MON 810
MON 810 est une lignée de maïs Bt, OGM (maïs génétiquement modifié) de la firme américaine Monsanto.
Les maïs Bt sont des variétés de maïs auxquelles a été ajouté un gène «le cry1Ab» donnant une résistance aux ravageurs qui ciblent cette céréale, comme la Noctuelle du maïs (Sesamia nonagrioides) et la Pyrale du maïs (Ostrinia nubilalis).
Ce gène permettra à la plante de résister à ces insectes ravageurs par la sécrétion d'un insecticide. Ce gène provient de la bactérie Bacillus thuringiensis (abrégé en Bt) qui produit naturellement la protéine Cry1Ab, un insecticide naturel.
Cette protéine Cry1Ab est sécrétée au sein de tous les tissus de la plante durant toute sa durée de vie. Les taux de protéine sécrétée changent toutefois en fonction du tissu végétal analysé (feuille, graine, etc.) ainsi que du stade de développement de la plante.
Dans une étude de 2009, parue dans Journal of Plant Diseases and Protection, Nguyen et Jehle ont évalué que 5,5 à 6,6 microgrammes de Cry1Ab étaient présents par gramme de tissu frais (µg/g fw) dans la feuille d’un organisme au stade de développement BBCH83 (début de la maturation des graines).
Selon l'Agence France-Presse, en 2013, le seul maïs génétiquement modifié cultivé dans l'Union européenne est le MON 810 (essentiellement en Espagne et au Portugal)[1],[2]. Selon Inf'OGM, en 2017, deux pays européens cultivaient encore du MON810 : l'Espagne (124 227 hectares, soit une baisse de 3,8 % par rapport à 2016) et le Portugal (6 344 hectares, contre 7 070 hectares en 2016, soit une baisse de 10,3 %)[3]. En 2016, ils étaient encore quatre à en cultiver mais les agriculteurs slovaques et tchèques n'ont pas semé un seul grain de MON810 en 2017.
Le maïs MON810 de la société Monsanto est interdit à la culture dans tous les pays de l'Union européenne excepté au Portugal et en Espagne.
En France, le parlement a interdit le 5 mai 2014 la culture du maïs transgénique, après un vote du Sénat. Le Conseil d'État a rejeté la requête des producteurs de maïs et confirmé l'arrêté gouvernemental interdisant la culture du maïs génétiquement modifié MON 810.
Le 15 avril 2016, le conseil d'État annule cet arrêté. Toutefois, cet arrêté est devenu sans objet depuis la loi du 2 juin 2014 relative à l'introduction et la mise en culture de variété de maïs génétiquement modifié. L'interdit du maïs MON810 est donc toujours applicable.
Autorisation
La culture du maïs MON810 est autorisée dans les pays suivants : Afrique du Sud, Argentine, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Égypte, Honduras, Japon, Paraguay, Philippines, Union européenne (toutefois dans l'Union européenne, chaque État-membre doit également donner son accord), Uruguay. Tous ces pays, à l'exception de l'Afrique du Sud, du Chili et de l'Égypte, autorisent son utilisation et sa transformation dans les domaines de l'alimentation humaine et animale. En outre, les pays suivants : Australie, Mexique, Nouvelle-Zélande et Taïwan, bien qu'ils n'en autorisent pas la culture, autorisent son utilisation en alimentation humaine, tandis que la Turquie l'autorise uniquement pour l'alimentation des animaux[4].
En 2017, l'Union européenne a renouvelé l'autorisation d'utilisation du maïs MON810 dans les produits suivants[5] :
- aliments et ingrédients alimentaires, à l'exception du pollen,
- aliments pour animaux produits à partir de ce maïs ou consistant en ce maïs,
- produits destinés à d'autres fins que l'alimentation humaine ou animale, à l'exception de la culture.
Études et controverses
La structure transgène du MON 810 diffère du plasmide conçu pour l'évaluation sanitaire de Monsanto[6] et a changé en comparaison à la protéine Cry1Ab naturelle[7]. Gilles-Eric Seralini et ses collègues (2007 & 2009) ont analysé une nouvelle fois les données de Monsanto à propos du MON 810 (rendues disponibles après qu'une demande publique ait été formulée). D'après eux le maïs pouvait causer des dégâts au foie, aux reins ainsi qu'au cœur des rats étudiés[8],[9].
