetormentorum, expose, par rapport aux peines du purgatoire, le sens de I Cor.. tu, 14-15. Ce sont les fîmes coupables de moindres péchés qui pourront être ainsi sauvées comme par le feu. Col. 590. Les derniers chapitres, vi-.x, traitent des suffrages pour les défunts : lout particulièrement le c. vu rappelle, avec saint Augustin, quelles âmes profitent davantage de ces prières. I. es deux derniers chapitres sur le sacrifice de la messe sont particulièrement touchants : Quis enim. écrit-il, fnlcliiim Itabere dubinm possit in ipsa immolalinnis luira ail saterilnlis votent ctehun aperiri. Col. 595-596.

2. Robert Pulleyn. — Dans ses Sentences, I. IV. c. xxi, xxii, P. L., t. clxxxvi, Pulleyn étudie l’exis tence du purgatoire, séjour préparatoire pour les justes de l’Ancien Testament, à l’entrée dans le sein d’Alua hani. pour les justes après Jésus-Christ, à l’entrée au paradis, c. xxi. La peine du purgatoire est le feu. Une comparaison montre bien la gravilé de cette peine : ignis qwppe purgatorius, inler nus/ras et in/erornm panas médias, lanttim saperai has, qiianlnm saprratur ab illis. L’existence de ces peines est suggérée par le ps. vi, 2 : Domine, ne in furoretuo arguas me, nequein ira tua corripias me : la fureur divine se manifeste par les peines de l’enfer ; la simple colère, par les peines du purgatoire. C. xxi, col. 821) BC. C'était déjà l’interprétation de Bède ; voir col. 1227.

Quelques autres idées sont jetées comme en passant. Où se trouve le lieu du purgatoire ? Nondum scio. C. xxii. col. K2l> I). Combien de temps les finies demeureront-elles en purgatoire ? Usque ad sati.slaclionem. Id., ibiit. Après la purification, elles iront sans aucun doute dans le ciel ; mais, selon la gravité OU la quantité de leurs péchés, elles devront demeurer plus ou moins longtemps au purgatoire. Col. 827. A sa descente aux enfers i le Christ a probablement délivré toutes les aines du purgatoire. Col. 828.

.'i. Nous ne trouvons qu’une allusion en passant chez Richard de Saint-Victor, Pierre le Chantre, Alain de Lille. Voir Fbtj du puroatoibe, col. 2259. Mais, chez maître liandin (qui résume Pierre Lombard ;, nous retrouvons la formule de la quadruple division des fîmes après la mort (formule qui s’inspire de s ; iint Augustin, Enchir., c exi : h s valde boni, les mediocriter boni, les mediocriter mali. les valde mali. Les suffrages ne sauraient profiter aux valde mali et peut-être pas aux mediocriter mali. C’est la position d’Hugues de Saint-Victor, P. /… t. exen, col. n mu il. L239

I' U l{ ( i A T <) I ! < E. LES S E N T E N T I A I I ', I. S

1240

1. Avec Pierre Lombard nous arrivons aux formules qui ont servi de thème aux variations des théologiens sur le purgatoire. Dist. XXI. I.e Maître des Sentences se demande tout d’abord si certains péchés sont remis après cette vie. lit, invoquant Malt h-, XII, 32, et I Cor.. m, 15, il rappelle l’interprétât ion encore hésitante de saint Augustin sur ce dernier texte (De civ. Dei, t. XXI, c. xxvi, n. 4 ; voir ci-dessus, col. 1222) et conclut que le texte de l'épître aux Corinthiens « insinue ouvertement que ceux qui édifient le bois, etc., emportent avec eux des constructions combustibles, c’est-à-dire des péchés véniels, lesquels devront être consumés dans le feu purificateur ». Il y a donc des péchés remis après cette vie.

La peine du purgatoire ne sera pas égale pour tous. Le texte de saint Paul l’indique également. Les péchés véniels sont représentés par le bois, le. foin, la ppille. Mais le bois, ce sont des péchés plus sérieux ; le foin, des péchés moins importants ; enfin la paille, des fautes minimes. D’où il suit que, selon l’importance dos fautes, les âmes seront délivrées les unes plus vite, les autres moins rapidement. Parallèlement, l’or, l’argent, les pierres précieuses, ont des significations différentes : l’or, c’est la contemplation divine ; l’argent, c’est l’amour du prochain ; les pierres précieuses, ce sont, les bonnes œuvres en général. C’est là l’interprétation de la Glose ordinaire, qui s’inspire de saint Augustin, Enchir., c. lxviii.

Une dernière question se pose à Pierre Lombard : le < bois » qui sera consumé par le feu doit-il être entendu du péché lui-même ou de la peine due au péché? Pierre opine que c’est du péché lui-même qu’il fautl’entendre, car on peut être surpris par la mort sans avoir eu le temps de se repentir du péché véniel.

La question du purgatoire appelle nécessairement celle des suffrages pour les défunts. Pierre Lombard l’aborde dans la dist. XLV. Après l'énumération des réceptacles dans lesquels sont accueillies les âmes avant le jugement, le Maître des Sentences expose, c. ii, le problème théologique des suffrages. Le texte de 'Enchiridion sur les différentes catégories de défunts lui sert de thème. Voir col. 1221. Et il en tire une leçon touchant quatre catégories de défunts : les valde boni, les mediocriter boni, les mediocriter medi, les valde mali. Mediocriter malis suffranantur ad pœnæ mitigalionem ; mediocriter bonis ad plénum absolulionem. On sait qu’au Moyen Age nombre de théologiens ont admis une certaine mitigation des peines pour des damnés moins coupables. Voir Mitigation, t. x, col. 2000. Mais, à coup sûr, les mediocriter boni sont les âmes du purgatoire auxquelles nos suffrages apportent soulagement et entière délivrance. Dans quelle mesure nos suffrages sont-ils appliqués ? Les prières des obsèques sont -cl les utiles ? Autant de questions proposées par Pierre Lombard et auxquelles les commentateurs apporteront leurs solutions.

Les senteniiaires.

Les sententiaires étudient à

la suite de Pierre Lombard la question de la purification des péchés dans l’autre vie et celle des suffrages.

1. La purification des péchés dans l’autre vie.

Conformément à l’ordre observé par Pierre Lombard, la question de la rémission des péchés véniels vient en premier lieu. Alexandre de Halès se demande si les péchés véniels sont remis au purgatoire quant à lu coulpe. Summa, part. IV. q. xiv, membr. III, a. 3, § 5. La réponse est négative, le libre arbitre, après la mort, étant immobile, et le mérite impossible. C’est donc simplement la peine qui est remise au purgatoire. La coulpe est remise à l’instant même de la mort, par la grâce de la persévérance finale. Même opinion chez Albert le Grand. 7/ï / Vum Sent., dist. XXI, a. 1, et, plus tard, chez Major, ibid., q. m. Chez saint Thomas, une évolution s’accuse dans la pensée. Au début, en confor mité avec Pierre Lombard, il enseigne que « dans l’autre vie, le péché véniel est remis (quant à la coulpe même) par le feu du purgatoire à celui qui meurt en état de grâce, parce que cette peine, étant d’une certaine manière volontaire, a la vertu d’expier toute faute compatible avec la grâce sanctifiante ». In I V ara Sent., dist. XXI, q. i, a. 1, qu. 1. Mais plus tard saint Thomas modifie sa pensée : 1e péché véniel n’existe plus au purgatoire quant à la coulpe ; sitôt l'âme juste affranchie des liens du corps, un acte de charité parfaite efface sa faute, dont il ne restera que la peine à expier, l'âme étant dans un état où il lui estimpossible de mériter une diminution ou une remise de cette peine. Demalo, q. vii, a. 11. L’opinion de saint Thomas a conquis de nombreux suffrages chez les sententiaires : Richard de Médiavilla.PicrredelaPalu. Durand de Saint -Pourçain et même des nominal is tes comme Almain l’ont accueillie dans leurs commentaires sur la dist. XXI.

Avec saint Bonaventure, nous trouvons une opinion moyenne. L’art. 1, q. i. de la dist. XXI pose comme base de raisonnement que « le péché véniel ne saurait être remis sans la grâce sanctifiante ». Dans l’art. 2, q. i, Bonaventure reprend l’opinion de Pierre Lombard ; après cette vie, le feu purifie l'âme non seulement de la peine, mais de la coulpe du péché véniel : les âmes souffrantes sont en état de grâce, et, pour produire son effet de purification, la charité est aidée, au purgatoire, par la souifrance. Denys le Chartreux a repris cette solution, ibid., q. i, ainsi que plus tard Dominique Soto, dist. XV, q. ii, a. 2. Sur la doctrine en général de saint Bonaventure, on consultera avec profit Thomas Gerster de Zeil, Purgatorium juxta doclrinam seraphici doctoris S. Bonavenluræ, Turin. 1932.

Contrairement à l’opinion émise en dernier lieu par saint Thomas, Duns Scot revient à l’idée d’une faute remise postérieurement à l’accomplissement de la peine. In IV" m Sent., dist. XXI, q. i. Toutefois, dans iesReportata Paris., il semble beaucoup se rapprocher du Docteur angélique. Voir Duns Scot, t. iv, col. 1932.

Quel sentiment animera donc l'âme souffrante relativement à ses péchés ? Pas de contrition véritable, telle qu’on la trouve dans la pénitence sacramentelle ou dans l’acte méritoire de pénitence ; le regret du péché équivaut chez l'âme du purgatoire au désir d'être délivrée : animée purgalorii sacramentaliler vel merilorie conteri nequeunt, sed tantum solutorie, ideoque ob repugnantiam sui status. Alexandre de Halès, op. cit.. q. xvii, membr. ii, a. 2, § 3. Albert le Grand rappelle, lui aussi, cette incapacité des âmes souffrantes. Leurs peines ne sont volontaires que secundum quid. La peine volontaire, en effet, est celle que la volonté librement recherche et s’impose. Or les âmes subissent leur peine parce que cette peine leur permet d’arriver au ciel. C’est la différence qui existe entre la satisfaction de la vie présente et la satispassion du purgatoire. A. 7. Saint Thomas dira pareillement que les âmes souffrent d’une volonté conditionnée, en tant qu’elles savent que leurs souffrances les conduiront au ciel. I.oc. cit., qu. 1. Bonaventure admet pareillement que la peine du purgatoire n’est qu'à demi volontaire : la volonté la subit, la tolère, mais tout en désirant sa cessation ; elle n’est pas méritoire. Ibid., q. iv.

Cette constatation amène les deux grands théologiens à déclarer, eux aussi, que la moindre peine du purgatoire est supérieure à la plus grande souffrance d’icibas. Mais, alors que saint Thomas se contente de reproduire l’assertion telle que nous l’avons déjà rencontrée chez maint auteur, Bonaventure lui adjoint une explication opportune : - Dans l’autre vie, en raison de l'état des âmes, la peine purificatrice sera, en son genre, plus grave que la plus forte épreuve d’icibas. En ajoutant dans son genre ». Bonaventure établit une proportion qui dissipe les malentendus pos1241

P i RG l< » | Kl LES SE NTE NTIAI RES

I

sii>ii> : (H>ur le même péché, l.i plus petite peine du purgatoire sera supérieure.1 1.1 plus grave punition terrestre correspondante, s rhomaSi toc cit.. a. 1, nu..i ; s Bonaventure, toe. cit., q. rv ; cl. dist XX, l>art. l, a. I, q. 11. La plupart dos autres auteurs suivent saint rhomas : voir -.urt > » ut Richard de Médiavilla, iii>t. XX, a.’-'. q. n. Pierre de la Palu, dist XXI. q. 1. .1. 1. ooncl. i. Mais, si grande que soit leur peine, les .mu - æ se croient pas damnées et elles n’ignorent pas qu’elles --ont on purgatoire. Saint rhomas, id., qu, -I. Leur état est toi qu’elles possèdent une certitude do leur salut, plus grande que celle qu’elles avaient sur terre, moins grande que celle qu’elles amont au ciel. Cette doctrine est commune à tous les docteurs dans leur commentaire soit a la dist. XXI. soit a la dist. XLV. sont 00s peines qu’on appelle d’un nom qui les englobe tontes : le purgatoire. L’existence de 00s peines purificatrices est démontrée par un double argument. Tout d’abord, la raison théologique : A la mort. certaines Ames sont asso/ parfaites pour aller directe ment au ciel ; les damnés iront en enfer ; mais certains pécheurs, qui no méritent pas l’enfer et ne peuvent cependant pas entrer immédiatement au ciel, passeront par l’épreuve du purgatoire, s. Thomas, « list. XXI. q. 1. a. 1. qu. 1 : Cont. fient., I. IV. 0. xc.i : cf. Optue. Dedaratio quortundam articulorum, c. ix : l’.ontra Arment - <t Saraccnos ; S. Bonaventure,

dist. XX. a. l. q. 11. Ensuite, la révélation. Sans s’attarder a Sap., . 25 ; K. ww. S : Apec. i. 27 (Dedaratio…), tous nos théologiens sans exception font otat do I Cor.. 111. 1 l-lô.

se do I Cor., m. ll-lô. reflète chez tous rintluonoo do Césaire d’Arles. Tous interprètent unanimement dos péchés véniels le bois, la. paille », le « foin ». Certains, comme Albert le Grand et saint Thomas, donnent même un sons différent à chacun de 00s syraboles : lo bois, 00 sont les péchés véniels plus importants ; lo foin. 00 sont les péchés véniels moindres ; la paille, los péchés véniels minimes. L’or, l’argent, les pierres précieuses, ce sont les œuvres qui reflètent los pensées de Dieu ; le bois, le foin, la paille, lesœu resqui reflètent los pensées du monde. Alexandre deHalès, op. cit.. q. xv, membr. m. art. 1-3 ; S. Albert le Grand,

t.. a. 2 : s. Thomas, Cont. genl., loc. cit. ;

dist. XXI. q. i, a.2, qu. 2 : In epist. I adCor., m. Iect.2. Pour Alexandre do 1 laies, le fondement est la foi seule. bien qu’il faille considérer que cette foi doit ont rainer la charité. Ibid., a. 2. Albert le Grand fait observer qu’on n’édifie pas dos péchés, même véniels, sur la foi : ils sont doue commis concomitamment avec la pré de la foi dans l’âme. A. 3.

D’après le texte « le saint Paul, ces péchés véniels’clone puritios quasi per ignem. D’où nos théolo ipnent unanimement que la peine positive

du sms sera, au purgatoire, par le feu : feu matériel et » rel. Ceux qui ne professent pas cet enseignement a Uur commentaire do la dist. XXI. ainsi que le font saint Thomas et saint Bonaventure, s’y rallient dans leur commentaire de la dist. Xl.l (Scot, Gabriel Biel, Durand de Saint-Pourçain, Richard, Pierre de Taren . etc.). où l’on étudie plus spécialement l’action du fou sur les ftmes. oir ici Feu de l’enfer, col. 2230-Alexandrc de Halos va même jusqu’à écrire : Quidquid in hoc opinando dixeril bealus Augustinus, omnrs reliqui Ecclesia doctore » ignem purgatorium rnuterialem esse aperle conclamant. Q. xv, membr. ni.

q. 1 -11. Assertion qui. si l’on s’en tient a laconsi tion superficielle des conceptions archaïques fin feu du Jugement, pourrait être à la rigueur consii

llement exacte. Mais le mérite de saint

précisément de dégager les différents

rspectives eschatologiques, ce qui logi ent devait l’amènera émettre quelques doutes sur

la matérialité du (ou purificateur. Les édlteui s « le Qua

raCChl ont même Cni pOUVOir ajouter au texte do saint

Bonaventure la remarque suivante : Purgationem mu nuiriuii pott hanc oitam fleri per ignem, quintamenexclu dantur alite pana, negant Grttci, affirmant nunc Latini, quorum sententta graoissimta auctoritatibua confirma tnr. NoNiu m autem al’Ecclesia deflnita est ; née constat quod omnes purgandi illam pamam sensus palientur. <i dist. XXI, ». 1, q. n. il est difficile, après le concile di Florence (voir plus loin), <le présenter sous,, . jour la doctrine du feu matériel. Voir Fbi dv pi rqatoire, col. 2260.

1 ous les soniont i.iiios admettent qu’à l’instar dos chAUments de l’enfer, les peines du purgatoire comprendront, outre la peine du feu. la peine du dam. Kl iv empêché dont rer dans le bonheur du ciel, ollà, coi tes. pour les Ami s du purgatoire une véritable peine, qu’on lient comparer à celle du dam. Voir los commentateurs dos dist. XX el XXI, parmi lesquels, outre saint Tho mas et saint Bonaventure, il faut citer Pierre de la Palu, Richard de Médiavilla et, au 1. III. dist. XXII, q. iv. Durand de Saint l’ourcain. La plupart de ces auteurs admettent même que col te peine du - dam 1 est la principale peine du purgatoire ; quon toute hypothèse elle se tait sentir d’une façon cruelle aux plus saintes âmes, qui, mieux que les autres, comprennent do quel bien elles demeurent privées. Saint Bonaven turc toutefois lait remarquer qu’eu raison clos certitudes ri dis espérances du salut cotte peine chez les saintes àmos ne saurait être considérable. In IV m Seul., dist. XX. a. 1. q. 11.

Enfin, alors que tous les théologiens entendent du jugement le dies Domini, saint Thomas on étend la signification à tout Jugement do Dieu, et Duns Scot enseigne que ce « jour du Seigneur » est la tribulation de la vie présente, mais qu’on peut le rapporter au jugement particulier. Saint Thomas, lu epist. I ad Cor., c. m. lect. 2. éd. de Parme, t. xiii, p. 179 ; Scot, In Pum Sent., dist. XXI. q. 1.

Deux points dogmatiques très Importants complotent ooi enseignement sur le purgatoire.

Tout d’abord, le purgatoire sera plus ou moins sévère et Ion u solcii le nombre et la gravité clos pochés à expier. Alexandre do I laies, c// ;. c il., a. !, §.’!  ; S. Thomas. lu lum Sent., dist. XXI, q. 1. a. : i. qu. 3. Mais saint Thomas ajoute une considération spéciale : il est certain cpio l’un sera délivré plutôt que l’autre du purgatoire., selon le degré d’affection qu’il a eu au péché véniel. Mais précisément, si le péché véniel est moindre et l’affection plus accent née. il est possible qu’une âme demeure plus longtemps au purgatoire, tout en soutirant moins.

Ensuite tous nos théologiens sont unanimes a décla rer qu’aussitôt purifiée l’âme oui nia en possession du bonheur céleste. Albert le Grand en conclut que c’est une erreur d’enseigner, comme lo l’ont les Grecs, que personne n’entrera au ciel qu’aprèsle jugement dernier. Loc.c17., a.l0. Saint Thomas n’hésite pas à qualifier d’hé

résie 1.1 doci rine de la dilat ion dos réc penses. Suppl.,

(]. 1 ix. a. 2. Du sait qui. sur ce point, le dogme ne fut défini qu’en 1336 par Benoit XII. Voir t. n. col.

A coite synthèse, il convient d’ajouter quelques traits accessoires. Le lieu du purgatoire semble Inquté ter beaucoup les théologiens sentent iaires. Dans sa doc trine dos réceptacles dos àmos après la mort, Pierre

Lombard avait posé les bases de la discussion. TOUS

situent le purgatoire vers hcentre de la terre, a proxi

unie clo l’enfer, soit après, soil avant les limbes, s. 1 homas, In lum Seul., disl. XX I. (|. 1. a. I, « pl. 2 ; S. Bonaventure, q. vi ; Richard do Médiavilla, a. 1. q. m : Pierre de la Palu, q. m : dist. XLV, q. 1. a. 1 ; Durand de Saint -Pourçain, /" /// uln Sent, dist. XXII.

q. iv. etc. I.st ce un compartiment de l’enfer ? Rien de

m a cet égard. Mais, d’après les révélations faites

à certains personnages, surtout celles que rapporte Bède (voir col. 1227), il est probable qu’il y a deux lieux du purgatoire : l’un, selon la loi commune, est contigu à l’enfer ; l’autre, pour les cas exceptionnels, est réserve aux âmes dont Dieu permet les apparitions pour donner des leçons aux vivants ou demander des prières. Il est improbable toutefois cpie les âmes soient là OÙ elles ont commis le péché : sur ce point saint Thomas et [es sentent iaires contredisent Hugues de Saint-Victor, Voir col. 1238. A quelle distance de l’enfer seront ces lieux exceptionnels ? Saint Bonaventure aflirme que ce peut èl re en des lieux moyens, jamais en des lieux supéricurs. La théologie sera longue à se dégager de ces spéculations assez puériles.

Sans doute le feu sera l’instrument de la purification, mais Dieu se scrvira-t-il également des démons pour faire souffrir les âmes ? Saint Thomas et saint Bonaventure répondent négativement. S. Thomas, ibid., a. 2, qu. 3 ; S. Bonaventure, ibid., q. v. Pour ce dernier, les âmes sont conduites au purgatoire et au ciel par leurs lions anges. ld., ibid. Albert le Grand avait été hésitant sur ce point, tout en penchant pour la négative. Dist. XXI, a. 9. Les théologiens postérieurs suivent l’opinion de saint Thomas.

Il est assez difficile de dégager d’une manière bien nette ce que les théologiens du xme et du xive siècle considèrent comme relevant de la foi catholique, et ce qu’ils proposent comme simple opinion expliquant le dogme. L’existence du purgatoire, c’est-à-dire de peines purificatrices après cette vie, paraît bien, dans leur esprit, appartenir au dogme lui-même, puisqu’ils appuient cette doctrine sur la nécessité d’une satisfaction donnée à Dieu pour le péché véniel ou pour la peine due au péché pardonné. Le caractère temporaire du purgatoire, la libération des âmes, aussitôt leur expiation terminée, voilà deux autres vérités sur lesquelles il ne paraît pas y avoir la moindre hésitation. L’existence d’un feu réel au purgatoire est proclamée, par Alexandre de Halès, une vérité certaine appuyée sur le témoignage de tous les docteurs, sauf Augustin. La restriction que le théologien franciscain est obligé d’apporter à son affirmation est déjà par elle-même significative. Les autres théologiens se contentent d’affirmer le feu réel ou corporel, mais il semble bien que leur conviction intime soit celle d’Alexandre. Pour tout le reste, il apparaît nettement que ce soient simples opinions plus ou moins probables.

2. Les suffrages pour les morts.

La meilleure synthèse, la plus représentative de la pensée des théologiens au xme siècle, est celle de saint Thomas. Nous

nous y appliquerons presque exclusivement. Le Docteur angélique livre son enseignement sur ce sujet dans les Sentences, dist. XLV, reproduite dans la Somme, Suppl., q. lxxi. Nous citons d’après le Supplément.

L’art. 1 rappelle le fondement théologique de l’efficacité des suffrages pour les défunts : en raison de la charité qui unit les membres de l'Église et de l’intention qui permet au chrétien d’olïrir ses œuvres pour autrui, les suffrages faits par l’un peuvent profiter aux autres, quant à leur valeur impétratoire et quant à leur valeur méritoire ou satisfactoire. Saint Thomas rapporte expressément au dogme de la communion des saints cette vérité fondamentale.

En conséquence les morts peuvent être aidés par les vivants. A. 2. Saint Thomas s’appuie sur II Mac, xii, 46, et sur l’autorité de l'Église universelle déjà invoquée par saint Augustin dans le traité De cura pro mortuis gerenda. La tradition est ici représentée par le pseudo-Damascène (voir col. 1203) et le pseudo-Denys (voir col. 1206), Enfin la raison théologique invoque les liens de charité qui unissent les vivants non seulement aux vivants, mais aux morts en état de grâce..Même les suffrages offerts par des pécheurs ont une certaine

valeur, au moins ex opère opernto. A. 2 ; cf. Sum. theoL, III a, q. lxxxii, a. 6, et ici Messe, col. 1061 ; II a -II », q. lxxxin, a. 10 ; q. cxxxviii, a. 2, et ici Prière, col. 2.'18. Damnés et habitants des limbes sont exclus du bénéfice de ces suffrages. A. 5 et 7. Mais « il n’est pas douteux que les suffrages faits par les vivants ne soient utiles à ceux qui sont dans le purgatoire ». A. G. Avec Augustin saint Thomas énutnère les principaux moyens de secourir les âmes du purgatoire : prières de l'Église, sacrifice de l’autel, aumônes. A. 9. Les indulgences ne servent qu’indirectement et secondairement, si leur forme est telle qu’elles puissent leur être appliquées. Un certain nombre de questions accessoires sont abordées par saint Thomas, qui fait d’ailleurs écho à Pierre Lombard, sur l’utilité des obsèques, a. 11, la valeur respective des suffrages particuliers et des suffrages communs. A. 12-14.

On retrouve la même disposition et les mêmes enseignements chez la plupart des autres sententiaires, notamment saint Bonaventure, dist. XLV, a. 2, q. i-m. Dans son commentaire sur la dist. XX, saint Bonaventure, a. 1, q. v, envisage la manière dont la remise des dettes peut être faite aux âmes du purgatoire en raison des suffrages des vivants. Il formule la réponse qui deviendra traditionnelle dans la théologie catholique ; la remise des dettes au purgatoire ne peut se produire per modum judiciariæ absolutionis ; elle est toujours per modum suffragii. Cette doctrine laisse intact l’enseignement commun des théologiens sur la possibilité qu’ont les justes encore en vie d’offrir à Dieu en justice des satisfactions véritables les uns pour les autres. Elle s’est compliquée dans la suite de plusieurs controverses accessoires. Voir plus loin, col. 1308 sq.

Enfin, les sententiaires se sont demandé si les saints du ciel pouvaient intervenir en faveur des âmes du purgatoire. La réponse affirmative est commune ; voir les commentaires In IVum Sent., dist. XLV. Des controverses se produiront sur la manière dont les saints peuvent intercéder. Mais le fait lui-même est admis sans discussion par tous, sauf peut-être par Durand de Saint-Pourçain, dist. XLV, a. 1.

Quoi qu’il en soit des discussions sur les modalités des suffrages pour les défunts, il y a une unanimité telle parmi les théologiens sur le fait même de l’efficacité de ces suffrages et sur l’enseignement et 1? pratique de l'Église à cet égard, que leur doctrine nous apparaît bien comme le « lieu théologique » transmetteur delà foi elle-même. Aussi bien, les docteurs sont-ils sur ce point le fidèle écho des Pères, comme ceux-ci le sont du magistère lui-même.

II. L’ENSEIGNEUENI DES THÉOLOGIESS BYZANTINS DE LA FIN DE L' AGE PATR18TIQVE AU IIe CONCILE

DE LYON. — 1o La doctrine des peines positives. — Cette doctrine passe pour ainsi dire au second plan. On a exposé ici (voir t. viii, col. 1793) comment les perspectives eschatologiques sont devenues confuses avec la théologie byzantine, qui accuse un véritable recul sur l’enseignement des Pères des époques antérieures. Dans cette obscurité presque totale on ne peut que glaner quelques allusions aux peines purificatrices d’outretombe.

Faut-il voir une allusion à ces peines dans l’opinion de saint André, de Crète († 720), qui place certains pécheurs en enfer, mais avec la possibilité d’en sortir grâce aux suffrages des vivants ? C’est bien, semble-t-il, la forme que, de plus en plus, la doctrine des peines temporaires de l’au-delà prendra chez les Orientaux.

C’est bien la solution qui s’impose si l’on s’arrête à un fragment de Théodore Graptus (ixe siècle). Oratio de dormientibus, interprétant I Cor., iii, 15. Illud « salvabitur » aut intelligitw de condemnatis qui saloantur, hoc est, rémanent salvi et integri inler flammas illas adernas ; autintelligitur de illis qui spem salutis possident, quem IM RG TOI RE. LES l II ÊOLOG1 1 N> GRECS

L246

mÉmwdum et Grtgoriua Nyssenua diction tUud inter pntatua est : licel nonnulli illum calumnic&i sunt tanquiim Origenianl dogmatit omfhnn. Ce court tragmont que Grégoire, hiéromolnedeCh108(rvr siècle), .> navé de l’oubli en l’intercalant dans >a Synopsis dognuitum. Blbl. Vatlc, n. S r, est surtout connu parce qu’il est rapporté par Allatius, De utriuaque Ecdeaim mrddentalis nique orientait* perpétua m dogmatt de purgatono eonsensione, dans Migne, Theologim < ursus eompjenis.t.xviii, col. 125. Iltémoignedela distinction très nette que faisaient, au iv siècle, certains théologiens grecs entre le feu. peine du purgatoire temporaire, et le feu éternel, peine de renier. oir Fi r du puroatoiri. aol. :.

Au v Nicole. Œcumenius se rapproche davantage encore Mo notre conception catholique du purgatoire, « ans sou commentaire mit 1 Cor., m. 15. Pour lui. aucun homme n’est complètement juste : il faudra passer par oo fou. qui purifiera les légères souillures conbractées. P. <L. t. ow m. col. 676.

771 ophylæte, archevêque d’Achrida, ou Bulgarie, i fin du xie siècle, interprète Luc, ni, ."> : - Craigne* celui qui. après avoir ôté la vie, </ le pouvoir d’en : dans la géhenne. Ceux qui meurent pécheurs, dit l’exégète, no sont pas toujours envoyés dans la géhenne, niais ils sont au pouvoir de Dion, qui pont aussi lour pardonner. Je « lis cela a cause dos oblations et ilos aumônes qui sont faites on faveur des défunts : ailes no sont pas do pou d’utilité même a ceux qui sont morts coupables de graves péchés. Aussi do texte dit-il) non pas qu’après la mort (Dieu) les envoie, mais qu’il a lo pouvoir do les envoyer dans la géhenne. /' G., t. cxxiii, col. 880. l.o même exégète, Interprétant i l :.. m. 15, reprend l’explication do Jean Cbrysostomo : le pécheur sera sauvé, c’est-à-dire conservé dans le feu pour les supplices éternels a<V. ; Tr^zl-ꝟ. 81x.aç '-.i/ii’t. t. oxxiv. col. 605 A. 2o Les suffrages pour les défunts.

En revanche, en oo

qui concerne les suffrages pour les défunts, la théologie byzantine reste fidèle à la tradition séculaire del'Église. 1. Le traité anonyme De iis qui in fide dormierunt. attribue jadis a saint Jean Damascène, remonte a coup sur au moins au ix' « ècle. L’auteur se propose d’y réfuter ceux qui affirment que les prières et les œuvres pies ne sont d’aucune utilité pour les défunts. Il invoque l’autorité du II livre des Machabées, et cite des passages du pseudo-Denys, de Grégoire de anze. de Chrysostome. de Grégoire de Xysse, et enfin, par des faits historiques, s’elTorce de démontrer l’ellicacité des sufïrages. Nous y trouvons l38 légendes cernant la libération do l’enfer, grâce aux prions des vivants, de la païenne Falconille et de l’empereur Trajan. De tout l’ensemble de l'écrit se dégagent un certain nombre de points qui paraissent bien résumer la doctrine de l’auteur anonyme. Il admet : a) qu’exceptionnellement Dieu peut délivrer, eu égard aux prières des vivants, certains pécheurs de l’enfer ; b) que ledamnés reçoivent toujours quelque adoucissement de leurs peines en suite de ces prions ; < / que, selon la loi commune de la divine justice, les âmes des impies ne peuvent pas être délivrées de l’enfer par les sufs des vivants ; d) que ces suffrages sont utiles aux s qui pendant leur existence terrestre se -ont adonfort négligemment aux cem res vertueuses ou bien n’ont pas pu achever d’accomplir le bien qu’elles lient proposé : e) qu’enfin ces finies souffrent et expient dans le feu. si nous laissons de côté les libérations exceptionnelles de l’enfer isur la possibilité de

- libérations, voir Enfer, t. v, col. 99 1 si la

mitigation dos peines (voir Mitigation, t. x. col. 2002),

tout le reste peut assez facilement cadrer avec notre

doctrine du purgatoire. Sans doute le pseudo-Damas paruit étendre au-delà des limites qu’imposerait

la stricte théologie la catégorie do ceux que les prions

des vivants peuvent secourir dans l’autre monde ; ne.ni

moins il affirme le principe de l’efficacité do ces

prières a l'égard des pécheurs pour lesquels il a quoique raison d’agir avec miséricorde, Vceluanl

que les pécheurs absolument Impies et endurcis, il

Sacrifie peut être la justice a la miséricorde. Il admet

du moins deux vérités qui se complètent l’une l’autre :

d’une part, une catégorie de pécheurs susceptibles do recevoir encore leur pardon dans l’autre vie ; d’autre part, l’efficacité do nos prières on faveur do celle cale gorie. (/est la tout l’essentiel du purgatoire. P. (/'.. t. x, . col. 2 17 s, |.

2. lue doctrine plus nettement orthodoxe ressort du récit de la Continuation de Théophane louchant le

suit éternel do l’empereur iconoclaste I hcophilc. Apres

la mort do Théophile, sou épouse Théodore voulut res

taurer le culte des images, mais auparavant obtenir les prières do l'Église pour son épOUX. La réponse du patriarche Méthode fui très nette : impossible d’ob

tenir par les prières de l'Église le pardon aux âmes qui ont quitté' le monde des vivants sans bon espoir de salut et sont do toute é ideuce frappées d’une sentence de damnation. L’impératrice ayant affirmé sous la loi

du serment qu’avant « le mourir Théophile avait rétracté sou erreur et baisé dévotement les saintes Images, les prélats rassemblés n’hésitèrent plus à se faire fort d’obtenir le pardon du défunt par leurs prières. Thenphanes continuatus, t. IV, c. v, P. G., t. o.xix. col. 168 BD.

3. La doctrine des suffrages pour les morts transpire des nombreuses biographies écrites par Syméon Métaphraste. Dans la Vie de Jean l’Aumônier, n. 48, nous lisons cette phrase significative : « Il ordonnait qu’on célébrât des sacrifices pour ceux qui étaient morts, affirmant et repétant qu’aux défunts sont grandement utiles les prières et saints ministères faits à leur intention. » P. G., t. exiv, col. 937 B ; cf. Vita S. Theodori cœnobiarchæ, c. xiv, n. 17, ibid., col. 484, 485.

4. Le schisme de Photius qui devait survenir peu après ne changea rien a la question des suffrages pour les morts. Personnellement Photius était très certainement acquis à la doctrine traditionnelle de l’Orient. Comme Chrysostome, comme Théophylæte, il interprète I Cor., iii, 15, de la conservation du pécheur dans le feu éternel, qui brûle et détruit son œuvre, sans le consumer lui-même. Cf. Hergenrôther, Photius, t. iii, p. 648-649, 651.

5. Terminons par un passage de Michel Glycas, qui, mieux que le pseudo-Damascène, définit quels défunts peuvent profiter des suffrages des vivants :

Il ne faut pas douter de l’ellicacité des bonnes œuvres, que certains offrent pour des défunts pieux certes, mais pécheurs (y&ptv 'j. ; / iiatS& xyjxoxalûtv 6fe). Notre confiance se fonde avant tout, sur les disciples du Chris ! et les apôtres qui ont établi que la mémoire des morts serait faite publiquement aux troisième, neuvième et quarantième jouiet a l’anniversaire… Et ne me dites pas : Puisque les sacrifices sont oITerts universellement a Dieu pour les défunts, donc Ions aussi parviendront au salut. Pour dissiper cette objection, voici, avant tonte autre, l’opinion du grand Denys, qui enseigne parfaitement lesquels, parmi les péchés, peuvent ii. pardonnes, lesquels ne reçoivent pas de rémission. Car. de ceux qui quittèrent la vie encore souillés de péchés, voici

ce qu’il « lit : S’ils ne sont souilles que 'le péelies légers, les défunts recevront utilité des bonnes œuvres faites a leur intention ; mais, si leurs péchés sont graves. Dieu les repoussera loin d’en.. (Cf. Deeccfe ». hierarch., c vii, 7. P. <., t. m. coi. 561. i Et le grand Épiphane ajoute', dans s. m Pananon : Les pneus sont utiles pour les d. -fonts, bien qu’elles

n’effacent pas les grands délits. ill.rr.. LXXV, 7, 1'. ('., t. Mil. eol. 513.)

Cette citation de Glycas est tirée de l’ouvrage In divins Scripturse dubia, epist. xix, P. G., t. crvm, col. ' » 21-928. De plus, Glycas place ces pieux pécheurs 124'

pukcatui m.. M- : 11e conçu. i : ni- ; lyon

1248

dans l’enfer (èv iJcô'o’j) et éloigne d’eux, comme d’ailleurs des démons et des damnés, la peine du feu avant le jugement universel. Ibid., epist. xxii, col. 929. Enfin, tout comme le pseudo-Damascène, Glycas admet que même certains impies damnés pourraient être, très exceptionnellement, délivrés de l’enfer par les prières de certains saints personnages. Epist. xx, col. 929. Ces textes sont intéressants ; ils présentent bien la doctrine des Orientaux sous la forme qu’elle va adopter désormais d’une façon presque générale.

/II. LA DOCTRINE DU PURGATOIRE AU IIe CONCILE DE LYON ( 1274). — 1° Les « travaux d’approche » au point de vue doctrinal. — Sur l’histoire même du concile et des raisons, plutôt politiques que doctrinales, qui incitèrent Michel Paléologue à accepter l’union avec l'Église romaine, on se reportera à Hefele-Leclercq, Histoire des conciles, t. vi, p. 153 sq. Mais déjà bien avant Grégoire X la pensée des papes avait été de travailler à la réconciliation des deux Églises. De là, entre Occidentaux et Orientaux, certaines discussions doctrinales que nous pouvons légitimement, par rapport au II c concile de Lyon, qualifier de travaux d’approche.

1. Sous Grégoire IX.

Nous possédons, au moins en partie, la relation d’une controverse sur le feu du purgatoire qui se produisit, à la fin de l’année 1231 ou au début de 1232, au monastère grec de Cazoles, près d’Otrante, entre frère Barthélémy, un des légats du pape pour instaurer l’union des Églises, et Georges Bardane, évêque dissident de Corcyre, que Manuel Comnône avait envoyé comme ambassadeur à l’empereur Frédéric II. Sur le premier voir G. Golubovitch, Biblioteca bio-bibliograftea délia Terra santa, t. i, Quaracchi, 1906, p. 170-175. Sur le second, voir E. Kurtz, Georaios III Bardanes, Metropolil von Kerkyra, dans Byzanlinische Zeitschrijt, t. xv, 1896, p. 603613. Traversant l’Italie, Georges Bardane était tombé malade et avait dû séjourner dans le monastère. Frère Barthélémy vint le visiter pour l’entretenir de l’union et l’interrogea sur le sort de ceux qui meurent sans avoir pu accomplir sur terre toute la pénitence (rà è7UTÎu.ia) imposée par le confesseur. Le franciscain exposa au prélat grec la doctrine catholique sur le purgatoire et la purification par le feu des âmes qui se trouvent en un état intermédiaire entre les élus et les damnés, invoquant l’autorité des Dialogues de saint Grégoire. Le prélat grec remarqua que le Latin enseignait non seulement le feu du purgatoire, mais la rétribution immédiate après la mort, et il répliqua aussitôt en enseignant ouvertement la dilation des rétributions jusqu’au jugement général, rejetant le feu du purgatoire comme une doctrine entachée d’origénisme. Le colloque des deux interlocuteurs est partiellement conservé, sous forme de dialogue, dans deux mss., le Barber, græc. 297 et le Laur. grsec. 36, n. 3. La doctrine des Latins ne semble pas avoir été comprise par l’auteui de la relation.

Toujours est-il que ce fut là le point de départ de la controverse générale. Car bientôt non seulement Georges Bardane consigna par écrit son entretien contradictoire avec frère Barthélémy, mais le patriarche Germain 1 1 lui-même (qui demeurait alors à Nicée avec l’empereur grec), sans dout, , averti par l'évêque de Corcyre, écrivit un traité contre le purgatoire, traité aujourd’hui perdu. Du côté des Latins, la rumeur se répandit que les Grecs niaient le purgatoire et retardaient la rémunération des âmes jusqu’au jugement dernier. Des écrits furent composés pour réfuter cette double erreur.

2. Sous Innocent IV.

- Un de ces écrits eut pour auteurs les dominicains de Péra. Il est intitulé Contra errores Grœcorum, titre qui vraisemblablement inspirera environ dix ans plus tard saint Thomas d’Aquin. (Dans l’opuscule Contra errores Grœcorum de saint Thomas, la question du purgatoire vient au e. i xix, cf. Feu nu purgatoire, col. 2254.) Ce traité, des domi nicains de Péra, paru en 1252, rappelle, dès le début, que le deuxième article sur lequel les Grecs dînèrent des Latins est le purgatoire parce qu’ils aflirment : de/unctorum animas nec puradisi gaudiis per/rui, nec in/ernorum suppliciis vel igné purgalorio cilra diem judicii, oui unie lalam sententiam extremam judicis posse subjacere. P. G., t. cxx, col. 487. Après avoir attribué la paternité de cette double erreur à André. archevêque de Ccsarée(attribution d’ailleursinexactej, les auteurs en entreprennent la réfutation. Pour prouver la rétribution immédiate soit des bons, soit des méchants, ils invoquent les autorités de Jean Chrysostome et d’Athanase. Col. 511-513. Puis ils abordent directement la question du purgatoire, nettement enseignée dans I Cor., ni, 11-15. Ce feu est celui du purgatoire. Pour le démontrer, ils s’appuient sur l’histoire de sainte Macrine, sœur de saint Basile, sur les textes de Basile lui-même et du pseudo-Damascène, col. 515-516, et enfin ils rejettent l’interprétation de Chrysostome sur le salvabitur per ignem. Col. 515-517. Mais, ailleurs, déjà sous le pontificat d’Innocent on put se rendre compte que la croyance des Grecs n'était peut-être pas si éloignée qu’on pouvait le croire de la doctrine catholique. Une lettre d’Innocent à Odon, cardinal de Tusculum, son légat dans l'île de Chypre, en fournit un témoignage irrécusable. Cette lettre constitue la meilleure préface qu’on puisse donner aux conciles de Lyon et de Florence :

Cum Veritas in Evangelio asserat quod si quis in Spiritum sanctum blasphemiam dixerit, neque in hoc s ; eculo, neque in futuro dimittetur ei : per quod datur intelligi quasdam culpas in pnesenti, quasdam vero in futuro sæculo relaxari ; et Apostolus dicat quod iiniiisciijusque opus, quale sit, ignis probabit, et eujus opus arserit detrimentum patietur, ipse antem salvus erit, sic tamsnper ignem (I Cor., ni, 15) : et ipsi Græci vere ac indubitantercredereet allinmre dicantur animas illorum, qui suscepta psenitentia, ea non peracta, vel qui sine mortali peccato, cum venialibus tamen et minutas decedunt, purgari post mortem et posse sufîraghs Ecclesia ? adjuvari : nos, quin Incum purgalionis hujusmodi dieunt non fuisse sibi ab coruin docloribus certo el proprit) nomine indication, illum quidem juxta traditioncs et auetoritates sanctorum Patrum purgatorium.nominantes, volumus quod de ccetero ujtud illos isto nomine appelletur. lllo enim transitorio igné peccata utique, non tamen criminalia seu capitalia, quæ prius per psenitentiam non fuere remissa, sed parva et minuta purgantur ; quæ post mortem etiam gravant, si în vita non fuerint relaxata. Mansi, Concil., t. xxii. col. 581-582.

Puisque la Vérité affirme dans l'Évangile que, si quelqu’un blasphème contre l’JCsprit-Saint, ce péché ne lui sera remis ni en ce siècle ni dans l’autre : par quoi il m. us est donné de comprendre que certaines fautes sont pardonnées dans le temps présent, et d’autres dans l’autre vie ; puisque aussi l’Apôtre déclare que l'œuvre de ciiacun, quelle qu’elle soit, sera éprouvée par le feu et que, si elle brille, l’ouvrier en souffrira la perte, nuis lui-même sera sauvé, comme par le feu ; puisque les Grecs eux-mêmes, dit-on, croient et professent vraiment et sans hésitation que les âmes de ceux qui meurent ayant reçu la pénitence sans avoir eu le temps de l’accomplir ou qui décèdent sans péché mortel, mais coupables de véniels ou de fautes minimes, sont purifiées après la mort et peuvent être aidées par les suffrages de l'Église, nous, considérant que les Grecs affirment ne trouver chez leurs docteurs aucun nom propre et certain pour désigner le lieu de cette purification, et que, d’autre part, d’après les traditions et les autorités des saints Pères, ce nom est le purgatoire, nous voulons qu'à l’avenir cette expression soit reçue également par eux. Car, dans ce feu temporaire, les péchés, non certes les crimes et fautes capitales, qui n’auraient pas été auparavant remis par la pénitence, mais les péchés légers et minimes sont purifiés ; s’ils n’ont pas été remis au cours de l’existence, ils chargent l'âme après la mort. I.'.'

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. LE 11 1 CONC1L1 Dl LYON

I

Il ne s’agit pas Ici sans doute d’un document pontifical ex cathedra. Mais il étal ! Intéressant de citer Inté paiement ce texte d’Innocent l parce qu’il montre clairement que le pape ne voyait, entre l’affirmation des l atins et la position des Grecs, qu’une différence verbale.

l luttent M. iipourparlers étaient en

- entre l’autorité romaine et l’empereur Michel Paléologue et déjà la profession dt du qui de val I Être sanctionnée à Lyon était préparée et proposée a l’em pereur. Voir Lyon fil » concile acuméniqm l.col. 1382.