Toutefois, l'autorité européenne de sécurité des aliments (AESA), après avoir revu cette analyse, conclut que les différences observées se retrouvaient dans des gammes normales lors de l'étude du rat, considérant que les méthodes de mesures statistiques étaient inadéquates[10]. Séralini fut critiqué de la même façon pour des travaux réalisés par la suite lorsqu'il affirma que des rats avaient développé des cancers après la consommation d'aliments génétiquement modifiés[11].
Par ailleurs, les études menées avant celle du professeur Séralini était d'un durée trop courte (3 mois) pour conclure à l'innocuité du mais MON810. L'étude du professeur Séralini a duré 2 ans et il s'agit là d'une nouveauté introduite par cette étude.
Plusieurs autres publications montrent des effets du Cry1Ab sur des espèces non ciblées telles que certains insectes et d'autres arthropodes n'appartenant pas au groupe des lépidoptères (papillons)[12],[13],[14],[15], la toxine Cry1Ab disposerait donc d'un champ d'action moins réduit qu'on ne pouvait le supposer au départ[16],[7],[14].
Le 5 avril 2012[17], La Pologne annonce qu'elle interdira la culture du MON 810 sur son territoire craignant que le pollen de la souche puisse avoir un effet nocif sur les abeilles.
Un article paru en 2010 rédigé par Agnès Ricroch et al. pour le journal Transgenic Research, qui avait déjà publié plusieurs méta-analyses ainsi que de récentes études, conclut que la décision allemande d'interdire la culture du MON 810 était « injustifiée scientifiquement », allant à l'encontre de plusieurs autres méta-analyses indiquant un effet négatifs de la toxine Cry1Ab sur des organismes non ciblés[18],[19],[20]. Bien que, comparé à la pulvérisation avec des pesticides à large spectre, les effets négatifs sur les organismes non-ciblés par les protéines Bt étaient inférieurs[20] Ricroch et al. déclarent que les preuves substantielles citées dans leur revue sont biaisées du point de vue de la totalité de l'éco-système et que la décision de l'Allemagne aurait dû se baser sur une « approche au cas par cas » employant une liste incomplète de références[21]. Les auteurs de cette revue critiquent également l'interdiction française prise dans des circonstances politiques dans un rapport d'actualité de l'ISB[22],[23] (Après l'interdiction française, il fut révélé par Wikileaks, lors de la révélation des télégrammes diplomatiques, que l'ambassadeur américain en France recommandait de calibrer une liste de représailles à l'encontre des pays européens réfractaires aux OGM : « we calibrate a target retaliation list that causes some pain across the EU »[24],[25],[26])
En 2012, un article de Bøhn et al., dans Environmental Sciences Europe[27], se trouve en désaccord avec le point de vue de Ricroch et al. à propos du fait que la décision d'interdiction de l'Allemagne était « scientifiquement injustifiée ». Dans leur conclusion ils pointent les faiblesses suivantes dans l'article de Ricroch et al. :
- Les revendications importantes à propos de la Daphnie magna sont incorrectes (La quantité de toxines utilisée lors de l'expérience n'a pas été présentée).
- Des résultats essentiels sont omis de la discussion (Différences de mortalité globale et fécondité totale).
En outre, seulement certaines données sélectionnées dans la littérature (celles montrant des effets négatifs) furent scrutées qualitativement alors que les études ne montrant aucun effet furent décrites uniquement quantitativement sans que leur qualité ne soit assujettie au même niveau de critique. L'effet d'un double standard quant à l'évaluation d'un risque biotechnologique fait que les personnes qui ne liront ou ne feront référence qu'à Ricroch et al. seront sérieusement mal informées par rapport à l'ensemble des autres études et à l'interdiction par l'Allemagne du maïs MON 810[27].
Analysant la controverse du MON 810 en Europe et particulièrement la question de la qualité des études de sûreté biologique visant à soutenir l'interdiction Allemande, Wickson and Wynne[28] mirent en lumière comment les recherches autour d'un sujet menant à prendre des décisions politiques pouvaient se retrouver différemment encadrées s'agissant des questions posées, de méthodes et d'interprétation des données et comment une fois ces études effectuées, qu'il s'agisse d'être pour ou contre la question, elle pouvaient être légitimement débattues.