.1 mort du pape empêcha la réalisation immédiate de l’union, rendant le long interrègne pontifical, les cardinaux chargèrent leur collègue Rodolphe Gros parmi, évéque d’Albano, de régler l’affaire de l’union si la chose était possible, mais toujours avec le texte préparé par Clément 1 (1270).

n </ « foi des Grecs au concile de Lut n. La profession de foi prépare* par Clément l tut admise sans discussion. Non-- n’en reproduisons ici que la partie concernant les erreurs des Grecs but l’eschatologie. Noir le texte latin, t. ix. col. 1385.

Mais, .1 cause de diveises erreurs que certains ont Introduites par ignorance et d’autres par malice, elle (Il glise romaine 1 dit et proclame que ceux qui tombent dans le péché api es le baptême ne doivent pas être rebaptisés, mais que, par une vraie pénitence. Ils obtiennent le pardon de leurs péchés. Que m. vraiment pénitents, Os meurent dans la charité avant d’avoir, par de dignes fruits de pénitence,

.it pour ce qu’ilont commis ou omis, leurs âmes, comme nous l’a expliqué Irére Jean, sont purifiées après leur mort, par des peines purificatrices ou txpiatrices et, pour l’allégement de ces peines, leur ser> ent les suffrages des Sdéles ivants, a savoir les sacrifices des messes, l< - prières, les aumônes et les autres a m res de piété que les Bdèlesont coutume d’offrir pour les autres fidèles selon les institutions de l'Église. 1 es âmes de ceux qui, après avoir reçu le baptême, n’ont contracté absolument aucune souillure du péché,

- aussi qui. après avoir contracte la souillure du 1 écl é, en ont été purifiées ou pendant qu’elles restaient dans leur corps ou après avoir été dépouillées de leur cor] s, ci mine il

ilit plu> haut, sont aussitôt revues dans le ciel.

Sur ce texte, quelques remarques littéraires sont nécessaires.

Le frère Jean doni il est question est le franciscain

Jean Parastron (de Balastri), Grec d’origine, habile

dans la langue grecque et zélé pour l’union. » Cf.

achymère, M'./a/>. IltxXaioXoYOÇ, I. V, c. m.

P. G., t. < m nui. col. 823.

Le texte latin correspondant aux deux mots que nous avons soulignés est bien : partis purgaloriis seu ealharlenis. C’est là le texte vulgarisé. Dcnz.-Iiannv.. n. 1° 1. Cavallera, n. 1 i r >">. L’expression est sage et prudente, car elle évite les controverses sur le lieu du pur : e ou sur le jeu. Dans le texte latin des professions de foi envoj ées par Mie lu 1 Paléologue, en 1277 an pape XXI, en 1277 au pape Nicolas III. on lit : pænis purgatnni seu eatharterii. A. Theiner et Miklosich, iwienta spi < lantia ad unit 1 m Ecclesiarum, ienne, us le texti la prof( '-imi de foi

Ironie Paléologue, 1277. on lit : ->, ::L. : —.

. Ibid., p. 17. Dans 1 elui de

la professji.il de foi du patriarche Jean, on lit :

(, -iz-ꝟ. 6<4va-rov xv’iy séeti… ibul.. ] leçons devaient être

tenues pour vraies, il s’ensuivrait que la volonté expriInnocent IV concernant l’appellation « lient été sanctionnée par le concile. Mais la et uteuse que le texte rapporte par I heini r, et < omme la quest ion du lieu des

1 tement é< artée pai droit de u point de i

klosich. An point de vue dogmatique, le texte imposé aux

DICT. t)E TIIÉOL. CATIIOL.

Grecs représente a coup sûr la doctrine catholique, il est l'équivalent d’une définition es cathedra. C’est la toi de l'Église catholique qui est Ici proclamée. Toute lois, en ce qui concerne l’admission Immédiate au cl< 1 des âmes complètement purifiées, la formule mox m cstlum recipi trouvera dans la définition de Benoît XII de nouvelles et nécessaires précisions.

La i"i de l'Église, en ce qui concerne strictement le purgatoire, s’attache uniquement a deux points : dans l’autre n ie. les âmes justes, mais non encore complète ment purifiées, devront subir des peines purificatrices. L’allégement de leurs peines est obtenu par les sui (rages des vivants, sacrifices de la messe, prières,

aumônes et autres œuvres de piété, d’ailleurs consa « rées par l’usage et la pratique universelle de l'Église.

Du caractère temporaire des peines purilical riecs il

n’est rien défini directement, mais ce caractère tem poxaire ressort avec évidence du fait qu’aussitôt après leur purification les âmes Mini reçues immédiatement

dans le ciel.

Désormais l'Église s’en tiendra a ces formules générales : ni le lieu ni le feu du purgatoire ne seront envi

sa^cs dans ses définit ions.

Après le concile de Lyon.

1. Une intervention

pontificale à l'égard de l'Église arménienne. - I.e pape Benotl XI 1. sollicité par les Arméniens de leur envoyer du secours contre les Sarrasins, répondit en exigeant tout d’abord leur renonciation à certaines erreurs, dont la liste avait été dressée d’après des dépositions assermentées d’Arméniens et de Latins ayanl vécu en Arménie et d’après quelques livres arméniens. Cf. F. Tournebize. Les cent dix-sept accusations présentées à Benoît XII contre les Arméniens, dans Reo. île l’Orient chrétien, t. xi. 1906, p. 163-181, 274-300, 352-370, et ici Benoit XII. t. ii, col. 696.

En ce qui concerne l'état des âmes après la mort et le purgatoire, voici les erreurs reprochées aux Arméniens. Axant le jugement général, les âmes n’entrent pas au ciel et ne vonl pas en enfer ; elles restent sur cette terre OU dans l’air, comme les démons. A. 7, l.">. 23.31. En conséquence, pas de purgatoire : Item quod Arment communiler lenent. quod in alio sseculo non est purgatorium animarum, quia, ut dicunt, si christianus conflteaiur peccata sua, ornnia peccata ejus et pâma pec calorum et dîmitluntur. Sec etiam ij/si orant pro defunctis. ut eis in alio sseculo peccata eis dimittuntur, sed genefaliier orant pro omnibus mortuis, sicut pro beata Maria, apostolis… Dcnz. l'.anmv., n. 535.

La réponse des Arméniens fut donnée au concile de Sis. en 1342. Voir Ilelele -I.eclercq, op. cit., t. vi, p. 861. La 1 épouse montre la doctrine arménienne assez ferme sur l'état des âmes justes et des âmes pécheresses après la mort : les finies pécheresses descendent en enfer, les âmes justes vont toutes à la vie éternelle, comme il est dit souvent dans la liturgie. Quant au purgatoire, la doctrine est bien ce qu’elle pouvait être après le concile de Lyon. Les Arméniens n’admettent que depuis quelque temps le mot purgatoire, mais, en revanche, ils ont professé de tout temps la doctrine correspondant à ce mot. l.i le synode de sis apporte des preuves à l’appui de son affirmation. Ils p rient pour les défunts pécheurs, mais il est Taux qu’ils prient pour Marie et pour les saints du ciel afin qu’ils soient rendus participants du repos éternel. Cette prière demande seulement que les saints ne conçoivent pas, à cause de nous, de la tristesse et du trouble, c’est-à-dire que nous restions libres de tout péché. Voir le texte des articles incriminés et des réponses dans Mansi, Concil., t. xxv, col. 1188.

L’affaire devait traîner en longueur : l’union ne fut scellée qu’au concile « le Florence. Le même pape avait d’ailleurs fait une allusion très claire au purgatoire, dans s.-, bulle Benedictus Deus, en parlant des 'hues qui,

T. — Xllf — W. après leur mort, auraient achevé [de se purifier]. Voir ici, t. ii, col. (i.’i.S.

2. Continuation des controverses théologiques.

Les adversaires de l’union ne manquèrent pas après le concile. En ce qui concerne la croyance au purgatoire, les principaux adversaires sont Matthieu Koïestor Ange Panarétos, théologien de la seconde moitié du xiv c siècle, et Siméon de Thessalonique († 1429).

Le premier a écrit un traité sur le feu du purgatoire, réfutation du c. ix de l’opuscule de saint Thomas, Declaratio… Voir col. 1217. Malheureusement il est encore inédit. Son titre est ©copia çiXoaocpo’j toù

  • A)(îvou Xoyoç rapi. xaOapTYjpîou 7ropôç » tal repôç toùtov

àvnŒaiç MaxOatou Koioâafiopoç toù Ilavxpé-rou. Sur les manuscrits voir P. Risso, dans Romae l’Oriente, t. viii, 1914, p. 178. Cf. Panarétos, t. xi, col. 1844. La diatribe de Siméon de Thessalonique contre le feu du purgatoire se lit dans son Dialogus contra hæreses, c. xxiii, P. G., t. clv, col. 116 D. C’est, dit-il, en substance, l’enseignement de tous les saints : aucun d’entre eux ne reconnaît pour les âmes pécheresses d’autre peine que celle d’être enfermées, comme en une prison, en des lieux de désolation, dans la tristesse, en attendant leurs peines ; les âmes des justes, au contraire, sont dans des lieux de lumière et de réjouissance attendant le bonheur espéré, avec la réunion à leur corps. Dieu accorde un certain soulagement dans leur tristesse et leur crainte à ceux qui ont quitté cette vie dans des sentiments de pénitence véritable mais imparfaite. Il n’y a pas de feu qui les purifie, comme l’affirment les Latins, mais simplement les prières sacrées et les sacrifices offerts par l’Église à Dieu à leur intention…

En revanche, l’affirmation de l’efficacité des suffrages subsiste toujours. On vient de la trouver même dans l’attaque de Siméon de Thessalonique. Cette utilité des prières pour les défunts se retrouve affirmée par Georges Pachymère dans ses annotations au De eccles. hierarch. du pseudo-Denys, c. vii, § 6 et 7, P. G., t. iii, col. 576-577, 580, et par Nicolas Cabasilas, Liturgise expositio, c. xxxiii, P. G., t. cl, col. 441 sq. Un seul théologien expose pleinement la doctrine catholique parce que, catholique de sentiments, il a reçu des dominicains une forte empreinte doctrinale et qu’il s’est fait dominicain lui-même ; c’est Manuel Calécas († 1410). Dans son Adversus Grœcos libri, dont nous ne possédons au complet que le texte latin (P. G., t. clii), un chapitre du t. IV, est consacré au feu du purgatoire, col. 228 sq. L’auteur établit d’abord que le dogme du purgatoire est pour ainsi dire postulé par le fait des pénitences imparfaitement accomplies sur la terre, col. 229 BC, et qu’il est impliqué dans la pratique des prières pour les défunts. Col. 229 C. On ne prie, en effet, ni pour les élus ni pour les damnés. Col. 229 C. A supposer même qu’il n’y ait que des péchés légers à expier, le purgatoire répond à la nécessité d’effacer tout ce qui peut nous empêcher de nous unir à Dieu, col. 232 BC ; il faut donc conclure à l’existence du « feu du purgatoire ». Col. 232 C. Si ce feu n’existait pas, ce serait équivalemment admettre qu’un mal reste impuni, ce serait aller contre Dieu et le détruire. Col. 233 AB. Les prières faites par l’Église à l’intention des défunts, demandant pour eux le repos et la paix, démontrent l’existence de ce lieu de souffrances et d’expiation. Col. 233 D, 236 AB. Jusqu’ici, par une heureuse fortune, nous avons, parallèlement au texte latin, l’original grec. Mais du dernier paragraphe, Migne ne donne que le texte latin. Il s’agit de I Cor., iii, 13-15, sur la signification du mot « feu ». L’auteur rapporte l’interprétation de Chrysostome, qu’il repousse, et s’attache à démontrer que Grégoire de Nysse a fourni la véritable explication, un feu temporaire, dans ses effets, et qui n’est pas le feu de l’enfer. Col. 235-236 CD.

Si tous les Orientaux avaient eu la mentalité de Manuel Calécas, l’union eut été facile, elle eût été d’avance réalisée. Malheureusement telle n’était pas la réalité. On va le voir en étudiant les actes du concile de Florence.

IV. LA DOCTRINE DO PUHQAT)UŒ AV CONCILE

de Florence (1439). — Le 8 février 1438, l’empereur Jean VII Paléologue et les représentants de l’Église grecque débarquaient à Venise pour se rendre à l’invitation que leur avait adressée le pape Eugène IV. Voir t. vi, col. 24-25. Dès la iii* séance du concile (encore à Ferrare), les questions débattues entre Grecs et Latins furent abordées. La question du purgatoire vint la première en discussion. Les Actes de cette discussion ont été enfin publiés en 1920 par Mgr Petit, dans la Patrologia orientalis, (P. O.), t. xv. Ils comprennent six documents, en grec et en latin : 1° exposé de la doctrine catholique par le cardinal Julien Cesarini ; 2° mémoire de Marc d’Éphèse en réponse aux Latins ; 3° mémoire de Bessarion [ce mémoire, publié une première fois à Bàle, avec une traduction de Jean Hartung, dans Orthoioxographa theologise sacrosanctæ ac syncerioris fidei doctores numéro LXXVI, Bâle, 1555, p. 1376-1390, parut ensuite, en simple traduction latine due à Vulcanius, Leyde, 1595 ; il eut d’autres éditions et s’égara au xvir 3 siècle sous divers noms ; Arcudius l’attribuait au moine Barlaam, De purgatorio igné adversus Barlaam, Rome, 1637 ; il fut ensuite attribué à Nil Cabasilas, voir ici t. ii, col. 1296 [Mgr Petit le restitue à Bessarion ] ; 4° réponse aux Grecs par le dominicain Jean de Turrecremata ; enfin 5° les précisions réclamées par les Latins sont apportées par les deux derniers mémoires, dus à Marc d’Éphèse. Ces documents ont été publiés d’après le ms. grec 653 de la bibliothèque Ambrosienne ; le texte latin a dû être traduit du grec par Mgr Petit. Récemment le P. Hoffmann a découvert plusieurs pièces inédites relatives au concile de Florence à la bibliothèque Saint-Marc de Venise : deux de ces documents sont le texte latin original des documents i et iv susindiqués. Orientalia christiana (O. C), t. xvi, 1929, n. 3 ; t. xvii, 1930, n. 2. Nous suivrons, dans notre exposé, l’ordre même des documents et nous conclurons par le texte officiel du concile. Nous nous inspirerons du travail d’A. d’Alès, La question du purgatoire au concile de Florence en 1438, dans Gregorianum, 1922, p. 8-50.

1° Exposition de la foi catholique par le cardinal Cesarini (P. O., t. xv, p. 25-32 ; O. C, t. xvi, p. 285-298). — La croyance de l’Église catholique est formulée d’après le texte du IIe concile de Lyon. Le texte édité par le P. Hoffmann, porte pœnis purgaloriis, op. cit., p. 286 (31). La croyance de l’Église romaine s’appuie sur sept arguments : II Mac, xii, 46 ; Matth., xii, 32 ; I Cor., m, 13-15, le feu dont il est question ici ne pouvant s’appliquer aux damnés ; la tradition de l’Église catholique, latine et grecque, qui prie et toujours a prié pour les morts ; sans purgatoire, cette prière serait vaine ; l’autorité de l’Église romaine qui toujours a tenu cette doctrine dès le temps de l’union avant le schisme ; l’enseignement des Pères latins et grecs ; enfin les exigences de la justice divine, qui ne doit laisser aucune faute impunie et qui proportionne l’expiation au péché. Cf. Deut., xxv, 2 ; Ez., xxxiii, 14, 15 ; Sap., vii, 25.

Le dossier patristique renferme plusieurs apocryphes. Le P. d’Alès a fait le triage des indications fournies par le document conciliaire (op. cit., p. 12-13). Nous reproduisons son intéressante note.

Ve concile œcuménique (Gonstantinople, 553), Act. iii, Mansi, t. ix, col. 201-202 : (Pseudo-Augustin, en réalité Césaire d’Arles), Serm., civ, 1, P. L.. t. xxxix, col. 1946 ; S.Augustin, Deciv.Dei, XXI, 13 et 20, P. L., t. xli, col. 723 et 738 ; S. Augustin, De cura prn morluis gerenda, i, 3, P. L., t. XL, col. 593 ; iv. 6, col. 596 ; (Pseudo-Augustin), '

    1. PURG loi RE##


PURG loi RE. Il CONCILE DE FLORE NC l

L254

ZV vera < ! Li/>it pcrnilentia, x n.. ;. r. L, t. xi, col. 1 1J7… ; uo, 1 1 wii. 2. r. I.. t. ww iii, roi. 936 ; S Unbroisc Vmbrosiaster), In I Cor., iii, i'. L. t. wii, …iu-W-i.i-.iixl. niai., IV, 39, P. L, I.i wii. col. 396 AB ; S. Basile, dans I.. / iturgie de

laiVnlecdte, _ éd., Venise, 1862, p. 375, 376 ; Liturgie des mori>. p. 407 : s. tirégoire de Nysse, De consolation » <i data aiiiniitrinrt posl marient, i'. ('.. t. ii, col. 97 C, 100 A : lie nwriitis. id., col. 524 B ; (Pseudo-Denys), Ebeftt. Mer., VII, I. P. <>'. t. m. col. 560 B ; S. Êplphane, ll.ir.. i, s, . t. mii. col. 513 B ; (Pseudo-Damascène), De (h gui in fUc dormieritnl, iii, 7'. (".. t. x, . col. l ! 19, cité pat saint Thomas, In ; » « Sent., dist. M V, q. u a. 1 ; Théodoret, In 1 Cor., iii, i'. G., t. i . col. 1 !.'>2. note 2 : * tuutlientinidouteuse).

le Mure d'Éphise (P. 0., p. 39-60). — Après avoir énoncé la doctrine des Grecs sur la vie d’outre-tombe, Marc reprend les trois arguments d'Écriture apportes par Cesarini. les doux premiers seraient étrangers à la question du purgatoire ; le troisième est inefficace et favorable à l’origénisme. Marc passe sous silence les arguments tirés de la tradition des Églises ; il discute les preuves tirées des témois patristiques et rejette le septième argument : la raison théologique. A son tour il prend l’offensive et énonce onze chefs d’argument. Ce mémoire de Mare fut repris dans le mémoire suivant, par Bessarion qui fusionne en une seule réponse la riposte de Marc et la sienne propre.

3° Mémoire de Bessarion (Mare et Bessarion fusionP. 0., p. 61-70). — L’inspiration en est plus chrétienne, et la forme plus courtoise. Document de première valeur, qui souligne les profonds malentendus de l’Orient et de l’Occident sur la question du purgatoire et qu’il faut examiner de près.

Les Grecs, déclare Bessarion, n’ont trouvé chez aucun de leurs docteurs une croyance à l’expiation temporaire accomplie, après cette vie, par le feu. D’autre part, ils admettent, selon l’enseignement de leurs docteurs, que les prières de l'Église sont utiles aux défunts. La controverse du purgatoire se ramène, pour Bessarion, à deux questions : 1. Y a-t-il, après cette vie, une rémission des péchés ? 2. S’il existe une rémission des péchés dans l’autre vie, comment s’accomplit-elle ? Est-ce par un pur elTct de la miséricorde divine, acquiesçant aux prières de l'Église ; est-ce par le moyen d’un châtiment ? Et, s’il s’agit d’un châtiment, de quel châtiment ? La captivité, la crainte, les ténèbres, l’ignorance, ou bien le feu, un feu réel et matériel ?

Sur ce dernier point la doctrine grecque est bien arrêtée : pas de feu matériel et temporaire. Si l’on admettait cette sorte de feu, on pourrait craindre de iser l’erreur origéniste qui nicl'éternitédes peines. Sur le premier point les Grecs admettent qu’après cette vie il y a place pour une rémission des fautes vénielles. Reste donc un unique point à débattre : comment s’accomplit cette rémission. Bessarion, sans apporter une solution complète, insiste surtout sur ce qui lui semble inadmissible dans l’enseignement des Latins touchant le feu purificateur.

Il reprend plusieurs arguments du mémoire de Cesarini. Les deux textes scripturaires, II Mac, xii, 46, et Mat th., xii, 32, visent bien une rémission de certains péchés dans l’autre vie, mais laissent intacte la question de la purification par le feu. Quant à I Cor., ni, 11-15, les Grecs l’expliquent conformément à l’interprétation de saint Jean Chrysostome, qui possède une autorité hors de pair, soit comme exégète, soit comme disciple passionné de saint Paul. La tradition de l'Église de Constantinople affirme que l’apôtre Paul vint en personne l’instruire : Proclus, disciple et successeur de Chrysostome, l’a contemplé de ses yeux dans une vision mystérieuse. Or, Chrysostome entend

ce texte du feu éternel qui conserve etne rend pas ses victimes, s.uiii Augustin, sans doute, a expliqué différemment ce texte ; mus, dans l’interprétation d’un

texte grec, l’opinion d’un l'ère grée tel que saint Chrysostome doit être préférée. Saint Augustin avait le SOUCl de confondre l’erreur de ceux qui, étendant ce

texte à toutes sortes de fautes, supprimaient en fait

l'éternité des peines de l’enfer. Il ne trouva rien de mieux que d’admettre Ici un feu temporaire. Il a pris le change sur le sens du mot o-coOrjo-eToa ; or, les Grecs savent que oco^eaOai, wcornpta, expriment simplement

la conservation d’un être. Ainsi l’ont entendu en cet

endroit Jean Chrysostome et tous les Pères grées. Pour dirimer la controverse, il suffit de se reporter aux Écritures, à Rom., xiii, 12, aux autres passages OÙ il est question du feu du jugement dernier, Dan., vii, 10 ; Ps., xlix, 1 ; xevi, 2 ; II Pelr, iii, 12, 15. Commentant le ps. xxviii, 7, Basile montre le feu allumé par la divine justice et produisant un double effet : d’une part, il fait resplendir les vertus des justes, d’autre part, il toiture les impies qui lui appartiennent pour toujours. Pour saint Paul, ce feu consumera les œuvres des impies, qui seront perdues ; mais l’impie sera réservé pour le châtiment éternel : o-coOïjæxai..

Quant aux textes des Pères, les uns, ceux qui affirment que la prière des vivants est utile aux trépassés pour la rémission de certaines fautes, sont reçus avec vénération par les Grecs. Mais ils ne prouvent pas le feu du purgatoire. Le texte de Théodoret est introuvable dans ses œuvres. Le seul qui soit vraiment favorable aux Latins est le texte de saint Grégoire de Nysse. Mieux aurait valu, pour l’honneur de ce Père, que son autorité fût passée sous silence, car ici Grégoire, quelle que soit sa sainteté, a participé à la faiblesse humaine et s’est trompé. A son époque, l'éternité des peines était encore une question sur laquelle l’enseignement de l'Église n'était pas fixé. Grégoire admet donc l’apocatastase des pécheurs, doctrine nettement origéniste. D’autres personnages, comme Irénée, Denys d’Alexandrie, ont erré aussi avec leur époque. Grégoire le Théologien (de Nazianze) ne dit-il pas lui-même, dans son discours sur le baptême, après diverses considérations sur le feu éternel : « A moins qu’on ne préfère une doctrine plus miséricordieuse et plus digne du souverain Juge. > Oral., xl, n. 36, P. G., t. xxxvi, col. 412. Mais le Ve concile œcuménique condamna cette erreur. Si Grégoire de Nysse a enseigné l’apocatastase, il a erré, et les Grecs aiment mieux s’attacher à l’enseignement de l'Église et à la règle des Écritures qu’aux assertions particulières de tel ou tel docteur. La distinction de deux châtiments et de deux feux n’est conforme ni à l'Écriture ni au Ve concile œcuménique.

Sans doute la purification par le feu se lit expressément chez saint Augustin, saint Ambroise, saint Grégoire-Dialogue ; mais ces auteurs latins, développant en latin des vues personnelles, ne s’expriment pas avec une parfaite clarté. Dans leur écrits connus en Orient, on ne trouve qu’une chose certaine : l’utilité pour les défunts des offices et prières de l'Église. II y a peu d’années que les œuvres d’Augustin et de Grégoire ont été traduites en grec ; comment les Grecs pourraient-ils connaître ce qu’ils n’ont jamais vu ni entendu ? D’ailleurs l’enseignement des Latins n’est qu’un enseignement de circonstance : désireux d'éliminer une erreur pernicieuse, la rémission finale de tous les péchés, ils se sont jetés dans la voie moyenne, accordant le moins pour ne pas céder le plus. Même en admettant leur parfaite sincérité, il faut s’en tenir à une doctrine contraire, qui découle avec certitude du texte de l’Apôtre, commenté par saint Chrysostome, et expliqué par tout le contexte.

Les révélations et les faits miraculeux rapportés par 12.-).')

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. L V. « > N C I IK Dli FLOMK.NCK

L256

Grégoire au IVe livre de ses Dialogue » soul ils autre

chose que des allégories ? Quoi qu’il en soit, l'Écriture ne prouve pas la thèse des Latins, et saint Grégoire la

ruine lui-même en disant que les tantes légères des justes peuvent être ou bien compensées dés cette vie par de bonnes œuvres, ou bien expiées a la mort, par la crainte, ou enfin remises après la mort par l’elîet des prières offertes à leur intention.

L’autorité de l'Église romaine, à elle seule, ne sutfit pas à dirimer la controverse : si le concile est réuni, c’est que précisément on entend bien ne pas s’en tenir à renseignement d’une Église. Si l’on persiste à juger d’après les coutumes particulières, chaque parti pourra toujours opposer une fin de non-recevoir aux raisons de l’adversaire, et il n’y aura pas de raison d’en finir.

Enfin les Latins font appel à la raison et tirent argument de la justice divine. Les Grecs ne sont pas à court d’arguments pour appuyer leur sentiment. Présentement ils se bornent à esquisser quelques-unes de leurs raisons. Suivent dix chefs d’arguments, empruntés textuellement, sauf un seul (le troisième), au mémoire de Marc d'Éphèse (Marc avait onze chefs d’arguments ; Bessarion a laissé tomber le premier et le neuvième et en a ajouté un, le troisième, de son propre cru). Nous reproduisons ici les dix arguments, dans la traduction du P. d’Al ès, op. cit., p. 20-21 (P. O., p. 56-60, p. 76-79).

(Le premier argument de Marc d'Éphèse était : Si l’amour divin purifie les âmes ici-bus, pourquoi le même amour ne les purifierait-il pas après cette vie. A quoi bon le feu du purgatoire ?)

1. Il convient moins à la bonté de Dieu de négliger un léger mérite que de punir une légère faute. Or, le peu de bien qui est dans les grands pécheurs n’obtient aucune récompense, à cause de la surabondance du mal : donc il ne convient pas que le peu de mal qui est dans les saints soit puni, en dépit de la prépondérance du bien ; car, en l’absence de faute grave, une faute légère apparaît négligeable. Donc il ne convient pas d’admettre un feu purificateur.

2. Il en est du peu de mal des bons comme du peu debien des méchants. Mais le peu de bien des méchants ne saurait appeler une récompense, mais seulement une différence dans le châtiment. Ainsi le peu de mal des bons ne saurait appeler un châtiment, mais seulement une différence dans la béatitude. Donc il n’y a pas lieu d’admettre un feu purificateur.

3. La justice du châtiment éternel apparaît surtout dans la disposition irrévocable de la volonté déréglée des pécheurs : car à la perversion éternelle de la volonté est dû un châtiment éternel ; inversement et par voie de conséquence, si la volonté irrévocablement fixée dans le mal est punie d’un châtiment éternel, celui qui n’est pas puni éternellement n’a donc pas une volonté irrévocable ; car une volonté irrévocable du mal serait destinée à un châtiment éternel ; une volonté irrévocable du bien n’appelle aucun châtiment, puisqu’elle mérite des couronnes. Mais vous-mêmes reconnaissez que ceux qui seraient purifiés par ce feu ont une volonté irrévocable : ils n’ont donc pas à être purifiés par le feu (argument propre à Bessarion).

4. Si la parfaite récompense pour la pureté de cœur et d'âme consiste à voir Dieu, et si tous n’y ont point également part, c’est donc que tous ne sont pas également purs. Donc nul besoin de feu purificateur si en quelques-uns la purification laisse â désirer, car ce feu même produirait en tous une égale purification et les disposerait tous également â voir Dieu. Ce qui arriva sur la montagne de la Loi, en symbole et en figure ; car alors tous n’apparaissent pas au même lieu ni au même rang, mais en des rangs divers selon la mesure de leur purification respective, suivant Grégoire le Théologien.

5. Le grand Grégoire le Théologien, dans son discours théorique et anagogique sur la Pâque, en vient à dire : « Nous n’emporterons rien et ne laisserons rien pour le lendemain, et il explique en termes clairs et nets qu’après cette nuit il n’j a pas de purification, entendant par nuit la vie présente de chacun et n’admettant aucune purification ultérieure.

6. Le même, dans son discours sur la plaie de la grêle, s’exprime ainsi : « Je ne parle pas des expiations d’outre-tombe, auxquelles une pensée indulgente ici-bas livre (les pécheurs) ; car mieux vaut se laisser présentement instruire et purifier

que d'être livre aux tourments de l’autre vie, ou il ne s’agit

plus de purification, mais de châtiment » ; donnant clairement a entendre qu’il n’y a pas de purification, au delà de Cette vie, mais rien que l'étemel châtiment.

7. Le Seigneur, dans l'évangile selon Luc sur le riche et Lazare, enseignant quel sort atteignit l’un et l’autre, dit que Lazare a sa mort lut porté par les anges dans le sein d’Abraham, et que le riche à sa mort fut enseveli, que son âme fut tourmentée dans l’enfer ; ainsi, par le sein d’Abraham, il a désigné l’exaltation dans le bonheur réservé aux amis de Dieu ; par l’enfer et les tourments, la condamnation finale et le châtiment éternel des pécheurs ; il n’a point laissé entre deux un lieu de tourments temporaires, mais rien qu’un grand et infranchissable abîme, séparant les uns de* autres et manifestant la profonde et irréconciliable opposition de leur sort.

S. L'âme délivrée du corps, totalement incorporelle et immatérielle, ne semble pas pouvoir être châtiée par un feu corporel après que son corps, qui devait donner prise au leu, a péri. Mais après la résurrection elle retrouvera un corps impérissable ; toute la création sera transformée ; le feu sera partagé, nous dit-on ; alors elle en éprouvera sans doute un châtiment correspondant, et non pas elle seulement, mais encore les démons, eux aussi ténébreux, revêtus de matière de grossièreté, de corps aériens ou ignés, selon le grand Basile. Mais avant de retrouver son propre corps, n'étant qu’une forme exempte de matière bien que subsistant par elle-même, comment l'âme serait-elle châtiée par un feu corporel ?

(Neuvième argument de Marc d'Éphèse : Si le péché originel, qui est bien plus grave, n’est pas puni ]>ar le feu dans l’autre vie, pourquoi punir le péché véniel par le feu ?)

9. Nos saints Pères, qui ont mené sur terre une vie angélique, initiés en bien des lieux et bien des fois par des visions, des songes et d’autres miracles au châtiment éternel et au sort des impies et des pécheurs qu’il afflige, et faisant part de leurs lumières, contemplant et exposant ces mystères comme présents et actuels, ainsi que la parabole de l'évangile selon Luc décrit la condition du riche et de Lazare, n’ont jamais fait allusion au feu purificateur temporaire.

10. La doctrine de l’apocatastase et de la fin du châtiment éternel, due à Origéne et acceptée par quelques personnages ecclésiastiques, comme Didyme et Évagre, doctrine qui met en avant la bonté divine et trouva bonaccueil parmi les lâches, selon le mot du divin Jean, architecte de l'échelle céleste, n’en a pas moins été proscrite et anathématisée par le saint concile Ve œcuménique, comme dissolvante des âmes et encourageant la lâcheté chez les lâches, qui escomptent la délivrance de leurs tourments et l’apocatastase promise. Pour les mêmes raisons, la doctrine proposée du feu purificateur semble devoir être rejetêe de l'Église, comme énervant les âmes vaillantes et les détournant de faire tous leurs efforts pour se purifier en cette vie, par la perspective d’une autre purification.

4° Réponse de Jean de Turrecremata, au nom des Lulins (P. O., p. 80-107, le texte latin original dans O. C, t. xvii, p. 215-243). — La réponse des Grecs, déclare-t-il, fonde l’espoir d’une entente, car un point capital est déjà mis hors de doute : l’efficacité des prières de l'Église pour les âmes des défunts quand ces âmes ne sont pas assez pures pour entrer immédiatement au ciel, ni assez coupables pour être jetées en enfer. C’est sur cette catégorie moyenne que doit désormais se concentrer le débat. Mais, pour mettre de côté tout préjugé, pour examiner à fond la question à la lumière des seules Écritures et de l’enseignement des Pères, les Grecs devront s’abstenir d’une réponse qui semble bien une fin de non-recevoir : « Jamais nous n’avons parlé de la purification par le feu ! jamais nous n’en parlerons ! » Ce qu’il faut, c’est prier Dieu pour lui demander simplement le triomphe de la vérité.

L’orateur latin distingue quatre parties dans la réponse des Grecs :

1. Le premier point concerne l'état des âmes saintes après la mort. Sont-elles enlevées immédiatement au ciel ? Pareillement, les âmes que la mort a trouvées en éfat de péché mortel descendent-elles aussitôt en enfer pour y être châtiées ? Ou bien les unes et les autres attendent-elles le jour du jugement dernier et la résur l’I i ; t, rOl RE. Il i ONCILE DE II RENCE

1258

rection générale qui il< 1 1 Bxer leur sorti Quant aux âmes de la catégorie moyenne, mu lesquelles porte la controverse, quel est leur sort ? Subissent elles une peine ? Quelle peine ? Esl ce simplement le délai d’attente ? Est-ce une douleur sensible ? S’il d’un tourment proprement dit. en quoi cont-il ? Après Uur purification, ces Ames sont elles enlevées au ciel ? Sur tous ces points, les Latins attendent la réponse des Grecs

_'. Le second point est relatif a la purification par le feu. Les Grecs craignent que la croyance au feu temporaire ne provoque, chei tes chrétiens, l’hérésie de ï'apocatastase finale. Crainte peu justifiée, en réalité, et qui doit dispar Itre devant l’enseignement clair et positif des saints, devanl la coutume ancienne de l'Église catholique. Les saints Pères ont puisé leur enseignement du teu purificateur dans la sainte Écri turc et ils ont affirmé le feu temporaire sans détriment du feu éternel, le feu temporaire pour lestacheslégères, le feu éternel pour les péchés graves. L'Église romaine a toujours tenu la doctrine du feu purificateur sans pour autant tomber dans l’hérésie origéniste, qu’elle réprouve et qui d’ailleurs est presque Inconnue en Occident. Bien plus, la doctrine du feu purificateur, loin d’engendrer le relâchement, provoque la ferv » ur : la perspective d’un feu temporaire après cette vie émeut les fidèles bien plus que la perspective d’une relégation en un lieu Inconnu. En publiant la doctrine du feu du purgatoire, les saints Pères savaient qu’ils encourageaient beaucoup d’œuvres pieuses, et le saint sacrifiée de la messe, et les aumônes, et les prières, en faveur des Ames du purgatoire.

1 nplus [es textes patristiques invoqués démontrent bien la vérité de renseignement des Latins. L’orateur Cherche surtout à donner une pleine valeur en faveur du purgatoire à l’autorité de Grégoire de Nysse, dont les écrits ont été proclamés exempts d’erreurs par le V" concile. Dans le temps même où l’on brûlait les eerits d’Origène, on conservait et honorait ceux de - lire. Les Grecs parlent d’interpolations origénistes : si de telles interpolations s'étaient produites avant le concile, le concile les aurait dénoncées. Après le concile, elles n’auraient pu se produire par des mains origénistes ni aux fins de l’origénisme. De fait on trouve donc, (liez saint Grégoire, l’enseignement des Latins sur le feu du purgatoire. Quant aux Pères latins, saint imustin en particulier, comment rejeter leur autorité? Les Grecs ne peuvent ignorer un enseignement consigné dans des écrits universellement connus et vénérés, L'Église romaine a toujours su garder la voir de la vérité entre des erreurs extrêmes et opposées ; ici encore elle a su rejeter Ï'apocatastase origéniste sans pour cela méconnaître la réalité des peines temporaires. Ouant a saint Grégoire, dont les écrits ont été traduits en « rec par le pape Zacharie, il s’est exprimé sur le feu du purgatoire avec une netteté parfaite. et les Grecs n’ont pu s’y méprendre. Un dogme si auto-i ancien dans l'Église catholique, ne saurait être remis en question.

Les Grecs prétendent que le texte du II « livre des Machabées et que Matth., xii. 32, ne concernent aucune peine purifiante et qu’il n’y est question que d’une rémission et absolution des péchés. Or il faut, dans tout péché, distinguer la coulpe et la peine ; la coulpe une fois remise, reste la peine à expier. La répon - ne marque pas assez clairement auquel des deux éléments correspondent la rémission et l’absolution du péché dans l’autre vie. Dans l’autre vie, l'âme n’est plus capable de détestation du péché ni de contrition : donc la rémission ou l’absolution dont parlent les Grecs ne peuvent s’appliquer qu'à la peine, stipulée par l'Écriture. Deut., xxv, 2 : II P.eg., xii, 13. Cet textes marquent le lien qui rattache la coulpe a la

peine. Quand donc on dit que les prières « le ri

obtiennent la rémission du péché, il s’agit non de la coulpe. mais de la peine. Donc, avant de recevoir, en vertu des suffrages îles iants, rémission de leurs pèches, les.'unes des défunts étaient sous le coup île

certaines peines, i : i. entre aul res moyens pré us par la justice divine pour l 'accomplissement de ces peines, il tant compter le feu corporel ci temporaire du purga

toile.

3. lai troisième lieu, Turrecremata examine les

textes des l'èi es interprétant 1 (.or., ni. l.'i ].'>. Si les

Grecs ont une vénération méritée pour Chrysostome,

les Latins peux eut dire qu’AugUSt in ne le cède en rien a

Chrysostome. Les IV. v et VI* conciles attachèrent à son autorité le plus grand prix. Grande également est l’autorité de saint Grégoire : les Latins oui de quoi

répondre a la vision de ProcluS. la' bienheureux Thomas, exégète de saint Paul, tut. peu ayant sa mort, favorise d’une apparition de l’Apôtre, qui le félicita d’avoir bien rendu le sens de ses épîtres et l’invita a le suix re dans la claire x Ision… Les l'ères latins d’ailleurs, comme les Latins eux-mêmes, connaissent la langue grecque et les doctrines des l'ères grecs. Mais les I.alins auraient-ils consenti à un moindre mal, le purgatoire, pour échappera un mal plus grand, la négation de l’en fer ? Saint Augustin est l’ennemi du mensonge ; il ne craint pas de dire que le texte de l’Apôtre relatif au feu du purgatoire n’a pas toujours été bien compris. Et il parle en public pour redresser cette erreur. Il n’y a donc pas à craindre qu’il ait voulu dissimuler la xerité par crainte d’un plus grand mal.

L’orateur passe ensuite au sens de I Cor., iii, 1 1-15. Tout d’abord il admet que l'Écriture puisse renfermer des sens multiples. Chrysostome en a exposé un ; Augustin, un autre. L’Apôtre parle ici de fondement et d'édifice. Les pécheurs obstinés, les infidèles, n'édifient rien sur le fondement qu’est le Christ. Sur ce fondement on ne peut appuyer qu’un édifice vivant, composé des pierres vivantes que sont les fidèles (cf. I Pet., ii, 5). Cela suppose la foi, la foi conjointe à la charité ; ce qui exclut le péché mortel. Les termes mêmes dont se sert l’apôtre excluent l’hypothèse de pécheurs bâtissant ici un édifice : il est question de bois, de paille, de foin, tous matériaux légers, et non de plomb ou de pierres, matériaux qui figureraient mieux les péchés mortels. Telle est la remarque de Grégoire et d’Augustin. Donc, pour édifier sur le fondement qu’est le Christ, il faut avoir au cœur la foi agissant par la charité.

L’Apôtre a-t-il en vue, comme le pensent les Grecs, le jour du jugement dernier ? Quand bien même ce serait exact, il ne s’ensuivrait pas qu’il parle de fautes mortelles, ni qu’il exclue l’idée d’une purification temporaire. Les Latins estiment qu’il ne s’agit pas seulement du jugement dernier, mais encore du jugement particulier. Le fleuve de feu dont parle I)aniel, x ii, 10, doit non seulement entraîner les méchants au supplice éternel, mais purifier les bons qui auraient encore quelque tache à consumer. L’interprétation des Grecs relative au jugement dernier peut donc être acceptée à condition d'être complétée par une autre interprétation relative au jugement particulier. Le mot <Jû)07)o - etoi, disent les Grecs, signifie conservation, permanence. Peut-être est-il bien osé pour lis Latins de les contredire ici ? Mais, dans l'Écriture on ne trouve ce mot qu’appliqué au bien et au salut. Dans lu même épître, on ]ieut citer i. 1K ; v, ô ; ix, 22. Voir aussi Acl., xvi, 30, 31. Si l’Apôtre a employé ici ce mot acû(WjæTai, C’est selon sa pensée connue par ailleurs. De plus la préposition <5'.à marque un passage, non une permanence : si l’interprétation des Grecs était la vraie, il eût fallu dire ftv irupi et non <51à 71upôç. Le mot ^r)(i.iwO^gzzv.'., disent encore les Grecs, ne saurait désigner une

purification qui est en somme un bienfait ; il ne peut s’appliquer qu’aux impies. Les Latins sont d’un avis différent : cette purification, quel que soit le bienfait qu’elle apporte, est cependant un dommage, peine plus rigoureuse, au sentiment de saint Augustin, que toutes les peines de cette vie. Donc le sens du mot est sauvegardé.

Quant à l’autorité de l'Église romaine, si elle a été mise en avant, c’est que cette Église n’est pas une Église quelconque : elle est instruite par les apôtres Pierre et Paul, fondements et lumières de la foi ; elle est tête et maîtresse des autres Églises, ainsi qu’en témoigne saint Maxime dans sa lettre aux Orientaux (P. G., t. xci, col. 137 D).

Enfin l’argument des Latins tiré de la justice divine est resté sans réponse ; en revanche, les Grecs ont accumulé dix arguments contraires. Les Latins pourraient eux-mêmes apporter de multiples raisons opposées, mais l’orateur veut se contenter de répondre aux arguments de Bessarion.

4. Cette réplique forme le quatrième point. En réalité il suffît de lire les arguments des Grecs pour s’apercevoir de leur peu de consistance. Les réponses de Turrecremata aux arguties des Grecs sont elles-mêmes d’un intérêt médiocre. Toutefois la troisième mérite d'être retenue, parce qu’elle envisage l’immutabilité des volontés dans l’au-delà :

Si l’immutabilité de la volonté droite est nécessairement requise dans l’obtention de la béatitude, elle ne se suffît pas cependant à elle-même. La poursuite d’une bonne œuvre et surtout l’obtention de la fin dernière requièrentdemultiples éléments… Le mal peut surgir de l’un ou l’autre des mille défauts possibles ; mais le bien ne peut exister que si toutes les conditions en sont remplies. Donc, il suffit d’un défaut quelconque pour empêcher l’achèvement et l’acquisition du bien. Aussi, bien que pour être digne du châtiment éternel, il suffise à l'âme d’avoir une volonté immobile dans le mal, il ne suffit pas, par contre, pour qu’une âme quittant cette terre, puisse immédiatement entrer en jouissance de la béatitude, qu’elle ait une volonté fixée immuablement dans le bien ; il faut de plus qu’elle n’ait plus de faute ou depeine à expier ; car, comme on l’a déjà dit, la félicité du ciel n’admet rien de souillé. En outre, si cette immutabilité de la volonté droite en celui qui est prédestiné à la vie éternelle suffisait pour lui faire conférer immédiatement le bonheur, comme l’immobilité de la volonté du damné dans le mal suffit à le plonger dans l'éternelle perdition, que vous servirait de prier pour les défunts, puisque vous dites que cette immutabilité de la volonté dans le bien suffit ?… Hoffmann, op. cit., p. 2 (56)

La réplique est bonne et péremptoire. Mais on voit par là à quel genre d’exercice se sont livrés les deux jouteurs.

5° Précisions apportées par les Grecs (P. 0., p. 108151, 152-168). — Marc d'Éphèse apporta les précisions demandées en deux mémoires.

1. Le premier, de beaucoup le plus étendu, déclare que les Grecs vont exposer simplement leur sentiment propre et discuter de plus près le sentiment qu’on leur oppose.

Ils enseignent donc que les justes n’entrent pas immédiatement en possession de la béatitude promise à leurs œuvres ; que les pécheurs ne sont pas livrés immédiatement au supplice éternel qui leur est destiné. Les uns et les autres ne parviendront à ce terme qu’après le jugement dernier et la résurrection universelle. Sans doute ils ont déjà quelque chose de leur destinée future. Les bons sont dans le repos et la liberté, soit dans le ciel, près de Dieu, avec les anges, soit dans le paradis terrestre ; ils sont parmi nous, dans les temples où on les honore ; ils entendent nos prières, prient pour nous, se font nos intercesseurs, opèrent des miracles par leurs reliques, jouissent de la vue bienheureuse de Dieu et du resplendissement de sa gloire, plus parfaitement qu’en cette vie. Lesméchantssontenfermésdansl’enfer,

plongés dans les ténèbres, dans l’ombre de la mort, dans le lac profond (cf. ps. lxxxvii, 7), dans la terre ténébreuse et obscure, sans lumière, sans spectacle de la vie. Cf. Job, x, 22. Si les premiers sont comblés de joie, les seconds sont dans une tristesse inconsolable. Cependant les premiers n’ont pas encore le véritable héritage céleste ; les seconds ne sont pas encore livrés aux tortures éternelles et dévorés par le feu. A l’appui de cette doctrine, Marc d'Éphèse cite plusieurs Pères, le pseudovthanase, Qusestiones ad Antiochenum ducem, q. xx, xxi, P. G., t. xxviii, col. 609 ; saint Grégoire le Théologien, Orat., vii, In laudem Ceesarii jratris, n. 21 ; xvi, In patrem tacentern propler plagam grandinis, n. 9, P. G., t. xxxv, col. 781-784 ; 945 C ; xl, In sanctum baplisma, n. 45, t. xxxvi, col. 425 C ; saint Jean Chrysostome, Ad populum Antiochenum, hom. vi, n. 3 ; Adv. Judseos, hom. vi, n. 1, P. G., t. xlix, col. 85 ; t. xlviii, col. 904, 905. Les visions et révélations sur les châtiments d’outre-tombe, attribuées à de saints personnages, ne sont donc que de simples représentations figurées des réalités à venir, non la description des réalités présentes.

Par là est exclue l’hypothèse du feu purificateur temporaire. Déjà saint Pierre montrait les impies attendant la sentence définitive, II Pet. ii, 4 ; il parlait de captivité. Les Grecs parlent de châtiments déjà commencés : honte, remords ou peines semblables ; mais il ne faut pas leur demander d’admettre qu’un feu matériel agit sur les âmes spirituelles. Tout au plus pourraient-ils admettre ces expressions en un sens allégorique.

L'Église, selon la coutume d’origine apostolique, offre le saint sacrifice et d’autres prières pour tous les défunts sans distinction. Aux damnés, à défaut de la délivrance, est procuré un léger soulagement. Maints exemples historiques attestent cette vérité (l’orateur rappelle le texte de saint Basile dans Eù/oX6yi.ov t& [it-fix, voir col. 1253 ; le fait de Falconille et de Trajan). Et toutefois l'Église ne prie pas publiquement pour de telles âmes ; elle se contente de prier pour tous les fidèles trépassés, si grands pécheurs qu’ils soient. On peut citer sur ce point non seulement saint Basile, mais saint Jean Chrysostome, In Joannem, hom. lxii, n. 5, P. G., t. lix, col. 348 ; In I Cor., hom. xli, n. 4, P. G., t. lxi, col. 361 ; In Mallh., hom. xxxi, n. 4, P. G., t. lvii, col. 375 ; In Mac, dans le pseudo-Damascène, De iis qui in fide dormierunt, n. 3, P. G., t. xcv, col. 249 B. Si les prières de l'Église peuvent obtenir un adoucissement aux âmes destinées à l’enfer, combien plus l’obtiendront-elles pour les âmes de la catégorie moyenne ! Ces dernières pourront, grâce aux prières de l'Église, être réunies à Dieu. Quant aux âmes justes et saintes, elles recueillent, elles aussi, un véritable bénéfice de ces prières puisqu’elles n’ont pas encore touché au terme. Cf. pseudo-Denys, Eccl. hier., vii, 7, P. G., t. iii, col. 561 D-564 A. Aucune raison donc de restreindre l’efficacité des prières et des saints sacrifices à une seule catégorie d'âmes, celles du purgatoire.

Les Latins ont cru pouvoir en appeler à l’autorité de saint Basile, qui prie Dieu d’introduire les âmes dans un lieu de rafraîchissement. Mais cela ne signifie nullement que ces âmes soient dans le feu du purgatoire. Quant à l’autorité de saint Grégoire de Nysse, il faut bien se résigner à reconnaître que ce Père a erré sur ce point. Qu’on montre où il a parlé du feu éternel I D’ailleurs, il place le feu purificateur des pécheurs au jugement dernier. Quoi de commun entre ce feu et celui du purgatoire des Latins ?

Les Grecs ont cité largement Grégoire (de Nysse), pour ne pas être accusés de le calomnier comme origéniste. Grégoire, pour les Grecs comme pour les Latins, est un docteur ; mais il est malaisé d’expliquer comment il a pu professer cette doctrine du purgatoire sans 1261

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. LE CONCILE l>K FLORENCE

L262

encourir la condamnation tiu concile œcuménique. Qu’on lise l’apologie écrite par saint Maxime pour la doctrine de l’apocatastase telle que l’a présentée Gré : tout > rappelle l’origénlsme. Comment enfin présenter la doctrine ilu purgatoire comme une doctrine ancienne dans l'Église et tenant le milieu entre deux erreurs, alors que les docteurs les plus nombreux et u-s plus Illustres ont cru devoir expliquer au sens allégorique le feu éternel et les châtiments sans fin ? Comment les peines qui précèdent le Jugement pourraient-elles être par un (eu matériel ?

1 i - textes de saint Matthieu et des Machabées ne prouvent pas la doctrine de la purification ou du châtiment dans l’autre vie, mais celle do la rémission des péchés. Et puis quisignifie cette distinction entre la coulpe et la peine ? Cette distinction paraît aux Grecs contraire aux faits les plus certains : quand les princes pardonnent une offense, les voit-on en poursuivre le châtiment ! Le puhlicain retourne élu/ lui non seulement absous, omis justifié, lue., xviii, 14 ; Menasse, après s'être humilie, est délivré de ses fers et rétabli sur son trône. II Par., xxxin. 13 : les Ninivites, grâce a leur pénitence, sont soustraits aux i oups qui les menaçaient. Jon.. m. 5 : le parai] tique reçoit, avee le pardon

de sis péchés, u redressement de son corps. Matth., ix. i. L’exemple allégué de David n’est pas concluant,

car il eut de la mémo femme un autre fils qui fut le grand Salomon. Donc on ne peut poser en principe qu’après le pardon de l’offense il reste encore à subir une peine : pour démentir un tel principe, l’exemple du baptême suffirait : avec le pardon des péchés. le baptise ne reçoit-il pas remise île toute sa peine ?

En ce qui concerne I ("or., iii, 11-15, dont dépend pour ainsi dire tout l’enseignement des Latins, des divergences se sont produites entre docteurs sur ce texte comme sur beaucoup d’autres. Cependant l’interprétation de saint Jean Chrysostome doit être préférée, car il s’est attaché à reproduire la pensée de l’Apôtre. Marc d'Éphèse en appelle à Job. xvi, 10, pour justifier le sens de conservation » attaché à cwô^aeTai par Chrysostome. Et sa conclusion est nette : il faut s’attacher à l’exégèse de Chrysostome si l’on ne veut pas s'écarter de la vérité.

2. Le dernier mémoire de Marc apporte les derniers éclaircissements demandés par les Latins. Ces éclaircissements concernent quatorze points. Les questions précises des Latins ont amené Mare à des précisions nouvelles, qui donnent un prix spécial à ce dernier document.

a) En quel sens les Grecs disent-ils que les Ornes des saints ne sont pas encore en possession de la béatitude ? Le sort ili - Ornes destinées à la béatitude demeure, jusqu’au dernier jugement. provisoire et imparfait, soit que Dieu ait décidé de ne récompenser les âmes qu’en compagnie de leurs corps, soit qu’il veuille différer la récompense commune jusqu’au moment de la réunion complète du corps des élus.

b) Qu’entendent les Grecs lorsqu’ils disent que les saints sont au ciel avec les angi -s prés de Dieu ? C’est le mode spécial de présence des esprits, tel que l’ont exposé saint Jean Damascène, ^aint Grégoire de Nazianze. Denys l’Aréopagite.

c) La vision bienheureuse dont jouissent les saints dé- maintenant est-elle la isjon oVelSouç dont parle

1 saints voient-ils Dieu par essence ? Aucune créature ne peut oir Dieu par essence : la vision qui est le partage des saints est la vision Si’e'80'jç, mais non la vision face a face (irpcowrov "poç -ç^ai, , -', ^ qui est réservée pour le séjour de la gloire.

d) Qu’est ce que le rayonnement de Dieu dont les saints jouissent déjà au ciel ? Marc répond ici par quelques phrases de Jean Climaque.

r) Que doit-on entendre par le royaume de Dieu et

parles biens Ineffables dont les saints n’ont pas encorela

jouissance'.' Mare se réfère Simplement a saint Maxime.

/ / Où sont les Ames de ceux qui moulinent dans le

péché mortel ? Elles sont dans les enfers, lortuiecs par

l’attente et la crainte de leur triste sort.

il) Comment les anus des saillis jouissent elles d’une

joie parfaite, sans avoir encore part aux biens ineffables ? Elles jouissent par avance d’une félicité bienheureuse, dans l’espérance des biens promis.

Ii) La privation de la ision divine est elle pour les

damnes une peine plus grande que le feu etei ne ! '.' Sans aucun doute, cette privation étant le plus dur tour

ment des Ames déchues de toute espérance.

i) Quelles peines les âmes de la catégorie moyenne

endurent-elles ? Les souffrent-elles tour à tour ? C’est la

question proprement dite du purgatoire, la question des âmes - moyennes i, destinées à voir Dieu après une expiation temporaire. Mare répond que les peines endurées par ces âmes sont diverses et inégales, comme les fautes qui les leur ont méritées.

j) Qu’est-ce que les Crées entendent par « l’incertitude de l’avenir i ? C’est l’ignorance où demeurent ces Ames quant au temps où, leur expiation étant consommée, elles si verront réunies au chœur des élus.

k) Qu’est-ce que la honte de la conscience ? Toute faute inexpiée engendre une certaine honte. Quelquefois, la pénitence est assez complète pour effacer entièrement le péché ; mais il n’en est pas toujouis ainsi, l'âme qui n’a pas suffisamment fait pénitence doit traverser une période de châtiment ; ainsi en est-il pour beaucoup de fautes quotidiennes qui échappent à notre fragilité. On ne songe guère à en faire pénitence. Mais la miséricorde divine peut en faire remise au pécheur, et les prières de l'Église peuvent acquitter sa dette.

I) Que faut-il penser du soulagement des damnés par la prière des vivants ? La prière des vivants peut obtenir aux damnés quelque adoucissement avant le jugement général.

m) Quelles sont les fautes petites et légères, qui affectent les âmes de la catégorie moyenne ? Sur ce point, les Grecs ont un sentiment différent des Latins. Ils ne reconnaissent pas les fautes vénielles ; ils n’admettent pas que les péchés soient remis par la charité. La rémission des péchés est due à la pénitence : si la pénitence est parfaite, rien ne manque à l’expiation du péché ; si la pénitence est imparfaite, le péché, dans la mesure où il n’est pas encore remis, devra être expié outre-tombe. Pas de distinction entre la coulpe et la peine.

nj Pourquoi les prêtres grecs imposent-ils une pénitence en absolvant les pécheurs ? De cette pratique, Marc apporte cinq raisons et laisse entendre qu’il peut en exister d’autres : toutes raisons d’opportunité, dont la plus admissible est le caractère médicinal des satisfactions sacramentelles. A l’article de la mort on absout et on communie le moribond, en comptant que Dieu suppléera à ce qui lui manque.

G" Définition du concile. — Telles sont les pièces du procès, du moins celles qui sont aujourd’hui connues. La discussion se prolongea un mois et demi encore ; cf. Mansi, Concil.. t. xxxi a, col. 485-493. L’empereur, pressé d’aboutir, intervint de sa personne et présida un débat public les 16 et 17 juillet 1439. Les Grecs en voulaient particulièrement au feu du purgatoire ; les Latins cédèrent sur ce point, qui d’ailleurs ne se présentait pas (nous l’avons constaté au cours de notre enquête) garanti par une tradition ferme. L’accord se fit en fin de compte sur la formule suivante, qui à quelques mots près reproduit la profession de foi du concile de Lyon. Nous juxtaposons les deux textes :

11' l ONCILF. DE LYON CONCILE DE FLORENCE

Si vire ptmitentea in caSi vrre pa’nitentes in Dei ritate ilriisM-rint. aiitequain raritate ilicessiiint. ante

dignis i >. - 1 1 1 1 < 1 1 1 î ; < tructibus <ic commissls sal isfecerinl el omissis ; c.iiin)i animas pœi uv purgatoriis [seu catharI ri iis, sic h i nobis [rater Joannes explanavil | post mortem purgari : el ad pæ n : is hujusmodi relevandas prodesse cis ndelium vivo mm suffragia, missarum scilicet sacriflcia, orationes el eleemosynas et alia pietatis officia, quæ a fidelibus pro aliis fidelibus fteri consueverunt secundum Ecclesias institut ;  !.

Illorum autem animas, <iui post sacrum baptisma nullain omnino peccati maculam incuirorunt.illas et lam, qu ; i' post contractant peccati maculam, vel in suis [manentes ! corporibus, vel eisdem exuta', prout superius dictum est, sunt purgatse, mox in csrlum recipi. « in un dignis pœnltentlæ tructibus de commissls satisfecei mi et omissis, eorum anim is pœnis purgatoriis posl mor tem purgari ; el ui a pœnis hujusmodl releoentur, prodesse iis ndelium vivorum suffragia, missarum scilicei sacriflcia, orationes et elee mosynæ et alla pietatis officia, quæ a fidelibus pro aliis fidelibus fteri consueveruni secundum Ecclesiæ ins lituta.

Illorum autem animas, qui in mortali peccato vel cum solo original] decedunt, mox in infernum descendere, pœnis tamen disparibus puniendas.

[llorumque animas, qui post baptismt susceptum nullain omnino peccati maculam lncurrerunt, illasetiam quæ post contractant peccati m iculam, vel in suis corporibus, vel eisdem exutæ corporibus, prout superius dictum est, sunt purgatse, in caslum mox recipi et intueri clore ipsum Deum trinum et unum.sieuti est, pro meritorum tamen diversitale alium alio perfectius.

Illorum autem anirms, qui in actuali mortali peccato vel solo originali decedunt, mox in infernum descendere, pœnis tamen disparibus puniendas.

A la profession de foi de Michel Paléologue, que les Grecs pouvaient difficilement rejeter, le concile de Florence, s’inspirant de la définition de Benoît XII et pour éliminer les tendances palamites de Marc d'Éphèse, ajoute simplement que les âmes justes, une fois entièrement purifiées, sont reçues immédiatement dans le ciel, pour y voir Dieu clairement, dans son unité et dans sa trinité. tel qu’il est, l’un plus parfaitement que l’autre selon la diversité de leurs mérites.

Deux points d’une importance capitale paraissent avoir été acquis. Les Latins semblent avoir découvert que les Grecs n’ont aucune objection de principe contre la prière pour les morts. Les Grecs constatent que l’origénisme n’existe pas en Occident, comme ils se l'étaient imaginé avec le feu du purgatoire.

Le terrain ainsi déblayé, les divisions n'étaient pas toutes supprimées. On les réduisit au minimum et, pour que l’union fût réalisable, on fit silence sur les questions secondaires où chaque Église avait son enseignement particulier. La nature des peines d’outretombe revêt des caractères fort différents selon qu’on la considère dans la doctrine ferme des Occidentaux touchant les rétributions immédiates après la mort, ou qu’on l’envisage dans l’eschatologie fuyante et compliquée des Orientaux. Le vice le plus profond du système exposé par Marc d'Éphèse est peut-être la confusion établie entre la coulpe et la peine. Outre que cette conception semble réduire la pénitence des péchés à une vulgaire liquidation de compte avec Dieu, on se demande ce que peut bien être, pour le péché moi tel, cette rémission qui ne remet qu'à moitié et qui laisse l'âme rentrée en grâce avec Dieu à moitié captive du mal ; pour le péché véniel, cette tare qui suit dans l’autre vie une âme qui cependant quitte ce monde avec la charité parfaite. Marc d'Éphèse a fait des prodiges de subtilité pour soutenir la thèse d’une satisfaction sacramentelle qui n’en est pas une.

On laissa tomber toutes ces divergences, et, ayant nettement séparé la cause du feu du purgatoire de celle du purgatoire lui-même, l’accord se lit sans peine. La doctrine du purgatoire est un dogme de l'Église ; la

docl i me du feu demeure, après les discussions de Ferrare, ce qu’elle étail auparavant : une croyance respectable, mais avec ce caractère nouveau que lui confère le concile de Florence, c’est que proposée à la sanction du magistère, celui-ci s’esl refusé à la consacrer.

VI. La controverse protestante et le concile dj Trente. - Nous n’avons pas voulu interrompre l’exposé de la controverse avec les Orientaux avant qu’elle soit close, officiellement du moins, par la définilion du concile de Florence. Il nous faut maintenant, jeiani un regard sur l’Occident, rappeler que, bien avant ce concile, l’Occident lui-même avait été troublé par la négation du purgatoire, ou, plus exactement, cette négation se greffait sur une hérésie plus vaste, dont elle n'était qu’un aspect secondaire.

Au iii c - siècle, les cathares (albigeois) avaient été entraînés, par leur morale singulière, à la négation du purgatoire. On sait que, pour ces néo-manichéens, la vie spirituelle ne peut exister ici-bas. l'âme étant prisonnière en un corps qui est l'œuvre de Satan. Le bonheur n’est possible qu'à la délivrance de l'âme, après la mort. Puisque le règne de Satan est limité à ce monde, l’enfer n’existe pas : toutes les âmes finalement doivent revenir à Dieu, mais après une série d'épreuves, de purifications. Et c’est sur terre que les âmes doivent se purifier pour être dignes de Dieu ; d’où il suit que les âmes imparfaites reprennent un nouveau corps et une nouvelle existence en vue d’une purification plus complète. Pas de place, en un tel système, pour un purgatoire. Pas de prière non plus pour l'âme des morts puisqu’il n’y a pas d’expiation dans un purgatoire et que les morts ou bien sont unis à Dieu ou revivent sur terre sous une nouvelle forme. Voir Albigeois, dans Dict. d’hist. et de géogr. eccl., t. î, col. 1626, 1631. Dans sa condamnation de l’hérésie des albigeois, l'Église s’est contentée de formules générales et n’a pas envisagé directement la négation du purgatoire.

La position des vaudois (tout à fait distincts au début des cathares) est assez peu cohérente : au début ils rejettent moins le purgatoire et la prière pour les morts que certains trafics pécuniaires dont ces dogmes sont trop facilement l’occasion.

Il est à remarquer que plus tard Wiclef et Hus, qui, tout autant que les vaudois et les albigeois, préludent aux négations protestantes, n’ont pas osé attaquer directement le dogme du purgatoire, tant la crainte était grande de s’aliéner l’esprit des masses. Néanmoins, Wiclef attaque déjà les indulgences, cf. prop. 42, Denz.-Bannw., n. 622 ; Hus lui fait écho, prop. 8, ibid., n. 634, et le concile de Constance impose à leurs partisans deux interrogations sur ce point. N. 26, 27, ibid., n. 676, 677. La négation du purgatoire pourrait être déduite de la négation des indulgences.

Mais ce sont les réformateurs du xvie siècle qui osèrent ouvertement contredire une croyance et des pratiques si populaires. Luther y mit d’abord quelque réserve ; Calvin brusqua l’offensive. On fera d’abord l’exposé des négations protestantes ; ensuite on retracera la riposte catholique du côté des théologiens et enfin on exposera la doctrine du concile de Trente.

I. EXPOSÉ DES NÉGATIONS PROTESTANTES. — 1° Genèse et évolution de la pensée luthérienne.


1. Dans ses thèses du 31 octobre 1517. Luther combat les indulgences, mais non encore le purgatoire. Toutefois il parle de l'état des âmes souffrantes en des termes qui sont contraires aux données traditionnelles : il veut détruire le lien qui pourrait les unir aux vivants. Les âmes des mourants paient toute leur dette par la mort ; le droit canonique ne les atteint pas. et elles ont droit à la remise de leurs fautes, th. xiii ; la conscience de leur imperfection morale et de ce qui manque à leur charité comporte une grave 126

IM RGAT01 RE. I I - NÉG ETIONS PRO II ST N II S

L266

crainte, .i.1 elle seule cette crainte éteint le feu du purgatoire th xt. xv, routefois, pour les Ames du purgatoire, la crainte diminuant, s’accrott la charité, th. wii ; on ne peut prouver par la raison ou l'Écrl ture que ces Ames soient hors d'étal de mériter et d’accroître leur charité th. wm II ne ». tr.u’l pas qu’elles soient certaines de leur béatitude, au moins toutes th, i Peut l'île même ne désirent elles pas leur libération immédiate th. xxix, ou II' sér. n. I. Dispufolio ratione viriutis indulgentiarum, éd. « le

Weimar fW i. t. i, p. 233-234. Les protestations surgirent de partout. Dans l’apo publiée in.illem.mil vers la tin de 1519, en réponse.i Priérias et a Jean Eck, Luther déclare croire ferme, ui souffrances des pauvres âmes qu’on doit secourir par des prières, des jeûnes, des aumônes et d’antres œuvres II ajoutait cependant ne pouvoir déterminer le genre de leur peine ni savoir si cette peine peut seule servir a la satisfaction requise. ViUerrieht au) Miche Artikel, .. t. n. p. 70. Celte profession de foi, d’apparence encore catholique, fait

écho a la deelarat ion contenue dans les ResoltUioiUS disput. de indulg. virtute, où Luther proclame sa certitude du purgatoire, conci. 15, discute longuement sur Us peines, ihiit.. mais nie le pouvoir du pape sur ces peines et ne lui aeeorde de qui est d’ailleurs la thèse catholique) qu’un pouvoir per modum suflrugii. Concl. 22. 25, 26, W., t. i. p. 555, 556-558, 671, 572,.">7l.

2. Mais déjà, dans des lettres privées, il laisse entendre que va doctrine sur la justification par la foi et sur l’inutilité des bonnes œuvres ne permet guère de maintenir une expiation des péeliés. Dans la Dispuiaiio de Leipzig avec Jean Kek. pressé par ce dernier de déclarer s’il admet encore le purgatoire, Luther repond qu' en vérité, dans toute l'Écriture, il n’y a pas un mot a ce sujet. W., t. n. p. 324. Si on lui oppose le IIlivre des MachabéeS, il se contente de rejeter ce texte, alléguant que les deux livres des Machabees sont par erreur dans le canon des Écritures. W., t. M. p. 32 1 : cf. Kostlin-Kawerau. Martin Luther, t. i. Berlin. 1903, p. 248. Il discute toutefois encore sur l'état des Ames du purgatoire, plutôt en rant dis doutes qu’en proposant des négations formelles. Cf. Resolutiona lutheriana su/>er prop. suis Liptite dispaîaîis, concl. 6,. W.. t. n. p. 123, 126. Cas hésitations sYxpliquent par la nature même du débat. Déjà, de toute évidence, le purgatoire, comme les indulgences, doit être rejeté : mais, tandis qu’on peut sans crainte bafouer les indulgences si peu populaires en raison des abus qui se sont produits, il est dangereux de s’attaquer a des croyances comme le itoire et Us prières pour les défunts, croyances si chères aux peuples chrétiens.

. :. Voilà pourquoi, dans les propositions condamnées par la bulle Exsurge Domine, on ne relève que des propositions ou l’existence même du purgatoire n’est

I cause :

Prop..' : l’omis j. ctianiM nullum adstt actuate peecatum, moratur exeuntem corpore animais ab fengrettu cceli.

Prop. i. Imperfecta caritas ninriluri fi-rt i c cuiM ne " magnum timorem,

qni —, s, , w, ssrJ* est (aeere ixen.on purgatorii et hnpe dit introitum !.

Prop. : 17 : Purgatorium non poti st probarl ex Scriptura quas ( t in canone.

Prop. 38 : Animain pur La concupiscence, même lorsqu’il n’existe aucun péché actuel, retarde l’Ame a

- 1 sortie du corps. « i « - son

eut rée au ciel.

Iji charité imparfaite du

moribond comporte nécessairement nue grande crainte

qui par (lie seule Suffit à

entraîner la peine du purgatolre et., empêcher l’entrée

au ci, I.

I.e purgatoire ne peut être

prouvé par la sainte 1 leriture

qui est danle canon.

Les âmes du purgatoire ne

gntorio non suai secura de sont pas. toutes du moins,

earum salute, saltem omnes ; certaines de leui salul NI

nec probatum est ullis aut la i tison al l’I orlture ne

rationibus aut Scripturls, peut démontret qu’elles ne

Ipsas esse extra statum s, .ut plus en état tle mérltci

merendl vel augencke cari et d’accrottre leur charltt

tatls

Prop. 39 : VnlnuB In purLes anus du purgatoire

gatorio peceanl sine mler peelient s ; ms Interruption

mlssione, quamdtu querunt parce qu’elles cherchent le

requiem et horrent pœnas. repos et oui horreur de leurs

souffrances.

Prop. to Anima' ex Les Ames délivrées du pui

purgatorio liberataa suffira gatolre, grâce aux suffrages

aïs icntitim mfalUS beaudes i ants. sont moins heu

tur, quaiu si per se sattsfecls reuses que si elles avalent

sent. I >en/ liannw.. n. 743- Satisfait par elles inenu-s.

7 1 1 : 777 7so. i avallera, n. i 160.

Ces propositions, Luther les reconnaît comme

siennes, bien que pour l’une ou l’autre il affirme ne s'être pas encore prononcé catégoriquement. Cf.

issertio omnium articulorum…, W., t. vii, p. 110-111, 149-150. H est d’ailleurs facile d’en retrouver le sens et jusqu'à l’expression dans des œuvres antérieures. Prop. 3 : J esolut. disput. de indulg. virtute, concl. 23, W., t. i. p. 572 : Cutlier reproche aux catholiques de

raisonner ijiiasi non sint niai percuta iietualia. æ si famés relietus imita sit iniiiiuiulitia. nullum impedimentum. nullum médium, quod m<>ratur ingressum regni. - Prop. I : Disput. » r<> declaratione virtutis indulgentiarum, prop. 15, '.. t. i. p. 234 ; Résolut, disput. de indulg. virtute, concl. l l. p. 554. — Prop. 37 : Disput. Lipsise, De purgatorio, W., t. n. p. 323, 321 : i-f. ]). 338-339. Dans les Assertiones, Cuther insiste sur l’impossibilité de prouver le purgatoire par Il Mac. et il ajoute que seul l’amour du lucre a causé tout ce tumulte autour du purgatoire. W., t. vii, p. 1 lit. — Prop. 38 : énoncé des thèses de la Dispulatin Lipsise, th. lx. W., t. ii, p. 161, Résolut disput. de indulg. virtute [1518], concl. 18, 19, W.. t. i, p. 562, 56 1 : Disput. I, Lipsise [1519 ]. W.. t. ii, p. 332-333. — Prop. 39 ; Résolut, disput, de indulg. virtute, concl. 18, W.. 1. 1, p. 562. Prop. 40 : Disput. 1, Lipsise, W., t. ii, p. 3bi.

1. Au für et à mesure que sa popularité croit, Luther prend une position de plus en plus nette. Dans le De abroganda missa (1524), il enseigne ouvertement qu’on ne se trompe pas en niant le purgatoire. W., t. vin. p. 152. Après le séjour a la WartbouTg, il est plus audacieux encore : Qui a fait du purgatoire un article de foi ? Le pape, uniquement pour s’enrichir, lui et les siens, p ?r les messes. Très peu de personnes

vont en purgatoire ». Kirchenpostille, w.. t. x, i " part. a, p. 58o). Il accepte cependant encore qu’on prie pour les morts, mais qu’on le fasse avec prudence ; il est

possible d’ailleurs que les âmes dorment d’un profond

sommeil jusqu’au Jugement dernier. Dans l’incertitude OÙ nous sommes, il faut donc dire a I)i i n : Je te prie pour cette Ame. Il se peut qu’elle dorme ou

qu’elle soutire. Si elle soullre. je le demande, au cas OÙ ce serait ta divine volonté, de la soulager dans ses peines. Du reste, quand on a prié une fois ou deux.

c’est bien assez, l’rrdiulcit. dans l'édition d’I'.rlauuen,

t. xvii, 2* part., p. 55. En 1528, Luther autorise encore les prières pour les morts. Vom Abendmahl Christi Bekenntniss, W., t. xxvi. p. 508. Mais il esi vraisemblable que de sa part c’est une pure tactique pour (pôle peuple ne s 'a percoi Ve (le l’iell.

â. C’est en 1530 que Cuther laisse enfin éclater ses sentiments véritables. La question du purgatoire

avait été passée prudemment sous silence dans la

Confession d’Augsbourg, « pie Mélanchthon avait rédi

gée dans le sens du parti de la conciliation Cuther

proteste avec véhémence. Epist. ail Melanchthonem, août l. r >30 ; éd. De Wette, t. iv, p. 156. Et immédiatement il envoie ; uix ecclésiastiques de l’assemblée d’Augsbourg un Avertissement où se trouve violemment condamné le principe même de la satisfaction pour les pécheurs : « Dire : Il faut que tu satisfasses pour tes péchés, c’est dire : Il faut que lu renies le Christ, que tu rétractes ton baptême, que tu blasphèmes l'Évangile, que tu accuses Dieu de mensonge, que tu ne croies pas à la rémission des péchés, que tu foules aux pieds le sang et la mort du Christ, que tu violes le Saint-Esprit, que tu montes au ciel par tes propres moyens… Qu’est-ce que cette foi, sinon la foi des Turcs, des païens et des Juifs ? Eux aussi voulaient satisfaire par leurs œuvres. Toutes les abominations sont sorties de là : messes, purgatoire, offices des morts, confréries, indulgences, etc. » Vermahnung an die Geistlichen versammelt auf dem Reichstage zu Augsburg, W., t. xxx, 2 « part., p. 289-290. C’est alors que paraît le premier écrit dirigé directement contre le purgatoire : Widerruf vom Fegfeuer, W., t. xxx, 2e part., p. 367 sq. C’est une longue diatribe contre la thèse catholique de l’existence du purgatoire, contre les preuves scripturaires qu’on a coutume d’apporter et contre les marchandages que cette doctrine introduit dans la religion. Le Dieu Mammon fait de la Bible tout ce qu’il veut !

6. Les articles de Smalkalde établissent définitivement la doctrine toute négative de Luther. Négation de l’utilité des satisfactions pour soi-même ou pour autrui. Part. III, a. 3, De psenitentia, dans J.-T. Millier, Die symbolische Bûcher, Gûtersloh, 1912, p. 315, n. 20. C’est en partant du principe de la satisfaction qu’on a « relégué » pour le purgatoire ce qui pouvait être encore à désirer dans la satisfaction faite ici-bas. Ibid., n. 21. C’est donc un comble d’abomination de prétendre que la messe, même offerte par un vaurien sans foi ni loi, puisse délivrer l’homme de ses péchés dans cette vie ou au purgatoire. Donc encore superstitions que les messes de vigiles, d’obsèques, de septième, de trentième jour, d’anniversaire, ainsi que le jour des défunts : le purgatoire et toutes les solennités qui s’y rapportent ne sont qu’un masque du diable (mera diaboli larva). Tout cela constitue « une contradiction avec le premier article qui enseigne que la libération des âmes est dans le Christ seul et non dans les œuvres des hommes. De plus, au sujet des morts, rien ne nous a été commandé par Dieu. Donc toutes ces pratiques, même s’il ne s’y mêlait rien d’erroné ou d’idolâtrique, pourraient être omises. Part. II, a. 2, De missa, op. cit., p. 303, n. 12. Sans doute on objecte l’autorité d’Augustin au sujet de sa mère Monique. Mais Augustin n’a rien enseigné ; il rapporte simplement une recommandation de sa mère : simple dévotion particulière. Ibid., n. 14. Tout ce qu’on fait pour les défunts n’est qu’une invention humaine, comme le culte des reliques. Il faut s’en tenir à la règle de foi contre laquelle même un ange ne saurait prévaloir. Quant aux prétendues apparitions, ce sont d'éhontés mensonges et des contes. Ibid., n. 16, 17. Désormais, Luther ne parlera plus du purgatoire que pour le tourner en dérision. Il se moquera du pape, qui à prix d’argent vend les messes, les vigiles, les indulgences en faveur d'âmes du purgatoire qu’il ne connaît pas. Part. III, a. 3, De psenitentia, p. 316, n. 26-27. De ces moqueries les Tischreden (Propos de table) sont remplis. Cf. W. (éd. des Tischreden), t. ii, n. 1873 ; t. iii, n. 3695 ; t. iv, n. 4449, 4819 ; t. v, n. 5316, 5989, 6022, 6033, 6200, 6427 ; t. vi, n. 6845.

Mélanchlhon.

Les peines dues au péché

échappent, dit Mélanchthon, au pouvoir des clefs. Loci communes (2 a setas), De satisfactione, dans Corp. reform., t., xxi, col. 49. En conséquence, pas d’indul gences ou de suffrages possibles. Ailleurs, dans le chapitre sur le sacrifice de la messe, il esquisse la théorie sur laquelle roulera toute la doctrine de la Défense de la Confession d’Augsbourg : le sacrifice ne peut être appliqué à autrui, mais on peut prier pour autrui. Ibid., col. 485.

Ainsi donc, Mélanchthon ne niera pas expressément le purgatoire ; dans la Confession d’Augsbourg, il passe sous silence cette question. Dans la Défense, il l’aborde à plusieurs reprises, dans le sens indiqué par les Loci. Le principe de la justification par la foi seule commande toutes les déductions. C’est faire injure à la réparation offerte par le Christ que supposer encore nécessaire une satisfaction de notre part. Apologia, a. 6, De confessione et satisfactione, dans J.-T. Millier, Symbolische Bûcher, p. 200, n. 77. Les catholiques ont transporté dans l’autre vie cette idée d’une satisfaction humaine. Le facile âignos fructus psenitenlise équivaut pour eux à : « Souffrez les peines du purgatoire dans l’autre vie. » Ibid., p. 192, n. 39, 40 ; cf. p. 189, n. 25. Pour légitimer cette conclusion, il faudrait montrer que les peines éternelles ne sont remises qu'à la condition d’une compensation de peines temporaires au purgatoire, ce que n’enseigne pas l'Écriture. Ibid., p. 200, n. 77. Et voici qu’ils veulent racheter les satisfactions dues par les défunts avec les indulgences et le sacrifice de la messe ! Apologia, a. 12 (5), De psenitentia, p. 169, n. 15. Or, d’une part, c’est mal comprendre les indulgences que de leur attribuer de l’efficacité pour délivrer les âmes du purgatoire. Ibid., a. 6, De confessione et satisfactione, p. 262, n. 78 ; cf. p. 170, n. 26. D’autre part, les papes ont transféré l’application des messes aux âmes du purgatoire, a. 24 (12), De missa, p. 262, n. 64, délivrant ainsi ces âmes des peines du purgatoire par la simple application d’une messe, qui aux vivants même ne saurait profiter sans la foi !

La doctrine positive de Mélanchthon est exposée, dans la même Apologia, dans l’a. 24 (12) sur la messe. La messe ne confère pas la grâce ex opère operato ; si elle est appliquée aux vivants et aux défunts, elle ne mérite ex opère operato aucune rémission des péchés, coulpe ou peine. Ce qu’elle fait, c’est vaincre par la foi les terreurs du péché et de la mort. P. 250, n. 11.

S’il en est ainsi, il est inutile de célébrer la messe pour les défunts et d’admettre un purgatoire. Ibid., p. 268, n. 90. Sans doute, il faut croire que la cène du Seigneur a été instituée pour la rémission des péchés, et c’est de véritables péchés qu’il s’agit. Et pourtant la messe n’offre pas une satisfaction pour le péché, car elle deviendrait ainsi l'égale de la mort du Christ : la rémission de toute faute ne peut s’obtenir que par la foi ; la messe n’est donc pas une satisfaction, mais une promesse, un signe sacré (sacramentum) qui requiert la foi. En appliquant les messes aux défunts, on va donc contre l'Écriture. N. 92. Le canon de la messe grecque « applique » la messe aussi bien aux saints du ciel qu’aux défunts ; donc il ne s’agit pas de satisfaction à offrir à Dieu ; c’est une simple mémoire, une action de grâces. Id., p. 269, n. 93. Quand les catholiques allèguent les témoignages des anciens Pères sur Voffrande du sacrifice (oblatio), il ne s’agit en réalité que de prières pour les défunts, et nousmêmes ne les interdisons pas (scimus veteres loqui de oratione pro mortuis, quam nos non prohibemus) ; mais nous rejetons absolument (improbamus) une application de la cène du Seigneur pour les morts, ex opère operato. J.-T. Mùller, op. cit., p. 269, n. 94. Si vérius a été condamné, c’est qu’il refusait de prier pour les morts, et ce n’est pas pour avoir nié que la messe constituât un sacrifice pour les vivants et pour les morts. Ibid.. p. 269, n. 96. Et Mélanchthon de con PURGATOIRE. LES M G ATIONS PROTESTANT ! L270

dure que la doctrine catholique concernant la remis

sion des péchés par un sacrifice extérieur est une

doctrine renouvelée « lu Judaïsme ou même du paganisme. Ibid.. d. 07-98. a noter que, il.mson commentaire >ur la I i' » r.. m. 13-15, Mélanchthon entend le

feu des tentations de la vie présente. Opéra, tlans

Corp. re/orm., t.. p. 1068.

3o Calvin. Calvin n’a jamais eu les ménagements » de Luther ou de Mélanchthon. Après avoir tonne contre les Indulgences, il fond vigoureusement sur le

purgatoire : Maintenant, pareillement qu’ils ne nous rompent plus la tête de leur purgatoire, lequel est par cette OOignee COUpé, abattu et renverse lusques a

la racine. Car h n’approuve point l’opinion d’aucuns

(sans doute fait-il allusion a la Confession d’Augsbourg) qui pensent qu’on doive dissimuler ce poinct et se garder de faire mention du purgatoire, dont grandes

noises, comme ils disent, s’esineuvent et peu d’editieation en vient. Certes, ie senne bien aussi d’advis qu’on laissast tels fatras derrière, s’ils ne tiroyent

grande conséquence après eux : mais veu que le purgatoire est construit de plusieurs blasphèmes et est de iour en iour appuyé encore de plus grans, et suscite de gr.uis scandales, il n’est pas mestier « le dissimuler. Cela possible se pouvolt dissimuler pour un temps, qu’il a esté inventé sans la parolle de Dieu, voire avec folle et audacieuse témérité invente : qu’il a esté reçeu par révélations ie ne saj quelles, forgées « le l’astuce de Satan : que pour la continuer on a meschamment corrompu aucuns lieux de l’Escriturc… i Et. relevant que le purgatoire n’est pas autre chose, sinon une peine que soulïrent les âmes des trépassez en satisfaction de leurs péchez ». il conclut qu’une telle conception est un blasphème contre la satisfaction offerte par le Christ. Institution chrétienne, I. III. c. v, n. 6, Œuvres, t. iv (Corp. re/orm.. xxxii), col. 168.

Quant aux témoignages des Écritures, Calvin les repousse, lis papistes invoquent Matth., xii, 32 ; Marc. iii. 28 ; Luc.xii, 10 : « Je demande s’il n’est pas évident que le Seigneur parle là de la coulpe du péché. > Donc le purgatoire est inutile pour expliquer Mais Calvin veut « bailler une solution plus claire ». Voulant montrer comme un péché ne peut être remis ni en ce monde ni en l’autre, il explique que Jésus-Christ a en vue deux jugements : « Pour ce que le Seigneur voulait oster toute espérance de recevoir pardon d’un crime tant exécrable, il n’a pas esté content de dire qu’il ne serait jamais remis ; mais pour amplifier il a usé de cette division, mettant d’une part le Jugement que la conscience d’un chacun sent en la vie présente et d’autre part le ingénient dernier qui sera publié au jour de la résurrection. Donc aucun pardon, ni maintenant ni au dernier jour, tel est le sens exact des textes. Ibid.. col. 168-169. Ces enfers dont il est question dans l’hil.. n. in. ce n’est pas le purgatoire : ce texte exprime simplement la seigneurie souveraine du Christ en tous lieux. Ibid., col. 169-170. Reste II Mac.xii, 39-46. Calvin explique le but de Judas Machabée faisant prier pour les morts. Ce but concerne les vivants, afin de leur donner estime pour ceux qui étaient tombés, pour que ceux au nom desquels il offrait fussent accompagnez aux fidèles qui estaient morts pour maintenir la vraye religion. Ibid., cil. 171. Mais. ; i coup sur. le zèle de Ju « las Machabée 'tait inconsidéré ». Ibid.

Enfin, il attaque la i forteresse invincible I Cor., m, 12-15. Mais le feu dont il est question ici n’est que « croix et tribulation, par laquelle le Seigneur examine les siens pour les purifier de toutes leurs ordures ». Ibid. Et. de fait, cela est beaucoup plus vrai que d’imaginer un purgatoire. Ce t feu » est donc une métaphore, tout comme l’or, l’argent, les pierres

précieuses, Le -jour du Seigneur n’est pas autre

chose « pie sa présence qui se révèle a chaque tribulation. Le i foiulement » sur lequel se bâtit l'édifice, ce sont les principaux et nécessaires articles de la foi. ('.eux qui édifient avec du bois, de la paille, « In foin, ce sont « eux qui s’abusent en d’autres choses : leur ouvrage périra. « l’arquov. conclut Calvin, tous ceux qui ont contaminé la sacrée pureté « les EscritUTeS par Geste Dente « 't ordure du purgatoire, il faut qu’ils laissent périr l’ouvrage. » Ibid., col. 173.

Le plus difficile est « le réfuter l’argument tiré de la

tradition, c’est-à-dire de la pratique « le prier pour les

morts. Sans doute, avoue Calvin, cette coutume est « lesià introduite devant tre/e cens ans…. mais ie leur

demanderai selon « nielle parolle « le Dieu, et par quelle révélation, et suvvant quel exemple cela a esté faict ». Ibid., col. 171. Or il n’y a rien dans l'Écriture qui autorise la prière pour les défunts ; cette pratique est donc une illusion introduite par Satan, ou un emprunt aux coutumes simplement humaines ou païennes, i L’Escriture donne une bien meilleure consolation, en prononçant que ceux qui sont morts en Nostre Seigneur sont bien heureux, ajoutant la raison qu’ils se reposent de leur peine (Apoc, xiv, 13). » Sans doute, i saint Augustin au livre de ses Confessions recite que Monique sa mère pria fort à son trépas qu’on fist mémoire d’elle à la communion de l’autel : mais ie dy que c’est un souhait de vieille, lequel son fils estant esmeii d’humanité n’a pas bien compassé à la règle de l’Escriture, en le voulant faire trouver bon ». Ibid., col. 175. Les anciens Pères ont fait quelque mention des morts en leurs prières sobrement et peu souvent, et comme par forme d’acquit. Les « papistes » sont toujours après, préférant cette superstition à toutes œuvres de charité. Ibid., col. 176. L’interprétation de I Cor., iii, 12-15 du feu métaphorique de la tribulation se retrouve dans le commentaire de Calvin sur cette épître. T. xlix (Corp. rrform., lxxvii), col. 537.

i Zwingle. — Zwingle est d’accord avec Calvin pour interpréter du feu métaphorique de la tribulation I Cor., iii, 12-15. Voir son commentaire, Opéra vol. vi, t. ii, Zurich, 1833, p. 1 13. Mais sa doctrine concernant le purgatoire est résumée dans les thèses de 1523 : th. lvii : « La vraie Écriture sainte ne connaît aucun purgatoire après cette vie » ; th. lx : < Que l’homme implore avec insistance Dieu en faveur des défunts pour leur attirer sa miséricorde, je n’y vois aucun inconvénient. Mais pour cela fixer un temps et en vouloir tirer un profit, voilà qui est non pas humain, mais diabolique. » E.-F. Karl Miiller, Die Dekenntnisschrijten der reformierten Kirche, Leipzig, 1903, p. 6.

Les thèses de Berne, 1528 (de Kolb et Haller), s’inspirent des idées même de Zwingle. La th. vu affirme qu’il n’y a pas de purgatoire dans l'Écriture, que tous les jours consacrés au culte deî défunts, vigiles, messes de funérailles, services, messes des septième et trentième jours, anniversaires, sont inutiles (vergeblich). Ibid., p. 30.

Dans la Fidei ratio de 1530, voici comment s’exprime Zwingle : Credo purgatorii ignis ftgmentum tam contumeliosam rem esse in gratuitam redemptionem per Christum donatam, guam lucrosa fuit auctoribus suis. Nom si suppliciis et cruciatibus scelerum nostrorum commerita eluere est nrcesse, jam frustra erit Christus mortuus, jam evacuatur (initia. A. 12, ibid., p. 92.

5o Les confessions de l'Église réformée. — 1. Confrssio helvetica prior (1532), a. 26 : Quod autem quidam tradunt de igné purgatorio, fidei christiana : « Credo nmissionem peccalorum et vilam œternam » purgatio nique plense per Christum, et Christi Domini hisce sententiis (on cite Joa., v, 21 : xin. 10) adoersatur. Ibid., . p. 217. 1271

PI RG 'l 01 RE. RÉPONSES CATHOLIQJ I 12 72

2. Confessio Gallicana, a. 24 : Finalement nous tenons te purgatoire pour nue illusion procedee d’icelle mesme boutique de laquelle sont aussi proce dez les vœuz monastiques, pèlerinages, défenses <lu mariage et de l’usage des viandes, l’observation ceremo nieuse des iours, la confession auriculaire, les indulgences et toutes autres telles choses, par lesquelles on pense mériter grâce et salut. Lesquelles choses nous reiettons, non seulement pour la faulse opinion du mérite qui y est attachée, mais aussi parce que ce sont inventions humaines, qui imposent ioug aux consciences. » Ibid., p. 227.