Notes et références
- « Monsanto retire ses demandes de culture d'OGM dans l'Union européenne », http://www.rts.ch (page consultée le 18 juillet 2013).
- « Monsanto retire ses demandes d’autorisation de culture OGM en Europe », [1] (page consultée le 18 juillet 2013).
- « UE : les cultures transgéniques en baisse de 4,3 % », sur Inf'OGM, (consulté le )
- (en) « Event Name: MON810 - Authorizations: Summary of Regulatory Approvals: Country, Year and Type of Approval », International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications (ISAAA) (consulté le ).
- (en) « Commission implementing Decision (EU) 2017/1207 of 4 July 2017 renewing the authorisation for the placing on the market of genetically modified maize MON 810 (MON-ØØ81Ø-6) products pursuant to Regulation (EC) No 1829/2003 of the European Parliament and of the Council », sur Official Journal of the European Union, (consulté le ).
- Van Rie J. et al. 1989. Specificity of Bacillius thuringensis delta-endotoxins. Eur J Biochem 186: 239-247
- Hilbeck A, Schmidt JEU. 2006. Another view on Bt proteins-how specific are they and what else might they do? Biopesticides Int 2 1:1-50.
- Gilles-Éric Séralini, Cellier D, de Vendomois JS (2007). "New analysis of a rat feeding study with a genetically modified maize reveals signs of hepatorenal toxicity". Arch. Environ. Contam. Toxicol. 52 (4): 596–602
- Gilles-Éric Séralini, de Vendômois JS, Roullier F, Cellier D. (2009) A comparison of the effects of three GM corn varieties on mammalian health. Int J Biol Sci. 10;5(7):706-26.
- Statement of the Scientific Panel on Genetically Modified Organisms on the analysis of data from a 90-day rat feeding study with MON 863 maize
- Article détaillé : Long term toxicity of a Roundup herbicide and a Roundup-tolerant genetically modified maize
- Schmidt et al. 2008. Effects of activated Bt transgene products (Cry1Ab, Cry2Bb) on immature stages of the ladybird Adalia bipunctata in laboratory ecotoxicity testing. Arch Environ Contam Toxicol. oi: 10.1007/s00244-008-9191-9.voir : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18712501
- Hilbeck, A et al. 1998. Toxicity of Bacillis thuringiensis Cry1Ab toxin to the predator Chrysoperla carnea. Environmental Entomology 275:1255-1263.
- Bøhn, T., Primicerio, R., Hessen, D. O. and Traavik, T. 2008. Reduced fitness of Daphnia magna fed a Bt-transgenic maize variety. - Archives of Environmental Contamination and Toxicology 55: 584-592.
- Bøhn, T., Traavik, T. and Primicerio, R. 2010. Demographic responses of Daphnia magna fed transgenic Bt-maize. - Ecotoxicology DOI 10.1007/s10646-009-0427-x. (Open Access).: 419-430.
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- Poland bans Mon810
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- Ricroch A, Bergé JB, Kuntz M, « Is the Suspension of MON810 Maize Cultivation by Some European Countries Scientifically Justified? », ISB News Report, no April 2010, , pages 8–11
- http://agriculture.greenpeace.fr/wikileaks-les-ogm-au-menu-des-diplomates-americains-en-europe
- Vidal, John, « WikiLeaks: US targets EU over GM crops », The Guardian, (lire en ligne, consulté le )
- « Democracy Now: WikiLeaks Cables Reveal U.S. Sought to Retaliate Against Europe over Monsanto GM Crops », Democracy Now, (lire en ligne, consulté le )
- Bøhn, T., Primicerio, R. and Traavik, T. 2012. The German ban on GM maize MON810: scientifically justified or unjustified? - Environmental Sciences Europe 24:22: 1-7.
- Wickson, F. and Wynne, B. 2012. Ethics of Science for Policy in the Environmental Governance of Biotechnology: MON810 Maize in Europe. - Ethics, Policy and Environment 15: 321-340.