3. Confession d’Erlau (I5112). De purgaiorio : Purgatorium omnium delictorum nostrorum est gratin Dei, sanguis Christi, Spiritus sancti sanctifteatio per fidem et verbum… Meritum gratise Dei et redemptionis Christi culpam et peenam condonavit et combussit. Satisfecit perfecte pro peccatis nosiris… Impium et diabolicum flgmentum est papisticum purgatorium, subterraneum igné a’terno exæstuans ubi purgari animas impie fingunt. Caret enim Scripturse veritate et contrarium gratise Dei, Christi mérita est. Ignis et aqua percuta purgans et exurens, gralia Dei, meritum Christi, Spiritus sanctificatia est. (Pauli I Cor., in.) Ignem judicii et condemnationis punientis peccata, intelligit perdiem et ignem, id est tribulationem, Me ignis non purgat peccata, sed damnât impiorum peccata ; est enim ignis ir ; r Dei. Ibid, p. 293.

Les àmes saintes vont donc au ciel. On peut citer Lazare dans le sein d’Abraham, Luc, xvi, ou encore le Cupio dissolvi et esse cum Christo, de saint Paul, Phil., i, 2. Les àmes ne vont donc pas au purgatoire, mais, comme l'écrit saint Jean dans l’Apocalypse : Beati mortui qui in Domino moriunlur… xiv, 13. Au contraire les àmes des impies sont dans la prison, dans le lieu de tourments, sont elles-mêmes torturées sans fin. Cf. I Petr., iii, 19 ; II Petr., ii, 9. C’est ainsi que l'Écriture et les Pères ont défini le sort futur des àmes, et même Pierre Lombard enseigne que les saintes âmes attendent sous l’autel le dernier jour.

4. Confession anglicane.

Les quarante-deux articles de 1552 (les trente-neuf de 1562).

Art. 23 de 1552 : Art. 22 de 1562 :

Scholasticorum Doctorum romanensium

doclrina de purgaiorio, de indulgeniiis, de veneralione et adoratione tum imaginum, tum reliquiarum, neenon de invocatione sanctorum, res est fiitilis, inaniter conficta et nullis Scripturarum leslimoniis innititur, imo verbo Dei perniciose

coniradieit. Ibid., p. 513.

II. LES RÉ ACTIONS DE LA THÉOLOGIE CATHOLIQUE. —

A vrai dire, toutes ces négations protestantes s’appuient sur des bases bien fragiles. L’exposé qu’on a fait plus haut de la tradition catholique montre, mieux encore que l’exégèse des textes scripturaires le plus souvent invoqués, la force et la vigueur de ce mouvement doctrinal qui part de l’idée de l’expiation en général (idée éminemment scripturaire), pour aboutir à celle de l’expiation du péché pardonné par des peines purificatrices de l’autre vie. Cette position traditionnelle sera en somme, nonobstant quelques exagérations dans l’exposé des preuves scripturaires du purgatoire, la position adoptée d’abord par les théologiens controversistes, par les conciles provinciaux, par les facultés de théologie et enfin par le concile de Trente.

1o Les théologiens catholiques contre Luther.

Un assez grand nombre de polémistes catholiques prirent part à la controverse relative au purgatoire. A la suite de K. Wcrner, Geschichte der apologetischen und polemischen Literatur, Schatlhouse, 1865, nous citerons : Catharin, Apologia pro veritate catholicæ et aposlolicæ fidei ac doctriniv adversus impia et valde

pestifera M. Lutheri dogmata, Florence, 1520, t. IV, p. *."> sq. : Jacques Hoogstraten, De purgaiorio seu de expiatione venialium post mortem libellas, Anvers, 1525 ; Antonio Yarani (cf. Joclier. Lexikon, Leipzig, 1751, t. iv, p. llll). De purgaiorio (s. [.) ; Berthold de Chiemsee, Teutsche Théologie (s. i.), c. lxxxilxxxiii. On peut ajouter : Jean Faber, Responsiones duse de antilogiis, Cologne, 1523 ; Malleus in hæresim Lutheri. Cologne, 1524 ; Fred. Grau, Contra catholicæ fidei adversarios, Mayence, 1524 ; J. Clichtove, Antilutherus, Paris. 1524 ; Vinc. Gracchari, De purgaiorio et suffragiis, Venise, 1535 ; J. Tavernier, De purgaiorio animarum, Paris, 1551. N’ous n’avons pu consulter que les quatre auteurs suivants :

1. Cafetan.

Les deux questions de Cajétan, qui forment son opuscule (xxill) De purgaiorio ont été écrites à Augsbourg, 25 septembre-17 octobre 1518. Cf. Cajétan, Saint-Maximin, 1934-1935, p. 12-43. Elles visent principalement les erreurs luthériennes de la proposition 38 condamnée par Léon X. Voir col. 1266.

Au purgatoire, dit Cajétan, il ne peut plus y avoir de mérite : les àmes sont en état de satisfaire, non de mériter ou de démériter. Si, en effet, elles pouvaient encore démériter, elles seraient encore capables de se damner : ce qui est contraire à la nature même du purgatoire. De plus, ces âmes sont certaines de leur salut : n’y aurait-il, pour leur donner cette certitude, que l’enseignement de la foi qu’elles ont reçu encore sur terre, ce serait déjà suffisant. Mais elles ont de plus une parfaite connaissance de leur état par la science intuitive qu’elles possèdent d’elles-mêmes. Enfin, elles ne vivent pas dans l’horreur perpétuelle, car < elles aiment la divine justice et subissent volontiers leurs peines par soumission à cette justice ».

Cajétan se pose l’objection des visions dans lesquelles certaines âmes auraient affirmé leur incertitude par rapport au salut : « La doctrine de l'Église, répond-il, ne s’appuie pas sur ces visions. L'Église ne les a pas approuvées : ce ne furent peut-être que des songes… ou des illusions diaboliques pour introduire de nouveaux dogmes. » Opuscula, Lvon, 1575, p. 1 loin.

2. Pri('rias (Silvestre Mazolini). — Le titre exact de l’ouvrage de Priérias contre Luther est Errata et argumenta Martini Luteris recitata, détecta, repulsa et copiosissime trila, 1520. Le titre habituellement cité, De juridica et irrefragabili Ecclesiæ veritate, n’est qu’un sous-titre. Ce n’est pas au 1. III. mais au 1. II que se trouve la controverse relative au purgatoire, c. xi-xii, p. clxi v°-clxxxv r°. Il est inutile d’entrer dans le détail des idées et des discussions. La réfutation écrite par Priérias a servi de thème à Eck, dont l’ouvrage, plus considérable, ne fait que développer l'écrit de Priérias. Voir plus loin. Mais on trouve déjà chez celui-ci la justification du terme catholique : purgatorium et le rejet de l’expression punitorium. C.clxxvii.

3. John Fisher.

Dans son Assertionis lutheranæ confutatio, composé en 1520, imprimé à Paris en 1523 (voir Fisher, t. v, col. 2558). Pévêque de Rochester reprend un à un chacun des quarante articles luthériens, condamnés par la bulle de Léon X. En réfutant les art. 2, 3, 4, 37, 38, 39, 10, c’est un véritable traité du purgatoire qu’a écrit John Fisher. Tout l’essentiel de la synthèse bellarminienne s’y trouve déjà. L'écrit, on le sait, est composé sous forme de dialogue entre l'évêque » et Luther.

a) La réfutation de l’art. 2. In pueris baplizatis manere peccata. op. cit.. p. xevi, prend la théorie luthérienne à son point de départ : même chez les enfants baptisés, le péché demeure, qui leur interdit l’entrée du ciel.

b) Ainsi est rendu intelligible l’art. 3. Fomes peccati, etiamsi nullum adsit actuale peccatum, moratur 12 7. ;

PU RG ici RI R ÊPO NSI - C I lloi.l QUES

L 2 7 4

txeuntem wimam ah ingressu cteli, p. cxlvi,

Article contraire à la doctrine de l'Église qui enseigne que le baptême enlève tout le notas du péché. En ceux qui son ! baptisés, le fomes (la concupiscence) n’est plus un péché ; il est un défaut <lu corps, le péché est une t.ii-iii- <ic l’Ame.

L’art. ' de Luther, p. cl, es ! reproduit tel que l’a condamné Léon. mais Fisher > ajoute une remarque empruntée A Luther (voir ci dessus, col. 1266), s< défen liant d’avoir pu prendre | » <>-.ii ion à re sujet puisque l'Écriture ne renferme rien sur l'état des.nues saintes après la mort ni sur le purgatoire. Ce qui amène une excellente remarque de Fisher : si l’on doH croire au purgatoire (Luther j croyait encore) et si les saintes Écritures n’en parlent pas. c’esl qu’il J a une

autre source >ie preuves, les traditions apostoliques, la

pratique de l'Église, les interprètes sacres (les l'èresl,

etc. i Revenant au sujet même « le l’article, Fisher

démontre que la charité qui anime les Justes sur terre, si elle n’enlève pas la crainte de la mort, suffit ci-peu dant a chasser toute crainte relative à la damnation et a donner toute confiance par rapport au salut. 1'. ii.iv. dt L’art. 37 de Luther nie la possibilité de prouver le purgatoire par l'Écriture. Fisher commence par

insister sur l’idée émise déjà dans sa réfutation de l’art. I. Même si l'Écriture ne pouvait prouver le purgatoire, il J aurait bien d’autres chefs de dénions tration, et il rappelle notamment la pratique de la prière pour les morts et l’enseignement formel de tant de Pères grecs et latins. Toutefois il est incroyable

qu’un dogme aussi nécessaire que le purgatoire n’ait pas de fondement dans l’Kcriture. Mais ce fondement ne sera mis en relief que si l’on veut bien conserver a l'Écriture le sens que lui reconnaît l’autorité souveraine de l'Église catholique. Les textes invoqués par l'évêque de Itoehester sont : Mat th.. Ml. 32 ; I.loa..

v. 16 fpeeeatum non mi mortem) ; Apoc, v, : t (sablas terrant purgatoire) ; l’hil.. n. lu. Le ps. lxvii, 19, reproduit par Eph., i. S. indique l’existence d'élus au ciel : Luc. wi. 22, enseigne l’existence des réprouvés ; donc, puisque rien de souille n’entrera au ciel et qu’il faudra rendre compte de la moindre parole oiseuse au jour du Jugement (Matth., xii, 36), il faut un lieu intermédiaire. Luther se moque du texte. Trtmsioimus per ignem et-ai/aani <ps. lx. 12), et cependant nombre de Pères l’ont applique au purgatoire. Enfin on doit invoquer I Cor., m. ll-lô. et l’interprétation d’ignis au s, -ns du feu de la conflagration générale, comme le voudrait Luther, en s’appuyant sur II Thess., i. 9, et II l’et.. m. 7. ne saurait être retenue. En dernier lieu, l'évêque défend la canonicité et l’autorité de II Mac. xii. 39-46, invoquant, outre l’autorité de l'Église, les témoignages de Jérôme et d’Augustin.

que termine en réfutant deux assertions luthériennes : le purgatoire n’a été inventé que par esprit de lucre ; l'Église grecque n’a pas la croyance de l'Église latine. Fisher invoque ici l’existence du Mémento des morts dans toutes les liturgies.

Finalement Luther est convaincu et obligé d’admettre le purgatoire, mais il prétend qu’on ne doit imposer cette croyance.< personne. L'évêque déclare qu’ici il est nécessaire de contraindre (cf. Luc. XIV, t incidemment s’intercale tout un paragraphe sur l’autorité doctrinale de saint Thomas d’Aquin. La conclusion de ce long chapitre es1 quelepoint de depart des erreurs de Luther est sa fausse conception d’un purgatoire qui serait une sorte d’enfer, moins l'éternité, et dans lequel, comme en enfer, régnent le trouble, la crainte, l’horreur, le désir de fuir. I'. ».

e) L’article suivant : animée non sunt securte…, etc., remarque I isher. comporte deux parties. Voir col. 1265. Sur le premier point, l'évêque montre que h s âmes sont toutes certain ! - de leur salut : elles ont fait, avant la

mort, une pénitence suffisante et a elles s’applique

le texte de Luc, . 7. 10. Elles soutirent, mais

elles aiment leur souffrance eu ce que cette soûl France est. pour elles, la condition de leur bonheur

futur, et la certitude de leur s.ilul hur apporte une immense consolation. Sur le second point, rue proba tum est… ipsas esse extra statum merendi oel augendss caritatis, Fisher lait une dissertation remarquable sur la mort, terme de la vie : le temps <ie l'épreuve, « le l’opération, ^ » mérite est la vie présente, il Invoque,

loi. i. I ; l.ccl.. i. 10 ; Gal., m. '.' ; 1 Cor., vi. 2 : Il cor… 10, et, parmi les l’eus. Vugustln, Jérôme, Chrysostome, Origène. P. Dcxxxvii d< xxxix.

Mais ce n’est pas assez de dire que le purgatoire est un lieu de pénalité ; c’est un lieu de purification, ii"ii

punitorium, sed purgatoritun. P. dcxlii. I) L’art. 39, animée in purgatorio peccant sine inter missione, etc. est aussi une injure a la doctrine catho lique. Les âmes du purgatoire ne pèchent pas : cettes elles désirent le repos, mais elles ne prennent pas en haine leurs peines. Saint Paul encore en vie exprimait le désir de quitter cette vie pour être uni au Christ, l’hil.. i. 23 ; ainsi les âmes désirent quitter le purgatoire pour régner avec le Christ. En cela aucune faute. Elles possèdent la charité : or la charité est patiente et supporte tout. I Cor., .xiii, 7. Les Ames supportent donc patiemment leurs peines. Et d’ailleurs, si elles péchaient, ce ne pourrait être que mortellement, et elles deviendraient ainsi dignes de l’enfer, p. DCXLVll, puisque aucun remède au péché ne pourrait plus leur être applique Donc il faut maintenir qu’au purgatoire il n’y a plus ni péché, ni mérite possible ; plus de vice nouveau, plus de nouvelle vertu.

g) L’art, lu peut présenter deux sens différents. La finale. <jntim si für sr satisfecissent, pourrait se rapporter aux satisfactions qu’elles auraient pu offrir au cours de la vie présente. Et, en ce cas, la proposition ne mérite aucune note, car il est exact qu’en satisfaisant en cette vie pour leurs fautes les pécheurs fontœuvre plus efficace que la peine du purgatoire ne le saurait être. Mais, si l’on rapporte cette finale aux peines du purgatoire, comme si les âmes délivrées par les suffrages des vivants étaient ensuite moins heureuses qu’elles ne l’auraient été en achevant leur purification d’outre-tombe, la proposition devient erronée, car ces souffrances purificatrices ne leur font acquérir aucun mérite, aucun droit à récompense : niliil omninomercedis lucratur (peena) maculas tantum expiasse contenta.

P. I)l XLIX.

I. Jean Eck. Le célèbre controversiste de la dispute de Leipzig ne pouvait laisser dans l’ombre la

question du purgatoire Eck s’esl al lâche a réfuter les

erreurs de Luther sur ce point en deux écrits, dont le premier, daté de 1523, s’attaque aux premières erreurs.

encore louvovanl es. de l’hérésiarque : le second, paru en 1530, visant plus spécialement le traité Wiilirruf

rom Fegfeuer. Voir col. 1267. Les deux écrits d’Eck sont contenus dans Operum Johannis Eckii secunda purs. 1531, p. xiii r-lxxxii v : lxxxiii r°-xcvi.

ni Le br purgatorio est divisé en quatre livres ; il faut regretter cjue ce traité s.iii si peu connu : il a servi de modèle a la synthèse de Bellarmin, lequel a trouve dans l'œuvre de son devancier un modèle déjà presque parfait. En voici l’analyse :

L. I. L’existence du purgatoire. L’auteur expose d’abord son dessein de combattre les erreurs luthériennes. C. i. L’existence du purgatoire, ] qu’en

dise Luther, peut se démontrer par l'Écriture, pri paiement par I Cor., iii, ll-lô. c. n. L’interprétation « h ce texte, appuyée sur les autorités d’Ambroise, de Jérôme, d’Augustin, de Grégoire, montre qu’il s’agit bien du feu du purgatoire, c. in-v, t qu’en conséquence on msaluait admet inl’exégèse de Lui lier, qui voit ici le feu <le la conflagration et, dans le jour du Seigneur, la simple tribulation. ('.. vi. Mais d’autres

textes peuvent être invoques, nul amiiu ni.Mallll., v, 20 (c. vil) ;.Mallll., XII, 32 (C. IX), sans qu’on doive

s’arrêter aux subterfuges de Luther et de Mélanchthon

sur ces textes. C. vin. Luther met en cause, à propos de II Mae., xii, l’autorité même de ce livre ; Kck montre que cette autorité est intacte et que le livre est canonique. G. x. Enfin viennent d’autres textes empruntés aux psaumes, lxv, 12 ; xvi, 3 ; xxv, <>, et à l'épître de Pierre, I Pctr., i, 7. C. xi. Cette démonstration permet à Eck de conclure que l’existence du purgatoire est un dogme de la foi et que la négation du purgatoire est une véritable hérésie. Ainsi en a jugé saint Thomas d’Aquin, dans son opuscule Contra errores Grœcorum ; ainsi en a décidé l'Église elle-même au concile de Florence. C. xii.

L. II. Les âmes du purgatoire sont certaines de leur salut. — L’Apocalypse le témoigne en apportant à l’Agneau les louanges de toutes créatures, même de celles qui sontsuft terra, Apoc, v, 3, 13. On trouve ici réunis les saints du ciel, in cœlo, les saints de la terre, in terra et les âmes du purgatoire, sub terra. C. i. Ces âmes louent le Seigneur et ont donc la certitude d'être en purgatoire et non en enfer, c. n ; elles sont assurées de leur salut : c’est d’elles que le canon de la messe dit qu’elles reposent dans le Christ ou encore qu’elles dorment dans le sommeil de la paix. C. m. Ces expressions fournissent à Eck l’occasion de montrer en quoi consiste le repos dans le Christ pour les âmes du purgatoire et comment, nonobstant ce repos, nous devons encore pour elles demander à Dieu le repos éternel. C. iv. Vraiment, en attribuant aux âmes du purgatoire l’incertitude de leur salut, Luther s'éloigne de la doctrine catholique ; son enseignement est suspect, et il laisse périr les suffrages pour les défunts. C. v. Il est très certain que les âmes sont en purgatoire assurées de leur salut : le dogme du jugement particulier fonde cette vérité, c. vi, et il est non moins certain que le secours de nos suffrages ne prive pas ces saintes âmes d’un degré de gloire qu’elles auraient obtenu par leurs souffrances prolongées. C. vu. En vérité Luther est plein de contradictions, et son enseignement mérite condamnation. C. vin.

L. III. Le purgatoire ne comporte pas cet état peccamineux que Luther attribue aux âmes souffrantes. — Luther rend le purgatoire en quelque sorte pire que l’enfer : il nous y montre les âmes pleines d’horreur, d’angoisse, de désespoir. Pour reprendre son système au point de départ, il faut dire que la crainte de la mort n’implique pas nécessairement une charité imparfaite qui engendre à elle seule la peine du purgatoire. C. i. Le juste peut craindre la mort, tout comme le pécheur peut aimer la vie plus que Dieu. C. n. L’imperfection de la charité ne doit pas être mesurée aux restes des péchés. C. m. Et Luther, à son point de départ, commet une double erreur : tout d’abord en affirmant qu’en l’homme régénéré les restes du péché d’Adam empêchent la charité, ensuite en enseignant que, même après le baptême, le péché subsiste encore dans l'âme. C. iv.

Toutes les mauvaises raisons accumulées par Luther, c. v-vi, doivent céder devant cette constatation : Luther affirme que les âmes du purgatoire seraient dans le trouble et l’angoisse en raison d’une foi et d’une charité imparfaites. Or, ces âmes ont pleine connaissance de leur état ; elles ont pleine confiance en Dieu, ce qui implique la fausseté totale de la position de Luther. C. vu. Ici, il faut signaler une très belle page d’Eck : l’aride exposé théologique fait place à un mouvement oratoire de la plus grande beauté. La pensée du Christ est tellement présente aux saintes âmes que pour elles se renouvelle, dans les souffrances

purificatrices, la scène du Christ’venant a ses apôtres sur la mer en tempête : Habele fiduciam ego sum, nolite timere (Matin., xiv, 27) ; l’amour du Christ soutient ces saintes âmes et nourrit leur confiance. Donc, en elles, pas de désespoir, c. viii, et pas de crainte : la douleur n’est pas la crainte. C. ix. Toute la « tragédie » luthérienne sur l'état des âmes au purgatoire se fonde sur la regrettable confusion que les peines du purgatoire sont les mêmes que celles de l’enfer, moins la durée, c. x : il y a une différence de nature. Pensée profonde et suggestive, qu’on est heureux de trouver sous la plume d’un théologien du xvie siècle I

Les chapitres suivants, xi-xv, s’appliquent à relever les fausses interprétations de Luther relatives aux textes scripturaires invoqués par lui en faveur de son étrange conception de l'état des âmes au purgatoire, et en terminant Eck rappelle la doctrine catholique : les âmes, au purgatoire, expient les péchés véniels qu’elles ont commis et non réparés, et les péchés mortels dont elles sont contrites, mais pour lesquels elles n’ont pas satisfait ici-bas. C. xvi.

L. IV. Pas de mérite ni de démérite possible pour les âmes du purgatoire. — Nous retrouvons ici, à peu de chose près, les arguments de Fisher sur l’impossibilité de mériter après la mort. C. i-n, v-vi. Toutefois il faut se garder d’interpréter ces textes, et notamment Eccl., xi, 3, comme s’il n’y avait pas, dans l’autre vie, place pour le purgatoire entre le ciel et l’enfer ; Eck invoque ici l’autorité de Jérôme et de Jean Damascène. C. in-iv. L’erreur de Luther est donc formelle, c. vii, et toutes les raisons qu’il apporte en faveur de la possibilité d’un accroissement de grâce chez les âmes du purgatoire, c. viii, sont facilement réfutables. C. ix. Pareillement, c’est une détestable erreur que d’affirmer de ces saintes âmes qu’elles pèchent sans cesse, c. x, parce qu’elles ont horreur de leurs souffrances et aspirent au repos, c. xi ; c’est leur faire injure que leur attribuer un égoïsme coupable et un amour vicieux qui les oppose à Dieu. C. xii. Les raisons apportées en ce sens par Luther ne sont pas recevables. C. xin. Il est nécessaire d’affirmer contre Luther que les âmes du purgatoire satisfont pour le reste de leurs péchés et qu’au purgatoire la satisfaction que pourrait offrir sur terre la seule charité ne suffit plus : il faut l’expiation de la douleur. C. xiv. Le c. xv et dernier forme la conclusion générale.

b) Le second traité d’Eck est moins remarquable, et son allure trop polémique lui enlève cette sérénité qui ajoute au poids des arguments théologiques. Il est intitulé Confutatio furiosi libelli Ludderi de Purgatorio.

La I re partie, très brève, relève la contradiction qui s'étale dans la nouvelle attitude de Luther par rapport au purgatoire : l’hérésiarque nie maintenant l’existence même du purgatoire et déverse ses calomnies sur cette croyance de l'Église. Aussi convient-il de lui rappeler les condamnations déjà portées à ce sujet contre les albigeois et la profession de foi du concile de Florence. La IIe partie s’attache à la démonstration scripturaire du purgatoire, répartie en sept chapitres. Rien de bien nouveau en tout cela.

L'œuvre de Jean Eck, quelle que soit la faiblesse de son argumentation scripturaire (nous avons dit au début l’inconvénient de vouloir à tout prix pourchasser Luther sur ce terrain), est vraiment remarquable. Elle marque, pour la théologie du purgatoire, une évolution considérable qui dégage cette théologie des chemins battus, dont un contemporain, Dominique Soto, n’a pas su encore se libérer dans son Commentaire sur les Sentences, t. IV, dist. XIX, écrit cependant après la révolte de Luther. Eck ne présente pas encore, comme Bellarmin, un traité complet et parfaitement équilibré. Il a cependant préparé la voie à celui-ci

et Un aura fourni les meilleurs traits de sa synthèse, [toutefois, entre Eck et Bellarmln, il >.1 i<- concile de [Yente ; c’esi pourquoi l'œuvre de Bellarmin, mieux que celle d’Eck, se présente comme un commentaire autorise des décisions « lu concile.

neilea provinciaux. lu l ; i-. » h « i aombre de conciles provinciaux, émus « les négations luthériennes) affirmèrent, avant même le concile de Trente, la foi catholique mit le purgatoire. On peut citer celui de sens, en 1529, Mansi, Concil., t. xxxii, col. [173-1174 ; celui de Mayence, en 1549, c xtt. Mansi. col. 1416 ; celui de Narbonne. en 1551, Mansi. col. 1251 t. : celui de Cambrai, en [565, Mansi. t icxxiii, col. 1416,

Voici a titre de spécimen, le texte de la formule de

.retienne et catholique, relatif au purgatoire, for mule rédigée en 1556 par le concile polonais de LowiCX, Mansi. t. xx. col. ">1 1 :

l’inniter crcdeintum Ml post liane vilain purgatorium oiiin.mun m quo soh dur po’na peccatis adluic débita. I i-.lem t.imen subvenitur McriOdO altaris, oratione. jejuiuo. eleemos na. alusque bonis operibus ivorum sient et indulgentiis. quo citais ab ea hbeientur. Animadefunctonun pin-galamo remuant cimi ( luisto m ca-lo et anima' impioniin bine migrantes sempiternis inferni tr.uluntur supplieiis. Cavalière, n. 1481.

3o Censures des universités. 1. La première faculté qui s’occupa de Luther fut la faculté de Louvain. Elle soumit a l’examen de la faculté de Cologne un travail de iss pages avec diverses publications de Luther. Le 30 août 1519, la faculté de Cologne donna son Jugement en forme solennelle. Elle signale les erreurs suivantes touchant le purgatoire :

v. (Luther) rejette la satisfaction requise à la suite du peelie mortel pardonné, puisqu’il prétend que Dieu remet la peine en même temps que la coulpe du péché.

vu. H formule des erreurs ineptes sur les peines du purgatoire et l'état des âmes après cette vie. par exemple qu’aucune âme n’y souffre pour des pèches mortels, mais seulement pour des péchés véniels.

vin. Du encore : que les âmes du purgatoire aiment Pieu d’un amour défectueux et coupable, y pèchent sans interruption et cherchent plutôt leur intérêt que la volonté de Dieu, ce qui est contre la charité ; que les morts, non moins que les vivants, sont en état de mériter pour la vie éternelle… Duplessis d’Argentré, Coll. fadiciorum, t. 1 b, p. 3.'>8-3ô9.

Dans son jugement du 7 novembre 1519, la faculté de Louvain se contente de stigmatiser la proposition

générale de Luther relative a l’inutilité de la satisfaction. Trop. 17. ibid, p. 360.

2. La faculté de théologie de Paris publia le lô avril 1521 sa célèbre Determinatio super doctrina Lutheri hactenus revisa. Dans L’introduction on indique expressément que Luther répand d’intolérables erreurs sur… la satisfaction…, les peines du purgatoire ».

Parmi les « propositions tirées des écrits de Luther autres que la Captivité de Babijlone », la faculté de Paris signale (tit. xi) neuf propositions touchant le purgatoire, et elle leur inflige une censure doctrinale :

I. « Il n’y a absolument rien dans l’Kcriture sur le purgatoire. 1. ; 7 de la bulle). — FaUMe, favorable.1 l’erreur des vaudois. répugnant au sentiment des saints l’eres.

II. Il ne paraît pas prouvé que les âmes du purgatoire soient hors d'état de mériter ou de croître en charité. (Th. xviii du 31 oct. 1517 ; bulle, a. 38). — Fausse, t. m raire, impie et. en tant qu’elle prétend que ces âmes sont .en cet état, erronée « fins la foi.

m. Il ne paraît pas prouvé que les âmes du purgatoire soient certaines de leur saint, du moins toutes.. (Ibid., th. xix ; bulle, a. 38). - Fausse, présomptueuse et, en

tant qu’elle affirme cette incertitude, contraire a la tradition de l'Église et.1 la doctrine dis saints.

iv., Los âmes au purgatoire pèchent continuellement,

tant qu’elles oui horreur des peines et demandent le repos

et parce qu’elles recherchent leur Intérêt plus que la olonle

île Dieu, ce qui est contraire a la charité. Fausse,

impie. Injurieuse aux Ames du purgatoire, hérétique. v.. la chante Imparfaite du moribond comporte néces

s. mentent une grande crainte, d’autant plus grande que la

charité est moindre. (Bulle, a. t.i

vi. La peine du purgatoire est la terreui et l’horreur de la damnation et de renier. Fausses, téméraires et

suis fondement. (Qualification se rapportant aux deux prop. et i i

il. Il est probable que les anus du purgatoire sont dans une telle contusion qu’elles msavent pas dans quel état elles sont, de damnât ion ou de salut ; il leur Semble nieiue

qu’elles vont s la damnation et tombent dans l’abtme.

m. Elles sentent seulement le commencement de leur damnation, sauf qu’elles sentent que la porte de l’enfer n’est pas encore fermée sur elles. fausses, offensives

des oreilles pics. Injurieuses B l'étal des aines du purgatoire. (Qualifications se rapportant aux deux prop. vu et et vin.i

i. Toutes les âmes qui descendent en purgatoire n’ont qu’une fol Imparfaite et même, de quelque façon qu’on les

délivre de leurs peines, elles ne peuvent acquérir la santé » parfaite si on ne leur ote d’abord le péché, c’est-à-dire l’imperfection de la foi, de l’espérance, de la charité. » — Dans toutes ses parties, fausse, téméraire, en désaccord avec une saine intelligence de l'Écriture. Duplessis d’Argentré, Coll. judic, t. i b, p. 372.

/II. LE C0XC1LE DE TRENTE. — Depuis le début du concile, la question du purgatoire était prévue au programme. Massarelll nous apprend que, dès le 19 juin 1517, des articles sur le purgatoire avaient été distribués aux théologiens mineurs et que leur discussion avait occupé les séances des jours suivants. Conc. Trid., t. i, p. GG5. Les événements et l’ordre des discussions conciliaires retardèrent l’examen de la question jusqu'à la fin du concile. A l’issue de la congrégation générale du 15 novembre 1563, il fut décidé que des théologiens qe toutes nations rédigeraient les canons sur les dogmes restant à définir : purgatoire, indulgences, culte des saints et des images, que les Pères adopteraient par placet. Conc. Trid., t. ix, p. 1017, note G. Le décret des théologiens mineurs était prêt dès le 30 novembre : ces théologiens observaient que ces matières avaient déjà été traitées dans d’autres conciles et notamment à Florence et même en certaines sessions du concile de Trente, et qu’en conséquence il suffisait de les aborder brièvement et en des formules générales, laissant aux évêques le soin de faire le reste. Ibid., t. ix, p. 1069. Ces « canons », écrit l'évoque de Verdun, Psaume, rédigés et approuvés a nonnullis doctissimis Patribus et theologis, avaient été distribués par écrit par le secrétaire du concile peu avant la réunion plénière. Ibid., t. ii, p. 878. Le décret sur le purgatoire fut lu par l'évêque de Castellaneta. Ibid., t. ix, p. 1069. De timides observations furent faites. Claude de Saintes, abbé de Lunéville, aurait désiré qu’on ajoutât des textes scripturaires ; Laynès désirait qu’un canon vînt corroborer la déclaration du décret. Ibid., p. 1071. Les évêques français désiraient partir et ne pouvaient être retenus ; les décrets furent donc lus, comme il avait été convenu, et acceptés par acclamation par la presque totalité des Pères. Ibid., p. 1076. Dès le lendemain, le décret sur le purgatoire fut publié en la xxv c et dernière session.

c.um catholica Eeciesla, Puisque l'Église catho Spiritu sancto edocta, ex lique, instruite par l’Esprit sacris Litteris et antiqua Saint, a la lumière des

l’atrum traditione, in sacrii saintes Écritures et de l’an conciliis et novissime in bac lique tradition des I'ères, a

œcumenica synodo docucrit, enseigné dans les sacrés con purgatorium esse, anim isque ciles et enseigne en dernier

loi detentas fidclium suffralieu dans ce concile œcumé giis, potissimuui vero accepnique qu’il y a un purgatoire

tabili altaris sacrificio juvæt que les âmes qui y sont

ri : pneciplt sancta synodus détenues Boni secourues par episcopls, ni sanam de purles suffrages des fidèles et gatorio doctrinam, a sanctis surtoul par le saint sacrifice Patribus ci sacrls concillis ( ! < l’autel, le saint concile traditam, a Christl fidelibus prescrit aux évoques de credi, teneri, docerl et veiller < ce que la doctrine ubique prædicari diligenter vraie du purgatoire, reçue studeant. A.pud rudem vero des saints Pères et des saints plebem difflciliores ac subti conciles, soii prêchée parUores quæstiones, quæque ad tout avec zélé et que tes œdiflcationem non faciunt, chrétiens en soient instruits, et ex quibus plerumque nuUa s’y attachent et la croient. fit pietatis accessio, a popuMais, près de la toule peu laribus concionibus secluinstruite, les prédications dantur. Cf. I Tim., i, 1 ; populaires devront être dén, 21J ; Tit., iii, 9. Incerta pouillées de toutes questions item, vel <ux specie falsi plus difficiles et subtiles, qui laborant, evulgari ac tracne présentent aucune utilité tari non permittant. Ka pour l'édification et desvero qiue ad curiositatem quelles il ne sort la plupart quandam aut superstitionem du temps aucun profit pour spectant, vel turpe lucrum la piété. Les évêques ne persapiunt, tamquam scandala mettront pas qu’on y aborde et (ideliuin oiTendicula proles points incertains et qu’on hibeant. Curent autem épisy aflirme des choses appacopi, ut fidelium vivorum remment fausses. (Ju’ils insuffragia, missarum scilicet terdisent comme scandaleux sacrificia, orationes, eleemoet offensant pour les fidèles synse aliaque pietatis opéra, tout ce qui se rapporte à la qua 1 a fidelibus pro aliis ftdepure curiosité, tout ce qui libus defunctis fieri consues’inspire d’un lucre honteux. verunt, secundum Ecclesiæ Mais, au contraire, les instituta pie et dévote fiant, évêques veilleront à ce que et quie pro illis ex testatoles suffrages des fidèles virum fundationibus vel alia vants, à savoir les sacrifices ratione debentur, non perdes messes, les prières, les functorie, sed a sacerdotibus aumônes et les autres œuvres et Ecclesise ministris et aliis, de piété que les fidèles vivants qui hoc pra ?stare tenentur, ont coutume d’offrir pour les diligenter et accurate persolfidèles défunts se fassent vantur. Denz.-Bannv., n. 983 aec piété et dévotion, selon (sauf la finale) ; Cavallera, les institutions de l'Église. n. f 462. Les suffrages dus aux défunts

par suite des fondations établies par testament ou de toute autre manière, devront être acquittés non avec négligence, mais avec soin et diligence, par les prêtres et les ministres de l'Église et les autres qui y sont tenus.

Ce décret concernant la croyance au purgatoire est intéressant à plus d’un titre et appelle un commentaire :

l. Les sources de la croyance au purgatoire sont indiquées : Écriture sainte, tradition antique des Pères, conciles et très récemment le concile de Trente luimême.

De la sainte Écriture le concile ne dit rien de plus précis ; il laisse donc aux théologiens et aux exégètes le soin de chercher en quelle façon l'Écriture peut donner un fondement à la croyance au purgatoire, soit par des textes précis, comme Eck avant le concile de Trente et Bellarmin, après ce concile, ont voulu le faire, pourchassant ainsi Luther sur le terrain même que sa proposition 37 voulait éluder, soit par la doctrine générale, explicitement proposée par l'Écriture, d’une expiation nécessaire pour tout péché non encore entièrement réparé. Nous avons ici même tracé la marche de celle double démonstration ex sacris Litteris.

De l’antique tradition des Pères, les théologiens et les prélats assemblés à Trente ont invoqué dans leurs travaux préliminaires les deux chapitres de lapremiêre partie du Décret de Gratien, can. 4, Qualis ; can. 5, Qui in aliud, dist. XXV, le premier tiré de saint Grégoire, Dial., t. IV, c. xxxix, P. L., t. lxxvii, col. 390, le second attribué à saint Augustin, en réalité de l’auteur inconnu du De vera et falsa psenilentia, n. 18, P. L., t. xl, col. 1118.

Des conciles les Pères de Trente rappellent simplement le décret d’union des Grecs, bulle Lœtentur cali, du concile de Florence. D’après l’indication fournie par E. Ehses, Conc. 1 ml., t. ix, p. 1077, note 3 et 4.

Le concile de Trente lui-même avait déjà touché indirectement ou directement à la question du purgatoire en deux endroits, sess. vi, De juslificatione, can. 30, et sess. xxii, De sacrifie i<> missie, can. 3, cf., c. 11. Le rappel de ces deux textes conciliaires fixe l’objet précis de la définition tridentine.

2. Objet précis de la définition tridentine.

a) Sess. vi, can. 30 :

Si quis post acceptant Si quelqu’un dit qu'à tout

j ustificationis gratiam cuilipécheur pénitent qui a reçu

bet peccatori psenitenti ita la grâce de la justification

culpam reinitti et reatum l’offense est tellement remise

alterna ; peense deleri dixerit, et l’obligation à la peine éter ut nullus remaneat reatus nelle tellement effacée, qu’il

pœnæ temporalis, exsolvenne lui reste aucune obligation

dse vel in hoc sasculo, vel in de peine temporelle à payer,

futuro, in purgatorio, antesoit en ce monde, soit dans

quam ad régna cselorum l’autre, au purgatoire, avant

aditus patere possit ; A. S. que l’entrée au ciel lui puisse

Denz.-Bannw., n. 840. être ouverte, qu’il soit anathème.

Dans le c. xiv, qui correspond à ce canon, le concile s'était contenté d’affirmer que « la pénitence d’un chrétien tombé dans le péché est bien différente de celle du baptême ; elle renferme… la satisfaction par le jeûne, les aumônes, les prières et les autres exercices de la vie spirituelle, non certes pour la peine éternelle qui est remise avec la faute par le sacrement ou par le désir du sacrement, mais pour la peine temporelle qui (ainsi l’enseignent les saintes Écritures), n’est pas toujours, comme dans le baptême, remise entièrement ». Denz.Bannw., n. 807. Dans le canon, le concile fait allusion à la possibilité de payer cette dette satisfactoire, soit en ce monde, soit dans l’autre, au purgatoire. La doctrine générale de la satisfaction pour la peine due au péché, pardonné est reprise par le concile, sess. xiv, c. Il et can. 12. Voir Pénitence, t.xii, col. 1089, 1110.

b) Sess. xxii, De sacrificio missæ, can. 3 :

Si quis dixerit, missæ saSi quelqu’un dit que le crificium tantum esse laudis sacrifice de la messe est seuet gratiarum actionis, aut lement [un sacrifice ] de nudam commemorationem louange et d’action de sacrificii in cruce peracti, grâces, ou une simple comnon autem propitiatorium, mémoraison du sacrifice acvel soli prodesse sumenti, compli sur la croix, et non neque pro vivis et defunctis, pas un (sacrifice] propitiapro peccatis, pœnis, satistoire, ou bien qu’il ne profite factionibus et aliis nécessitaqu’au seul prêtre commutibus, offerri debere ; A. S. niant et qu’il ne doit pas être Denz. - Bannw., n. 950. offert pour les vivants et

pour les morts, pour les péchés, les peines, les satisfactions et toutes les autres nécessités, qu’il soit anathème.

Ce canon correspond au c. ii, dans lequel le concile rappelle la valeur propitiatoire du sacrifice de la messe : cette valeur ne fait, en aucune façon, tort à celle du sacrifice de la croix : « aussi, conformément à la tradition des apôtres [la messe] est offerte non seulement pour les péchés, les peines, les satisfactions et les autres nécessités des fidèles vivants, mais encore pour ceux qui sont morts dans le Christ et ne sont pas encore entièrement purifiés ». Denz.-Bannw., n. 940. Voir Eucharistie, t. vi, col. 833-834.

Ces deux points, déjà définis avant la xxv* session, fixent la portée dogmatique du décret concernant le purgatoire : sont proposés comme vérités de foi divine et catholique les deux seuls points déjà touchés au concile de Florence et antérieurement énoncés par le IIe concile de Lyon : existence du purgatoire, c’est-à1281

p | RG l ni i ; I SYN l il i si C rHOLIQI I

L282

due de peines ultra terrestres subies par les Ames non encore totalement purifiées de la dette « le peine.nia chée aux péchés pardonnes ; utilité des suffrages des vivants pour le soulagement « les défunts, et prlnclpalement de l’oblation du sacrifice eucharistique. Il 3 a un purgatoire, . ! it notre décret, et les âmes qui j -ont détenues sont secourues par les suffrages des Bdèles et surtout par I.- saint sacrifice iio la messe.

. ;. Prescriptions disciplinaires. — Cette doctrine aine du purgatoire, qui se réduit essentiellement a ces deux points, devra être prêchée partout avec lèle ; les chrétiens devront on être instruits, - attacher et la croire. Les évoques devront veiller a ce qu’il en soit ainsi. Le concile n’exclut pas de renseignement les autres questions plus difficiles et subtiles, mais il ne veut pas qu’elles soient le thème des prédications populaires. Et la raison en est qu’elles ne présentent aucune utilité pour l'édification et qu’il n’en soit souvent aucun profit pour la pieté. Avec quelque apparence de verito il faut considérer comme inutiles les questions concernant le lieu du purgatoire, la nature, l’intensité et surtout la durée des peines « pie les.'unes y souillent. Ou. si l’on aborde ces questions devant un auditoire plus cultivé, qu’on le fasse avec toutes les nuances et les réserves voulues. L'état des âmes souillantes par rapport a leur salut éternel nous semble, au contraire, entrer dans I expose du dogme lui-même du purgatoire : le purgatoire, étant par définition un état essentiellement temporaire et préparatoire a la béatitude, ne saurait être exposé eu ses lignes essentielles sans qu’on atlirme en même temps l'état de sainteté des âmes qui expient et la certitude où elles sont de posséder un jour le bonheur céleste.

Les points incertains, par exemple les prétendues certitudes de libération des âmes grâce à l’application de certains suffrages, devront être éliminés. Les choses apparemment fausses, comme les récits d’apparitions qui ne seraient pas historiquement démontrées, seront impitoyablement passées sous silence. Enfin, tout ce qui pourrait scandaliser les fidèles, tout ce qui relèverait de la pure curiosité, tout ce qui touche à la superstition ou s’inspire de l’esprit de lucre, est d’avance condamné. C’est ainsi que, dans le décret disciplinaire De obsenumdis et erilandis in celebratione missarum (voir ici. t. x. col. 1139-11 111. le concile prescrit l’abolition d’un nombre déterminé de messes, célébrées par manière de superstition bien plutôt que par esprit de pitié véritable. Cône. Trid.. t. viii, p. '.103. Cette interdiction est précédée, dans le décret, de l’obligation < de n’introduire dans la célébration de la messe aucune pratique, cérémonie ou prière que celles approuvées par l'Église et reçues par un usage louable et répandu >. Les neuvaines pour les âmes du purgatoire ainsi que la célébration des trente messes _ riennes sont approuvées par l'Église, elles font donc ption à ces prohibitions portées par le concile. Il faut en dire autant de toute pratique de piété accomplie en faveur des Ames souffrantes, des | ; l que cette pratique est autorisée par l'Église,

La dernière partie du décret concerne les fondations de prières ou de messes en faveur des âmes du purgatoire. Le concile prescrit a ceux qui sont chargés de 1 - acquitter de le faire avec tout le s. in et toute la diligence possibles. Le can. 6 De reformatione de la xxii' session concède cependant à l'évêque un droit de commutation des dispositions testamentaires, - il v a des raisons graves. Ibul.. p.

5° Le magistère de l'Église nprrs. le concile de Trente. — 1. La profession de foi de Pie I V 1 1 ; >, 4, : Constanler teneo purgatorium esse, animasqiu ibi detenias fidelium sufjragiis juoari. Denz.-Bannw., n. 098.

2. Profession de foi de Grégoire XIII ( ! .). impoElle reprend le texte du coin île de

MCT. DE THSOL. CATHI

Florence (voir col. 1262) et la profession de loi de Pie iv. Denz.-Banrrw., n. 10s 1.

$ : Profession de loi </< Benoît i I t743 imp< aux Orientaux, Reprise des professions « le foi do Florence et de Trente. Denx, Bannw., n. 1468, 1473.

1. Condamnation par Pie VI de la proposition 12 du s node janséniste de Pistole, déclarant lamentable et illusoire l’application des indulgences aux défunts DenI. Bannw., n. 15 12.

.">. Déclaration de Léon XIII :

De plenitudlne Inflnltl splrttualls thesauii ad eus quoque dllectoa Ecclesite Blios, larglus quo flerl possii prodesse cupl unis, qui morte justorum obita de miltûa hujus vit » migra

runt euiu Signo lidei æ iuslic : c vltis inserli propagtni, ila

tamen m probibeantur Ingressu in œternam requiem usque dum divin » lustitbe ultrici pro contractia debitia ad minimum reddant quadrantem, Movemur autem tum pila catbolicorum otis… tum lacrimabili pœoarum quibus defunctorum animacruciantui atrocltate… sic oimlrum pise anima', in quibua noxarum reliquite terrlblli cruciatuum magnitudine eluuntur, peropportunum ac singulare Bola tiiun perciplent ex hostia salutari. l'.x litteria Qaod annloer sarius, die Paschatis isss, a l’occasion du Jubilé. Cavallera, n. 1463. Ct. Acta sanctæ Sedis, 1. x. p. 418.

II. L* SYNTHÈSE CATHOl tQl 1 dans la théologie posi n-.ini mini :. Depuis les définitions du concile de Trente, deux théologiens ont surtout contribué à donner à la théologie du purgatoire sa physionomie définitive, Bellarmin et Suarez. Ce n’est pas cependant aux détails mêmes que s’applique ce caractère défini tu* : des précisions exégétiques, amorcées pour une bonne part par Suarez, ont été apportées au sens des textes script oraircs ; aux xix' et xxe siècles, la critique a dû restituer certains documents patristiques à leurs véritables auteurs : la piété ou la curiosité des théologiens a soulevé, sans pouvoir d’ailleurs les résoudre sérieusement, plusieurs à-côté du problème traditionnel. Mais, en somme, le cadre et les solutions indiqués par Bellarmin et Suarez sont demeurés à la base des traités modernes J)c pargatorio.

Avec les théologiens posttridentins, nous ferons la synthèse de ce traité en étudiant : 1° l’existence du purgatoire ; 2° les peines ; 3° l'état des âmes ; 4° l’efficacité des sulïrages offerts pour les défunts ; 5° quelques aspects secondaires du problème.

1. L’EXISTENCE Dl PURGATOIRE.

Elle est considérée par tous comme un dogme de la foi. Elle est démontrée par l'Écriture, par la tradition, par la raison théologique. Enfin les apologistes font valoir l’accord de la doctrine catholique avec les exigences purement rationnelles ainsi que ses convenances morales.

La démonstration scripturaire.

Nous avons reproduit, au début de cet article, les témoignages sur lesquels s’appuie Bellarmin pour démontrer, en prenant le contre-pied de la proposition 37 de Luther, l’existence du purgatoire. Bellarmin, Controversite, De purgatorio, dans Opéra, éd. Vives, I. m. p. 53 sq. On a noté que, pour conférer à la plupart des textes de l’Ancien Testament une valeur démonstrative, Bellarmin avait dû les faire escorter d’un imposant cortège d’interprétations patristiques qui en précisent le sens. J. de La Servière, La théologie de Bellarmin, Paris. 1908, p. 278.

Suarez suit de plus près le sens littéral des textes. De pmnitentia, disp. XI. Y. De purgatorio in génère, dans Opéra, éd. Vives, t. xxii, p. 879 sq. De l’Ancien Testament il ne retient comme texte vraiment probant que II Mac., xii. 12 sq. Les autres témoignages ou peuvent être discutés, ou n’apportent qu’une indication probable, ou encore doivent être abandonnés, lin Nouveau Testament certains textes lui paraissent discutables ou d’une valeur simplement probable : I Cor., x. 29 ; Luc, xvi, 9 ; d’autres sont démonstratifs : Mattli.. v. 26 ; xii. 32 ; d’autres enfin lui paraissent

T. — XIII —41.

allirmer un principe dont on pourrait déduire le purgatoire, et c’est encore bien obscur : Act., ii, 21 ; Mail h., v, 22. C’est I Cor., iii, 11-15, qui retient toute l’attention de Suarez. Il est hésitant sur le mus à donner a la métaphore du bois, de la paille, du foin : péchés véniels ou péchés mortels ? Mais saluus erit indique à coup sur non la persistance dans l’existence, mais le salut éternel. N. 14-18. Incertitude également quant à la personnalité des constructeurs de l'édifice : n’importe quel juste ou simplement les prédicateurs de la foi ? Hésitation pareillement sur le feu dont il est question comme instrument de l'épreuve à laquelle seront soumises les œuvres de chacun. N. 22-28. Mais finalement Suarez s’arrête à cette solution : « Tous seront examinés par le feu parce que tous seront jugés pour savoir si le feu purificateur doit leur être appliqué. » N. 28.

On le voit, à part le texte de II Mac, grandes hésitations partout, même dans l’interprétation de I Cor., m, 11-15. Ce texte cependant a été si universellement invoqué dans l'Église latine que presque tous les théologiens modernes l’ont retenu, unanimes à s’appuyer sur II Mac, xii, 42 ; Matth., xii, 32, et I Cor., iii, 11-15. Ainsi D. Palmieri, De novissimis, § 20, n. 5-11 (il ajoute un quatrième texte, Luc, xii, 58) ; C. Mazzella, De Deo créante, n. 1331-1333 ; Ch. Pesch. Prælectiones dogmaticæ, t. ix, n. 589-591 ; Billot, De novissimis, th. v (certains textes de l’Ancien Testament cependant cités comme illustrant, par l’usage antique de la Synagogue, le geste de Judas Machabée) ; Lépicier, De novissimis, q. v, a. 1, n. 3 (p. 251-254) (en plus, Matth., iii, 11) ; Sanda, Synopsis, t. i, § 350, n. 4-5 ; Hugon, Traclalus dogmatici, t. iv, De novissimis, q. iv, a. 2 (en plus, Matth., v, 26) ; Tanquerey, Synopsis, t. iii, n. 1126, etc. Plus strict, Perrone n’admet, avec raison, nous semble-t-il, que II Mac, xii, 42, et Matth., xii, 32, Prælectiones theologicæ, éd. Migne, Paris, 1856, 1. 1, col. 836. Diekamp s’appuie sur II Mac, xii, 42, I Cor., iii, 10-15 et II Tim., i, 16-18, Theologiæ dogmatiæ manuale, t. iv, Tournai, 1934, p. 516517. Labauche passe sous silence l’argument scripturaire, Leçons de théologie dogmatique, t. ii, Paris, 1911, p. 411.

On peut s'étonner, en revanche, de trouver encore des auteurs qui accordent une importance exagérée à certains textes de l’Ancien Testament. G. Atzberger n’a pas su éviter ce défaut dans son volume, Die christliche Eschatologie inden Stadien ihrer Ofjenbarung, Fribourg-en-B., 1890. Et nous le rencontrons, plus accentué encore, dans J. Bautz, Das Fegfeuer, Mayence, 1883, et Fr. Schmid, Das Fegfeuer, Brixen, 1904.

L’argument de tradition.

L’argument de tradition est développé avec complaisance par Bellarmin.

Ce théologien montre d’anciens conciles des diverses Églises reconnaissant expressément le purgatoire, ou l’admettant équivalemment lorsqu’ils recommandent la prière pour les morts. Il signale cette prière dans toutes les liturgies connues ; il montre que cette prière n’a pas seulement pour but, comme le disaient Pierre Martyr, Loci communes, Londres, 1576, p. 768, ou Calvin, Institution chrétienne, (ci-dessus, col. 1270) de rappeler aux vivants la pensée de la mort ou d’empêcher que le souvenir des défunts ne périsse de la communauté chrétienne ; mais les textes liturgiques et les interprétations qu’en donnent les Pères montrent bien que l’objet de la prière est le soulagement, la délivrance des âmes souffrantes. Bellarmin, op. cit., c. vi, p. 76. Enfin il est possible d’apporter des textes positifs dans lesquels les Pères ou recommandent la prière pour le soulagement des défunts, ou exposent clairement la doctrine catholique sur la matière. Ibid., c. x, p. 79-82. Bellarmin n’apporte aucun texte clair antérieur au ive siècle ; mais sa démonstration lui paraît si convaincante qu’il n’hésite pas à conclure : « Quand bien même

les Pères n’auraient jamais nommé le purgatoire, il suffirait de leur enseignement si clair sur le besoin que certaines âmes ont de soulagement, et sur le secours que leur apportent les prières des fidèles, pour être fixé sur leur sentiment. » lbid., p. 81. Cf. J. de La Servièie, op. cit., p. 282-283.

Suarez n’apporte rien de nouveau aux textes invoqués par Bellarmin. Il fait simplement remarquer que beaucoup d’assertions relatives au purgatoire sont formulées par les Pères dans leur commentaire des textes de l’Ancien et du Nouveau Testament qu’on a coutume d’invoquer, surtout de I Cor., ni, 11-15. Plusieurs autorités citées par Suarez doivent être aujourd’hui éliminées comme inauthentiques. Op. cit., n. 3033.

Les théologiens postérieurs n’ont pas ajouté grand' chose à ces essais encore informes de théologie positive. Il convient cependant de rappeler l’opuscule d’Arcudius, De purgatorio igné adversus Barlaam, Borne, 1637 (on sait que l'étude attribuée ici à Barlaam est en réalité le discours de Bessarion au concile de Florence, voir col. 1252) ; l’ouvrage d' Allât ius, De utriusque Ecclesise occidentalis alque orientalis perpétua in dogmate de purgatorio consensione, dans Migne, Theologise cursus, t. xviii (cet ouvrage, paru à Borne, en 1655, s’efforce de supprimer toute divergence entre l'Église grecque et l'Église romaine : la critique y perd parfois ses droits) ; Arnauld, Perpétuité de la foi, éd. Aligne, t. iii, t. VIII, c. vi-x, p. 1123 sq. Les deux dernières études ont contribué dans une large mesure à attirer l’attention des théologiens sur les points de contact et de dissemblance qui régnent entre les deux Églises. Le travail a été repris, au xixe siècle, d’une manière encore assez peu critique par Valentin Loch, Das Djgma der griechischen Kirche vom Purgalorium, Batisbonne, 1842. Des deux ouvrages déjà cités de Bautz et de Schmid la critique est totalement absente. Bartmann. Das Fegfeuer, Paderborn, 1928, est plus au point. L’ouvrage d’Atzberger, Geschichte der christlichen Eschatologie innerhalb der vornicànischen Zeit, Fribourgen-B., 1896, s’efforce d'élucider, pour les trois premiers siècles, plus d’un point obscur.

Les théologiens récents insistent tous sur le fait que, dès les débuts, l'Église a prié pour les m jrts. Quant aux textes positifs concernant le purgatoire, ils se contentent le plus souvent de faire un choix parmi ceux qui leur paraissent le plus convaincants. Le manuel de Tanquerey, op. cit., t. iii, n. 1127, nous semble avoir fourni la meilleure indication relativement à la façon d’envisager l’argument de tradition : il marque trois stades dans l’affirmation du dogme du purgatoire : pendant les quatre premiers siècles, l’existence du purgatoire est confessée dans l’universelle pratique d’offrir des prières et des sacrifices pour les défunts, et même déjà quelques Pères parlent explicitement du purgatoire ; à partir de saint Augustin les témoignages en faveur du purgatoire commencent à se multiplier et à se préciser, et les Pères postérieurs à Augustin précisent encore cette doctrine ; enfin la pleine possession de la vérité se manifeste au Moyen Age avec les scolastiques et s’affirme à Lyon et à Florence. On remarquera que c’est le cadre même de notre article. Ch. Pesch est peut-être l’auteur qui a le mieux utilisé les documents de la tradition, op. cit., t. ix, n. 592-596 ; mais aucune étude d’ensemble n’a encore été faite.

L’argument de tradition doit se compléter par l'étude des conciles. Bellarmin et Suarez ont rappelé opportunément certaines décisions de conciles particuliers concernant les suffrages accordés aux défunts. Bautz a assez bien colligé ces décisions. Op. cit., part. I. § '.>. p. 105-108. Mais le concile de Florence n’a pas été suffisamment étudié sur la question du purgatoire. Les théologiens sont d’ailleurs excusables, les Actes con it m ; roiRE.e xis ri. nc i.

286

cernant le purgatoire n’ayant été publiés qu’en 1922. Aussi avons-nous voulu les résumer Ici.m^i complètemont que possible. Les éditions futures devront tenta 1 davantage compte du décret d’union nui. précisément pour permettre l’union, se t.iîi mula question du fou réel.

Enfin l’argument s’achèe par le rappel des liturgies diverses, qui toutes comportent la prière pour les défunts. Sur oo point l’argument proposé par nos théologiens posttridentins se ressent de la solidité et do l’antiquité do la t radition ecclésiast Ique elle-même. Los autours plus récents > ont apporté une érudition plus considérable et un souci plu-- marqué de la critique dos documents. Mais essentiellement l’argument demeure, gamme il l’a toujours été, le plus solide do tous.

3o La raison théologique. In certain nombre d’auteurs passent sous silence cet argument, par exemple Perrone, Palmieri, Ch. Pesch. D’autres no font que l’indiquer en passant, ou même la confondent avec l’argument do raison de convenance.

Il nous semble qu’un argument très solide et très convaincant do raison théologique doit être apporté on faveur de l’existence du purgatoire. C’est celui-là même quo nous avons développé dans le si i de la deuxième partio de cet article : l’expiation personnelle dans l'économie de la rédemption (col. 1179 sq.).

Bellarmin, sans remonter è ce principe général, en note cependant los applications à propos du purgatoire : il y a dos péchés véniels ne méritant qu’une peine temporelle ; il peut donc arriver qu’un homme meure ayant de tels poilus sur la conscience ; ils doivent donc être expiés dans l’autre vie, Lo même raisonnement vaut pour le pécheur réconcilié avec Dion mais ayant BCOre une peine temporelle à expier, l.oc. cit., c. x. p. 81. Entre los très bons, à qui la récompense éternelle est Immédiatement conférée, et los très mauvais, qu’attend le supplice éternel, il y a place pour les médiocres, qui doivent être purifiés ayant d’entrer dans l'éternel bonheur. Ibid., p. 85.

Suarcz. plu^ théologiquement peut-être que Bellarmin. rappelle los trois principes qui commandent l’argument de raison théologique : l’existence des péchés véniels non expiés à la mort. op. cit., n. 3 I : l’existence d’une peine temporelle duo aux péchés mortels pardonnés, n. : ', .") ; la nécessite morale (ad divinss fustitiss sequitatem pertinere i d’une expiation pour que lo pécheur encore endetté envers la justice divine pilissc entrer au ciel. N. 36.

-t l’argument ébauché par saint Thomas dans les deux articles De purgatorio de l’appendice do la Somme théologique (voir col. il ; 10) et que l’on retrouve, plus ou moins écourté, dans la plupart dos manuels de théologie. Mazzella, op. cit., n. 1335 ; Hugon, op. cit., q. iv. a. 2. n. S. p. 791 ; Hervé, Monnaie, t. iv. n. 656 ; Lépicior.. n. S ; Diekamp. Monnaie, t. iv,

p. 518-519. Tanqueroy, à tort, y voit une simple raison de convenance, /". rit., n. 1 130 ; Billot se contente, dans son traité dos tins dernières, de parler en rai des raisons théologiques per se obvias ; c’est qu’il a développé cet argument ailleurs. De personali ri originali peccatn, Rome, 1924, De reatu panse, p. 77 sq. ; />< do veniali, th. vin. p. 109 sq.

4o Les raison » de convenance. On les trouve développées plus ou moins en connexion avec la raison théologique. Nulle part on ne les trouve mieux présenl’art. Purgatoire du Dictionnaire apologétique de la foi catholique, t. iv, col. 512-515. L’auteur envisage tout d’abord les convenances rationnelles ; ensuite ]rs ( r, T. enani es mort

1. Coni ' nani et rationnelles. — Pour les spiritualistes, le dogme du purgatoire n’a rien qui ne s’accorde pleinement ave( U - prin< i| di I i raison. L’ordre moral doit a mesure où il a été violé ;

or, lo rétablissement de la justice ne s’eflectue en ce mondo que d’une manière très imparfaite : il semble donc conforme a la Justice divine qu’une dette subsistant encore a son égard après la mort appelle une réparation dans l’au-delà. Ce qui différencie cet argument tlo la raison théologique, c’est que la raison théolo gique s’appuie, en dernière analyse, sur les vérités certaines que lui apporte la révélation touchanl la répa

ration duo au péché ; Ici, la simple raison naturelle ne fait état que de ses propres lumières. Dans le premier

cas, l’argument est de valeur contraignante ; Ici, il s’offre comme une simple convenance, Infiniment vraisemblable, mais qui ne s’impose pas à la raison d’une manière absolument certaine. Et c’est a ce point de vue de la convenance rationnel le que les auteurs rapport ont los croyances convergentes des peuples païens euxmêmes. Égyptiens, Babyloniens, Perses, qui, sous des formes différentes, ont promulgué la nécessité d’une expiation pour les péchés, voire d’une sorte de purgatoire préparant l’entrée dos âmes dans la félicité. Voir ici, col. 1167-1169. La doctrine de Platon confirme cotte convenance rationnelle du purgatoire : i A peine séparées de leur corps, les âmes arrivent devant le juge, qui les examine attentivement… Aperçoit-il une âme défigurée par le péché, il l’envoie aussitôt avec Ignominie aux cachots où elle doit subir les justes châtiments de ses crimes… Or il y en a qui profitent des peines qu’ils endurent ; ce sont ceux dont les fautes sont de nature à être expiées… Toutefois cet amendement no s’opère en eux que par la voie des douleurs et des souffrances, car il n’est pas possible d'être délivré autrement de l’injustice. Pour ceux qui ont commis les plus grands crimes et qui, en raison de cette perversité, sont devenus incurables, ils servent pour l’exemple. Leur supplice ne leur est d’aucune utilité parce qu’ils sont Incapables de guérison. » Gorgias, 522 sq. ; Pliédon, 113 sq.

2. Convenances morales.

Est-il besoin de montrer combien la doctrine du purgatoire est, pour le catholique, bienfaisante et douce ?

En nous donnant une si haute idée de la sainteté et de la majesté divine et en fortifiant en nous le sens de la justice, (cette doctrine j avive dans les âmes l’appréhension de toutes fautes, même des plus légères, si bien que la pensée d’un purgatoire ou se purifient les défunts est purifiante elle-même pour les vivants.

Elle répond en même temps aux sentiments les plus profonds comme aux aspirations les plus élevées du cœur humain, l'.n nous rendant familière la croyance à l’Immortalité de l'âme et en tournant le cours de nos méditations vers l’au-delà, en nous apprenant que le lien si fort et si doux qui nous attaciiait a nos chers disparus n’esl pas entièrement luise par le trépas, que nous restons en communion de pensée et de sainte charité avec eux ; que nous pouvons encore faire quelque chose pour eux. alléger leur

souffrance, leur ouvrir plus vite les ioies du ciel, elle maintient vivant et agissant le culte d’affection qui les entourait dans leur vie et qui s’exalte i la mort, it notre cœur nous

pousse : i leur donner, tant que nous leur survivons, le meilleur de nous mêmes, nos prières, UOS Sacrifices, nos

honnes (eus res. i, 'esi la suprême consol il ion dans le di chi renient des séparations cruelles. . iii, , col. 514.

5o Les objections.

La théologie posttrident ine complote ordinairement la question de l’existence du purgatoire par la réfutation des objections soulevées par

les protestants. A Bellarmin, "/<. cil., e. jcii, p. 86 sq., a Suarez, loc. <it.. n. 38-40, il faut ajouter ici Estius, In IV " » Sent., dist. l..? I, qui semble avoir donné d’une façon plus précise encore, le cadre de cette dis cussion. Les efforts des adversaires portent a la fuis sur le terrain scripturaire, patristique et ique.

l. Au point de vue scripturaire, l’apologiste catholique doit tout d’abord rétablir et défendre l’autoriti il le i iie tére canonique du ir livre des Machabées.

oii plus haut. col. 1 MUi. H lui faut ensuite établir le

sens exact des textes du Nouveau Testament sur lesquels il pense pouvoir fonder la révélation « lu dogme du purgatoire. Il est enfin nécessaire de préciser le mus et la portée « le certains textes qui semblent exclure un état intermédiaire entre le ciel et l’enfer pour les anus séparées de leurs corps.

Ces textes, dit Suarez, loc. cit., n. 38, contiennent deux affirmations. La première est qu’après cette vie il n’y a plus possibilité de mériter ou « te satisfaire par ses œuvres propres, mais il faut subir la jusle sentence du juge, que cette sentence concerne l’enfer ou le purgatoire, peu importe. Ainsi doit être compris Eccl., ix,

10 : « Il n’y a plus ni œuvre, ni science, ni sagesse, dans le séjour des morts où tu vas. » La seconde est qu’après cette vie il n’y a que deux termes ultimes vers lesquels se dirige l’humanité responsable de ses actes : le paradis et l’enfer, ce qui ne veut pas dire qu’avant ce terme ultime du paradis, une expiation 'préparatoire ne sera pas à subir. Ainsi doivent être compris Eccl., xi. 3 ; Mattb., xxv, 34, 41 ; Marc, xvi, 16. Cf. Bellarmin, op. cit., c.xii, p. 86. Si les adversaires insistent et proposent certains textes qui semblent promettre la récompense aux justes immédiatement après la mort, sans aucune attente, par exemple Ps., cxxvi, 2, 3 ;

Il Cor., v, 1 ; Apoc, xiv, 13 ; Joa., v, 24, il faut répondre que l'Écriture, en aucun de ces textes, ne parle d’une récompense immédiate : elle sous-entend toujours la condition d’une justice parfaite au moment de la récompense, si digni sunt vel perfecte purgati. Cf. saint Augustin, In Joannem, tr. xlix, n. 10, P. L., t. xxxv, col. 1751. Suarez fait observer que ces textes n’ont pas tous besoin d’une semblable explication. Au sens littéral le ps. cxxvi ne regarde pas la récompense de la vie future ; saint Paul, dans II Cor., v, 1, invite à l’espérance d’une demeure éternelle, sans préciser le moment où on pourra l’habiter ; l’Apocalypse ne vise que les parfaitement justes et, pour les autres, qui ont encore quelque expiation à offrir, il est déjà exact de parler de repos, puisqu’ils sont certains de leur béatitude éternelle. Au canon de la messe nous prions pour les âmes du purgatoire, qui reposent dans le Christ et dorment du sommeil de la paix. Suarez, loc. cit., n. 3940. Saint Augustin avait proposé ici une autre explication : le cas visé serait celui des martyrs, De civitateDei, t. XX, c. ix, n. 2, P. L., t. xli, col* 674 ; cf. Lépicier, op. cit., p. 264. Enfin, Joa., v, 24, doit s’interpréter d’une récompense future, mais non nécessairement immédiate. Lépicier, op. cit., p. 265.

2. Au point de vue patristique, les textes objectés comportent certaines assertions relatives à l’impossibilité, dans l’autre vie, de faire pénitence et d’offrir à Dieu des satisfactions. Saint Cyprien, Contra Demetrianum, n. 25, Hartel, t. i, p. 370 ; saint Jérôme, Comment, in Amos, t. III, c. ix, 5, P. L., t. xxv, col. 1141 D ; saint Jean Chrysostome, In Epist. I ad Cor., hom. xxviii, n. 2, P. G., t. lxi, col. 234 ; saint Augustin, Enchiridion, c. lxviii (simple doute sur cette possibilité), voir ci-dessus, col. 1222. Ces textes doivent s’interpréter d’une manière générale comme les textes similaires de l'Écriture. On peut cependant trouver à chacun d’eux une explication particulière. Voir Lépicier, op. cit., p. 265-266. Bellarmin répond simplement qu’en déclarant qu’après la mort il n’y a plus de pénitence ni de satisfaction possible les Pères entendent parler de la satisfaction, de la pénitence qui précède la justification : « Les Pères, en effet, font mention expresse d’une double satisfaction : une qui précède la justification, et par laquelle Dieu est apaisé de congruo, par laquelle il est incliné à la rémission de la faute ; l’autre qui suit la justification et par laquelle réparation est faite à Dieu de condigno pour la peine encore due. » Op. cit., c. xiii, p. 89. Par là nous rejoignons les objections dogmatiques.

3. Au point de vue dogmatique, en eifet, les protestants insistent surtout sur le fait que le Christ a suffisamment satisfait pour nos péchés et que c’est faire injure à sa passion que d’exiger encore de notre part une satisfaction nouvelle, soit en ce monde, soit en l’autre. Cf. ci-dessus, col. 1267. Ils invoquent surtout Heb., x, 1 1. Bellarmin répond à l’objection dans le traité du purgatoire. Sans doute les mérites du Christ sont assez grands pour effacer toute faute du pécheur et toute peine duc à ces fautes, « mais, pour être efficaces, ces mérites doivent nous être appliqués ; cette application se fait par les sacrements et par les actes de l’homme. Dieu a voulu en effet qu’après le baptême les mérites du Christ soient appliqués par la contrition et la confession, jointes à l’absolution du prêtre, pour la rémission de la faute ; qu’ils soient appliqués par les œuvres satisfactoires de l’homme, pour la rémission de la peine temporelle. Lorsque la faute est remise, la peine éternelle qui lui était due se change en peine temporelle, la justice exigeant que le péché soit puni en quelque façon. » Op. cit., c. xiv, p. 92. Dans les développements donnés par Bellarmin à cette idée fondamentale, on retrouve les principes qui ont guidé le concile de Trente dans l'élaboration du c. xiv, de la vie session et du c. n de la xive session. Voir ici, t. viii, col. 2178 sq. ; t.xii, col. 1090. Dans le sacrement de pénitence la rémission des péchés se fait d’une manière moins libérale et moins plénière que dans le baptême : le pécheur justifié doit encore ordinairement expier quelque peine, soit en ce monde, soit en l’autre. S’il est vrai d’affirmer que l’homme ne peut plus mériter au purgatoire, il est faux que toute satisfaction doive être méritoire : « Celui qui paie une dette parce qu’un arrêt du juge l’y force satisfait à ses créanciers bien qu’il soit contraint. » Op. cit., c. xiv, p. 92. Aussi, pour marquer ce caractère contraint de l’expiation temporaire d’outre-tombe, la plupart des théologiens posttridentins emploient-ils l’expression de satispassion. Mais la plupart réfutent l’objection dogmatique des protestants dans le traité de la grâce, au chapitre de la justification, ou dans le traité de la pénitence, à la question du reatus panse.

La certitude d’une dette de peine, que laisse subsister la rémission de la coulpe, détruit par sa racine même une des principales objections des Orientaux. Voir col. 1254. L’objection proposée en premier lieu par Bessarion (voir col. 1252) a retenu l’attention de quelques théologiens modernes. Billot a bien montré qu’il n’y a aucune parité entre le bien léger des damnés et le mal léger des élus. Le mal léger des élus ne supprime pas leur mérite du ciel et n’exige qu’une expiation temporaire. Le péché mortel, au contraire, mortifie toutes les actions méritoires accomplies par le pécheur avant sa faute : les bonnes œuvres ne sont méritoires qu’en raison de l’ordination à la récompense éternelle que leur confère la volonté divine ; or, cette ordination n’existe plus dans les œuvres mortifiées, et par conséquent celles-ci ne sauraient exiger, avant la peine éternelle, une récompense temporaire. Billot, op. cit., p. 97-98. Cf. saint Thomas, In /V"™ Sent., dist. XXI, q. i, a. 1.

On trouve à peu près les mêmes objections réfutées, dans Perrone, loc. cit., col. 844-847.

II. LES PEINES SU PURGATOIRE.

Les théologiens sont bien obligés de convenir que la question des peines est beaucoup plus obscure que celle de l’existence du purgatoire.

Tous sont unanimes à reconnaître que la foi n’est ici engagée que sur deux points : le purgatoire comporte des peines (c’est la définition même du purgatoire), et ces peines ne se feront plus sentir à aucune âme après le jugement dernier. Par conséquent, la peine purificatrice ne sera, pour toute âme, que temporaire. Bel im i ; r. loi RE. PE1 i S

1290

larmin, op. 'il.. I. 11. c i. p. HT. Su. ne/, op. cit., disp. l VI, sect. i. p. 920 sq. Ces vérités rassortent des définitions du ilconcile de Lyon, de Benoît 1 1 et du concile de Florence. De plus, elles s’imposent en raison de Matth., . 16,.m sujet duquel Pères et théologiens font unanimement observer i|iu' toute possibilité de purgatoire après le Jugement est enle ée par cette affirmation du Sauveur. Billot, op. cit., th. i. B sq.

Dans le domaine asses peu consistant des opinions théologiques, les auteurs catholiques se posent de multiples questions concernant la durée, la nature, l’intensité, l’objet des peines purificatrices.

i' l a durée. Il s’agit Ici de la durée de la peine pour chaque âme prixen pari Iculier. Suarei pose doux principes opportun-. : en premier lieu ; il taul admettre que l'âme puisse expier seule pour un péché auquel le corps a pris part : hpéché, en effet, réside essentiellement dans la volonté de fainle mal. t-t donc. l’Ame

ayant pris, dans l’acte offensanl Dieu, la part principale et formel le. peut vit isfalre seule a la justice div ine.

in purgatoire prolongé jusqu'à la résurrection des corps n’esl doue pas nécessaire. En second lieu, il faut affirmer que la durée de la peine, loin délie égale pour toutes les.'unes, sera plus OU moins longue en proportion de l’expiation requise. D’où suit une conséquence certaine, c’esfl que toutes les.'mus ne resteront pas en purgatoire Jusqu'à la fin du monde. Disp..YI, si-et. iv. n. 3-6. Conclusion qui vaut, même abstraction faite du secours apporté par les suffrages de l'Église.

Mais peut-on, en toute hypothèse, assigner un terme à la durée des peines. On sait que Dominique Soto enseignait que les souffrances du purgatoire sont si teribles. que les suffrages de l'Église sont si efficaces, qu’aucune Ame, quelle que soil sa dit te n’y doit séjourner plus de Vingt et même de dix ans. In I Vum Sait.. àiSL I. q. m. a. '_'. Bellarmin rejette cette opinion, l’appuyant sur la pratique de l'Église autorisant l’offrande du saint sacrifice de la messe pour des fidèles morts depuis cent ans et plus. L, „-. cit. Quelques - théologiens, entre autres Maldonat. Dr purgatorio. q. v. ont suivi Solo SUT ce point, mais la presque unanimité lui est plus ou moins host ile. Tout en réprouvant l’opinion de Solo. Suarez ne la croit pas digne de eensure. mais simplement incertaine, et personnelle. Toutefois, il faut se souenir de la condamnation p< rtee par Alexandre VI I contre la proposition suivante : Un legs annuel (fondation) pour l'âme d’un défunt ne dure pus plus de dix ans. Denz.-Bannw.. n. Il 13. Voir '. i. col. 746. Sans réprouver directement l’opinion de

ic pape condamne la conclusion prat ique qui tains en tiraient. Sur l’opinion de Soto et ses partisans, voir Diana, ! tolutiom - moralt -. Lyon, 1667, part. IV, tr. VIII, resol. loi. Reprenant une expression d’Augustin, Suarez conclut simplement : quanlo magis minusre transeuntia fanims / dilexerunt, tanto brevius tardiusre salrnbuntur. Les théologiens, en général, se prononcent pour une dorée assez longue. Cf. Bellarmin, I » oanitu a 'umbse. I. II. e. ix.

Il est d’ailleurs bien risqué de mdemander combien de n n mes demeurent au purgatoire. Le

temps est la durée qui mesure les choses matérielles. Au purgatoire, il n’y a plus ni jours, ni années, ni I emps, mais trvum ou évitemité ». Voir Éternité, t. v, 115. Comment estimer une durée qui échappe., nos ussi i.i plupart des théolo utils rapidement sur une quest ion parfaitement insoluble.

Un seul problème inti pose au sujet des

justes qoe la im du monde trouvera encore en vie ? Comment leur purification pourra-t-elle avoir lieu en cet instant suprémi IteUTS se contentent en

général de reproduire la réponse de saint Thomas, In

I 'um Sent., dlst. XL II, q. ii, a. : i. qu, 2, ad justes auront souffert auparavant des angoisses qui leur tiendront lieu de purgatoire ; le feu de la conflagration générale leur servira de feu purificateur avec

d’autant plus d’efficacité qu’ils en accepteront volontairement les a (tell il es ; en lin l’Intensité de la peine nie

la chaleur, dit saint rhomas) compensera sa durée. Ainsi Palmierl, op. cit., p. 76 ; Hugon, op. cit., p. 801 ; Hervé, op. cit., p. 641 ; Lépicier, op. cit., p. : > 7 : >. Billot adoucit quelque peu. tout en demeurant dans le môme sens doctrinal, ce qu’il j a de peu vraisemblable en

Cette ex pli cal ion. Op. cit., p. 101. La Solution nOUS paraît

contestable ; elle est donnée dans l’hypothèse d’une

purification faite nécessairement par le feu et comportant une durée temporaire. Or, même dans l’opinion

des Latins, la purification faite par le feu ne s’impose pas nécessairement comme explication, et l'éviternité doit être considérée comme la durée mesurant déjà cet instant solennel du jugement dernier. L’intensité de

la peine, quelle que soit celle peine, peut donc seule

être invoquée Ici comme explication plausible. '_ ! " Xidure des peines. Bellarmin expose que trois

choses sont certaines louchant la nature despeines purificatrices : la principale peine est la privation « hla ne de Dieu ; il existe en outre une peine positive du

sens ; enfin cette peine est essent iellenient un feu, soit

réel, soit métaphorique..Mais il ajoute que, de l’avis commun des théologiens, le feu du purgatoire est réel : les textes de l'Écriture qui ledécrivent ( !) doivent être pris au sens propre quand il n’y a pas de raison de les en détourner, et toutes les descriptions des Pères ne peuvent s’entendre que d’un feu réel. Op. rit., t. II, c. x, xi, p. 118. Il ! >.

1. La dilution de lu vue de Dieu. - Suarez, reprenant le même thème, se demande d’abord si la privation de la vision béatifique doit être considérée chez les âmes du purgatoire comme une peine du dam. Il relate tout d’abord l’opinion de Cajétan, qui. tr. IV, /)<? altritione et contrilione, q. iv, admet sans doute dans l'âme puriflée l’absence de la vision divine, mais nie que cette absence soit une peine. Cajétan estime que, toute aversion par rapport à Dieu étant ôtée de l'âme sainte, la peine du dam. correspondant a cette aversion, ne saurait exister eu elle. Suarez fait observer que, nonobstant la charité dont les âmes du purgatoire sont animées envers Dieu du fait qu’elles expient en raison des

restes du péché, l’absence de vision béatifique com

poile pour elles une véritable prix ation, donc une véritable peine. I. 'expiai ion requise est en effet une suite non seulement de la conversion vers le mal. mais encore de l’aeision de Dieu, qu’implique tout péché. Op. Cit., disp. I.YI. sect. i. n. 1.' !. Mais il est bon (limiter que Cajétan n’envisage pas le cas des âmes du

purgatoire, il se peut donc que la polémique de Suarez manque d’objet. L’expression pœna deanni est retenue par la plupart des théologiens. Citons, parmi les modernes, i tautz, "/>. cit., p. 130 ; Palmieri, op. cit., p. 70 ; Mazzella, "/ ». cit., n. 1337 ; Tanquercy, op. cit., t. m. ii. 1132 ; Hugon, op. cit., p. 792 ; Lépicier, op. <-it.. p. 268, Toutefois, la plupart de ces ailleurs corrigent, par l’explication qu’ils en donnent, le sens du mol dam appliqué à la peine de la privation ou mieux, disent-ils, de la dilation « le la vision béatifique. Il ne s’agit doue pas en réalité de peine du dam au sens propre du mot. Ch. Pesch, op. cit., t. ix, n. 601, el I lervé, op. cit., t. iv, 2, noient expressément que ce n’est qu’un dam secundum quid et Billot nous semble avoir heureusement rompu avec la terminologie reçue en parlant simplement de la peine île la dilatinn de la gloire, Op.Cit.,

th. vu. C’est mie véritable peine, écrit-il, puisqu’elle firirr les âmes de la vision béatifique à un moment où

elles auraient pu et du la posséder. P. 101. El I i

précisément le caractère qui distingue la dilation du

purgatoire de celle des limbes avant Jésus-Christ. Pour

les justes des limbes, le temps (le [a vision béatifique

n'était pas encore arrivé ; donc la dilation n’avait aucun caractère pénal. Hugon, loc. cit., p. 794.

Nous estimons pour notre part que l’expression « peine du dam » devrait être éliminée totalement delà terminologie relative au purgatoire. Tout le monde est d’accord pour reconnaître que le prétendu dam du purgatoire n’est que très lointainement analogique au dam de l’enfer : pourquoi maintenir une expression capable d’induire en erreur sur le véritable état des âmes au purgatoire ? Le seul fait de l’espérance et de la certitude du salut enlève à la privation temporaire de la vue de Dieu le caractère d’une véritable damnation.

On lira, sur cette privation de la vue de Dieu, comme peine du purgatoire, la belle page de Lessius, De perf., div., t. XIII, c. xvii :

Les âmes justes, au moment même où la gloire qui leur est préparée devait leur être conférée, se voient rejetées et reléguées en un cruel exil, tant qu’elles n’auront pas satisfait pour leurs péchés passés : elles en ressentent une douleur incroyable. Combien est grande leur douleur, nous le pouvons conjecturer par quatre considérations. Premièrement, elles se voient privées d’un si grand bien, et cela au moment même où elles auraient dû en jouir. Elles comprennent l’immensité de ce bien avec une force qui n’a d'égale que leur ardent désir de le posséder. Deuxièmement, elles voient qu’elles en sont privées par leur faute. Troisièmement, elles déplorent la négligence qui les a empêchées de satisfaire au moment où elles auraient pu le faire facilement, alors que présentement elles sont contraintes à de grands maux, et cette constatation accroît singulièrement l’acerbité de leur douleur. Quatrièmement, enfin, elles voient quels trésors immenses de biens éternels, quels degrés de gloire céleste, si facilement accessibles, elles ont par leur faute négligés quand il était temps. En prenant conscience d’une façon extrêmement vive de tout cela, ces âmes en éprouvent une grande douleur, comme nous-mêmes l'éprouvons dans les dommages humains, quand ces quatre circonstances sont réunies.

On pourrait citer également bien des passages du Traité du purgatoire de sainte Catherine de Gênes, pris des c. ni et vi principalement :

C’est une peine si excessive, écrit-elle, que la langue ne saurait l’exprimer, ni l’intelligence en concevoir la rigueur… Si, dans le monde entier, il n’y avait qu’un seul pain qui pût satisfaire la faim de toutes les créatures, et qu’il suffît de le regarder pour être rassasié, songez à ce qu'éprouverait un homme qu’un instinct naturel invite à manger quand il est bien portant, et qui ne pourrait ni manger, ni être malade, ni mourir ! Sa faim deviendrait de plus en plus cruelle ; sachant qu’il n’y a qu’un seul pain capable de le rassasier et qu’il ne peut y atteindre, il resterait en proie à des tortures insupportables. C. vi. Cf. P. Faber, Tout pour Jésus, Paris, 1926, p. 388 ; L. Rouzic, Le purgatoire, Paris, 1923, p. 165.

2. La peine du sens.

Suarez distingue nettement la question de la peine du sens, loc. cit., n. 4 sq., de la question du feu du purgatoire. Ibid., sect. ii, n. 1 sq. Non qu’il admette une peine positive distincte de celle que cause le feu, mais parce qu’il se pose tout d’abord la question de savoir si toutes les âmes souffrent, en plus de la « peine du dam », une peine du sens. La tristesse qui résulte de la dilation de la vision béatifique ne saurait à proprement parler être nommée peine du sens, ibid., n. 6 ; mais peut-on concevoir que certaines âmes soient purifiées uniquement par cette dilation et la tristesse qui en résulte ? Certains l’ont prétendu, en raison des visions rapportées par Bède. Voir col. 1227. Parmi ces « certains » il faut compter Bellarmin, qui admet comme probable l’existence d’un lieu, faisant partie du purgatoire « où les âmes n’ont plus la peine du sens, mais seulement la peine du dam, purgatoire fort adouci, prison honorable, et comme sénatoriale, mais où cependant les âmes ne sont pas heureuses et

souffrent même du retard apporté à leur béatitude ». Op. cit., c. vii, p. 112. Sans nier absolument la vérité de cette vision, Suarez estime qu’elle doit êtreinterprétée ; quoi qu’il en soit, il n’admet pas qu’au purgatoire la peine de la dilation de la vue de Dieu soit séparée de la peine du sens. Loc. cit., sect. i, n. 9-12. L’opinion contraire n’a d’ailleurs rien qui offense la doctrine catholique : elle est simplement étrangère au sentiment de la plupart des théologiens. Palmieri s’y rallie, 'jfi. cit., p. 74. Toutefois il est nécessaire de rappeler que les Grecs, tout en niant l’existence du /eu du jmrgatoire, n’entendent pas nier l’existence d’une peine positive du sens, affliction, douleur, chagrin, honte de la conscience, etc. Voir col. 1253, 1202. Il est donc utile que, dans la synthèse théologique de la doctrine du purgatoire, on tienne compte de cette nuance. Peu de théologiens latins l’ont fait.

3. Feu réel ou métaphorique ? — Voir Feu du purgatoire, t. v, col. 2258 sq. Sur le degré de probabilité de l’opinion des Latins, voir col. 2260.

Intensité.

Bellarmin n’approuve pas l’opinion

de saint Thomas d’après laquelle la moindre peine du purgatoire est plus douloureuse que la plus affreuse souffrance de la terre. Il se rallie à celle de saint Bonaventure. Voir col. 1240. Sans doute la privation de Dieu est une grande souffrance, mais « adoucie, soulagée par l’espoir assuré de le posséder ; de cet espoir naît une incroyable joie qui s’accroît à mesure qu’approche la fin de l’exil ». Op. cit., c. xiv, p. 121. Des âmes condamnées au purgatoire peuvent n’avoir, au moment de la mort, que quelques fautes légères ; il semble bien dur qu’elles soient punies par un supplice plus affreux que toutes les peines de la terre. Tel est le thème général sur lequel se sont greffées des opinions nombreuses et variées.

1. Gravité de la peine de la dilation.

Suarez n’hésite pas à présenter cette peine comme la plus grave et la plus douloureuse pour les âmes du purgatoire. C’est là, dit-il, la doctrine commune, communis sententia. Op. cit., disp. XLVI, sect. i, n. 2. Le texte de Lessius, cité ci-contre, laisse entrevoir les raisons de cette douleur immense. Suarez reprend ces raisons. Ibid., sect. iii, n. 1. Mais son instinct théologique lui fait entrevoir une difficulté devant laquelle saint Bonaventure déjà s'était arrêté. Si ces raisons sont vraies, il suit de là que « les plus saintes âmes du purgatoire, bien que très légèrement coupables, sont punies le plus sévèrement quant à cette peine et à cette tristesse (de la dilation). En effet elles sont privées d’une gloire plus considérable, le bien qu’elles ne possèdent pas est plus grand, et la charité, racine de la douleur dans les âmes saintes, est plus grande en elles. » Ibid., n. 2. De fait, nous trouvons chez certains mystiques des assertions de ce genre. Résumant la doctrine de sainte Catherine de Gênes, le P. Faber écrit » : L'âme se sent constamment entraînée par la violence de son amour vers Dieu, qui peut seul la satisfaire. Cette violence est sans cesse croissante, tant que l'âme demeure privée de l’objet dont elle est si avide, et ses souffrances croîtraient à proportion, si elles n'étaient pas adoucies par l’espérance ou plutôt par la certitude que chaque instant la rapproche du moment de son bonheur éternel. » Tout pour Jésus, p. 388-389. A cette difficulté, saint Bonaventure avait répondu en disant que, du chef de la dilation, la souffrance des âmes n'était pas considérable. Voir col. 1242. Suarez trouve à bon droit cette réponse trop simple, et il fait deux remarques sensées : la première est que si, par rapport à la nature même des choses, la peine de la dilation de la vue de Dieu doit apporter aux âmes les plus saintes la plus grande souffrance, cependant, par rapport à l’ordre de la justice divine, cette souffrance est tempérée en proportion de l’affection apaisée et parfaite avec laquelle les saintes PURG T « 'I RE. PE1 N i S

129'

âmes l acceptent, sans compta 1 que l’espérance certaine du bonheur adoucit la souffrance ; la seconde est que la tristesse des âmes répond bien davantage aux degrés de gloire à jamais perd ai qu’a la dilat ion même de la gloire, ce qui fait que la tristesse est plus grande an une âme moins parfaite, précisément parce qu’elle a perdu plus de degrés de gloire. Loc cit., n. 3 I. l es modernes, on général, n’ont pas envisagé cet aspect de la question.

Grapiti de h peint du sens. - Tous les théologiens enseignent que la peine du sens est très grave et dépasse nos estimations d’ici-bas. routerais l’opinion de saint Bonaventure rallie de plus en plus les sut trages ilts auteurs. Suarez, t] ni signale les deux opinions, ibid., n.. r >. 6, conclut en « lisant qu’il n’est pas possible d'établir entre les peines du purgatoire et lis souffrances d’ici-bas une comparaison proprement dite : on ne peut comparer que des realites homogènes, et Ici les peines sont de nature très différentes. Spécifiquement toute peine du purgatoire, même la plus minime, dépasse les souffrances de la terre, précisément parée qu’elle est d’un autre ordre de douleur et de mal. Mais accidentellement, c’est-à-dire dans ses effets sur telle ou telle Ame, la comparaison pourrait être établie ; pourtant Suarea n’ose trop se prononcer. Voir, en faveur de l’opinion d< saint Bonaventure, Billot, op. cit.. th. vu. g _'. p. 103-105 ; Pesch., op. cit.. t. ix. n. 604. I.epieier. qui semble pencher en faveur de l’opinion plus dure de saint Thomas, conclut par une excellente remarque qui rappelle celle de Suarez : diximus panam pargatorii in suo génère omne id saperare quod in hoc mundo patimur, quia cum altéra sit conditiu aninnv separata ab ejus conditione in pressenti vitii. oportet ut etiam alterius rationis sit pana : unde comparatio non est anivoca, sed secundum proporlionem. Op. cit.. p. 127 I.

Feu de théologiens ont tenté de supputer la gravité de la peine du sens au purgatoire par rapport à la peine du feu en enfer. Notons à ce sujet cette simple remarque des Salmanticenses : Nous ne pensons pas inconvenant qu’un juste quittant cette terre avec une quantité m considérable de péchés véniels ou avec une dette si lourde pour des péchés mortels remis quant à la coulpe, mais non quant a la peine temporelle, subisse dans son temps de purgatoire une peine du sens plus atroce que celle qu’auront a endurer certains damnés éternellement punis pour un ou deux péchés mortels. I imparaison, notent ces théologiens, ne tient évidemment que pour certains aspects de l’atrocité de la peine. De vitiis et peccatis. disp. XVIII, duh. ii, § 6.

Objet des peines purificatrices.

L’expiation puritieatrice a-t-elle pour objet la coulpe ou la peine du péché'? I.a question se pose non pour les péchés mortels, mais pour lis péchés véniels. Déjà ce problème avait été envisagé par les sententiaires, et les théologiens posttridentins n’en ont guère fait progresser les solutions. Quant aux péchés mortels, seul le debitum panse peut être en cause.

1. La coulpe des pèches véniels.

Bellarmin sidemande comment les péchés véniels dont l'âme peut être encore souillée au moment de la mort sont remis au purgatoire ? Op. cit.. 1. I. c XXV, p. 93. Il suit l’opi- ; nion de saint Thomas : Les péchés véniels sont remis dans le purgatoire par let tmour et « le pat lence

qu’y produisent les âmes souffrantes : en effet, cette ptation de la peine Infligée par I rien, procédant de la charité, peut être appelée une pénitence virtuelle, et. bien qu’elle ne soit pas proprement méritoire puisqu’elle ne mérite pas une augmentation de grâce ou de gloire, elle peut obtenir la rémission du péché. Ibid., Remarquons toutefois que saint Thomas, dont Bellarmin cite l’opinion d’après le (.ommentaire sur les Sentences, a précisé, sinon corrigé-, sa réponse dans le

De mate (voir col. 1240) : c’esl tout aussitôt que l'âme esl affranchie des liens du corps, qu’un acte de chai de

parfaite etlæe la coulpe du péché véniel.

Suarez, qui traite cette question dans la disp. XI,

sect. i. expos, 1, -s diverses suintions bien plus claire

nient que Bellarmin et. après avoir rejeté les opinions

qui lui paraissent Improbables, se rallie finalement à

celle de saint Thomas dans le De nialo : Dans le pie mier instant de la séparation de l'âme et du corps, l'âme émet un acte fei eut d’amour de I lieu et de contrition parfaite de toutes sis tantes précédentes. l'.tant en état de grâce, l'âme juste est en mesure, connaissant sou état, de tendre parfaitement vers Dieu de toute la force de sa volonté soutenue et Surélevée

par la charité. Et ce mouvement suffit à enlever aussitôt tout ce qui est encore coulpe eu elle Lne. cit., n. 13.

Ici siplace une eonl ro erse cf reniement Intéressante contre C.ajétan. A cet Instant de la séparation de L'âme d’avec le corps. Cajétan pense que l'ànie est encore en état de mériter ou de démériter, puisque nondiim est omnino extra viam, sed in termina oitm. In / nm part. Suni. theol.. q. LXIII, art. 5. fine. Le dernier instant de la voie se confondrait ainsi avec le premier instant de l'état de terme. Suare/ rejet le avec vivacité cette bypot hèse Insoutenable : quæ sententia sernpcr mihi displieuit, quia ex Ma sequitiir possc hominem esse in gratin toto lempore vitse, et in Mo instanli illam amittere ; quod. ut opinor, repu final Scriptwis. L’inverse pourrait aussi devenir vrai : un pécheur, mourant en état de faute mortelle, pourrait ainsi, in primo instanli separationis anima a corpore, se réconcilier avec Dieu, ce qui n’est pas moins contraire aux Écritures. Suarez ajoute que le terme de la voie est extrinsèque a la voie elle-même ; donc l'ànie. à l’instant même où elle est séparée du corps, ne peut plus mériter ni démériter ; elle est continuée en grâce ou fixée dans le mal. Loc. cit., n. 14. II faut donc conclure que l’acte de charité agit, dans la rémission de la coulpe des péchés véniels à l’instant de la séparation, simplement comme disposition suffisante, et non comme cause méritoire. Voir, concernant la controverse susindiquée, les arguments que nous avons fait valoir, dans le sens de la thèse de Suarez, à propos d’un article récent. L’Ami du clergé, 1933, p. 756-761.

L’opinion de saint Thomas, reprise par Suarez, est commune parmi les théologiens. Voir de Lugo, De psenilentia, dist. IX. sect. n ; Palmieri, op. cit., § 22, p. 64-65 : Mazztlla, op. cit., n. 1321 ; Pesch, op. cit., n. 598 ; Billot, De peccato, p. 121 ; Hugon, loc. cit.. t. ix, p. 825 ; Hervé, op. cit., t. iv, n. 666 ; Lépicier, op. cit., p. 281 : Scheeben-Atzberger, Handbuch der kalh. Dogmatik. t. viii, Fribourg-en-B., 1903, §413, p. 855. et tous les thomistes.

Il ne reste donc à élucider que le problème de la rémission de la peine, qui est le même pour le péché véniel que pour le péché mortel.

2. Rémission de la dette de peine. - - Bellarmin n’envisage que le fail général de la rémission de la peine due aux péchés pardonnes : ce fait se confond avec le dogme même du purgatoire. Mais comment cette rémission est-elle obtenue ? A propos de cet aspect du problème, il se contente de rappeler que, dans le purgatoire, les âmes ne peinent plus ni mériter ni démériter : il leur manque l'état de voie. Op. cil., 1. II. c. nni, p. 101 sq.

Suarez et les théologiens postérieurs partent du même principe pour établir les deux doctrines explicatives, qui marquent la position de la théologie posttridentine sur ce point : la satispassinn des âmes et la rémission progressive des peines.

a) Suarez rappelle d’abord, op. cit., disp. XLVII, sect. ii, n. 5-6, que les âmes du purgatoire possèdent toute la charité dont elles sont capables ; que cette L295

l’IJIUiATOIl'. I.. Kl AT DKS l KS

1296

charité ne peut être accrue en elles puisqu’elles sont hors d'état de mériter. Et il continue :

On doit déduire de ces principes que les âmes du purgatoire sont en étiit d’offrir à Dieu non une véritable salisfaction, mais une simple salispaasion. La chose est manifeste si l’on explique ces termes en fonction de la doctrine précédemment exposée sur la satisfaction. Du péché pardonné demeure encore, avant tout et essentiellement, une dette de peine a l'égard du feu et de la souffrance au purgatoire. Or, cette peine, les âmes peuvent l’endurer et, puisqu’elle est temporaire, ces âmes, par une durée sullisante de souffrances, peuvent offrir une satispassion répondant a la qualité ou à la quantité de leur dette : il leur suffit simplement d'être en état de grâce. Toutefois, aux justes encore sur terre, il a été concédé de pouvoir mériter en quelque façon la rémission de leur peine par l’acceptation volontaire de peines de la vie présente moralement équivalentes et conformes à la loi divine et à une juste institution : c’est là, à proprement parler, la satisfaction. Les âmes du purgatoire, disons-nous, ne peuvent offrir de telles satisfactions, car, si la vie présente est le seul temps où l’homme puisse mériter, c’est aussi le seul état pour s itisfaire par des peines et des souffrances volontaires… Avant que soit portée la dernière sentence [du jugement 1, c’est le temps delà miséricorde ; la sentence une fois portée, c’est le temps de la justice rigoureuse et de l’exécution de la peine infligée parla sentence… Si la peine du purgatoire est accompagnée dans l'âme d’une volonté soumise à la volonté divine, elle n’est cependant pas volontairement recherchée, et une telle volonté de l'âme souffrante n’apporte pas à la justice divine de quoi compenser la dette : cette compensation n’est acquise que par l’expiation accomplie selon la loi et la mesure portées par Dieu… Ibitl., n. 7.

Et Suarez de conclure, n. 8, que pas même d’un mérite de convenance, les âmes du purgatoire ne peuvent, par elles-mêmes, mériter une diminution de leur peine.

Cette théorie de la satispassion, avec les considérants qui l’accompagnent, est enseignée par tous les théologiens qui expliquent par là comment une satisfaction volontaire de l'état de voie est bien plus efficace qu’une satispassion imposée au purgatoire à l'âme encore endettée envers la justice divine. Voir ci-dessus, col. 1240.

b) La question d’une diminution progressive des peines du purgatoire est plus obscure. Quelques théologiens seulement l’ont envisagée. On se reportera à

MlTIGATION DES PEINES DE LA VIE FUTURE, t. X,

col. 2007-2009.

Le seul point qui, à notre connaissance, n’ait pas été abordé par les théologiens posttridentins est de montrer comment cette diminution progressive, possible eu égard aussi bien aux peines considérées en elles-mêmes qu’aux suffrages des vivants, peut entrer dans le cadre de la durée qui mesure l’existence des âmes du purgatoire. Cette durée n’est plus le temps, mais l’sevum ou éviternité. Or, l'éviternité, mesure des esprits séparés, est définie par saint Thomas : « la durée d’un être immuable substantiellement, mais accidentellement soumis à des changements ». Immutabilité substantielle qui peut cependant, il faut le remarquer, concerner non seulement la substance de l’esprit, mais ses opérations mêmes. Cette éviternité est la durée des esprits purs et des âmes séparées, car leur vie propre est faite d’immutabilité substantielle et de successions accidentelles. Sans changement possible dans leur être, esprits et âmes séparées voient leur existence mesurée par le perpétuel présent de l'éviternité. C’est aussi ce perpétuel présent qui est la durée de la connaissance et de Vamour naturels qu’ils ont d’eux-mêmes et par eux-mêmes de Dieu, auteur de leur perfection. C’est également l'éviternité qui mesure l’acte par lequel ils adhèrent à leur fin dernière et, dans le cas des âmes du purgatoire, cette fixité de leur volonté dans le bien et dans l’amour de Dieu. Dans ces âmes, destinées au ciel mais souffrant encore au purga toire, l’expiation purificatrice sera un « instant » accidentellement joint au présent perpétuel inclus dans ['acte d’adhésion définitive que ces saintes âmes oui faite a leur fin dernière surnaturelle. En tant que privation de Dieu, l' « instani du purgatoire ne comporte pas, ne saurait comporter de succession. Cette privation est ; elle dure ce que dure la peine essentielle du purgatoire, avec laquelle d’ailleurs elle s’identifie. Quelle succession imaginer en une durée qui n’apporte a l'être de l'âme et ne comporte en ellemême aucun changement ? Aussi semble-t-il exact d’affirmer que la durée de la privation de Dieu doit être conçue au purgatoire comme une mesure ne comportant pis de succession. Mais de là à conclure que la diminution progressive de souffrances, même des souffrances résultant de la peine de la dilation de la gloire, soit impossible, il y a un abîme. Car de la privation de Dieu résultent dans l'âme divers sentiments qui se succèdent réellement, apportant leur contingent de regrets, de repentirs, de douleurs et d’actes de soumission à la volonté divine, mais auxquels également, en raison de l’acquittement de la dette et des prières des vivants, s’adjoint, de plus en plus vivement, l’espérance du bonheur futur. Quant au tourment positif de la peine du sens, même et surtout s’il s’agit du tourment causé par le feu, la souffrance endurée sera continue et sans arrêt. Nouvelle nécessité d’admettre, jointe à l’immobilité substantielle où se trouve fixée l'âme souffrante, une véritable succession de souffrances, succession mesurée par une durée qui sans doute n’est pas notre temps, mais lui ressemble. Cf. saint Thomas, I a, q. lui, a. 3 et ad l nm. /II. l'état DBS AMES. — Cet aspect du problème théologique du purgatoire a été traité par les théologiens posttridentins avec un soin particulier, en raison même des attaques de Luther contre l’enseignement traditionnel.

Les éclaircissements apportés peuvent se grouper autour de deux points : les âmes du purgatoire sont fixées dans la grâce ; elles sont certaines de leur salut.

Fixées dans la grâce.

Le point de départ

théologique de cette assertion certaine est la condamnation de la proposition 39 de Luther. Pour Luther, les âmes du purgatoire pécheraient perpétuellement parce qu’elles n’acceptent pas leurs peines dont elles ont horreur. Voir col. 1266.

La théologie posttridentine, réfutant l’assertion luthérienne, procède par affirmations nuancées qui projettent un jour intéressant sur l'état des âmes séparées.

1. Tout d’abord elles sont, dit Suarez, dès l’instant de la séparation d’avec le corps, confirmées dans la grâce qu’elles possédaient auparavant. C’est le principe fondamental qui doit diriger tout raisonnement sur l'état de terme. La voie du mérite et du démérite est close pour l’homme par la mort. Et donc, dans l'état même où l'âme est trouvée par la mort, elle persiste d’une manière immuable soit par l’obstination dans le mal si elle est trouvée en état de péché, soit par la confirmation dans le bien si elle est en état de grâce. D’où les âmes tiennent-elles leur confirmation dans le bien ? Suarez y voit uniquement une protection de la grâce divine, rendue nécessaire par l'état même de ces âmes. qui. étant destinées au ciel, ne peuvent ni pécher mortellement — ce qui les éloignerait à tout jamais de leur fin dernière — ni pécher véniellement. ce qui les retarderait sans fin de leur bonheur. Op. cit.. disp. XLV1I. sect. i, n. 6-7. Il semble qu’on doive ajouter à cette raison extérieure à l'âme une raison tirée de sa psychologie intime : le choix définitif fait de la fin dernière par le libre arbitre, dégagé enfin des conditions d’exercice de l'état d’union avec le corps. Aussitôt, en effet, que l'âme est détachée du corps, l’Ile prend les conditions normales il<’l’activité propre .ui esprits, activité Indépendante « le toute opération sensible et procédanl par vonnon d’abstraction, m ds d’intuition. Ainsi les fsi » i i i -. ne connaissent pas le bien i/i abs s ne s’attachent pas au bien suprême à

travers les biens périssables et changeants d’Ici bas ; iK tu’choisissent pas leur fin dernière sous l’influence des passions ou des habitudes ; d’un seul acte d’intelllet de volonté, « ]iii épuise du premier coup leur puissance d’activité quant a la On dernière, Ils t’arrêtent au bien qu’ils conçoivent comme cette fin et s’y fixent s. mis changement ultérieur possible bien est un bien concret, el l’amour par lequel ils s’j attachent devient Immédiatement le principe premier île tous leurs désirs, de tous leurs vouloirs. Telle lut la psychologie du premier acte délibéré par lequel les s. au commencement du monde, s’attachèrent comme I leur Un dernière, les uns a Dieu, 1rs autres à l’excellence de leur propre moi. Cel acte les tu entrer tl.ms l’état « If terme, et leur gloire, comme leur déchéance, fui acquise définitivement II en est do même de l’Ame après la mort. Dans l’au-delà cesse pour r.’uiii’toute variabilité relativement à l’objet

qu’elle aura placé BU sommet de ses affections et aime

par-dessus tout. Alors, l’amour de cet objet devient l’Immuable pivot de sou libre arbitre, et cet objet lui-même le pèle fixe ers lequel restent désormais tendues toutes les puissances de son vouloir. De la le principe énoncé par saint Jean Damascène et passe depuis axiome de la théologie : Que la mort est pour l’homme ee que le premier acte délibère a été pour les ailles. Billot, L" providence de Dieu et le nombre infini d’hommes en dehors de la voie normale du salut. dans Études, 1923, p. 102. Que survienne donc la mort, il en resuite. ipso facto, pour les uns. mie définitive obstination dans le mal ou desordre moral et, pour les autres, une confirmation, définitive aussi. dans le bien, dans la beauté de l’ordre, .née l’heureuse

Impossibilité de s’en Jamais sortir. Ibid., p. 397. Tous les théologiens enseignent bien que lame au purgatoire est Incapable de perdre la grâce, puisqu’elle n’est plus dans l’état de voie ; mais aueun n’a donné la raison psychologique profonde qu’apporte le cardinal Billot et dont nous nous sommes inspires nous-même dans Lesfins dernières, Paris. [927, p 11 13.

J. Ensuite, et précisément parce qu’elles sont confirmées en 1.. grâce qu’elles possédaient, les âmes du purgatoire ne peuvent ni perdre cette grâce par le démérite, ni l’accrottre par le mente. L’état de voie. condition indispensable au mérite ou au démérite, est pané. C’est encore ici la raison fondamentale qu’apportent tous les théologiens. "ir Condion’o uni. t. m. col 1148 cite raison fondamentale. Suarez ajoute trois raisons accessoires : le jugement particulier qui a ! ie a tout jamais le sort des âmes ; la convenance du mérite acquis pendant l’union de l’âme au corps ; enfin les absurdités qui résulteraient, eu 1 aux bus de la Providence, d’un renversement possible des merit. 1 purgatoire. Op. < il., disp. XL 1 1.

usonnements on peut objecter « pie

unes, dans l’au-delà, ne sont pas dans un état

gourdissement et de sommeil (cf. prop. 23 de Rosmini, condamnée par le Saint-Office, il déc. 1887, I » < nL-l î.miiw.. n. 1913) et par conséquent peuvent agir r librement. Pourquoi donc possédant la charité-. ne mériteraient-elles pas ? C’est, dit Suarez, parce que leur _ itteint s.. omplel d’intensité.

raison, y I. et passant. n. 5, est 1

coup plus profonde qui Suarez lui mémene

Elle répond pleinement a la doctrine tho miste de l’impossibilité d’accroître en notre âme la

tiliante perantis, sinon par des

larité plus intenses. Cf. Grâce, t. vi, col. 1628.

Toutefois Impossibilité de mériter ne signifie pas nécessairement Impossibilité de corriger les habitudes défectueuses et d’acquérir des dispositions plus par

laites.

Les habitudes délictueuses, acquises sur terre, dis ]). naissent par la mort dans leur chinent seusilil ; eu tant qu’elles sont dispositions mail aises de la Volonté, elles seraient appelées a disparaître par le seul fait

qu’en purgatoire elles ne peuvent plus trouver l’occa

sion de s’exercer ; mais, tout connue les pèches véniels,

elles disparaissent vraisemblablement par un acte de vertu contraire assez, intense pour les supprimer. Cf. Palmier !, op. cit., § 23, n. 3 ; MgrChollet, Vos morts mi purgatoire, au ciel, Paris. 1908, p. 135,

Palmier ! va plus loin et estime que, nonobstant l’étal de t cru le. les à mes du pu ruai o ire peuvent, dés le

purgatoire, acquérir les dispositions vertueuses qui

pourraient leur manquer pour être proportionnées a leur futur étal de gloire. L’» '. cit., n. 2 3. Et, a ce sujet, il cite le texte suivant de Lessius :

1 es aines détenues au purgatoire peuvent v corriger facilement et en peu de temps toutes leurs affections, et par conséquent > acquérir les habttus de tentes les vertus. « c qui ne simili lie pas qu’il y ait Ici lieu a mérite : pour qu’un Imhitiis soit infuse a l’aine, point n’est requise l’existence

d’un acte méritoire de cet habîtus ; il suffit d’une disposition ultime correspondant aux exigences de la nature ou de Dieu. Ainsi un pécheur peut croître en foi. en espérance, en tempérance, bien qu’il ne mérite pas. De summo bono,

t. ii, e. x x 1.

i. Enfin, les âmes du purgatoire, en raison même

de leur attachement au bien suprême, n’éprouvent aucun de ces sentiments d’angoisse ou d’horreur que

leur prête Luther, et qui seraient, en elles, une faute eritable.

Leur souffrance, dit Bellarmin, ne les absorbe pas au point qu’elles en perdraient la véritable notion de leur étal ou qu’elles se laisseraient aller au trouble el au désespoir comme si elles étaient en enfer. La parabole du mauvais riche ne montre-t-elle pas qu’un damné lui-même peut parfaitement se rendre compte de son supplice et de ses causes’.' L’Église d’ailleurs prie a la messe pour ces âmes qui dorment du sommeil de la paix. Or ces âmes endormies du sommeil de la paix ne sont pas des âmes anxieuses, des âmes

désespérées ; mais plutôt une incroyable consolation se mêle a leurs souffrances, à cause de la certitude où

elles sont de leur salut. Op. cit., I. IL c. IV, ]>. L08.

C’est la le théine que les théologiens reprennent a

l’envi. en exposant le ride de la volonté’des âmes souffrantes par rapport à leur expiation. Les peines

du purgatoire sont dites volontaires, c’est a dire

acceptées par la volonté de l’âme, en ce sens que ces âmes, parfaitement soumises à la volonté divine et sachant que la souffrance est pour elles le moyen de

parvenir au bonheur, acceptent avec reconnaissance et amour leur expiation. Ce qui n’empêche pas leur

douleur d’être contraire aux aspirations de leur volonté el par conséquent de lui infliger une véritabl

tristesse prél ente. Su a nv. op. Cit., disp. LY I, sec t. i. n. I. De la. il tant conclure que la souffrance ainsi

acceptée par les âmes du purgatoire, quelle que soit

la trislesse qu’elles en éprouvent, ne saurait produire en elles, ni désespoir, ni trouble, ni angoisse. /PLL. disp xi.vi l. seci. 111. n :  ; l. Si sur terre les âmes justes se soumettent avec amour a la divine Providenci

leurs tribulations, a plus forte raison les aines

du purgatoire, qui Boni confirmées en grâce et savent

que leurs peines sont très justes et leur sont inll

par une disposition divine. Elles ne se troublent donc

lies n’éprouvent même pas d’impatience, elles

se conforment pleinement a la’divine volonté ; aussi

au canon de la messe. l’Église affirme t elle qu’elles 1299

PUR » ; ToFRE. ETAT DES l ES

L300

reposent et dorment en paix. La véhémence de leur douleur ne peut même pas leur apporter un trouble involontaire : ce trouble serait concevable en une âme encore unie à son corps, mais, dans l'âme séparée du corps, il n’en peut résulter qu’une tristesse d’ordre intellectuel, incapable d’apporter le moindre trouble. Ces remarques de Suarez, loc. cit., a. 1, se retrouvent d’une façon presque identique chez les théologiens qui ont étudié cet aspecl « le l'étal des anus du purgatoire : « Hélas ! mon Theotime, les anus qui sont en purgatoire y sont sans doute pour leurs péchés, péchés qu’elles ont détesté et détestent souverainement ; mais quant à l’abjection et peine qui leur en reste d’estre arrestées en ce lieu-là, et privées pour un temps de la jouissance de l’amour bienheureux du paradis, elles la souffrent amoureusement, et prononcent dévotement le cantique de la justice divine : « Vous estes juste, Seigneur, et vostre jugement équitable. » (Ps., cxviii, 137). » Saint François de Sales, Traité de l’amour de Dieu, t. IX, c. vu. Sainte Catherine de Gênes a, sur ce sujet, d’admirables pages que commente avec profondeur le P. Faber, op. cit., p. 388-390.

Certaines de leur salut.

1. La doctrine.  — Cette

deuxième vérité est supposée dans tout ce qui précède. La certitude du salut, que possèdent les âmes du purgatoire, n’est pas, dit Bellarmin, celle des bienheureux, « qui exclut l’espérance et la crainte » ; elle n’est pas la quasi-certitude que les justes peuvent atteindre sur terre, « laquelle n’exclut ni l’espérance ni la crainte, et peut être appelée une certitude conjecturale ». C’est une certitude spéciale, « qui ex-clut la crainte, mais non l’espérance ; le bonheur réservé à ces âmes est futur, non présent, elles peuvent donc l’espérer ; par ailleurs ce bonheur leur est acquis, elles ne peuvent donc en craindre la perte ». Op. cit., t. II, c. iv, p. 105. Ayant ainsi défini cette certitude, Bellarmin la prouve par l’existence du jugement particulier. Si le sentence définitive de ces âmes a été prononcée aussittît après la mort, rien ne prouve qu’elles n’en aient pas connaissance : le but du jugement particulier est précisément de notifier l’arrêt divin à celui qui en est l’objet, lbid., p. 107. Les âmes d’ailleurs peuvent se rendre compte qu’elles sont en purgatoire, non en enfer, en constatant qu’elles-mêmes et leurs compagnes de peine ne blasphèment pas Dieu, mais l’aiment et sont pleinement soumises à sa volonté. Ibid.

Cette certitude du salut est enseignée par tous les théologiens comme une vérité très certaine. Suarez, op. cit., disp. XLVII, sect. iii, n. 5. Suarez analyse cette certitude plus complètement que Bellarmin. Deux éléments, dit-il, y concourent : le premier est qu'à la sortie du corps ces âmes se sachent en état de grâce ; le second est qu’elles sachent que jamais elles ne seront elamnées. Le premier élément leur serait-il fourni par la science intuitive qu’elles ont d’ellesmêmes ? Déjà Cajétan, op. cit., q. ii, et Bellarmin lui-même ont indiqué cette raison. Suarez en doute, car, dit-il, comment l’intuition qu’elles ont de leur nature pourrait-elle les conduire à la connaissance de réalités surnaturelles ? Il leur faudrait une science surnaturelle infuse, et nous ignorons si une telle science leur est octroyée par Dieu. C’est donc, tout d’abord indirectement, en raison des actes surnaturels d’amour de Dieu qu’elles accomplissent au purgatoire, qu’elles concluent avec certitude être en état de grâce. De plus, le jugement particulier leur a fait connaître qu’elles ne sont point damnées ; or, elles savent que quiconque est trouvé sans l'état de grâce au jugement particulier est damné. Enfin elles savent que les damnés sont obstinés dans le mal et n’ont aucun espoir du pardon ; ces deux sentiments étant contraires à leurs dispositions présentes, les âmes du purgatoire

en déduisent la cerl il ude de leur état de gi âce. !.>><. rit., n. *). Le second élément, la certitude de n'être pas damnées un jour, leur est inculqué par la foi qu’elles ont retenue de la terre et qui leur apprend que, ne pouvant pécher, elles ne risquent pas d’encourir plus tard la damnai ion. Et si quelque âme trop ignorante ne connaît pas ces principes, Suarez estime que Dieu y suppléera par une lumière nouvelle, au besoin par l’enseignement de l’ange gardien, lbid., n. 7. Mais toutes ces raisons ne sont qu’indirectes. Dans la sentence du jugement particulier Suarez trouve un argument direct et très démonstratif de la certitude des âmes par rapport à leur état de grâce : la sentence du jugement est pour elles une révélation leur donnant toute certitude sur leur état présent et sur leur future béatitude. N. 8.

Ces divers arguments se retrouvent plus ou moins nettement invoqués chez les théologiens modernes. Palmieri, op. cit., n. 24, p. 08, Mazzella, op. cit., n. 1353, Ch. Pesch, op. cit., t. ix, n. 599 (lequel ne voit dans le jugement particulier qu’un argument de vraisemblance), se contentent de résumer Suarez. Billot est plus personnel, et son argumentation mérite d'être notée : De novissimis, p. 107-108.

L’argument de Cajétan, délaissé par Suarez, ne laisse pas de plaire aux thomistes. Le cardinal Lépicier l’adopte pleinement, De novissimis, p. 326. Le P. Hugon l’indique d’un mot, op. cit., t. iv, p. 799, renvoyant pour de plus amples explications au traité philosophique de la connaissance des âmes séparées, Cursus philosophie thomisiiese, Paris, 1907, p. 138-149 ; cf. Réponse theologique à quelques questions d’actualité, Paris, 1924, L'état des âmes séparées, c. iii, p. 230 sq. On trouvera également de bonnes indications dans Le monde invisible, Paris, 1931, part. II, c. ii, § 4, p. 191 sq., du cardinal Lépicier, et dans Mgr Chollet, La psychologie du purgatoire, Paris, 1924. Sur la pensée de Denys le Chartreux touchant la certitude qu’ont les âmes de leur salut, voir Lépicier, op. cit., p. 328, qui défend l’orthodoxie de cet auteur.

2. L’objection.

Si les âmes sont certaines de leur salut, pourquoi l'Église, à l’offertoire de la messe des défunts, demande-t-elle « que les âmes des fidèles soient délivrées des peines de l’enfer et de la fosse profonde, ne soient pas dévorées par le lion infernal, ne soient pas absorbées par le Tartare et ne tombent pas dans l’obscurité » ? Et, à l’absoute, ne dit-elle pas, au nom du défunt : « Délivrez-moi, Seigneur, de la mort éternelle, en ce jour terrible, quand cieux et terre seront ébranlés ? » De telles prières, qui ne peuvent être offertes que pour les âmes du purgatoire, , semblent bien signifier que, dans la pensée de l'Église, ces âmes sont encore exposées aux flammes éternelles.

Bellarmin apporte deux réponses. Tout d’abord l'Église, bien que sûre du salut clés âmes du purgatrire, prie cependant pour que la sentence finale du jugement dernier leur soit favorable. On la voit ainsi fréquemment demander à Dieu ce qu’elle est sûre de recevoir. Mais il est une autre solution : « L'Église, par cette prière, eiemande bien que les âmes soient délivrées du purgatoire, mais elle emploie une figure, comme si les âmes étaient au moment de quitter leur corps et en péril de leur salut éternel ; elle se rappelle et se représente le jour ele la mort ou de la sépulture. » Op. cit., c. v, p. 109. C’est ainsi que, dans sa liturgie. l'Église se représente Jésus incarné, naissant, souffrant, bien qu’elle le sache glorieux au ciel. Cette explication se trouve également chez Grégoire de Yalencia. Commentariorum theologicorum, t. m. Venise, 1008. disp. VI, q. ii, punct. 8. Cf. Billuart, De ultimo fine. diss. II, a. 3, cirai finem.

Benoît XIV donne une solution bien trop simple : sous le nom d’enfer, de Tartare, de gouffre obscur,  :

l'Église entend simplement le purgatoire. De sacriflcio . 1. 11. c. i Palmier ! reprend la seconde expli cation île Bellarmln, op. cit., p. 7°. Billot, tout en recevant l’explication de Benoit l comme plausible, reprend la solution plus complète il<' Bellarmln, en ajoutant une considération (qu’il emprunte d’ailleurs.m commentaire de Sj l lus sur la Somme, SuppL, i relative a l'édification des fidèles :

r.uiiit n glise nous représente l’instant terrible de la mort, d’oti dépend l'éternité, tantôt ce lugement demiei qui eonftrmen solennellement le |ugemen1 particulier. De même qu’elle célèbre la naissance, la passion, la résurrection il ii Sauveur comme s’il nalssall encore présentement, comme s’il souffrait, comme -M ressuscitait, « l<- même elle ostnmémore les défunts comme s’ils étaient encore --niterre , i l’instant dernier de la vte ou se décide leur sort éternel, ou au contraire comme -i cet Instant ultime était transféré luaqu’au Jour de la colère, jour de calamité ri de misère, qui ilni o.' monde dans ii' îeu, comme en témoignent David « M i.i Sibylle. I. novtssimis, p, 108-109.

Même interprétation chez le cardinal Léplcier, n< nopissimis, p. 108,

L’explication proposée par Suarez présente un Intérêt très particulier. Sans doute elle suppose, comme les précédentes, « pul'Église se reporte au moment où l’Ame itait sur le point de quitter son corps ; mais Suarez admet une sortid’effet rétroactif de ces prières : H est probable çpæ cette initie de l'Église, même faite après la mort d’un fidèle, lui a pu profiter avant sa mort en raison de la prescience divine… Autrement comment l'Église pourrait-elle demandez un bienfait dépendant absolument d’une disposition antérieure '? : 0p. cil., dis)) Xl.V 1 II. seet.. n. 12. Stetitrup critique vivement la solution de Suarez. « Si cela suffisait, dit-il. nous pourrions au même litre prier pour les bienheureux, nous représentant le temps de leur mort et demandant a Dieu leur salut.

riologia, Inspruck, 1889, th. xxxv, p. 135. A quoi Ch. l’eseh fait observer que nous ne pouvons en réalité prier, même dans l’hypothèse de l’effet rétroactif de nos prières, que pour ceux a qui, hic et mine, nos prières peuvent encore être utiles. Op. cit., t. ix, n. 1. 17.

L’opinion de la valeur rétroactive des prières poulies défunts.i été reprise de nos jours p. ir Mgr Chollet, op. cit.. Pottseriptum : Un rayon dans ta nuit. p. 342 356, et Lettre pastorale sur La fia aux fins dernières, 1923. texte publié dans la Documentation catholique, 17 févr. ]

Que prétend donc l'Église ? Elle se reporte par une sorte de fetion au moment qui précède le jugement, c’est-à-dire .i la minute suprême ou les (unes sont encore dans la lutte. dans l’a » ! onie. disputées entre le lion infernal qui veut les deorer et l’archance qui veut les conduire dans le séjour de lumière, et la, elle supplie Dieu d’accepter ses prières et ses liostics delnuan-. : es et. en retour, d’accorder aux âmes dont elle fait mémoire les -r.ues de foi et de repentir qui les délivreront de la mort étemelle, des peines de l’enfer, des morsures du lion, des ténèbres île l’abtme.

1 'r il ne serait pas digne de l'Église de se livrer à une telle fiction si le fjeste « tait inutile, et si l’Ame ne devait eu tirer aucun profit. La réaJtté, c’est que l'Église, en se plaçant ainsi, par un retour sur le passé, au moment de l’agonie finale et en intercédant pour celui qui va paraître devant Dieu, sait que ses prières actuelles ont été vraiment présentes a Dieu a l’heure de cette agonie, que Dieu lésa consil’i ! a pu, dans sa miséricorde, s’en inspirer dans sa conduite envers l'âme… I'. 355.

l’our justes que soient ces considérations, elles

n’en doivent pas en faire Oublier une autre ; c’est que

nos prières liturgiques reflètent « luis leur archaïsme

l’imprécision de l’eschatologie primitive qui a été

-dessus

IV. IMS BOrfBAOl.IVAST-i POUR LB6 III. ' rat. — « Le suffrage est le secours par lequel les

fidèles aident les (unes du purgatoire, soil en raison du mérite de leurs bonnes œuvres, soit par leurs prières, soit parleurs satisfactions. Ch. Pesch, Praleel. theol., t. ii. n. 177. Les théologiens posttrldentlns se sont appliqués à mettre en relie ! trois points principaux : les bases doctrinales des suffrages, leurs bénéficiaires,

leurs modalités

1° Bases doctrinales. 1. La communion des saints et la doctrine du corps mystique. Dieu entendu le

premier point de dépari de nos théologiens est l'Écriture et la tradition, qu’on a étudiées plus liant : mais c’est au dogme de la communion des saints qu’ils

rattachent, avec toute la tradition, l’efficacité des

suffrages pOUT les morts. En ce qui concerne les l’eus et les.scolastiques, on trouvera la synthèse de leur

doctrine a l’art. Communion m s suxis, t. iii, col. 129 117. Les erreurs protestantes sur l'Église,

corps mystique du Christ. ont fait préciser la doctrine des Suffrages en fonction de celle donnée spéciale.

La notion du corps mystique, étendue aux âmes du purgatoire, se trouve déjà insinuée par saint Paul, I Thcss.. îv. 16 ; I Cor.. x. 1 S. C’est déjà en raison du rapport de la messe au corps mystique que saint Augustin explique qu’elle puisse être offerte pour les défunts : Les âmes des fidèles deluiils ne sont pas séparées de l'Église ; elles sont membres du Christ. » De cir. Dei, 1. V c. i. P. /… t. xi.i, col. 674. Au

ir siècle. Pierre h' Vénérable reprenait explicitement

cet argument, Epist. contra Petrobrussianos, 1'. L.,

t. ci. xxxix. col. S’il sq. Dans leurs commentaires sur la Somme de saint Thomas, III', q. viii, a. 2, les théologiens du r siècle font entrer les âmes -du purgatoire comme recevant l’inllux de la grâce et démérites de.Jésus-Christ. Cf. Emile Mersch, Le corps mystique du Christ, t. ii, Louvain, 1933, p. 'l’in. si cette doctrine du corps mystique ne fut pas expressément invoquée au concile (le Trente pour expliquer les rapports des Vivants avec les défunts, un des

évêques les plus marquants de l’assemblée, le futur cardinal Hosius, y lit appel ensuite dans sa célèbre Confessio fidei catholicse. C’est par cette doctrine du corps mystique qu’il montre que la messe peut être appliquée aux âmes du purgatoire : un effet du saint sacrifice est d’unir en quelque façon tout le corps du Christ, car le Christ s’y trouve faisant un. en lui, ceux pour qui on l’offre. C. XXII, dans Opéra omnia, Cologne, 1574, part. I, p. 139-140. Cf. Mersch, op. cit.,

t. II. p. 265, note 1.

Bellarmin reprend pour son compte l’argument du corps mystique, op. cit., t. II, c. xv, p. 122.

Cette doctrine du corps mystique, fondement dogmatique des suffrages pour les défunts, se retrouve soit explicitement, soit implicitement exprimée par les théologiens catholiques. Elle est, chez Suarez, a la base de toute la sect. i de la disp. XLVIII, De suflragiis. Voir également Gonet, Di pœnitentia, disp. XIII, a. 5, n. 61-62.

2. Le triple mode de suffrages.

Un autre présupposé doctrinal concerne la triple façon dont un membre du corps mystique du Christ peu ! subvenir aux besoins d’un autre membre. Ainsi que l’expose Suarez, toc. cit., n. 1, cette action mutuelle des membres du corps mystique répond à la déclarai ion de saint Paul : adimpleo eu quie désuni passionum Christi in carne mea pro corp ire ejus quod est Ecclesia. Col., i, 24. Non que la passion du Christ présente quelqui Insuffisance, mais il s’anit ici de la participation que le corps mystique lui même doit avoir a l'œuvre rédemptrice du Sauveur. Suarez, hic. cit., n. 5.

Or, les théologiens sont unanimes a enseigner que 'Ile participation revêt une triple forme : Vimpétralion, le mérite, la satisfaction, ci. Bellarmin, loc. cit.. c xiv ; Chollet, o/). cit., I. I. c. vi ; L’Ami du ci , p. 323 s(|. Il peut arriver d’ailleurs que la même action, la prière par exemple, possède a la luis cette triple Formalité. Voir Prière, t. mu, col. 234-235. Le mérite pour autrui ne peut, en toute hypothèse, être qu’un mérite de convenance. Voir Cc>c ; m ; o un i, t. iii, col. 1143-1144. De ces principes, dont ou ne peut marquer ici que les grandes ligues, l'Église a déduit la légitimité des indulgences, sous la forme qu’elles révèlent présentement, appliquées aux défunts. Ici, la théorie, déjà formulée au XIIIe siècle, a singulièrement devancé l’application officielle Noir Indulgences, t. vii. col. 16Il et 1616.

Les suffrages énumérés par le concile de Trente (voir col. 1279) et proposés par tous les théologiens rentrent dans l’une ou l’autre des trois catégories : sacrifices de la messe, prières, aumônes, autres œuvres de piété (dont les pénitences volontaires et les indulgences), toutes ces manifestations de notre activité surnaturelle en laveur des défunts ont valeur impétratoire, satisfactoire ou méritoire, soit disjonctivemenl, soit simultanément.

Sur le détail de ces suffrages pour les âmes du purgatoire, voir J. Terrisse, Le purgatoire ou pouvoir, motifs et moyens que nous avons de secourir les âmes du purgatoire, Paris, 1911-1912, p. 223-307 ; Chollet, op. cit., toc. laud. ; J. Munford, Traité de la charité envers les âmes du purgatoire, dansBouix, Le purgatoire, 3e éd., Paris, 1883 ; L. Rouzic, Le purgatoire, Paris, 1922, c. xxi-xxvii ; A. Molien, La prière pour les défunts, Avignon, 1929.

3. La manière dont les suffrages aident les défunts. — C’est là un troisième point où la théologie a dû apporter quelques éclaircissements.

a) La prière. — Il s’agit de la prière considérée uniquement quant à sa valeur impélratoire. Les théologiens sont assez divisés sur la manière dont la prière, par sa seule valeur impétratoire, peut apporter secours aux âmes du purgatoire.

Les uns estiment que la prière, considérée uniquement sous la formalité d’impétration, peut obtenir de Dieu directement la remise de la peine encore due à la justice divine par les âmes du purgatoire. Le Christ n’a-t-il pas dit sans restriction : « Demandez, et vous recevrez ? » De Lugo, De pœnitentia, disp. XXIV, n. 20. Bellarmin adopte cette solution. « La prière, dit-il, aide d’une double façon les âmes des défunts : d’abord en tant qu’œuvre pénale et laborieuse… ; ensuite, en tant que simple impétration. ce qui est le caractère propre de la prière, tout comme les prières des bienheureux sont utiles et à nous et aux âmes du purgatoire, bien qu’elles ne possèdent pas de valeur satisfactoire. » Op. cit., t. II, c. xvi, p. 123. Théophile Raynaud distingue entre prières des vivants et prières des saints du ciel : les premières seules auraient une influence directe en faveur de la rémission des peines du purgatoire. Scapulare marianum, q. v, dans Opéra, t. vii, Lyon, 1665, p. 289. « Doctrine pieuse, probable et peut-être vraie », déclare Suarez, op. cit., disp. XLVIII, sect. v, n. 5 ; mais combien incertaine et peu fondée, ajoute-t-il aussitôt. Car, si par nos prières, considérées comme simples impétrations, il nous est impossible d’obtenir pour nous-mêmes la rémission de la dette de peine dont nous sommes encore redevables à Dieu après le pardon de nos fautes, combien la chose sera-t-elle plus impossible encore à l'égard d’autrui. C’est donc en tant qu’œuvres satisfactoires, que nos prières obtiennent directement et pour nous-mêmes et pour autrui une rémission des peines dues aux péchés pardonnes. En tant qu'œuvres impétratoires, elles peuvent indirectement obtenir cette rémission en demandant à Dieu d’appliquer aux âmes souffrantes les satisfactions de Jésus-Chiist, de la sainte Vierge et des saints et

surtout d’inspirer aux fidèles de l'Église militante la pieuse pensée ei la charitable résolution d’offrir des

satisfad ions pour les à mes en faveur de qui sont faites ces prières. Cette seconde opinion nous paraît de beaucoup plus probable. En effet, de leur nature les peines du purgatoire sont dues a la justice divine, et le soulagement de ces peines doit être normalement obtenu par des satisfactions offertes par ceux-là qui sont en état de les offrir. Demander a Dieu que les âmes soient libérées gratuitement, c’est-à-dire indépendamment de toute satispassion de leur part ou de sal isfaction de notre part, c’est s’exposer grandement à ne pas être exaucé. Cf. Lépicier, op. cit., p. 299 ; Ch. Pesch, op. cit., t. ix, n. 611 ; L’Ami du clergé, 1932, p. 111-112.

Cette solution éclaire la question connexe de l’intervention d<'s saints du ciel en faveur des âmes du purgatoire. Cette intervention ne saurait être mise en doute. Deus venige largitor… quiesumus clementiam tuam : ut noslnc congregationis fratres… qui ex hoc sœculo transierunt, beat a Maria skmper virgin’e ixtehcedente cru omnibus SANCTis tuis, ad perpétuée beatitudinis consortium pervenire concédas. Deuxième collecte de la messe quotidienne pro defunctis. Mais le mode d’intervention doit être expliqué conformémint aux principes énoncés tout à l’heure. Les saints, en elïet, outre leur impossibilité de mériter et d’offrir à Dieu des satisfactions présentes, entendent bien se conformer, en priant pour les défunts, à l’ordre de la Providence, qui fait dépendre de l’expiation la rémission de la peine ou totale ou même partielle. La sainte Vierge et les saints offrent donc à Dieu les satisfactions passées de Jésus-Christ et leurs propres satisfactions acquises pendant leur vie terrestre ; ils demandent à Dieu d’inspirer aux vivants la pratique de satisfactions en faveur des âmes souffrantes et peut-être au cas où certains suffrages offerts pour des âmes déterminées ne pourraient leur être appliqués (soit parce qu’elles sont déjà au ciel ou qu’elles sont damnées), la Vierge et les saints désignent-ils à Dieu par leur intercession les âmes auxquelles peuvent être transmis le bénéfice des suffrages inutilisables. Sur tous ces points, voir J.-B. Terrien, La Mère des hommes, t. ii, Paris, s. d., p. 320-326.

Avec Suarez le P. Terrien estime peu probable que les saints du ciel (la même raison vaut aussi pour les prières des vivants) obtiennent de Jésus-Christ qu’il applique lui-même aux défunts la quantité de ses propres satisfactions nécessaire et suffisante pour qu’ils soient délivrés. L T ne délivrance ainsi obtenue serait gratuite et du côté du donataire et du côté de ses avocats ; mais la justice aurait néanmoins pleine satisfaction du côté du Christ. Ce mode d’application ou de rémission semble improbable, du moins d’une façon régulière, parce que « Jésus-Christ, cause et source universelle de toute rémission de la peine, ayant établi des instruments et comme des causes secondes pour appliquer ses satisfactions, il n’a pas coutume d’en faire l’application de lui-même, en dehors des moyens institués par lui. Si donc il le fait quelquefois, c’est par une économie spéciale qui ne tombe ni sous la science, ni sous la loi. » Terrien, op. cit., p. 324, note 1. Voir aussi Palmieri, op. cit. ; § 31, n. 4. En réalité nous ne pouvons que faire des conjectures plus ou moins vraisemblables. Dieu demeurant toujours libre d’agir par pure bonté et miséricorde.

De plus, les théologiens admettent généralement que si les suints ne peuvent venir réconforter par leur présence les âmes dans le purgatoire, il n’en est pas de même des anges gardiens, que Dieu ou la Vierge Marie, peuvent députer vers les âmes qui souffrent pour les soutenir ou leur annoncer leur proche délivrance. Suarez, De angelis, t. V, c. ix, n. 9, Opéra, 1305

PURGATOIR] SUFFRAGES DES VI VA NTS

i

t. ii, p. 7' ; i.M pourquoi la liturgie, s’insplrant de Luc, xvi, 22, invoque la protection de salnl Michel pour les Ames souffrantes (offertoire de la messe des défunts), ou encore confie aux anges le soin de conduire l’Ame.m paradis : /" paradisum deducani le angeli… Ce ministère des.un ; » --- s’exerce, comme l’expose -oint Thomas, l*. q. cviii, a. 7..ni o u '". par le moyen d’illuminations Intellectuelles. Voir plus loin le lieu tin purgatoire, col. 1310. Cf. Léplcler, op. cit., p. 300-301.

lue autre question connexe concerne la possibilité pour les àiiuv ilu purgatoire de demander elles mêmes a I>i<u leur libération ou leur soulagement. Parmi les théologiens <|ui abordent ce problème, plusieurs, notamment Bellarmin, />. cit., I. II, c xv, Sylvius, In Suppl. sum. theol., q. lxxi, a. '-'. Grégoire de Valencla, op. cit., t. m. disp. 1. q. ii, punct. 6, Suares, De religione, tr. IV, I. I. c xi, n. 12, répondent par l’affirmative. La réponse négative nous semble plus probable. Les prières il » -.'unis du purgatoire ne pi-uv-nt avoir tout au plus que valeur impétratoire. Or. la rémission de leur peine ne peut être accordée, avons-nous dit, A la prière que si la satisfaction l’accompagne. I".t il ne convient pas l< i que les Ames souffrantes, qui acceptent pleinement l'œuvre de justice qui s’accomplil en elles, Interviennent pour adoucir ou abréger cette œuvre, Les saints du ciel et les vivants de la terre peuvent faire appel en ce sens a la miséricorde divine dans un sentiment de charité ; mais la situation des âmes du purgatoire n’est pas la même que la notre : leurs installées pris de Dieu, en leur propre faveur, serait contraire a l’ordre. Cf. I. épicier. op. cit., p. 302-303.

b) ht mérite. Les théologiens n’envisagent guère la question du mérite de convenance offert à Dieu en vue île l’adoucis-cinent des peines du purgatoire. Voir cependant Suarez. De peenitentta, disp..YIII. seet. v. n. 1. De toute évidence cette question doit être résolue conformément aux principes énonces au sujet de la prière pour les défunts, lui égard aux mérites offerts en faveur des âmes du purgatoire, il est convenable que Dieu, sans leur accorder directement la rémission de leur peine (quoiqu’il le puisse, s’il le veut), provoque chez les vivants l’inspiration d’offrir des satisfactions pour les morts. D’ailleurs, en fait, il n’est aucune œuvre méritoire qui ne soit, sous quelque aspect, également satisfactoire. Cf. (omet. Ctgpeat theotogim thomâticte, De pœnitentia, disp. XIII, art. 2, § 3, n. 18.

o La satisfaction. L'œuvre satisfactoire peut être définie : une œuvre d< ni le caractère expiatoire offre A Dieu une compensation pour la peine temporelle encore due aux péchés pardonnes. Cette compensation, on peut l’offrir pour soi-même. On peut aussi l’offrir pour autrui. Cf. Su. ire/, op. eif., disp. |.Y 1 1 1. sect II, qui cite. n. I, une longue liste de théologiens favorables a cette doctrine, qu’on doit dire certaine dans l'Église. Elle peut être offerte pour autrui A titre de eondignité, c’est-à-dire pour se substituer en toute justice à la satisfaction qu’autrul devrait offrir A Dieu. La seule condition exigée Ici par les théologiens, c’est l'état de grâce en celui qui oITrc la satisfaction et, bien entendu, en celui pour qui elle est offerte, l’elle est très certainement la doctrine exprimée par saint Thomas, Snppf., q. xi, a, 2 ; cf. In IY<><<> Suit., dist.. In s'/nih. apost., a. 10 ; In epist. u<i Galatas, vt, 2 ; Cunt. fjent.. I. III. c CLvm, fine. I.es meilleurs commentateurs thomistes proposent et défendent cette dec trine. Cf. Salmanti censés, De psenitenlia, disp. dnb. n. Suarez lui consacre ici toute une section, op. cit., disp. XLVIII, sect ni. Billuarl la rattache à la doctrine générale du corps mystique : Nous sommes un dans le Christ, et nous sommes les membres d’un seul

corps dont le Christ est le chef. Or, dans le corps hu main, chaque membre a^it non seulement pour son utilité propre, mais pour l’utilité de tous Us membres.

Il en est de même dans le corps mystique de l'Église.

Et l’on peut trouver une confirmation de cette vérité

dans les usages humains : la charité a plus cl, , puissance

sur Dieu que sur les hommes ; or, un homme, par amour pour autrui, lient acquitter les dettes de sou prochain envers les hommes ; donc et a plus rorte raison un chrét ien le pourra taire a l'égard des Jugements dh Ins. De psenitentia, diss. i. art. ">.

i si n possible d’entendre cette thèse générale du cas particulier de l'œuvre satisfactoire offerte pour les Ames du purgatoire ? Peut-on admettre que cette satisfaction vicaire d’un vivant pour un mort puisse

avoir pies de Dieu valeur de COndignité, tout comme

A l'égard d’un membre vivant'.' Suarez le pense, op. cit.,

disp. XLVIII, sect. VI, n. I. La solution, dit-il, dépend de la promesse de Dieu.

si nous admettons que celle promesse existe a l'égard

des vivants, il n*J a aucune raison pour i|ue nous ne l’rlrn dions pas aux aines du purgatoire, i|ui nous sont unies aussi par la chante et ont besoin de notre aide tout autant que

les vivants et même davantage, puisqu’elles ne peuvent

par elles mêmes Offrir qu’une SatispaSSion (i non une salis (action. I >e plus, elles ne sont pas encore parvenues tout a (ail au terme et elles poursuivent encore leur oie. Aussi,

tant de leur côté que du nôtre, il y a fondement ci possi

hilite pour ce pacte ou celle promesse. Ilu cote de I lieu il

y a la même convenance de libéralité et de miséricorde, sans répugnance à la justice, la même manifestation de volonté, puisque, autant que nous le montre la pratique ci la tradition de l'Église, la loi des suffrages a l'égard des déduits est la même qu'à l'égard des vivants : l'Église offre pareillement ses suffrages pour les vivants et les morts. Loc. cil.

La thèse de Suarez (lèche par un point : il ne s’agit pas, du ciile de Dieu, d’une convenance de libéralité et de miséricorde, mais d’une acceptation. Celle acceptation se conçoit facilement dans le corps mystique dont les membres Vivants, encore dans l'état de voie, n’ont pas donné leur mesure linale : elle Semble

plus difficile a concevoir a l'égard de membres, vivants

sans doute, mais parvenus (quoi qu’en dise Suarez en ce texte) à l'état de terme simpliciter. Aussi nombre d’auteurs pensent-ils que cette substitution de satisfaction, offerte a Dieu par manière de suffrages, n’a devant Dieu qu’une valeur de convenance a l'égard des défunts. C’est l’opinion de Cajétan, Opusc. xvi, q. v, et d’autres maîtres du xi siècle, Pierre Solo, Melchlor Cano. Médina (Jean), Corduba, etc. L’opposition entre les deux opinions se retrouve (Voir plus loin). sur l’effet infaillible ou non des suffrages. Mais ici il s’agit moins d’effet infaillible que de proportion de justice. Ils seront i n lai I lilileineiil agréés par Dieu, mais seront ils agréés de telle sorte que Dieu y voie une satisfaction (le eondignité offerte à sa justice, ou bien n’y trouverat-il qu’une satisfaction de convenance proposée a sa

miséricorde.'? Tel est le vrai point en litige.

Les deux thèses pourraient bien finalement se cou

CÎIier dans l’ignorance ou nous sommes de la mesure exacte (le l’acceptation divine, ignorance que tous les théologiens sont obligés de confesser.

Quand on se souvient de la doctrine officiellement promulguée sur la valeur de l’indulgence plénière appliquée aux défunts (voir Indulgences, i. vu.

COl. 1622 1623), quand on se rappelle l’enseignement

des théologiens sur l’application de la valeui satisfac toire du sacrifice de la messe (voir MESSE, I. x. col. 1301 sq., et surtout Conclusion, col. 1304), on doit

bien convenir que la substitution de nos satisfactions

aux satispassions des âmes souffrantes est de la part

de Dieu beaucoup plus question de boulé et de miséricorde qu, - de jusl iee. 1307

    1. PURGATOIRE##


PURGATOIRE. SUFFRAGES DES VIVANTS

L308

Sur l’expression suffrages et per modum suffragii voir la bulle de Sixte IV ci aoûl 1476) et colle du 27 novembre 1477. Cavallera, n. 1264, 1265.

Les bénéficiaires des suffrages.

 De toute évidence, seules les finies du purgatoire sont bénéficiaires

de nos suffrages. Les bienheureux n’en ont pas besoin, et les damnés en sont radicalement incapables. L’opinion de certains scolastiques touchant l’efficacité des suffrages par rapport aux damnés mediocriter malis (voir col. I238)es1 désormais périmée. Il faut également éliminer du bénéfice des suffrages les âmes enfermées dans les « limbes des enfants ». Suarez, op. cit., disp. XLVII1, sect. v, n. f8. Enfin, même pour leurs seuls péchés véniels ou pour la peine due aux péchés pardonnes, les damnés ne peuvent profiter des suffrages. Ibid., sect. iv, n. 16. La raison en est que le bénéficiaire doit être en état de grâce. Ibid., sect. vii, n. 2.

Trois conditions, en effet, sont requises pour qu’un pécheur puisse bénéficier des suffrages offerts à son intention. 1. que la faute qui appelle le bénéfice des suffrages soit déjà remise quant à la coulpe : les suffrages ont pour objet la rémission de la peine encore due pour des péchés déjà pardonnes ; 2. qu’il soit en état de grâce (le pécheur pouvant être retombé en de nouveaux péchés) ; 3. qu’il soit encore débiteur à l'égard de la justice divine. Suarez, ibid., n. 1, 2, 5. Or les âmes du purgatoire vérifient toutes ces conditions. Ont-elles toutes droit aux suffrages ?

La question ne se pose pas pour les âmes de baptisés morts dans la communion de l'Église. Mais, même après le concile de Trente, les théologiens se sont demandé si les suffrages profitaient à toutes les catégories de pécheurs du purgatoire.

Avant le concile de Trente, Cajétan admettait qu’une catégorie d'âmes s'étaient rendues indignes des sulîrages de l'Église par le mépris qu’elles en avaient fait pendant leur vie ou leur négligence à prier poulies morts. Opusc. xvi.De indulgenliis, q. v. Même opinion chez Navarrus (Aspilcueta), De indulgenliis, notab. 22, n. 42. Sur cette opinion, voir Lépicier, op. cit., p. 310-312. Bellarmin, au contraire, ne voit aucune raison d'établir une catégorie d'âmes auxquelles il serait impossible d’appliquer les sulîrages. « Rien ne prouve, dit-il, que des dispositions ou des mérites spéciaux soient requis pour qu’une âme puisse bénéficier des suffrages de l'Église : l'état de grâce suffit. » Op. cit., t. II, c. xviii, p. 127.

C’est aussi l’avis de Suarez : « Si nous parlons des suffrages en général et sans précision, il faut dire que toutes les âmes sont capables d’en profiter. » Op. cit., disp. XLVIII, sect. vi, n. 9. Toutefois, en ce qui concerne spécialement l’application du sacrifice de la messe, Suarez se demande s’il peut être appliqué à un catéchumène défunt, et il répond par la négative. De même, il lui semble que les suffrages communs de l'Église ne peuvent être appliqués qu’aux défunts baptisés. Ibid. Et, par analogie, il déduit que vraisemblablement les indulgences ne peuvent être appliquées qu’aux défunts baptisés. Op. cit., disp. LUI, sect. iv, n. 7-8.

Pour la solution de ces problèmes, et dans la mesure où cette solution, en matières où l’initiative principale vient de Dieu, peut être conjecturée avec quelque vraisemblance, on se reportera, en ce qui concerne l’application du sacrifice eucharistique, à l’art. Messe, t. x, col. 1313-131(3. L’opinion de Cajétan pourrait sans doute trouver une justification qui l’accorde avec le sentiment commun dans la distinction qu’on a faite entre propitiation et satisfaction {ibid., col. 1303), certaines âmes trop coupables ne pouvant bénéficier des satisfactions qu’après que les sulfrages et surtout la messe auraient obtenu pour elles la propitiation divine.

Quant a l’action des sulîrages par mode d’impétration, on ne saurait lui poser aucune limitation de personnes. Sur tous ces points lire l’excellente mise au point de Lehmkuhl, Theologia moralis, t. ii, n. 175-181.

Les modalités.

Sous ce nom de modalités, il ne

peut être question d’exposer en détail les diverses formesqu’ontprisesaucoursdes siècles, sous la poussée des dévolions introduite par la piété chrétienne, les suffrages offerts pour les défunts. Nous nous tenons dans le domaine des généralités et nous envisagerons simplement la valeur des sulîrages ex opère operato et ex opère operantis : l’application des sulîrages à des défunts déterminés et l’infaillibilité de cette application ; les suffrages communs ; les cérémonies funéraires.

1. Valeur « ex opère operato » et « ex opère operantis », — La célèbre formule sacramjntaire (voir t. x, col. 1081) trouve une application à propos des suffrages. Certains sulîrages produisent leur effet ex opère operato, en ce sens qu’il suffit d’accomplir l'œuvre prescrite par l'Église pour que soit présenté à Dieu, au nom de l'Église même, le secours d’impétration ou de satisfaction en faveur des défunts. C’est le cas des indulgences et de la prière publique. L'état de grâce pourra être requis comme une des conditions prescrites par l'Église, par exemple dans le gain de l’indulgence plénière ; mais la rémission de la peine eu égard à l’indulgence offerte sera indépendante de la ferveur et du mérite de qui l’a gagnée. Cf. Galtier, De psenitentia, n. 592. Parfois, l'état de grâce ne sera pas absolument nécessaire, comme dans le cas de la valeur d’impétration annexée à la prière publique faite au nom de l'Église pour les défunts. Cf. Suarez, op. cit., disp. XLVIII, sect. viii, n. 2, 3. La valeur propitiatoire et satisfactoire de la messe, à fortiori sa valeur impétratoire, sont en soi indépendantes de la valeur morale et de la foi du célébrant. Voir Messe, t. x, col. 1299 : c’est qu’elles sont ex opère operato, Ibid., col. 1301.

En revanche, toute valeur d’impétration des prières privées, toute valeur de mérite ou de satisfaction des bonnes œuvres, offertes comme suffrages pour les défunts, dépendent de la qualité de l'œuvre accomplie ainsi que de la grâce ornant l'âme du fidèle qui offre, du degré de sa ferveur et de sa charité. C’est là un suffrage qui obtient son effet ex opère operantis.

Cette distinction permet de résoudre le cas de la communion « offerte pour les défunts ». Cette communion ne saurait agir ex opère operato à la façon du sacrifice de la messe, des indulgences ou de la prière publique. Mais elle est profitable aux défunts ex opère operantis. c’est-à-dire tant en raison des œuvres de pénitence qu’elle implique, confession, jeûne, etc., qu’en raison de la ferveur de la charité qui est l’effet propre de ce sacrement et d’où proviennent les prières ardentes, les désirs plus fervents, qui peuvent agir plus efficacement sur Dieu en faveur de la libération des âmes du purgatoire. Aussi, pour avoir universellement et sans restriction blâmé cette pratique populaire, Théophile Raynaud a vu condamner par l’Index son livre Error popularis de communione pro mortuis, 18 décembre 16tfi.

2. L’application des suffrages à des défunts déterminés et son infaillibilité.

Cette application pose trois problèmes : le fait de l’application, son extension à plusieurs défunts, son infaillibilité.

a) Le fait. — D’anciens auteurs que cite saint Thomas, In I V'um Sent., tiennent que les suffrages offerts pour une âme ne servent pas à elle seule, mais à foutes les autres aussi bien qu'à elle-même, comme une lampe allumée par le maître de la maison éclaire aussi bien que lui les serviteurs qui habitent le même domicile. Mais l’enseignement commun des théolo :

l’I RGAT01 RE l l I I

L310

giens, consacré d’ailleurs, en io qui regarde la messe, p.ir une décision officielle de l'Église, est que les suffrages offerts pour des défunts déterminés profitent « aux seules.'mus pour lesquelles les suffrages sont offerts, « .-.n l’application de ces biens dépend de l’Intention de celui qui les applique, et ces suffrages ne doivent pas être compares a la lumière d’une lampe, mais plutôt.i une somme d’argent payée par un homme pour un autre Bellarmln, o/>. cit., I. ii,

o wui. p. 1-7.

Sans limite, la charité qui unit les membres du corps mystique n’exclut personne du bénéfice des suffrages, mais dans l’application des suffrages Intervient un élément autre que la charité, V intention. Si l’intention doit ne pas contrarier la charité et, par conséquent, ne porter aucune exclusive, cependant elle

sutlit a diriger le suffrage en un sens détermine. Aussi la thèse catholique semble-t elle exactement formulée on tes tenues : Suflragia specialiter pra vaut defuncto fada, illi mugis muun céleris prosunt. Lépicier, op. cit., mi peut appliquer aux suffrages en général l’indication fournie par de V] dans la condamnation

de la proposition 30 du synode janséniste de Plstoie. Voir ce mot. t. . eol. J-l 1.

bi L’extension à plusieurs défunts. Do la doctrine qui a été exposée a l’article Ml ssi. t. x. eol. 1294 si[.,

on peut déduire avec certitude que l’extension à plusieurs défunts d’un même suffrage en diminue d’autant l’application a chacun d’eux, si la chose est vraie de la messe, dont la valeur est infinie, à plus forte raison sera-t-elle raie d’un suffrage de aleur finie, comme la prière, l 'indulgence, le mérite. Aussi SuareI. en cunolut-il que la même « ouvre satisfactoire exclusivement offerte a l’intention d’un défunt, ne peut profiter aux autres qu’a titre d’impétration ou de mérite de simple convenance. Op. cit., disp. XLVIII, sect. vi, n. 8.

c) L’infaillibilité de l’application. — A supposer qu’un défunt s.' trouve dans les conditions générales requises pour pouvoir profiter des suffrages, recevrat-il infailliblement l’effet du suffrage présenté a Dieu à son intention ?

Les théologiens se divisent sur ce mot infailliblement. Les uns, avec Suarez, répondent affirmativement. Op. cit.. disp. XLVIII, seet. vi, n. 6-7. Et le même auteur ajoute que les suffrages profitent aux défunts selon toute leur valeur. Ibid.. n. 8. On trouve un éeho de cette opinion chez I-épieier. op. cit.. p..SI I sq. Ce qu’on peut dire, c’est que les sulTrages sont Infailliblement présentés à Dieu et dans toute leur valeur. Mais comment Dieu les applique-t-il ? Q semble difficile de faire jouer ici une règle infaillible. C’est surtout à propos du fruit de la messe que la question se pose. lit la solution que nous apportions à cet aspect du problème (voir t. x. col. I2'.t.S et 1303) vaut à fortiori pour les suffrages autres que le sacrifice eucharistique. Les dispositions des défunts, en raison non seulement de leur charité présente, mais encore de leur attitude au cours « hla vie terrestre envers les autres membres du corps mystique et de leur soin a se procurer des suffrages après |, -ur mort. régleront les décisions divines a leur endroit. Cf. Salmanticenses, De eucharistia. disp. XIII, dub. vi ; Ch. Pesch, op. cit., t. ix, n 616.

Lst-il donc possible d'être jamais assuré de la libération d’une âme retenue au purgatoire ? La réponse ne peut-être que négative. Lépicier, op. cit.. p,

i tut tles indulgences plénières, en multiplia i permettant la pra tique du ' rien, n’a jamais entendu allir m r qu’u une.

Voir n 'les Indu

nt-Flour, sur l’ind I "autel pri ! 8 Juill. 1840, Indulgences, t. vii,

col. 1623 ; voir, sm l’efficacité du I rentain grégorien et

les interprétai ions abusives que l'Église a Voulu éliml

ner, Beringer, Les indulgences, Lrad. fr.. 1. 1, Paris, 1925,

n. ; » 77 : sur l’autel privilégié, ibid., n. 978 sq., et surtout n. 980. Il est interdit d’ajouter a l’inscription : autel

privilégié, qu’il est louable de conserver, une autre Ins criptlon indiquant que la célébration de la messe a cel autel délivre immédiatement et infailliblement l'âme

pour laquelle la messe est célébrée. Décret du 9 doc.

1606, Analecta ecclesiastica, vol. iii, fasc. ii, n. 7 7 ; t. I'. 160. L'âme est délivrée, si placuerii Deo. 8. Les suffrages communs. Restent les suffrages

communs, c’est-u-dire ceux que l'Église ou les fidèles

offrent à Dieu pour les défunts eu général, sans désl gnation de bénéficiaire particulier. Nous ignorons certes la loi qui préside à leur application. Cette loi cependant doit exister dans la sagesse et la justice divines : Dieu doit régler l’application d’après certaines dispositions qu’ont possédées les défunts au cours de leur vie mortelle, par exemple leur soin à gagner pour eux et pour d’autres des indulgences, leur dévotion envers la sainte Vierge, leur charité â l'égard d’autrui. etc. Aucune Injustice dans cette distribution Inégale puisque la charité des âmes est, d’une manière normale, la condition de la possibilité de leur soulagement, ('.'est toujours l’application du principe formulé par saint Augustin : non pro </uibus flunt, omnibus prosunt. sed lis tnntum quibus, <lum vivant. comparatur ut prosint. De cura pro mortuis gerenda, c. xviii, n. 22, /'. L.. t. xi. col. 609. Et puis, comme le déclare Ch. Pesch..)/). cit., t. ix. n. <>l(i : Il est impossible de savoir ce « pie Dieu décide pour chaque défunt en particulier puisqu’il s’agil ici de ses secrets desseins, i

I. Les cérémonies Itinéraires. Reprenant le thème souvent développé par les théologiens du Moyen Ane, Bellarmin termine son traité du purgatoire par la défense des cérémonies en usage pour la sépulture îles morts. Ces cérémonies sont anciennes et pieuses ; elles sont pleines d’utilité pour les lidèles qui les accomplissent : par elles est attestée la foi à l’i m mortalité de l’a me et à la résurrection du corps ; par elles la pensée de la mort reste présente aux vivants ; par elles la reconnaissance et l’affection des vivants est témoignée aux morts. Enfin ces cérémonies sont utiles aux morts euxmêmes puisqu’elles attirent à leurs âmes les prières des vivants.

Tel est le thème, emprunté iui-même àsaint Thomas, Suppl., q. lxxi, a. Il et aux autres sententiaires (voir col. 1243) que développent les considérai ions des i héologiens modernes louchant l’utilité des cérémonies des obsèques et des divers rites funéraires. Tous rappellent l’assertion do saint Augustin : Ista omnia, id est curatio funeris, conditio sépultures, pompa exequiarum, magis sunt vivorum solatia, quam subsidia moriuorum. De cura…. c. iv. n. 6, P. L-, t. XL, col. 596. Toutefois, si ees cérémonies sont faites pour une fin dictée par l’esprit de foi, on doit dire avec Bellarmin qu’indirectement elles peuvent profiter aux défunts eux mêmes. Cf. Palmieri, np. ri’L, s. 32, p. 86 ; L. Rouzic, Le purgatoire, c. i : A. Molien, La prière pour les défunts.

Quant au détail des cérémonies funéraires, a leur signification, à leur origine, â leur utilité, au choix des jours consacrés au souvenir « b-s défunts, nous ne pouvons Ici que renvoyer le lecteur aux ouvrages spéciaux de litn

V. QUELQUES A8PB0TB 9ECOND AIRES DU PROBLÈME.

— On étudiera brièvement ce qui se rapporte au lieu du purgatoire, aux visions, aux ré élations privées concernanl le purgatoire, à la dévotion aux âmes du purgatoire, enfin à la prédication que l'Église demande des ciit.s relatives au purgatoire.

1o Le lieu du purgatoire. - Au Moyen Age, la foi au purgatoire, à l’enfer, au ciel se confond pour ainsi dire I : i l l

    1. IMJHCATUIRE##


IMJHCATUIRE. LIE I

L312

avec la foi aux lieux mêmes désignés par ces mois (voir ci-dessus, col. 1238-1244) ; après le concile de Trente, les théologiens conservent encore la terminologie traditionnelle dans l'Église latine Suarez n’hésite pas à écrire : certa veritus fldei est dari post hune vilam purgalorii locum. Op. cit., <lisp. XLV, sect. i, n..'i. Et Bellarmin envisage le purgatoire coi m ne - un lieu dans lequel, comme dans une prison, les âmes qui n’ont pas été pleinement purifiées en cette vie achèvent leur purification… » Op. cit., t. I, c. i, p. 53.

Les auteurs plus récents n’osent engager la foi sur ce point. Billot estime que l’existence de tels lieux (ciel, enfer, purgatoire) répond à « un sentiment des Pères et des théologiens dont personne ne peut s'écarter sans une grande témérité. » De novissimis, q. ii, § 3, p. 43. Cf. Hugon, De novissimis, dans Tract, dogmat., t. iii, p. 7(52. Ce dernier théologien s’efforce d’appuyer cette doctrine sur la révélation.

La sainte Écriture, dit-il, insinue que le ciel et l’enfer sont… des lieux. Saint Paul atteste que l'âme du Christ est descendue dans les parties inférieures de la (erre. F.ph., iv, 9. Et de même saint Pierre : « il alla prêcher aux esprits qui étaient dans une prison » ; ces derniers mots faisant naturellement penser à un lieu matériel… De même, si les âmes des damnés sont dans le feu réel, elles sont donc attachées à un lieu déterminé, a un réceptacle.

Bien que ne définissant pas la chose, les conciles insinuent qu’aux âmes sont assignées des réceptacles ; ils proclament que les âmes saintes sont reçues immédiatement dans le ciel (prof, de foi de Michel Paléologue : concile de Florence), et que les âmes des impies descendent immédiatement en enfer. On en déduit que ciel et enfer sont des lieux. Ibid.

L’auteur conclut a pari pour le purgatoire. Certains collaborateurs de ce dictionnaire raisonnent de même. Ni Mgr Quilliet, art. Descente de Jésus aux enfers, t. iv, col. 565, ni le P. Richard, art. Enfer, t. v, col. 101, ne semblent admettre qu’on puisse raisonner différemment sur les textes de l'Écriture. Beaucoup plus réservée est l’attitude du P. Bernard dans l’article Ciel et surtout celle de M. Gaudel dans l’article Limbes, t. ix, col. 771. « En fait, écrit M. Gaudel, il ne faut jamais oublier que de cette géographie [de l’aude la ] nous n’avons ni révélation ni connaissance expérimentale ; les théologiens sur ce point ne peuvent apporter que des déductions fondées, d’unepart, sur l’idée mystérieuse de la localisation des âmes séparées et, d’autre part, sur le principe de proportionnalité qu’on suppose exister entre la peine (ou la récompense) et le lieu. Aussi l’ensemble des théologiens contemporains sont-ils de plus en plus réservés. »

En ce qui concerne le purgatoire, Palmieri s’exprime ainsi : Purgatorii nomine intelligitur slalus pœnalis pro juslis post mortem, atque intelligi quoque solet locus aliquis in quo ipsi sint. Op. cit., § 19, p. 52. Ch. Pesch est plus prudent encore : Existit purgatorium, id est status intermedius. Op. cit., t. ix, n. 857. Et cette prudence semble bien correspondre au sens des définitions de l'Église. En aucune des définitions relatives au ciel, au purgatoire, à l’enfer, on ne peut trouver d’allusion à un lieu. L’enseignement officiel de l'Église concerne bien plutôt l'état des âmes séparées par rapport à leur fin surnaturelle : ou la possession de cette fin par la vision béatifique, et c’est l'état glorieux du ciel ; ou l’aversion totale et définitive de Dieu, et c’est l'état de damnation en enfer ; ou le retard apporté à l’entrée au ciel par suite d’une purification encore nécessaire, et c’est l'état du purgatoire.

Ce principe une fois posé, nous pensons que, pour sauvegarder ce qu’il y a d’essentiel dans le sentiment des Pères et des théologiens « dont on ne saurait s'écarter sans grande témérité », une exégèse pour ainsi dire matérielle des textes scripturaires et conciliaires ne s’impose pas. On sait fort bien la part considérable de symbolisme qui se retrouve sous des expressions qui

sembleraient justifier la réalité des réceptacles. Les « parties inférieures dt la terre » sont conçues en rapport avec la peine de ceux qui, damnés pour l'éternité ou éloignés temporairement de Dieu, ne peuvent qu'être éloignés du ciel. Le ciel, à l’opposé, c’est le séjour en rapport avec l'état des élus, déjà en possession de Dieu. Bien que Dieu soit présent partout, n’est-il pas, d’une façon appropriée, plus particulièrement dans la partie conçue comme supérieure au monde créé, le ciel, lui qui est souverain maître de toutes choses ? Ce symbolisme, toutefois, repose sur un fondement réel, à savoir l’existence d’un au-delà, dans lequel très réellement les esprits purs et les âmes et, après la résurrection, les hommes, âmes et corps, doivent ou jouir du bonheur avec Dieu ou être éloignés de Dieu dans la souffrance. Et ce fondement montre bien qu’il ne saurait être question ici d’un pur symbolisme : il y a analogie. C’est donc, en définitive, la grande loi théologique de l’analogie qu’il convient d’appliquer ici dans notre conception des localisations de la vie future.

Ces localisations ne sauraient être conçues d’une façon univoque aux localisations de cette vie. fin cette vie, toute localisation suppose des êtres corporels : les uns sont contenus dans les autres par la juxtaposition de leurs superficies respectives. Les limites superficielles du contenant forment ainsi le lieu du contenu : terminus continentis immobilis primas, dit saint Thomas expliquant Aristote. IV Phijs., lect. 6. Supprimez les corps ; plus de lieu possible, au sens philosophique du mot ; bien plus, concevez un corps sans contenant, ce corps, tout matériel qu’il est, n’a plus, à proprement parler de localisation. Cf. Renier, Philosophia scholastica, t. ii, Prato, 1895, p. 97. Saint Thomas admet cette possibilité pour le corps glorieux du Christ. Cf. IIl a, q. lvii, a. 4. Pour arriver à nous faire un concept univoque de la localisation des habitants du monde de l’au-delà, il faudrait donc deux choses : a) que ces habitants fussent non seulement esprits, mais corps ; b) que leur localisation fût nécessairement faite dans les limites du monde matériel. Quant au premier point, à part Notre Seigneur (et sa sainte Mère), les habitants de l’au-delà sont de purs esprits et, jusqu'à la résurrection générale, des âmes séparées de leurs corps, donc assimilables aux esprits purs. Quant au second point, personne n’admettra que le monde matériel créé soit infini : on peut en conséquence admettre, en dehors des limites de ce monde matériel créé, l’existence de corps humains, fût-ce le corps du Sauveur (ou de la Vierge), échappant totalement aux lois connues de la localisation. Donc, enfin, l’univocité du concept de la localisation doit être exclue de notre théologie de la vie future.

Cette simple remarque ouvre des perspectives sans fin, devant lesquelles notre intelligence doit purement et simplement avouer son impuissance. Les bégaiements par lesquels nous décrivons la vie de l’au-delà ne peuvent qu’emprunter des formules suggérées par les choses d’ici-bas, mais dont la signification est nécessairement tout autre pour les choses de l’autre vie.

Et voici nos conclusions :

1. Ce serait un abus véritable que de vouloir trouver dans les paroles de l'Écriture et dans les formules conciliaires une expression adéquate ou même simplement une indication suffisante par rapport à la localisation des êtres dans l’autre vie. Si même une définition avait été portée sur les réceptacles des âmes, cette définition devrait encore, quant au sens à lui donner, suivre les lois de l’analogie. A plus forte raison donc, l’analogie s’impose à l'égard d’idées qui ne sont que « suggérées » par l'Écriture ou les conciles.

2. Ce serait, en second lieu, étrangement s’abuser que de vouloir aboutir à un concept positif de la loca131

PI RG TOI RE 01 ES flONS DIVERSES

i. ; i —,

Usation des Ames dans l’autre monde. Placer l’enter on le purgatoire dans le centre de. la tem (Suarai rappelle que la doctrine commune des théologiens situe le purgatoire en uo lieu unique et déterminé vers le centre de la terre, op. cit., disp. MA. Mit. ii, n. 3 I, el il le prouve par l’Ecriture, Phll., ri, 1 ; Apoc, v, 3 ; EcclL, xxiv, 15, etc., ainsi que par la raison, n. 5 7). discuter mit la proximité on l'élolgnement des autres lieux inforioitr^. limbes ou enfer (cf. Suerez, ibnl.. n. B 15), oot - semble Imaglnatil et arbitraire. Si le feu ilt l’enfer devait être un argument en faveur de cette opinion, il faillirait que ce fût un fou matériel comme le nôtre. Mais que sait-on de la nature de ce l’eu réelî Hion. absolument rien. Voir t.. col. 2223 2224. L’argument devient plus fragile encore avec le feu du purgatoire, dont la réalité même peu ! être contestée sans offenser la doctrine de l'Église. Le parti le plus sage est donc de s’abstenir de toute précision ; appartenant au monde des esprits et de l’au-delà qu’on pèse toute la valeur île ce terme : extra-mondial les lieux de l’enfer, du paradis, des limbes, du purgatoire échappent à coup sur a nos catégories, si non-, les concevons par analogie avec ce nue nous pouvons Imaginer Ici bas, sachons que ce n’est qu’une analogie, dont il ne nous est pas même permis de scruter l’exacte valeur et qui nous autorise simplement à affirmer qu’ils sont, sans pouvoir ilire ce qu’ils sont.

;. Reste A expliquer la présence de l’Ame dans ce

i lieu du purgatoire. D’après la philosophie thomiste, l’esprit n’est pas par lui-même en un lieu. L’ange peut être présent en certains lieux parce qu’il y exerce une action. Il semble difficile d’affirmer que l’Ame séparée soit présente de cette manière. Sylvestre île Ferrare accepte cette explication. In Sum. ami. génies. 1. III. > ixviii : niais comment expliquer l’action de l'âme en un lieu, indépendamment ilu corps ? Peut-être fautil simplement comprendre cette présence de l’Ame dans les lieux de félicité, de purification, d’expiation, par une détermination d’ordre purement intellectuel : en vertu d’une dispensât ion divine, l'âme serait déterminée à connaître en particulier uniquement les choses qui sont dans le lieu que lui assigne la justice de Dieu. ou les événements qui s’y passent : ainsi ce « lieu » deviendrait pour ainsi dire son séjour spécial et assigné. Cette explication, proposée par Billot, De novissimis. q. n. § 3. p. 45, ouvre des perspectives intéressantes sur la façon analogique de concevoir le lieu du purpatoire. Le théologien jésuite ajoute : Peut-être faut-il dire davantage, mais de ce davantage », je ne puis que confesser mon ignorance, i Ibid. Avons la même humilité.

2o Visions et révélation » privées concernant le purgatoire. — 1. La possibilité d’apparitions d'âmes du purgatoire ne saurait être mise en doute. Naturellement. il est vrai, les apparitions d'âmes séparées de leurs corps sont impossibles ; car aucune communication naturelle n’est possible entre les défunts et nous. Nous ne pouvons oir sans yeux, ni entendre sans oreilles, ni sentir ou agir sans les organes de la sensibilité ou de la motricité : donc les Ames des défunts - âmes encore au purgatoire ou déjà glorifiées - qui en sont privées, ne peuvent avoir de relations directes avec nous. Cf. Lépicier, Le monde invisible, p. 226 sq. C’est si vrai que les tenants du spiritisme ont voulu expliquer les apparitions d’outre-tombe par le corps Buidique que l’Ame conserverait perpétuellement et qui lui permettrait d’agir sur la matière, et. plus tard, de se réincarner. Toutefois, miraculeusement, ces apparitions sont possibles, quoique tout à fait rares et exceptionnelles. Cf. Apparitions, t. i. col. 1690. Il faut alors une permission, ou dispensation divine. Hoc quod morlui vivenlibus apparent, gualiterrumque… contingil per specialem Dei dispensationem. Saint Thomas, I ». q. lxxxix. a. 8,

DICT. DE TIIÉOL. CATHOL

ad 2o". lai ce cas. il faudrait admettre que Dieu, par

un miracle (es ! inter dlvlnn miracula computandum,

ajoute saint Thomas), leur donnerait le pouvoir de

s’unir momentanément a un corps pour se rendre sen siMes aux vivants.

Mais il v a bien d.iut res explications possibles de ces

apparitions. Totil d’abord il faut noter celle a laquelle saint Thomas semble s’arrêter avec complaisance :

Ces apparitions se produisent par l’intermédiaire

d’anges lions ou niauv alS, même à l’inSU des ànies elles

mêmes. L’ange bon ou mauvais peut exciter directe

ment le sens ou l’imagination et provoquer des visions

analogues aux hallucinations ou aux rêves. cf. saint

I ho in as. 1 >, q. (Xi. a. 3. L’apparition, pour miraculeuse qu’elle demeure, n’est qu’une image subjective de la personne dont la réalité existe ailleurs. Sur ces différentes explications et le caractère miraculeux desappa rit ions de morts voir Lépicier. Le inonde invisible, p. 238-247.

2. Le /dit de ces apparitions. Certaines vies de saints sont remplies de récils merveilleux concernant les apparitions d’Ames du purgatoire. Nous y avons fait allusion au cours de cette étude, principalement à

propos de Hède le Vénérable et de saint Grégoire le

Grand. Le théologien n’a rien à dire sur le fait des apparitions ; c’est à l’historien de passer les récils au crible de la critique et de juger ce qui peut en être raisonnablement retenu. Une seule directive peut être donnée ici par la théologie : l’apparition d’une âme du purgatoire étanl un véritable miracle, elle ne saurait si produire que rarement (inlerdum). In bon nombre de récits devraient donc être tenus pour suspects. Voir l’appréciation de Cajétan, ci-dessus, col. 1272.

3. L’interprétation des visions et des révélations qui les accompagnent. - Nous avons également entendu Cajétan rappeler que l’enseignement de l'Église ne s’appuie pas sur des révélations privées, quelle que soit leur authenticité. C’est le cas de se souvenir de la recommandation de saint Paul, Gal., i, 8. Voir ici Foi, t. vi, col. 145 sq. Bref, visions et révélations privées ne sauraient ni compléter ni même expliquer le dépôt de la foi. La raison en est qu’il ne peut y avoir de certitude absolue ni de leur origine divine, ni de la vérité de leur contenu. Seule l'Église est chargée par le Christ d’interpréter et de proposer authentiquement la révélation et il s’agit uniquement de la révélation publique. Aussi l’approbation ou la recommandation accordée par le Saint-Siège à quelques révélations privées ne signifie pas que leur origine di ine est garantie, ou que leur contenu est vrai, mais que ces révélations, si elles sont interprétées raisonnablement, ne contiennent rien contre la foi et peuvent même contribuer à l'édification des fidèles. Il serait donc inadmissible que des visions ou des révélations privées soient présentées sur le même plan que l'Évangile, soit pour le compléter, soit pour l’expliquer.

L'Église catholique les tient : 1o pour possibles, puisqu’elle ne les écarte pas : i priori quand il y : i lira d’en soumettre à son jugement ; 2o pour réelles eu certains cas. puisqu’elle a autorise, approuvé même plusieurs, soit par des sentences permisse es ou laudatives, soit par la canonisation desaints personnages auxquels elles avaient été faites, soit par l’approbation ou l'établissement île fêtes liturgiques basées sur elles ; 3 poui relativement rares, puisqu’elles les examine toujours, sinon avec une méfiance positive, du moins avec une extrême circonspection ; 4o pour nécessairement subordonnées -. la révélation publique, et même pour justiciables de la théologie, qui est toujours appelée à les |ugerà la lumière de la foi catholique ; ">" pour étrangères au dépôt de la révélation générale ci universellement obligatoire,

puisqu’elle ne considère iainds comme herel iipics ceux qui refusent de les admettre, encore qu’ils puissent quelquefois être, en cela, imprudents et téméraires, ludiot, art. Révélation, dans Oict. apol., t. iv, col. 1008.

T. — XIII — 12. 131 !

PU RG V.T01 RE. QUESTIONS Dl VERSES

1316

On voit par là quelle circonspection s’impose quand il s’agit d’accueillir des révélations privées touchant le purgatoire. Dans son traité l><ts Fegfeuer, Haut/, a recueilli les assertions les plus intéressantes de sainte Brigitte, de sainte Mechtilde et de quelques personnes recommandables. Les révélations privées qu’on peul accueillir avec le pins de laveur sont a coup sur celles de sainte Catherine de (iènes, dont le Traité du purgatoire a reçu en 1666, les approbations de la Sorbonne. Au cours du procès de canonisation de la sainte, la doctrine de ce traité a été pleinement approuvée par le P. Martin d’Esparza, S. J. Or les « révélations » de la sainte sont bien éloignées des matérialisations (pue certains prédicateurs apportent sur le purgatoire ; elles ne tentent pas de pénétrer les secrets de l’au-delà. Les théologiens leur font généralement bon accueil. Le P. Ch. Pesch a jugé bon d’en faire le résumé dans son traité du purgatoire, Prælect. theol., t. ix, n. 605 ; c’est d’après l’aperçu qu’en donne le P. I’aber dans son Tout pour Jésus, que nous l’avons cité à plusieurs reprises. En dehors de ce petit traité qui a reçu une sorte de lr.issez-passer ofïiciel de la part de l'Église, on ne connaît guère de révélations privées sur le purgatoire qui puissent être de quelque utilité à la théologie.

Il faut donc accueillir avec beaucoup de réserve les précisions apportées, dans des révélations privées (ou prétendues telles), à la durée, à la gravité des peines du purgatoire. L'Église n’ayant sur ces deux points, aucun enseignement ferme, il convient de demeurer prudent avec l'Église.

La dévotion aux âmes du purgatoire.

Il ne s’agit

pas ici de la dévotion qui consiste à prier pour les âmes du purgatoire, mais de celle qui consiste à prier les âmes du purgatoire afin qu’en retour elles prient Dieu pour nous. Les deux éléments de cette dévotion sont corrélatifs : si nous prions les âmes du purgatoire, c’est qu’elles entendent nos prières et peuvent les transmettre à Dieu avec l’appui de leurs propres suffrages.

Deux courants d’opinions se sont fait jour sur ce problème. Les anciens théologiens répondaient plutôt par la négative. Saint Thomas paraît avoir nié la possibilité d’invoquer les âmes du purgatoire et de recourir à leur intercession. « Ceux qui sont dans ce monde ou dans le purgatoire, dit saint Thomas, ne jouissent pas encore de la vision du Verbe pour qu’ils puissent connaître ce que nous pensons ou ce que nous disons. Et c’est pour cela que nous n’implorons pas leurs suffrages par la prière. » Sum. theol., Ila-II^, q. lxxxiii, a. 4. Voir Prière t. xiii, col. 227. D’ailleurs les âmes du purgatoire, en raison de leur état d’expiation, ne sont pas en état de prier pour nous, elles ont plutôt besoin que l’on prie pour elles. A. 11, ad 3um. Telle était l’opinion des anciens, dit Suarez, De oratione, t. I, c. x, n. 25, Opéra, t. xiv, p. 44. Et Suarez cite avec saint Thomas, Alexandre de Halès, saint Antonin, Alphonse Tostat, Navarrus, Pierre de la Palu, Richard de Médiavilla et, en général, les sententiaires, In IV am Sent., dist. XV. Sur l’opinion de saint Thomas, voir J. Ernst, Der heil. Thomas und die Anru/ung der armen Seelen, dans Der Katholik, 1916, t, ii, p. 217 sq.. 31.9 sq. Voir également plusieurs articles de revues ( Kitholik, Franziskanische Studien, Divus Thomas de Fribourg, Theol. prakt. Quartalschrift), signalés par Diekamp, op. cit., p. 526. De nos jours, la thèse a été reprise par le P. Gerlaud, O. P., dans La vie spirituelle, 1923, p. 130 sq., et avec plus de nuances, par le P. Mennessier, La religion, trad. fr. de la Somme théologique, t. i, Paris, 1932, p. 264-267. On peut citer aussi J. Didiot, Morale surnaturelle spéciale, vertu de religion, Lille, 1899, n. 162.

Deux motifs principaux, on l’a vii, incitent ces théologiens à nier le pouvoir d’intercession des âmes du purgatoire et, par voie de conséquence, l’utilité des

prières que nous pourrions leur adresser : aj Elles ne connaissent pas nos prières : » Si les bienheureux connaissent les événements qui concernent ceux qu’ils aiment, c’est que leur béatitude exige qu’ils ne soient frustrés d’aucun désir légitime… Rien de tel pour l'âme livrée à la douloureuse purification. » Mennessiei, op. cit., t. i, p. 266. — b) Leur expiation, leur souffrance les met hors d'état de prier pour nous, non que leur souffrance leur enlève la liberté de leurs pensées (voir col. 1299), mais parce qu’elle enlève à leur prière toute efficacité normale impétrative. Cf..Mennessier, loc. cit. Le P. Gerlaud ajoute un troisième motif : « La prière liturgique est une prière parfaite ; jamais nous n’y rencontrons un appel aux âmes du purgatoire. » Loc. cit., p. 132.

On conçoit facilement que, si la liturgie se prononçait en ce sens, la controverse n’existerait même pas : lex orandi, lex credendi. L’argument du silence ne vaut rien en l’espèce. On peut facilement lui opposer la tacite approbation accordée par l'Église à un enseignement opposé à celui de saint Thomas et qui est devenu pour ainsi dire l’enseignement commun des modernes, mnderni jere omnes, dit le P. Prummer, O. P., Manuale theol. moral., t. iii, n. 334. Aux autorités des « anciens » Suarez pouvait déjà opposer l’autorité de multi recenliores. L’initiateur de l'évolution doctrinale en un sens opposé à l’opinion de saint Thomas paraît être Jean .Médina († 1516), De oratione, q. v. Après Médina les théologiens partisans de la prière aux âmes du purgatoire sont devenus légion. C’est Suarez, loc. cit. ; Grégoire de Valencia, Commentarii theol., t. iii, disp. VI, q. ii, punct. 7 ; Sylvius, In // « ^// « q. lxxxiii, a. 11 ; Bellarmin, op. cit., t. II, c. xv ; Lessius, De juslilia, t. II, c. xxxvii, n. 23 ; Bonacina, De horis canonicis, disp. CXCII, part. I, n. 8 ; Elbel, Theol. moralis, t. ii, n. 398. Aujourd’hui, comme l'écrit le P. Prummer, c’est la presque unanimité des théologiens qui défend l’opinion que Bellarmin qualifiait déjà de commune. Citons chez les moralistes, Lehmkuhl, op. cit., t. i, n. 482 ; Noldin, De præceptis, n. 141 ; Scavini, Theol moral., t. ii, n. 203 (qui écrit : hoiie videtur sententia communis evasisse, maxime Romse) ; chez les auteurs dogmatiques, Ch. Pesch, op. cit., t. ix, n. 619 ; Palmieri, op. cit., § 21, n. 2 ; Jungmann, De novissimis, n. 120 ; Mazzetla, De Deo créante, n. 1356 ; Billot, De novissimis, q. vi, § 1 (qui qualifie l’opinion contraire : communi fidelium sensui plane répugnât, p. 127) ; Mgr Chollet, La psychologie du purgatoire, c. vi, n. 20 ; Bartmann, Das Fegfeuer, § 10, p. 130 sq., etc.

Aux arguments de Suarez, résumés ici, t. xiii, col. 227, on ajoutera les considérations suivantes :

1. Il n’est pas exact que les âmes du purgatoire ne puissent s’occuper de nos besoins sans les connaître et qu’elles ne connaissent pas ces besoins au moins dans une certaine mesure : « les âmes des morts peuvent s’occuper des intérêts des vivants sans connaître leur état, comme nous nous occupons des morts en leur appliquant nos suffrages, bien que nous ne sachions pas quelle est leur destinée. Elles peuvent aussi connaître les actions des vivants, non par elles-mêmes, mais par les âmes de ceux qui vont de cette vie dans l’autre, ou par les anges et les démons, ou par l’esprit de Dieu qui le leur révèle. » Saint Thomas, I a, q.Lxxxix, a. 8, ad lum. cf. Hugon, O. P., Réponses théologiques…, p. 240 sq. D’ailleurs on peut avec Bellarmin apporter une réponse péremptoire à l’argument tiré de l’ignorance où seraient les âmes souffrantes par rapport à nous en raison de l’absence de vision béatilîque : le IIe livre des Machabées, xv, 11-16, rapporte une vision de Judas touchant les prière. » d’Onias pour le peuple juif. Or, Onias ne pouvait être que dans les limbes et ne jouissait pas encore de la vision béatifique, ce qui ne l’empêchait pas de prier pour son peuple.

2. Nous.ii’ii> déjè dit que la grandeur des souffrances du purgatoire n’était pas, psychologiquement parlant, un empêchement a leur pensée et au mouve nient ilo leur prière en notre faveur, t’.es peines sont, objectivement du moins, toutes spirituelles ; aucune organique, aucun trouble physiologique, ne peuvent donc empêcher l’acte de l’intelligence et de la volonté. Enfin, pourquoi refuserait-on à la charité

dont sont animées 1rs.’unes du purgatoire l’acte de la prière en faveur des vivants dont elles ont gardé le souvenir et auxquels elles ont conserve leur alïcction’.'

i n argument positif semble devoir être pris dans

le dogme de la communion des saints. Il v a comme un llu et un reflux dans les communications des Églises triomphante, souffrante, militante. Et en quoi ces communications des défunts aux v iv ants peuv eut elles consister, sinon précisément dans les prières que ces saintes flmes peuvent offrir à Dieu pour nous ? Et cette raison, remarque a bon droit Billot, , >/>. cil., p. 127, est universelle, et le lien de la charité qui unit l’Église souffrante à l’Église militante tombe sous cette loi.

I. Diekamp fait remarquer qu’il existe une prière tndulgenciée par Léon lll il ; déc. 1889), où l’on de uande aux Ames du purgatoire d’intercéder pour nous près île Dieu, de prier » pour le pape, l’exaltation de la saillie Kglise. la paix des nations ». Op. cil., p. _’i x de la prière dans Acta Sanctte Salis, t. xxii. p. 17> ; en français dans Berlnger-Steinem,

-. 1 ed. I. i. p..127

5. Le P. olennessier accepte un sens où la dévotion aux âmes du purgatoire lui paraît théologlquement défendable : - c’est celui de la prière interprétative. Op. cit., t. i. p.

i veut dire que leurs mérites passes font partie du <le li Communion des saints et ont valeur devant

Dieu, ouuid nous prions les vunis. aous nous appuyons a leur Intercession et a leurs m/rites. Prier une aine du purgatoire, ee ser.it, en ce sens, taire appel a ses mérites devant Dieu pour être exaucé de lui. Il sein lie que telle soit la port’-c de l’argument que certains théologiens donnent en faveur de la prière adressée i ces un —, . et qu’Us appuient

sur leur appartenance a la communion des sunts.

Il semble que, si |’argument doit être accepté sous cette forme, il faut en pousser la logique jusqu’au boni. Nous [irions bs saints du paradis en nous appuyant non seulement sur leurs mérites, mais encore sur leur intercession. Pourquoi cette intercession serait-elle refusée, aux saints du purgatoire ?

Conclusion. — Pratiquement, cependant, il ne faut pas exagérer la dévotion aux âmes du purgatoire, sur l’opinion des modernes.

1. La prière aux âmes du purgatoire doit reskr quelque chose de très accessoire. La vraie dévotion envers les Ames du purgatoire est de prier p’iur elles : leur état est trop pitoyable pour que nous songions d’abord à nous-mêmes ou que nous y songions sur un pied I.- cas de redire avec saint Thomas : Non sunt in statu orandi, sed magii ut oretw pro eis.

2 La prière aux âmes du purgatoire pour obtenir par leur intercession les traces dont nous av ons b< soin -doit rester une dévotion d’ordre privé. Puisque l’Église n’a pas jugé opportun de nous inviter, dans sa liturgie, il la prière aux âmes du purgatoire, il ne faut pas faire sortir de son cadre cette dévotion, d’ailleurs légitime.’i. La prière aux âmes du purgatoire doit être faite <ivec plus de circonspection que la prière adresser a I lieu ou aux saints du ciel. Voici, a ce sujet, les graves paroles de Bellarmin, dont la doctrine sur ce point ne saurait être suspecte de partialité :

Tout cela est mi, dit il en parlant de l’opinion qu’il défend, et cependant il serait exagéré et superflu de prier ordinairement les me -.1 i purgatoire et de leur demander .leur intercession, lai eflet, elles ne peuvent ordinairement

connaître nos actions et nos Les, uns en particulier ; elles

savent sini’lein.nt.l’une in inière génél il. I. a.1 in ris.pie

nous courons, tout comme nous ne connaissons qu’en général les tourments qu’elles endurent, Biles n’interviennent pas.i nis tous les événements ; elles ne voient pas

nos pneus en Hieii, puisqu’elles ne sont pas bienheureuses,

et il n’est pas vraisemblable que Dieu leur révèle ordinal renient ee que nous faisons ou demandons. Loc. eu.

i n terminant, notons que le Catéchisme de Pie av ait donne asile aladoct i inealliriuant le pouvoir d’in tercesslon des âmes du purgatoire en faveur des vivants : / beati del paradiso < le anime del purgatorio sono anch’essi nella communione dei santi, perché, congiunti

Ira Ione eau uni dalla eantà, riceoono gli uni naslre

preghieree le allre i nostri suflragi, < tutti ci ricambiano

con lu lurii tntercessione pressa Dio. Catechismo délia doltrina crisllana, traita dal testa publicalo per ordine di s. s. papa Pio A’, Grottaferrata, 1921, p. 28. Sur tous ces points, voir L’Ami du clergé, 192 I, p.’.t. 7.s, 765. Il faut également observer que le [ail de refuseï aux aines du purgatoire le pouvoir de prier pour elles-mêmes n’implique pas l’impossibilité pour elles de prier pour nous. Billot, loc. fit. : I. épicier, De noviss. p. 302 el 320. Ce dernier auteur admet que les àmes du purgatoire prient pour nous et cependant demande qu’on

ne les invoque pas régulièrement. Toutes les différences

avec l’opinion des modernes sont ici dans les nuances.

La prédication’les vérités relatives au purgatoire.


Les théologiens modernes ne font ordinairement que

reproduire sur ce point la partie disciplinaire du décrel du concile de Trente. Voir ci-dessus, col. 1281. Selon leurs tempéraments, ils envisagent avec plus ou moins (le laveur la prédication ouverte de certains points où l’Église ne s’est cependant pas oITicielleinent prononcée, la peine du feu. par exemple. On nous permettra, avant de clore cet article, d’exprimer ici notre sentiment personnel.

1. Avant tout, il semble nécessaire de réagir contre la tendance de certains prédicateurs qui présentent le purgatoire connue un véritable enfer, moins l’éternité. Le châtiment du purgatoire diffère, dans sa nature même, du châtiment de l’enfer. Celui-ci est purement pénal, celui-là est essentiellement expiatoire et purificateur. Ce serait une erreur de se figurer la souffrance temporaire de l’aul re vie comme une simple peine, sous le coup de laquelle les âmes demeurent purement passives, attendant leur entrée au ciel. La peine existe, certes, mais c’est une peine d’expiation salutaire qui provoque, chez les âmes non encore complètement purifiées, des sentiments d’humilité, des dans de désir, des actes d’amour par lesquels elles deviennent de moins en moins indignes de Dieu. Bossuet, avec cette netteté d’expression qui caractérise sa belle et profonde théologie, établit ainsi la comparaison de l’enfer et du purgatoire :

Le caractère propre de l’enfer, ce n’est pas seulement la peine, m lis la peine sans /" p< nilence ; car je rem irque deux sortes de feu dans les Écritures divines. Il y a un feu qui purge et un feu qui consume et qui dévore : viiiiuscu jusque opus probabil ignts… I Cor., iii, 13 ; Cum igné dévorante. Is.. xxxiii. 1 t. Ce dernier est appelé dans l’Evangile « un

(en qm ne s’éteint pas, ignis non exlinguitur (Marc., ix,

47), pour le distinguer de ce feu qui s’allume pour nous épurer et qui ne m nique |amiis de s’éteindre quand il a fait Cet OÛlce. I.a peine accompagnée de la pénitence, c’est

un feu qui nous purifie. La peine suis la pénitence, c’est un feu qui nous dévore et qui nous consume, el tel est proprement le feu de l’enfer. Sermon sur hs souffrances,

.’, ' point, éd. I.ea.nq., t. IV, p. Tl.

2. En conséquence, on évitera dans la prédication li scriptions exagérées des Qammes du purgatoire,

descriptions qui ne sont en somme qu’œuvre’le pure Imagination. Déjà, en parlant du feu de l’enfer, la réalitéde ce feu n’autorise pas à le concevoir à la manière d’un feu matériel : le crucior in liac flamma doit, en bonne théologie, supporter une interprétation analogique. Que ne devrons-nous pas penser des « flammes du purgatoire » ? S’il est certain que les saintes aines du purgatoire souffrent un tourment positif, nous ne pouvons affirmer rien de précis sur la nature même de ce tourment. L’Église n’a vu dans la doctrine du l’eu réel du purgatoire qu’une opinion, très respectable sans doute, mais qu’il est loisible de ne pas accepter sans blesser la foi. In omni modo, déclare nettement Billot, animadvertes sepewalam esse causant ignis purgatorii et ignis in/erni. De novissimis, p. 102. Dans quelle mesure les prédicateurs peuvent-ils utiliser l’ « opinion « latine du feu réel du purgatoire ? C’est affaire de tact, de nuances et de précision théologique, peut-être d’auditoire. Toujours faudra-t-il, si l’on estime devoir en parler : a) éviter les descriptions purement imaginaires ; b) marquer très nettement le degré de simple opinion à accorder à cette peine positive ; c) insister surtout sur le caractère spirituel de cette peine infligéeàdes esprits. Mgr dTlulst a donné ici une excellente indication en affirmant que les flammes du purgatoire sont, avant tout, « le feu de l’amour jaloux. L’amour se venge comme il convient à l’amour ; sa vengeance détruit non l’objet aimé qui a été infidèle, mais son infidélité même et ainsi, en le punissant, elle le purifie et le fait digne de l’amour. » Lettres de direction, cvn. On ne saurait trop relire l’admirable conférence du P. Monsabré sur le purgatoire, Carême 1889, modèle parfait des convenances doctrinales que doivent respecter les prédicateurs.

3. Enfin on évitera d’avoir recours aux révélations privées pour étayer les enseignements de la chaire. « L’Église, dit le P. Monsabré, nous invite, par l’organe du concile de Trente, à nous abstenir de toute curiosité et vaine recherche dans les questions d’outre-tombe. Les révélations sur ce sujet doivent être acceptées avec la plus grande discrétion. » Op. cit., notes sur la 97e conférence. En tout cas, une révélation privée ne doit pas être apportée en confirmation de la vérité d’un enseignement discuté.


VIII. Conclusion.

Notre conclusion générale doit comporter une triple indication sommaire concernant :
1o l’évolution de la croyance au purgatoire dans l’Église catholique ;
2o l’évolution de l’attitude des orthodoxes après le concile de Florence ;
3o l’évolution de la pensée protestante après le concile de Trente.

1o Évolution dogmatique de la croyance au purgatoire dans l’Église catholique.

Nous avons dû, pour suivre le canevas classique des traités sur le purgatoire, commencer par l’exposé des textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, dans lesquels les théologiens ont cru trouver une révélation explicite du purgatoire. Le lecteur attentif a pu se demander — et nos réflexions ne l’en ont pas dissuadé — si le point de départ était aussi net qu’on veut bien le dire parfois. Il a pu constater que, si l’Écriture fournit un excellent point de départ à la croyance à une expiation dans l’au-delà, c’est beaucoup plus en rappelant la nécessité de l’expiation personnelle, nonobstant la rédemption du Christ, qu’en affirmant d’une façon directe l’existence de peines purificatrices dans l’autre vie. Dans son Sermon sur le culte dû à Dieu, Bossuet rappelle opportunément que, « pour connaître la justice [de Dieu], il faut la connaître dans tous les états où elle s’exerce et ne croire pas plutôt la punition des crimes capitaux dans l’enfer que l’expiation des moindres péchés dans le purgatoire. » Carême de SaintGermain, 2 avril 1666, éd. Lebarq, t. v, p. 117. Or, touchant cette connaissance de la justice divine même à l’égard de l’expiation des moindres péchés, l’Écriture fournit de précieuses et irréfutables indications. D’autre part, la prière pour les défunts pécheurs, si nettement enseignée dans le IIe livre des Machabées, et déjà passée dans la pratique de la primitive Église, est une de ces vérités générales qui Impliquent l’idée particulière de l’expiation d’outre-tombe.

Ce fut vraisemblablement un excès de zèle des apologistes catholiques voulant suivre et battre Luther sur son propre terrain qui les engagea dans la voie d’une démonstration purement scripturaire du purgatoire et leur suggéra de chercher, dans l’Écriture, une révélation explicite du dogme.

En réalité, on a pu le constater, le point de départ scripturaire n’est pas aussi net que l’ont affirmé Priérias et Eck, Hellarmin et Suarez. Sans doute on peut démontrer l’existence du purgatoire à l’aide de l’Écriture, mais il faut avouer l’insuffisance d’un certain nombre de textes classiques, et il serait préférable de n’employer les autres que dans un cadre de démonstration plus générale.

On ne s’est pas assez rendu compte que le dogme du purgatoire, vérité dont la connaissance n’est pas nécessaire au salut, ni de nécessité de moyen, ni même de nécessité de précepte, pouvait parfaitement, dans les débuts de l’Église, être simplement cru d’une manière plus sommaire et en quelque sorte implicite dans le dogme plus général de la justice divine exigeant du pécheur pardonné une expiation pour ses fautes, tout comme le dogme de l’infaillibilité du pape était cru dans la vérité plus générale du magistère de l’Église, tout comme le dogme de l’immaculée conception était cru dans la vérité plus générale de la sainteté parfaite de Marie. On ne s’est pas assez rendu compte également qu’un dogme ne tient pas nécessairement sa valeur de vérité révélée du fait qu’il est contenu dans l’Écriture et que la Tradition, c’est-à-dire l’enseignement de l’Église, s’exprimant souvent par des pratiques dont l’Écriture ne fait pas même mention, suffit à elle seule à authentiquer une vérité révélée.

Le dogme du purgatoire plonge des racines profondes et dans l’Écriture et dans la Tradition, et cette double et solide assise lui confère un caractère authentique de vérité divinement révélée. Mais c’est précisément peut-être en raison de cette double assise que le développement de ce dogme s’est réalisé d’une façon qu’il est peut-être audacieux (bien que cette expression nous semble assez exacte) de qualifier d’anormale.

En effet, en ce qui concerne la révélation par la tradition chrétienne, la croyance au purgatoire nous apparaît dès l’origine sous une forme à peu près définitive, dont les époques postérieures ne mettront en relief que des aspects très secondaires : la prière pour les défunts. C’est la forme à laquelle s’est attachée l’Église grecque, ce qui lui permettra d’ailleurs, aux époques d’entente avec l’Église latine, de trouver assez facilement une voie de réconciliation. Le protestantisme, qui rejettera la pratique traditionnelle de la prière pour les défunts, ne saura opposer à l’Église romaine que des négations stériles.

Mais, en ce qui concerne l’Écriture qui atteste la purification nécessaire de toute faute, le progrès a été difficile, et, la systématisation théologique étant survenue dans l’Église latine avant la précision dogmatique, les théologiens ont dépassé du premier coup le but à atteindre et, quand l’heure sonna des définitions garanties par l’infaillibilité, l’on s’est vu obligé de revenir pour ainsi dire en arrière. La nécessité d’une expiation d’outre-tombe est à la base de l’enseignement scripturaire ; mais quand sera cette expiation ? où se fera-t-elle ? par quels moyens ? Autant de questions sur lesquelles l’Écriture est en réalité absolument muette. On a cru trouver la solution de toutes difficultés dans le texte de saint Paul, I Cor., iii, 11-15. Et c’est ainsi qu’en Orient comme en Occident le feu de la conflagration générale, que beaucoup identifiaient avec le feu il ii Jugement, retenu l’attention des Pères et des écrivains ecclésiastiques, Il fui ensuite difficile à quelques-uns, Impossible a beaucoup, d’abandonner cette perspective eschatologique et de situer en conséquence l’époque de l’expiation entre les deux Jugements. En lent, If génie il Augustin réalisa et imposa cette disjonction ; mais la notion de teu, devant laquelle Augustin hésitait, .1 été retenue par les héritiers de sa pensée, el les siècles suivants onl tellement Identifié la notion du purgatoire et celle du l’eu purificateur qu’il semblait Impossible aux théologiens du xiiï siècle de les séparer dogmatiquement. La théologie.i.iii pris le pas sur le dogme, l’explication précédait l’affirmation des principes. De la une courbe anormale dans le développement de la doctrine. Après a oir été t rop loin, il a fallu rebrousser chemin, el la Juxtaposition des thèses grecq u effet latines a Florence a réalisé une mise au point qu’il ne faut pas hésiter a qualifier de pto Iden Uelle. En mal lères m obscures, en effet, nos expériences terrestres nous Interdisent dos affirmations trop précipitées, et il cm sage de s’en tenir aux lignes générales sanctionnées à Lyon, a Florence el à rrente : existence do peines purificatrices dans l’autre ie. utilité des suftrages pour le soulagement des âmes souffrantes. Et il convient de renoncer à toute autre précision doctrinale hormis les vérités concernant l’étal des saintes âmes fixées dans l amour de 1 Heu par leur jugement et désormais a ssur ées de Unir salut. L’Église es ! sage, a dit le P. Monsabré. Son enseignement nous met à l’aise dans le conflit des opinions et nous permet de n’accepter que les conclusions qu’on peut tirer sans effort des principes de la foi. > Conférence citée. Paroles d’or.

— Evolution des orthodoxes après le concile de Florence. — On la trouvera décrite à l’article suivant, col. 1326 sq.

3° Évolution de lu pensée protestante après le concile de Trente. — La question n’intéressant la théologie catholique qu’indirectement, on se contentera d’indications sommaires.

Après le concile de Trente, les théologiens protestants n’ont modifié en rien l’attitude prise en dernier lieu par Luther à l’égard du purgatoire. Brentz, Ochin, Pierre Martyr, Bucer, opposent au dogme catholique une dénégation basée sur la suffisance de la rédemption du Christ. Un seul point cependant les gène : la pratique de la prière pour les morts dès les premiers temps de l’Église. Chemnitz seul le reconnaît loyalement ; mais, sempresse-t-il d’ajouter, ce n’est pas que l’on ait cru à des tourments endurés dont les défunts seraient rachetés par nos suffrages ; c’était uniquement poi r la formation morale des vivants, pour leur réconfort, pour leur consolation ». Examen concilii Tfidenlini. Berlin, 1861, p. 621.

Avant l’envahissement du protestantisme par les tendances rationalistes, la thèse était simple : pas de purgatoire ; donc, à la mort, ou bien, pour les bons, l’entrée immédiate au ciel et la possession de la vision béatilique, ou bien, pour les impies, la damnation immédiate en enfer. L’ancienne dogmatique luthérienne se trouve bien exposée dans Hutterus redioious, refonte par Hase des Loet communes de Léonard I lutter († 1616), H »  » éd.. Leipzig, 1862 : La croyance au pur re a été rejetée, comme une restriction apportée à la justification générale par la foi, par l’Église évangélique. qui enseigne l’entrée immédiate des âmes dans le bonheur ou dans la damnation. Op. dt., p.’i'2’2. Même doctrine chez Quenstasdl < + 1668), dans une note empruntée à sa Theologia didæUco-polemica, V éd., Leipzig, lTlô. et ajoutée a ce passage de V Hutterus reilirirus. C’est d’ailleurs ce que confirme Leibniz (qui n’hésite pas à blâmer la position prise par sis coreligionnaires), i Les protestants. dit-il. pensent que lésâmes de ceux qui meurent parviennent aussitôt a l’éternelle

félicité ou sont damnées pour jamais ; ainsi ils rejet tenl

comme superflues les prières pour les morts, ou les

réduisent a des vœux inutiles, comme on en forme sur

ce qui est passe et terminé, plutôt par une certaine

h al >it ude que paiutilité. Système théologique, n.i xxii. Avec ces protestants, qui admettaient encore [’inspir. it Ion et l’autorité divine de l’Écriture, il était peut être encore possible de tenter un rapprochement, Bos

sud n’a pas manqué d’exposer sur ce point les prin

cipes utiles. Dans l’Histoire des variations, l. X, ii, 159

160, il rappelle que les principes des protestants

prouvent la nécessité du purgatoire. Les âmes justes

peuvent sortir de ce inonde sans et re eut ièrcnieiit puri lices. (, rotins, dit BoSSUet, prouve que cette vérité est

reconnue par les protestants, par Mestresal et Span lieiin. sur ce fondement commun de la réforme que dans tout le cours de cel le le, l’a me n’est jamais tout à lail pure. (’.rotins, lettres..">7.">. ; ">7.S. 579. Le Saint-Espril ayant prononce lui-même que rien d’impur n’entrera dans ta cite sainte (Apoc. XXI, 27). le ministre

Spanheim démontre lui-même que l’âme ne peut être présentée à Dieu si elle n’est sans tache et sans ride, pure et irréprochable. La question se pose, après cela, si cette purification de l’âme se lail au dernier moment ou après la mort, el Spanheim laisse la chose indécise.

Le Fond, dit-il, est ccr lai n ; mais la manière et les circonstances ne le sont pas. » Fr. Spanheim, Dubia evangelica, Genève, 1658, t. m. dub. cxli, n. <>-7. Bossuet montre qu’il faut passer plus avant avec l’Église catholique, en raison de la tradition de tous les siècles qui nous a appris à demander pour les morts le soulagement de leur âme, la rémission de leurs péchés et leur rafraîchissement », et il conclut (n. 1 « > 1 > en montrant la modération de l’Église au concile de Trente, où elle n’a voulu « déterminer que le certain ».

C’est le même esprit de conciliation qui anime le « projet de réunion entre les catholiques et les protestants d’Allemagne ». Le projet de Molanus, traduit en français par Bossuet, avait rangé la question du purgatoire parmi celles « qui ne peuvent être terminées par l’explication des termes ambigus ou équivoques », puisqu’il s’agit d’opinions directement opposées les unes aux autres ». C. xxx. Et Molanus opinait qu’il ne fallait pas s’opposer « à ceux qui tiendraient ce dogme pour problématique, comme a fait saint Augustin* C. xxxv. Bossuet donne son opinion. La prière pour les morts, acceptée par la Confession d’Augsbourg, est un article qui peut faire l’union sur le dogme du purgatoire. Episcopi Méldensis… sententia, part. I, n. 29. Les doutes de saint Augustin portent sur le feu ; mais les prières, les sacrifices, les aumônes ofîertes pour les défunts, appartiennent, d’après Augustin lui-même, à l’universelle tradition de l’Église. N. 40. Aussi, dans le projet de profession de foi à présenter au souverain pontife, prenant comme point de départ le texte de la Confession d’Augsbourg, Bossuet propose, n. 89, de confesser l’utilité des suffrages pour les défunts. Ainsi, conclut-il, toute controverse sur le purgatoire cessera. Bossuet, Œuvres, éd. Outhenin-Chalandre, Besançon. 1836, t. ix, p. 452, loi. 164, 165-466, 484. Voir aussi les Réflexions de M. l’évSque de Meaux sur l’écrit de M. l’abbé Molanus, c. iii, n. 1, p. 509.

On sait que le rapprochement désire ne se produisit pas. Non pas cependant que la croyance catholique au purgatoire fût un obstacle Insurmontable : il ne manqua pas. en effet, de théologiens protestants —

que l’.autz. op. cit., p. 7. appelle, on ne sait trop pourquoi, les semi-rai lonalistes pour t rouver une solution moyenne entre la foi cal holique et la négation trop

radicale des luthériens rigides. BautZ tiommi Baum

garten Crusius, de Wette, Hase, r II m ai m et Umbreit, dans leurs Theologischen Studien und Kritiken ; Dorner et Liebner, dans leurs Jahrbùchern fur deutsche Théologie. Plusieurs maintiennent l’enfer éternel tout en rejetant le purgatoire ; mais ils acceptent néanmoins un nouveau temps d’épreuve dans l’au-delà, et il est possible que ce temps d’épreuve dure jusqu’au jugement dernier. Quelques-uns vont jusqu’à affirmer que les prières des vivants peuvent aider les morts dans ce temps d’épreuve. Enfin les uns acceptent une purification possible pour quelques péchés seulement, d’autres pour tous les péchés sans exception, Bautz a recueilli un certain nombre de textes intéressants, p. 8-12. Wegscheider résume bien le point de vue des protestants orthodoxes au début du xixe siècle, dans ses Instituliones theologicæ, Halle, 1819. Nous citons dans le texte original :

Neque tamen de duratione pœnarum infernalium theologi recentiores omnino consenserunt, aliis œterna impiorum supplicia, aliis pœnas damnatorum, cum se ad meliorem frugem receperint, finitum vel saltem mitigatum iri statuentibus (pœnas vel absolute, vel hypothetice, vel relative seternas, )… P. 491. Hominem improbum, etsi pœnis vit » futurse emendatus in aliam eamdemque mitiorem abierit conditionem, nuinquam tamen vitæ terrestris maie actae recordatione (censemus) liberatum iri, vel beatitate iis parem fore, qui vita terrestri honeste acta defuncti fuerint. Unde patet, pœnas infernales recte dici sensu quidem diverso et aeternas et non œternas. P. 496.

Des idées analogues seront à relever déjà chez Lange, dans son commentaire sur les épîtres de saint Pierre (I Petr., iv, 1-6, Halle, 1734), où il semble que la restauration universelle soit préconisée ; Stàudlin, Lehrbuch der Dogmatik und Dogmengeschichte, Gœttingue, 1801, p. 540, 552 ; de Wette, Dogmatik der evang.-luth. Kirche, Berlin, 1821, p. 214 ; Baumgarten-Crusius, Grundriss der evangelisch-kirchlichen Dogmatik, Iéna, 1830, p. 90 sq. ; Lehmann, qui admet une purification possible pour certaines catégories ; Evangelische Religionslehre, Gœttingue, 1856, et les Theologische Studien und Kritiken, de 1861 et 1866. Bautz ne manque pas de citer les Agenden (rituels protestants) dans leurs prières relatives au soulagement des défunts. Op. cit., p. 9.

Singulière évolution que celle qui consiste à nier le purgatoire pour le rétablir sous une forme nouvelle en supprimant plus ou moins radicalement l’enfer ! On comprend le reproche ironique adressé aux protestants par Joseph de Maistre : « Un des grands motifs de la brouillerie du xvr 3 siècle fut précisément le purgatoire. Les insurgés ne voulaient rien rabattre de l’enfer pur et simple. Cependant, lorsqu’ils sont devenus philosophes, ils se sont mis à nier l’éternité des peines, laissant néanmoins subsister un enfer à temps, uniquement pour la bonne police et de peur de faire monter au ciel, tout d’un trait, Néron et Messaline à côté de saint Louis et de sainte Thérèse. Mais un enfer temporaire n’est autre chose que le purgatoire, en sorte qu’après s’être brouillés avec nous parce qu’ils ne voulaient point de purgatoire ils se brouillent de nouveau parce qu’ils ne veulent que le purgatoire. » Soirées de Saint-Pétersbourg, viiie entretien.

Ne faudrait-il pas cependant voir dans cette évolution inattendue un retour à une plus juste appréciation de la doctrine catholique ? Déjà Lessing, dans la deuxième moitié du xviiie siècle, osait constater que Luther, en niant le purgatoire, a dénaturé l’idée même de justice comme il a dénaturé les textes. Beilràge zur Geschichte und Literatur aus den Schâtzen der herzoglichen Bibliothek zu Wolfenbiïttel, dans Werke, éd. Hempel, Berlin, 1868-1878, t.xii, p. 123. C’est aussi l’aveu non déguisé de Karl Hase : « La plupart de ceux qui meurent sont, il faut l’avouer, trop bons pour l’enfer ; mais ce qui n’est pas moins sûr, c’est qu’ils sont aussi trop mauvais pour le ciel. On doit

avouer franchement qu’il existait à cet égard "une ccrlaiiic obscurité dans la doctrine des protestants. » Jlandbucli der protest. Polemik, Berlin, 1864, p. 422 ; cf. Evangelisclie Dogmatik, Leipzig, 1842, p. 109. Plus caractéristique encore l’aveu de Martensen, dont le manuel a une si grande vogue dans l’Allemagne du Nord et les pays Scandinaves : « Aucune âme n’ayant atteint l’état de consommation parfaite lorsqu’elle quitte ce inonde, il faut bien admettre un état intermédiaire où l’âme achève de se développer, de se purifier, de se mûrir pour le jugement dernier. Bien que la doctrine catholique du purgatoire ait été repoussée à cause du mélange d’erreurs grossières qu’elle renfermait, cependant elle a ceci de vrai que l’état intermédiaire est nécessairement, dans un sens spirituel, un lieu de purification pour les âmes. Die christliche Dogmatik, Berlin, 1870, p. 431.

Malheureusement ce revirement de la pensée protestante va tout droit vers la suppression de l’enfer. C’est, au fond, la doctrine origéniste de l’apocatastase universelle qui se renouvelle. La doctrine catholique du purgatoire n’est plus suffisante : « dans la forme qu’elle a revêtue, elle ne s’accorde pas avec nos conceptions morales et religieuses actuelles. Il n’y a pas de place pour un purgatoire dans un système où l’on admet que, même de l’autre côté de la tomb ?, l’homme reste un esprit libre, toujours capable de revenir au bien, et dont la destinée est de se développer éternellement dans le sens de la perfection. » E. Picard, art. Purgatoire, dans l’Encyclopédie des sciences religieuses, t. xi, p. 30.

Toute doctrine qui admet, après la mort, une possibilité de pénitence (au sens théologique du mot) est fausse et dangereuse, parce qu’elle ouvre la porte à ces perspectives miséricordieuses qui aboutissent à la suppression de l’enfer. On peut se demander si Hermann Schell s’est suffisamment défendu contre cette tendance. Voir sa Katholische Dogmatik, t. ni b, p. 787. On doit affirmer, en revanche, à coup sûr, que toutes les théories spirites contemporaines, avec la doctrine universellement acceptée par elles de la réincarnation des âmes, aboutissent à une conception, d’une sorte de purgatoire qui supprime l’enfer.

Au point de vue critique et historique, les protestants contemporains font en général remonter l’idée du purgatoire à saint Augustin, encore fut-ce à titre de simple hypothèse : « Cette hypothèse fut admise comme une réalité par Césaire d’Arles et répandue ensuite dans tout l’Occident par Grégoire le Grand. » Picard, loc. cit., p. 30. Rud. Hoffmann cependant découvre déjà des traces de l’idée de purgatoire chez Cyprienet chez Grégoire deNazianze, Grégoire de Nysse, Basile, qui tiendraient cette idée d’Origène. Ambroise l’aurait transmise à l’Église occidentale ; Augustin en aurait admis la possibilité ; Césaire d’Arles aurait appuyé sur l’idée et Grégoire le Grand l’aurait convertie en dogme. Ce n’était d’ailleurs qu’une simple doctrine de purification fort différente de la théorie du purgatoire imaginée au Moyen Age et sanctionnée par le concile de Trente. Realencyklopâdie für prot. Theol., t. x, p. 111. Enfin, dernière concession de la critique protestante, Clément d’Alexandrie et Origène doivent revendiquer le titre d’inventeurs du purgatoire. G. Anrich, Clemens und Origenes als Begrùnder der Lehre vom Fegfeuer, dans Theologische Abhandlungen, Tubingue, mai 1902.

Nous osons espérer que notre présent travail aura ramené à leurs justes proportions ces assertions pleines d’équivoques.

I. L’enseignement scripturaire. — On doit citer avant tout les réfutations de la proposition 37 de Luther, et, parmi celles-ci, Priérias (Sylvestre Mazolini), voir ce mot, t. x, col. 474, Errata et argumen a Marlini Lulheri, Florence, IS20, i. il. o. m mi : John l’isin’i. Asærtionli lultwanm

fori/iiMIm. l’an-, 1523, Wt.. ! T ;.If. m Ici. iM.ivcrl. D »

purawtorto, l. i. ii.nis Optra, Rome, ISS1 (1533), pan II, et Con/ulalio furiosi libtili Ludderi de puraaforfo, p. h-- il. même recueil, t ette démonstration du dogme par l’Écriture est reprise par Bellannin dans ses Controverses, i >< purga . 1. 1. o. i-vi, dans <>r<m. Paris, 1889, t. m. p. ; >. ; sq., par Nu. h. nitentia, disp. xi. /v purgaforto ïn

. m. Paris, 1861, t. wii. p. 879 sq. Nous av ohm lit

pourquoi cas études sertpturalres sont, dans leur ensemble, quelque peu défectueuses, i’exégèse du texte 1 Cor., iii, 11-15, présente une Importance considérable en raison de l’usage qu’en ont (ait 1rs Pères et les théologiens dans la question do la purification des péchés, i ne étude d’ensemble complète n’existe pas. on devra te reporter, en ce qui i-oiHvnu’upurgatoire, aux Indications fournies au cours de cette étude. Néanmoins le sens général est fourni trfs suilis.uunient par 1°. l’rat, L1 Ihéologit de saint Paul, t. 1. l’an-. 1908, nota G (1930, p. 109-113). Voir aussi < ornely, OanuMnlaiiua fn S. Puuli tptstolas, t. n. Paris, 1890. i >t commentaire du P. Alto, Première êptlrt aux Corin(Mans, Paris. 1935, n’apporte aucune lumière nouvelle.

11. I’i nsi i, .i mi ni PATRISTIQUB. Il a cli’étudié

surtout en raison de la controverse nvec les Orientaux, tin

trouve d’excellentes indications chez IScllarmin. -oit.i propos de l’exégèse des texte-, -eiipturaiies. soit dan-.

l’expose même de l’argument de tradition. Mais la première étude d’ensemble, en ce qui concerne la croyance au purgatoire, doit être reportée au Contra errores Grmeorum des dominicains de Pera, publié en 1252, art. 2, P. G., t. cxx-, col. 487 sq. s. uni Thomas --’en inspirera dans Declaralio qiiormiuliim articulorum contra Armenos, Grœcos et Sarat, c. îx (mais cet opuscule ne figure pas dans la liste

de- écrits authentiques dressée par le P. Mandonnet), el quelque peu dans le Contra errera Grtecorum. Lesdocuments

conciliaires de 1 crrare-1 lorence ont apporte quelque lumière sur ce point. Voir plus loin.

Depuis Trente, il faut citer Arcudius, De purgatorio igné dæri un. Home. 1637 ; Ailatius, De utriusque

lia oeeidenialis atqut orienlalis perpétua in dogmate de pargaltria eonsensione, Rome, 1 <">.">."" » ; Arnauld, Perpétuité de lu l"i. éd. Miizne, t. m. 1. III. c. 1-x. Plus pris de nous ValentJn I.och. Dos Dogma ti, r grieehisehen Kirche vom Purguturium, Ratttbonne, 1842, el quelques chapitres dans Hcdner. Dan Fegfeuer, Ratisbonne, 1856 ; Bautz, Dos Feg/euer. Mavence. 1883 ; Sclimid. Dus Fegfeuer nach katholi-dor lehre, Brixen. 1904 et Bartmann, Dus Fegfeuer, raderhorn. 1928. Atzberger, Geschichle der riirist. Fscha/ der Domlcânischen Zeil, Fribourg-en-B.,

ne fournit, comme le litre l’indique, des ronsei.in ments que sur les trois premiers siècles chrétiens. Dans sa loata dogmattea christianorum arientalium, t. iv, Paris, 1931, les indications de M. Jugie ne concernent que l’époque de la théologie byzantine. < in trouvera a l’article suivant d’autres bibliographies. Sur l’ensemble de l’argument patristlque, on consultera Xixeront, Hisloirt des

dogmes, passtffl (références au mot I’urqr. ;

III. Lis i.m-RoiF.s. — Voir surtout : Renaudot, l.iiurqiorum iTientalitim collectio, Frnncfort-sur-Mein, 1847 ; Goar. I. ifpe rituale Grmeorum, Venise, l7.Nn : Probst, Liturgie der drei ersten Jahrhunderte, Munster, 1893 ; Mone. LaleinUcht und qr tessen <m ; s rfen II.-VI.

Francforts. M.. 1850. Mais lis articles du Dictionnaire d’arelut.l., t de liturgie efef.au cours de cette étude, fournissent di ….. eux seuls, surtout en matière d’epicnipliie. une abondante moisson de documents. Voir aussi M.’ogia dogmaiica ihristianorum orienta Hum, t. iv. p. 89-95, et MlatJus, op. eit.

IV. DOCUMENTS CONCILIAIRES. I* Conctli de I qon. — Kn plus des grandes Collections, oir I lefele-l.eclercq. particulièrement bien ordonné et documente, llisl. des conciles, t. vi « , p. ].-, ; >, jq. ;, .| i ;, petite, niais précieuse brochure d’A. Theiner et Milriosich, Monumenta spectantia ad nnionem Ecelesiaram, Vienne, is72.

Concile de I, rrnr, -l lorence, dans Patrologia orient, dis, de r, ra(Tln-Nnu. t. w, Acta disputattonti Ferrariensi » de purgatorio nunc primum édita, sur lesquels on trouvera, dans riivi - des recensions utiles, notamment

. l’Aies. la question du purgatoire au concile de // dans Gregorianum, t. m. 1922 ; A. Michel. La qui du purgatoire élu :  ;. rjani Rev, proi. d’apolog.,

t. xxxii, 1921 ; V. Jugie, L" question du purgatoire ou concile de Florence, dans Écvoi d’Orient, t. xxi. 1921 ;

Hoffmann, s..1.. Coneilium Florentinum. I. Braies Gutnehien der interner liber dos Fegfeuer, dans Orienlalia christlana, t. svt, r.ise. à. p. 284 298 (31 1 1 des premiers chiffres Indiquent la pagination du volume ; les derniers, celle du fascicule) ; II. Zioeiles…, dtuuOrieniaUa christtana, t. xvii, tase. 2, ! ’. 215-244 (35-63). On consultera avec

précaution S ropoulos, I I

ti.ui. de Robert Creyghton, vera historia unionls non oer.r tnter Latinos et Grmcoi su ; - eoneilli Florenlini exactisstma narratio, La 1 ia e. 1660.

1 oneile de [renie. La discussion concernant le

décret proprement dit avant été pour ainsi due inexistante, il sullit de se référer au texte publié dans Cav aller i. 1 1 eau

rus, n. 1462. Ci. Coneilium Tridenlinum, éd. de la Gorresgesellschait, t. ix. p. 1069. Pour la sess. vi, c. xiv, et can. 30,

voir t. v. 2 « part., p. 638 639, 641, 716, 796, 799. Pour la sess. xxii. e. n et can. : i, voir t. viii, p. 960, 962.

V. Controverse protestante. les sources protestantes Indiquées au cours de l’article : Luther. W’erke, éd. de Welmar ; Calvin, Institution chrétienne, t. III, c. v. Œuvres, t. xxxii (.Corpus reformatorum, t. xi.i, col. 168 sq. ; pour les autres textes, voir J.-Tob. Muiler, Die sgmbolische Bûcher der eoangellsch-lulherischen Kirche, Gutersloh, 1912, et E. F. Karl Muller, fie Bekenntnisschriflen der reformierlen Kirche, Leipzig, 1903.

Postérieurement mu concile : Brentz, Commentaria in Esaiam, dans Opéra, t. n. Tubingue, 1870. p. 366 sq. : Chemnitz, l’.ramen concilii Tridentini, Francfort, i.">7.s ; Jean Gerhard, Loci theologici communes cum pro adstruenda, tum pm deslruenda quorumvis contradicenlium falsitate,

léna, 1610-1625, I. n ; Léonard I lutter, Compendium Inconnu thealogicorum, Wittemberg, 1610, avec sa rééd. par K. Hase, Hutlerus rediuiutis, 10’éd., Leipzig, 1862 ; et les autres auteurs cités col. 1321 sq.

VI. Synthèse.

- La meilleure synthèse est à coup sûr celle de Suarez, De pænitentia, dlsp. XLV-XLVIII, dans Opéra, Paris, 1856, t. xx ii, p. S71> sq. I ?.lle reprend, en les disposant en un ordre plus didactique et en les complétant de tout l’apport des controverses antigrecques et antiprotestantes, les idées émises par les théologiens des xiir » et xiv ° siècles dans leurs commentaires sur les Sentences, dist. XXI et XLV. Les manuels n’ont fait que prendre chez Suarez l’essentiel de la doctrine. l’ne place ; " » part doit : tr< fat : - au Dr ; ioi>i. :., imi.s du : animal l. : pivier qui i su grouper en un excellent exposé, d’après l’ordre du Supplément de la Sommp, toutes les questions scripturaires, patristiques, dogmatiques et théologiques intéressant la croyance au purgatoire. Au point de x’ue apologétique, l’art. Purgatoire du Diet. apolog, de la foi ualh., d’A. d’Ales (P. Bernard) est un modèle du Rcnrc.

A. Michel.

2. PURGATOIRE DANS L’ÉGLISE GRÉCO-RUSSE APRÈS LE CONCILE DE FLORENCE.


I. Considérations préliminaires.
II. Théologiens gréco-russes, partisans de la doctrine catholique. Divergences sur des points secondaires (col. i ::^, S).
III. Les adversaires du dogme catholique (col. 1337).
IV. Le groupe des indécis (col. 13 ! ">).
V. L’objet de la prière pour les morts d’après les livres liturgiques du rite byzantin et d’après les adversaires de le la doctrine catholique (col. 1348).
VI. Conclusion (col. 1352).

I. Considérations préliminaires.

On a vii, par l’article précédent, qu’au concile de Florence Grecs et Latins, après avoir longuement discuté sur le l’eu du purgatoire, avaient fini par s’entendre sur les deux points essentiels qui seuls appartiennent au dogme défini, a savoir : 1. l’existence, après la mort, d’un état intermédiaire entre l’étal « le béatitude et l’étal « le damnai ion. étal caractérisé par la privât ion temporaire de la Vision de Dieu et l’endurance de peil purificatrices, pour ceux qui ici-bas n’ont pas fourni une satisfaction suffisante de leurs péchés ; 2. l’utilité des suffrages de l’Église militante pour soulagei délivrer ces défunts de leurs peines. A vrai dire, l’accord sur ces deux questions (’tait acquis dès le début des pourparlers, comme il ressort clairement des documents publies par I.. Petit dans la P. 0., t. xv, et analysés plus haut, col. 1252 sq. si les Latins